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Michel Garroté -- Il y a des pays dont des soldats et des officiers sont présents - de fait illégalement - sur le territoire syrien du point de vue du droit international (ndmg - l'Iran). Par contre, il y a des pays qui sont dans un état de coopération technique et militaire avec la Fédération de Russie et se trouvent légalement en Syrie sur invitation des autorités du pays.
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De fait, Moscou, Damas et Jérusalem aimeraient voir les Iraniens quitter la Syrie. On peut raisonnablement supposer que la question de la présence iranienne en Syrie – c’est-à-dire sinon le départ de ses forces, du moins la baisse significative de leurs prétentions – fait d’ores et déjà partie de la grande négociation planétaire avec Téhéran. A ce propos, Gil Mihaely, sur causeur.fr, écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Mercredi dernier, Vladimir Poutine a rencontré Bachar Al-Assad à Sotchi.
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À la suite de leurs échanges, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a informé les journalistes : « Des pourparlers assez approfondis ont eu lieu », le président russe a félicité le président syrien pour les succès de l’armée gouvernementale syrienne dans la lutte contre les groupes terroristes, qui ont permis de créer des conditions supplémentaires en faveur d’une activation du processus politique à grande échelle ». Le président Poutine a estimé qu’ « avec le début du processus politique dans sa phase la plus active, les forces armées étrangères (ndmg : notamment l'Iran) vont se retirer du territoire syrien ».
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Poutine n’a pas précisé à quelles « forces étrangères » il faisait référence. S’agit-il des Turcs qui occupent la ville d’Afrine ? Des forces américaines présentes aux côtés des Kurdes ? Ou bien sont-ce les forces iraniennes (pasdarans, milices chiites et Hezbollah) ? L’ambiguïté du communiqué de presse russe ne peut être comprise autrement que comme un signal envoyé à Téhéran.
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Et, pour rendre le message encore plus clair, Vladimir Kujine, un conseiller du président Poutine chargé des coopération militaires et techniques, a déclaré il y a huit jours, soit 24 heures après la visite de Benyamin Netanyahou à Moscou, que la vente à la Syrie des systèmes de défense aérienne S-300 n’était plus à l’ordre du jour. Motif invoqué ? « L’armée syrienne dispose de tout ce dont elle a besoin pour faire face à ses ennemis ».
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Si on traduit ces subtilités diplomatiques en français, cela signifie que les Russes ont accepté la position israélienne. Ainsi, ils ne pensent pas que Tsahal vise les Syriens (lesquels n’ont donc pas besoin d’améliorer leurs défenses aériennes). Israël a donc obtenu le droit de faire respecter par la force des lignes rouges bien comprises par Moscou.
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Autrement dit, puisque la guerre civile est terminée, les Iraniens sont de trop en Syrie. Y compris aux yeux des Russes. Il faut dire que la survie d’Assad pose de nouvelles questions stratégiques. Pour le président syrien, l’objectif est évident : retrouver la situation d’avant mars 2011, ajoute Gil Mihaely sur causeur.fr (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Michel Garroté pour LesObservateurs.ch
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Source :
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https://www.causeur.fr/poutine-assad-syrie-iran-israel-151384
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Blog Archives
Syrie – Assad s’approche de la victoire
Michel Garroté -- Le président syrien Bachar al-Assad a pris une option pour la victoire sur ses adversaires qui voulaient le renverser mais il se retrouvera à la tête d'un pays en ruines, estiment les experts. Assad "contrôle la plus grande partie du territoire", ainsi que les zones "les plus peuplées", "et je pense qu'il va continuer à diriger la plus grande partie de la Syrie", déclare Aron Lund, expert de la Syrie à la Century Fondation.
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"La guerre se poursuit mais, stratégiquement, il a défait ceux qui pensaient le déposer et, sauf imprévus, je pense que le gouvernement syrien va reprendre le territoire tranche par tranche". Le régime de Damas a bénéficié de l'appui décisif de la Russie et de l'Iran. Et, avec l'entrée dans la ville de Deir Ezzor (est) contrôlée par le groupe Etat islamique (EI) - quelques mois après avoir bouté les rebelles hors d'Alep (nord) et s'être emparé de larges secteurs dans le désert du sud-est - il contrôle désormais plus de la moitié du territoire.
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Selon les chiffres fournis par le géographe Fabrice Balanche, cela représente les deux tiers de la population de Syrie, évaluée actuellement à quelque 16 millions. Les Kurdes tiennent 23% du pays, l'EI 15% et les rebelles islamiques 12%.
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Position de force :
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L'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a été abrupt en affirmant que l'opposition islamique syrienne devait accepter qu'elle n'avait "pas gagné la guerre", tout en demandant au gouvernement de ne pas crier victoire. "Est-ce que le gouvernement, après la libération de Deir Ezzor et de Raqa, sera prêt à négocier et à ne pas simplement crier victoire ?
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Est-ce que l'opposition islamique sera capable d'être assez réaliste pour réaliser qu'elle n'a pas gagné la guerre ?" a-t-il dit. Ces déclarations ont "profondément blessé" (sans blague...) un des chefs de l'opposition, Nasr Hariri, chef de la délégation du Haut Comité des Négociations (HCN), dénonçant des propos "choquants" tout en maintenant sa demande de voir partir Assad au début d'une période transitoire (il rêve, Nasr Hariri).
