Michel Garroté - Les forces pro-gouvernementales syriennes, soutenues par les Russes, lancent, ce mardi 27 septembre 2016, sur quatre fronts, un assaut terrestre contre les secteurs d'Alep contrôlés par rebelles djihadistes. A propos d'Alep, peut-on sérieusement affirmer qu'en Syrie, la Russie opte pour une "guerre totale" ? Le fait est que la Russie utilise sa puissance de feu pour aider le gouvernement syrien à reconquérir Alep, car elle estime qu'il vaut mieux remporter une victoire militaire, plutôt que de poursuivre de vaines négociations avec les Etats-Unis. Ce sont là les affirmations, fondées ou non, de divers "experts". "Experts" réels ou présumés, souvent très hostiles à Bachar al-Assad et à Vladimir Poutine ; et, de ce fait, "experts complices" des djihadistes syriens.
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"La Russie met le paquet parce qu'elle ne croit plus à la possibilité de collaborer avec les États-Unis en Syrie", commente Fabrice Balanche, spécialiste de la Syrie au Washington Institute (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page). "C'est la guerre totale, car Moscou ne croit plus que Washington soit capable de faire quoi que ce soit en Syrie par manque de volonté ou incapacité", ajoute-t-il. Après de laborieuses négociations entre le secrétaire d’État américain John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov, un cessez-le-feu était entré en vigueur le 12 septembre mais il n'a duré qu'une semaine. Outre le silence des armes, l'accord prévoyait l'acheminement d'aides humanitaires.
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Notamment à Alep où les habitants sont affamés par un siège implacable, et la distanciation des groupes rebelles de leurs compagnons d'armes, les jihadistes du Front Fateh al-Cham, ex-Front al-Nosra (branche syrienne d'Al-Qaïda). Aucun de ses engagements n'a été tenu et la guerre est repartie de plus belle. Les avions russes basés en Syrie frappent depuis jeudi soir la partie rebelle à Alep avec une violence qu'ils n'avaient jamais utilisée depuis le début de l'intervention militaire il y a un an. Moscou veut "en terminer avec une importante poche de résistance rebelle", souligne Igor Sutyagin, expert de la Russie au Royal United Service Institute de Londres.
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Il ne restera après qu'à reprendre la province d'Idleb et quelques poches rebelles, précise-t-il. Selon Thomas Pierret, expert de la Syrie à l'Université d'Edimbourg, "il s'agit d'accorder à Bachar al-Assad une victoire décisive" et "d'éliminer toute alternative en privant l'opposition de ce qu'elle considère comme sa capitale". "Une rébellion chassée d'Alep serait ramenée au rang d'insurrection périphérique", résume-t-il. Si depuis le début de la guerre, Moscou a toujours soutenu le président syrien face aux rebelles, aux Occidentaux et aux pays du Golfe, tant sur le terrain qu'à l'ONU, jamais leurs relations n'ont été aussi proches qu'aujourd'hui car Moscou, après bien des hésitations, a opté pour la force à Alep, comme le souhaitait depuis longtemps le régime.
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"La Russie se rapproche désormais de la manière de penser du gouvernement syrien", souligne Bassam Abou Abdallah, directeur du Centre de Damas des études stratégiques. "Elle était avant plus axée sur une solution politique et a commencé à dialoguer avec le Golfe, les Etats-Unis et d'autres pays, mais il s'est avéré que ce dialogue était impossible", selon cet expert proche du régime. Une victoire à Alep mettrait les autorités de Damas en position de force "en vue de prochaine négociations" souhaitées par l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura, note Alexeï Malachenko, politologue russe spécialiste du Moyen-Orient. "Sans Alep, Assad n'est qu'un demi-président. Pour vraiment gouverner, il lui faut Alep", assure Fabrice Blanche.
