L’armée de milice : un instrument pour la liberté

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Nos lecteurs nous écrivent.
Ce système constitue donc un outil incontournable pour un contrôle démocratique efficace et durable : une barrière face au totalitarisme. Savoir si il faut ou non le conserver dépasse les enjeux sécuritaires : il est ici question de la préservation de nos libertés.

 

 

L’armée est, du moins pour le moment, en Suisse un devoir constitutionnel. De cela découle logiquement une relation entre l’Etat et le citoyen, ici au travers de la sécurité. Or, la sécurité se profile parfois comme ennemie de la liberté. Il n’est en effet pas rare de voir dans plusieurs pays des libertés progressivement suspendues au nom de la sécurité, par exemple dans la lutte anti-terroriste.

 

Les politiques de sécurité ouvrent alors la voie à une domination totale de l’Etat sur le citoyen, même progressive. Carl Schmitt déclarait justement que le réel souverain était celui qui décidait de l’état d’exception, c'est-à-dire qui aurait le pouvoir de déclarer l’état d’urgence lui permettant de légitimer la suspension de tous les droits et libertés. Et la base de cette domination provient de cette dépendance du citoyen à l’égard de l’Etat pour sa sécurité. Comment alors s’assurer de la souveraineté du citoyen et de la sauvegarde de ses droits et libertés sans pour autant écarter son droit à la sécurité, sans se retrouver dans un état d’anarchie où règnerait la loi du plus fort ?

 

Il faut trouver le bon équilibre : une dépendance mutuelle entre les citoyens et l’Etat en matière de sécurité. Cela implique tout d’abord de ne pas penser le citoyen comme uniquement détenteur de droits, mais aussi de devoirs. Il ne s’agit alors pas du droit de faire l’armée, il s’agit du devoir de servir. Les citoyens font partie des agents directs de l’Etat dans sa politique de sécurité. Ensuite, pour faire de ces agents des citoyens et non des sujets, il est nécessaire de rappeler que tout militaire a le droit de conserver son arme à son domicile et qu’il est éduqué, tant au sens technique que moral, à son utilisation. Il est question d’une responsabilisation du citoyen : une relation de confiance entre lui et l’Etat et non plus une lutte de pouvoir, une relation de domination.

 

De plus, cette obligation ne peut être vue comme une simple conscription telle que fut le service obligatoire aux États-Unis ou en France. Il ne s’agit pas de servir entièrement pendant une courte période de temps mais du citoyen-soldat sur une longue durée, participant aux affaires de la cité y compris dans le domaine de la sécurité. Image d’Épinal dira-t-on. Il n’empêche qu’une telle idée du service obligatoire, avec comme complément indispensable la démocratie directe, fournit un rempart solide pour se prémunir de possibles dérives autoritaires – voire totalitaires - de l’Etat. Une barrière bien plus solide que l’idée d’un citoyen assimilable à l’image du bourgeois d’Hannah Arendt : un citoyen ne s’intéressant qu’à sa vie privée et attendant de l’Etat toutes les garanties nécessaires pour pouvoir mener ce qu’il pense dans le court terme être sa vie heureuse. Il n’en reste pas moins qu’il se trouve sous sa tutelle complète.

 

Notre système de milice permet donc cette relation de confiance entre l’Etat et tous les citoyens toutes classes confondues. Dans ce cas de figure, l’Etat ne peut pas suspendre les libertés sans risquer de voir sa légitimité décroître et ses agents se retourner contre lui. Personne - mise à part quelques farfelus issus du folklore politique - ne souhaite l’instabilité au sein d’une société, et encore moins un gouvernement.

 

Ce système constitue donc un outil incontournable pour un contrôle démocratique efficace et durable : une barrière face au totalitarisme. Savoir si il faut ou non le conserver dépasse les enjeux sécuritaires : il est ici question de la préservation de nos libertés.

 

 

Pablo RAPIN, 28 août 2013

Un commentaire

  1. Posté par Milicien à la retraite le

    En théorie tout ce que vous dites est absolument correct… dans une société homogène. Nous ne vivons plus dans la Suisse des années 60 où l’écrasante majorité des recrues étaient d’origine suisse. Aujourd’hui nombre d’entre elles sont d’origine exotique. L’armée suisse n’est d’ailleurs déjà plus obligatoire dans les faits pour qui sait s’y prendre. Elle n’est pas neutre non plus depuis son intervention au Kosovo. Les officiers supérieurs sont pour nombre d’entre eux OTANolâtre. Bref, il ne reste plus grand chose de l’armée à la grand-papa… malheureusement.

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