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Le président syrien pourra alors se targuer de contrôler les principales villes du pays, à savoir Damas, Alep, Homs, reprise en 2014, et Hama. "Russes et Syriens veulent prendre le contrôle de la totalité d'Alep et ensuite seulement négocier avec l'opposition", renchérit Fiodor Loukianov, membre du Conseil russe pour la politique de sécurité et de défense. "Alep joue un rôle clé" car l'avenir "dépendra de la disposition de la ligne de front qui séparera les parties belligérantes. Et cette ligne doit être stable". Au delà de la bataille d'Alep, la coopération entre Moscou et Damas répond à une logique sur le long terme, souligne Alexeï Malachenko. "Assad ne pourra rien obtenir sans Moscou, et la Russie à son tour comprend bien que sans Assad elle sera chassée du Proche-Orient. C'est une amitié forcée".
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Les images des immeubles détruits à Alep rappellent celles de Grozny, où l'armée russe avait appliqué son vieil adage: "l'artillerie conquiert le terrain et l'infanterie l'occupe". Les experts soulignent toutefois la différence de tactique à Alep par rapport aux deux guerres sans merci menées en Tchétchénie par la Russie contre les séparatistes dans les années 1990. "La tactique des militaires russes à Alep n'a rien à voir avec celle pratiquée à Grozny. A Alep, les morts parmi les civils se comptent par dizaines, à en croire les médias occidentaux, il ne s'agit pas des centaines de morts comme en Tchétchénie. Ce n’est pas comparable", assure Alexandre Golts, un expert militaire indépendant. A l'époque, l'armée russe avait parfois procédé à une centaine de raids aériens par jour, auxquels s'ajoutait l’apport très destructeur de l’artillerie déployée autour de Grozny (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Pour Jean-Sylvestre Mongrenier, coauteur de 'Géopolitique de la Russie' et Chercheur associé à l’Institut Thomas More, le cessez-le-feu russo-américain censé préparer un nouveau cycle de négociations sur le sort de la Syrie n’a donc pas duré (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page). Une semaine après son entrée en vigueur, le 19 septembre dernier, Damas annonçait la reprise des hostilités et un convoi humanitaire des Nations unies, envoyé dans une zone tenue par les rebelles, était bombardé. Depuis, les quartiers orientaux d’Alep sous le feu roulant des avions russes et syriens. Selon certaines analyses, ce nouvel échec diplomatique illustrerait la faible emprise de Moscou et Washington sur leurs alliés et protégés respectifs.
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Pourtant, ces derniers événements relèvent davantage du développement d’une grande stratégie russe dont les objectifs dépassent les enjeux géopolitiques syriens. Après avoir bloqué durant quatre ans tout accord international sur une transition politique en Syrie, en faisant usage de son droit de veto au Conseil de sécurité, et apporté un soutien financier et militaire constant au régime de Damas, le Kremlin a décidé d’intervenir directement dans le conflit, au cours de l’été 2015, au moment où le pouvoir de Bachar Al-Assad vacillait sérieusement. Deux jours avant le début des bombardements russes sur les positions rebelles, Vladimir Poutine justifiait cet engagement direct par la lutte contre le djihadisme (voir son discours à l’Assemblée générale de l’ONU, le 28 septembre 2015).
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En vérité, le déploiement de moyens militaires russes sur le théâtre syro-irakien n’a pas bouleversé le rapport global des forces et Moscou n’a ni les moyens requis, ni la légitimité nécessaire pour mettre sur pied une coalition mondiale contre l’« État islamique ». Dès le début des bombardements russes, le choix des cibles a confirmé que l’objectif de Moscou consistait à sauver le régime de Bachar Al-Assad et à sanctuariser le réduit alaouite et la « Syrie utile » (l’axe Alep-Damas et le littoral). Poutine entendait ainsi sauvegarder les intérêts stratégiques russes, à savoir les « facilités » navales de Tartous, à mi-chemin des détroits turcs et du canal de Suez, la base aérienne de Lattaquié, les radars qui surveillent la Turquie (voir la base d’Incirlik) et le Proche-Orient.
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De surcroît, la côte syrienne constitue un point d’entrée dans une région à laquelle la Russie accorde une importance cruciale. Autrement dit, l’enjeu résidait dans la préservation de ses « actifs » géopolitiques au Proche-Orient et en Méditerranée orientale. De fait, l’intervention a sauvé le régime de Damas et Bachar Al-Assad est le garant des intérêts stratégiques russes. Poutine a su exploiter la vacance de pouvoir, résultante de la politique américaine dans cette région. Dès le début de la sanglante répression des manifestations contre le régime de Damas, Barack Obama a bien exigé le départ de Bachar Al-Assad et le Département d’Etat a apporté un soutien diplomatique à l’opposition afin de préparer l’avenir.
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Pourtant, le renoncement de Barack Obama à faire respecter la « ligne rouge » qu’il avait tracée, malgré l’emploi d’armes chimiques, a mis en évidence le refus du président américain d’engager un nouveau conflit au Moyen-Orient. Il s’est empressé de saisir l’offre de Poutine: le désarmement chimique de Damas, sous la supervision de l’OIAC (Organisation pour l’interdiction des armes chimiques). L’acceptation de ce plan préservait le pouvoir de Bachar Al-Assad et offrait un succès au président russe (cf. l’accord russo-américain du 14 septembre 2013). On ne saurait parler de retrait des Etats-Unis. Le Moyen-Orient est une zone névralgique dont la destinée importe, nonobstant la montée en puissance de la production de pétrole de schiste outre-Atlantique, et il serait fallacieux de réduire la politique américaine dans la région à la seule gestion des flux pétroliers.
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De la Méditerranée orientale à l’Océan Indien, le dispositif géostratégique est toujours en place et l’on voit mal comment les Etats-Unis pourraient s’abstraire du Moyen-Orient, ce « nœud gordien » mondial. Simplement, Obama a centré sa politique sur la résolution de la crise nucléaire iranienne et il considère que le phénomène « Etat islamique » est une excroissance de la question irakienne. Plus généralement, la « patience stratégique » à laquelle il en appelle consiste à rétablir une certaine distance à l’égard du Moyen-Orient et à ne pas se laisser happer par les conflits régionaux. Du point de vue d’Obama, un interventionnisme inconsidéré en Syrie n’apporterait pas les résultats attendus et menacerait les positions extérieures des Etats-Unis, notamment en Asie-Pacifique.
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Il considère que l’avenir de la puissance se détermine sur d’autres plans que le militaire, ceux de la technologie et de l’économie. Enfin, il lui faut prendre en compte l’opinion publique américaine, encline à l’isolationnisme. Il reste que les développements de la situation ont montré l’impossibilité de borner cette guerre au territoire syrien et les limites du détachement géostratégique. Faute de moyens militaires additionnels visant à modifier l’équilibre local des forces, le secrétaire d’Etat John Kerry, a été conduit à faire des concessions unilatérales, sans résultat aucun. Poutine et Assad sont bel et bien « mariés », Moscou et Téhéran ont mis en place un axe russo-chiite et l’alliance Moscou-Damas-Téhéran, renforcée au sol par le Hezbollah, mène l’assaut contre les quartiers rebelles d’Alep.
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Dans cette guerre, Obama a négligé l’existence d’une « grande stratégie » russe qui s’étend bien au-delà des enjeux géopolitiques syriens. Malgré l’échec de la politique de « reset » et le conflit en Ukraine, il semble voir en Poutine un homme avec lequel il est possible de coopérer, comme dans la gestion de la crise nucléaire iranienne, si tant est qu’on lui laisse de l’espace. In fine, l’objectif du président russe serait d’améliorer les « termes de l’échange » avec l’Occident et d’être reconnu comme une puissance de premier plan, avec les droits et devoirs corrélatifs. Dans les faits, Poutine est un nostalgique de la superpuissance soviétique. Animé par une logique revancharde et révisionniste, il pense que l’heure de la revanche a sonné, la prudence excessive d’Obama en Syrie et la perte de « capital politique » des Etats-Unis au Moyen-Orient lui ouvrant la possibilité d’inverser le cours de l’Histoire.
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Du point de vue russe, la Syrie et le Moyen-Orient sont les théâtres d’une nouvelle guerre froide. A bien des égards, la vision de Poutine et des hommes qui l’entourent peut paraître irréaliste. Les « fondamentaux » de la puissance (PIB, technologie, démographie, structure sociopolitique) et l’incapacité à mener les réformes structurelles requises, pour mettre fin à la « malédiction des matières premières » et faire entrer la Russie dans le nouveau siècle, semblent invalider le projet géopolitique du Kremlin. Cela dit, il importe de comprendre que les perceptions et représentations géopolitiques, même erronées, comptent autant que les faits bruts. L’opiniâtreté, la prise de risques et les coups tactiques à répétition de Moscou sont susceptibles de mettre les équilibres mondiaux en danger.
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Surtout, l’insistance sur le fait qu’il n’y a pas de solution militaire en Syrie et la persistance à voir en Poutine un possible « pacificateur » mettent en évidence une faiblesse majeure du côté des sociétés occidentales post-modernes: une anthropologie mutilée focalisée sur les seuls « intérêts », la considération des avantages réciproques inclinant aux compromis. Ainsi, l’Occident néglige-t-il les passions qui émanent du « thymos » (la partie colérique de l’âme) et poussent aux extrêmes. Quand bien même nous apparaissent-ils déraisonnables, le ressentiment, la volonté de revanche et l’esprit de domination sont autant de passions souterraines qui déterminent l’impérialisme néo-soviétique de Poutine, conlut Jean-Sylvestre Mongrenier (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Pour Jean-Pierre Filiu, historien, "arabisant", "spécialiste" de l'Islam contemporain, ce serait, "un peu le sort de notre monde qui se joue à Alep". C'est du moins ce qu'il affirme dans l'entretien ci-dessous avec Ouest-France (voir lien vers source en bas de page) :
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Ouest-France - Qu’est-ce qui se joue à Alep, en ce moment-même ?
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Jean-Pierre Filiu - A mon sens, et je le dis avec une gravité que j’assume, c’est un peu le sort de notre monde qui se joue à Alep. L’Onu a été humiliée le 19 septembre avec le bombardement du convoi d’aide humanitaire qu’elle destinait à la ville d’Alep. Ce bombardement est, c’est ma conviction, l’œuvre d’un membre permanent du Conseil de sécurité, la Russie. Il a ouvert un cycle d’une extrême violence, sans précédent. On parle d’apocalypse à Alep, dont la Russie est le maître d’œuvre. Le régime Assad étant paradoxalement passé désormais sous ses ordres.
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L’objectif est de reprendre Alep à n’importe quel prix, même en la détruisant totalement ?
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Il y a d’abord la pratique de la guerre par la Russie, qui a été rôdée au cours des deux guerres de Tchétchénie, et qui consiste à reprendre des zones rebelles en les réduisant à l’état de ruines. Et en contraignant une population civile absolument vulnérable à choisir entre la mort et la reddition. Et à imposer ce choix aux combattants qui se trouvent au milieu de cette population. Il faut aussi mesurer l’affront qu’a représenté pour la Russie, début août, le fait que le siège d’Alep ait été brisé, alors que le commandement russe sur place était convaincu qu’il était devenu étanche, notamment avec le ralliement des milices kurdes, contre les quartiers Est d’Alep tenus depuis 2012 par les forces révolutionnaires.
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Les installations sanitaires sont de plus en plus ciblées. C’est un choix délibéré ?
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J’ai des témoignages directs, je connais bien le terrain. Il y a trois ans, tout ce qui tombait sur la tête des habitants des quartiers insurgés était déjà russe. Les bombes, les roquettes, les missiles, les balles. La différence, c’est que maintenant ce sont les Russes eux-mêmes qui les envoient. Les humanitaires sur place me disent tous la même chose : il y a bel et bien un ciblage systématique des institutions de santé. La première vague de bombardements de cette escalade, jeudi dernier, a détruit trois des quatre centres de la défense civile, les casques blancs qui sont absolument neutres et ne font que de l’humanitaire à Alep. Ce n’est pas une bavure, c’est une politique systématique car il faut briser la résistance d’une population, non seulement en l’affamant mais aussi en faisant que des blessures bénignes deviennent mortelles car il n’y a plus aucun moyen de les soigner.
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Moscou rétorque qu’en face, ce sont des groupes terroristes qui combattent. Daech et autres…
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La réalité, c’est que le Kremlin ne fait plus la guerre à Daech depuis longtemps. Or, c’était sous cette bannière de lutte contre le califat que Poutine avait justifié l’intervention directe et massive de ses forces il y a un an. L’autre groupe qui s’appelait al-Nosra, qui a changé de nom mais qui selon moi reste toujours l’émanation d’al-Qaïda, n’était pas présent à Alep jusqu’à très récemment. C’est le siège d’Alep par la Russie et le régime Assad qui a fait que les Djihadistes sont apparus comme des sauveurs en brisant le siège. On est face à une classique politique du pire menée par la Russie, une prophétie auto-réalisatrice. Les Russes bombardaient violemment Alep avant que Nosra ne soit présente. Cette situation est surtout le résultat de l’abandon de la Syrie par les pays qui prétendent la soutenir, comme les Etats-Unis, et ceux qui prétendent combattre le terrorisme mais en réalité l’alimentent, la Russie.
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Les propos des diplomaties occidentales au Conseil de sécurité, parlant de « barbarie », de « crimes de guerre », peuvent peser sur la situation ?
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Il faut rendre hommage à la diplomatie française. Le discours de Hollande, disant cela suffit, à la tribune de l’Onu contrastait la semaine dernière avec celui d’Obama, qui a passé la Syrie par pertes et profits. L’escalade a été anticipée par les diplomates français. Les Etats-Unis pourraient aller beaucoup plus loin que les accusations de « barbarie », ils pourraient montrer les preuves des crimes de guerre russes, car ils les ont. Mais le président Obama est coincé, comme il l’était en 2013 sur la question des armes chimiques. Il ne veut pas tirer les conséquences de ces preuves pour agir, et comme il ne veut pas agir il ne veut pas mettre les preuves sur la table.
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C’est un tournant dans les relations internationales et de la relation avec la Russie ?
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La reculade d’Obama sur les armes chimiques en août 2013 a convaincu Vladimir Poutine qu’il n’y aurait pas de réactions dignes de ce nom à l’annexion de la Crimée quelques mois plus tard. On a effectivement des théâtres qui, vus du Kremlin, sont intégrés. La Syrie occupe une position centrale. D’abord parce que c’est celle où se met en œuvre une doctrine, celle de la guerre de la guerre globale contre la terreur version Poutine, qui avait été développée il y a un an par le président russe à la tribune de l’Onu. Et plus généralement, une volonté de puissance au Moyen Orient, avec une collaboration militaire sur laquelle on n’insiste pas assez avec l’Egypte du maréchal Sissi, avec l’Irak, pourtant censé être un allié fidèle des Etats-Unis. Il y a cette proposition russe de parrainer des pourparlers israélo-palestiniens alors que, jusqu’à il y a peu, c’était une chasse gardée des Etats-Unis. Il y a eu cette conférence, en Tchétchénie, de dirigeants islamiques du monde entier pour condamner l’Arabie Saoudite. Donc on voit que le Moyen Orient en général, et la Syrie en particulier, ne sont qu’un marchepied, qu’un théâtre où se reconstruit une Russie qui mène la guerre froide à sens unique, et qui donc ne fait que la gagner face à des Etats-Unis qui reculent pratiquement sur tous les fronts, conclut Jean-Pierre Filiu (fin de l'entretien ; voir lien vers source en bas de page).
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Introduction, adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://www.challenges.fr/monde/en-syrie-la-russie-opte-pour-la-guerre-totale_429067
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http://www.challenges.fr/tribunes/syrie-ce-que-revele-la-strategie-agressive-de-vladimir-poutine_428793
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http://international.blogs.ouest-france.fr/archive/2016/09/27/alep-russie-filiu-syrie-16870.html
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