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Il y a cependant peu de chance que cette requête soit acceptée par le régime au moment où il n'a jamais été autant en position de force depuis le début en mars 2011 du conflit qui a fait plus de 330'000 morts. Son armée contrôle les principales villes et possède une puissance de feu considérable grâce à l'appui de Moscou et Téhéran. "Je ne sais pas s'il va gagner la guerre, mais il a certainement retrouver son allant. Mais, franchement, il regagne le contrôle d'un pays complètement détruit. Je ne sais pas ce que gagner la guerre signifie dans ce contexte", note Maha Yahya, directrice du Centre Moyen-Orient de Carnegie.
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D'autres experts soulignent la fragilité du pouvoir, dans un pays profondément divisé. "Assad restera longtemps mais avec une forte probabilité que persistent des insurrections armées endémiques, pas directement menaçantes pour le pouvoir central mais structurellement menaçantes pour un régime dont les faiblesses - économiques, démographiques, institutionnelles - restent importantes", souligne Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie à l'université d'Édimbourg.
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Chômage à 50% :
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Car si le président Assad est sur la voie de gagner après avoir frôlé la défaite jusqu'à l'arrivée de l'armée russe en 2015, la situation économique est catastrophique avec un chômage touchant 50% de la population active, un taux de pauvreté de 85% et la moitié de la population réfugiée ou déplacée.
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Grâce aux victoires du régime Assad, "il va y avoir une relative éclaircie économique d'environ 18 mois à deux ans, car l'électricité va être réparée par endroits, l'extraction du pétrole et du gaz va pouvoir reprendre", affirme Jihad Yazigi, directeur de The Syria Report, un hebdomadaire économique en ligne sur la Syrie. Mais, "en l'état actuel, je ne pense pas qu'il va y avoir une reconstruction", explique-t-il, en chiffrant celle-ci à "200 milliards de dollars" (environ 166 milliards d'euros).
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Il n'y a pas d'argent dans le pays et les banques ne sont pas en état de s'occuper de la reconstruction car la totalité des actifs des 12 banques syriennes s'élève à 3,5 milliards de dollars. En outre, l'argent des expatriés rentre très peu. Et "ceux qui peuvent financer cette reconstruction comme les pays du Golfe et l'Union Européenne n'ont pas l'intention de le faire", estime M. Yazigi (voir lien vers source en bas de page).
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Michel Garroté pour Les Observateurs
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https://fr.news.yahoo.com/assad-rapproche-victoire-pays-ruines-082430368.html
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Assad a-t-il lancé une attaque chimique sur Khan Cheikhoun ?
Ces derniers jours ont vu un revirement incroyable de l'opinion publique et des puissants de ce monde (notamment Donald Trump) vis-à-vis de la Syrie et du régime de Bachar el-Assad. La faute à un "bombardement à l'arme chimique" au-dessus de Khan Cheikhoun. Mais qui en est le responsable?
Confusion et brouillard de guerre
Le nom de cette ville située à 50 km au sud d'Idlib était parfaitement inconnu avant que ne déferlent sur tous les médias des informations issues de l'Observatoire Syrien des Droits de l'Homme, une organisation non gouvernementale très suspecte et pourtant couramment utilisée comme source par les médias occidentaux. Les forces aériennes de Bachar el-Assad auraient effectué un bombardement chimique au petit matin, s'en prenant également à un hôpital.
Dans les premières heures de l'affaire, même les Russes semblèrent mal à l'aise. Ils accusèrent dans un premier temps l'opposition syrienne d'avoir mis en scène les cadavres et les séquences d'évacuation des blessés, avant de se reprendre quelques heures plus tard en affirmant par le biais du ministère de la Défense que les armes chimiques faisaient partie d'un dépôt appartenant aux rebelles.
Le bombardement de Bachar el-Assad (dont personne ne conteste la réalité) aurait ainsi visé un dépôt de munition des ennemis du régime, dépôt dont l'inventaire était évidemment inconnu au moment du bombardement mais qui aurait contenu des armes chimiques et dont la destruction aurait entraîné un nuage de gaz fatal. Une explication plausible pour le grand public.
À qui profite le crime?
Parmi les différents services de renseignement, les Russes sont réputés pour leur talent dans la guerre de l'information - plus que leurs homologues américains. Sans savoir si c'était la vérité ou l’œuvre de quelques spin doctors, la thèse du "dépôt rebelle contenant des armes chimiques" commença à prendre de l'ampleur sur les réseaux sociaux.
Cette théorie cadrait notamment avec l'analyse géopolitique de la région. Assad n'aurait eu aucun intérêt à se livrer à une attaque non conventionnelle. Reprenant l'initiative grâce à ses alliés russes, face à un président américain ayant pour la première fois admis que son éviction était moins importante qu'une victoire contre l'État Islamique, le régime syrien n'avait apparemment rien à gagner et tout à perdre en brisant le tabou de l'utilisation d'armes chimiques.
Cette interprétation fut encore confortée par les conséquences du bombardement. L'outrage international fut à la fois intense et immédiat. Les Américains lancèrent 59 missiles contre une base syrienne. De nouveau, toute les options furent sur la table pour renverser éventuellement le régime de Damas. Là où on aurait pu s'attendre à une enquête pour établir les responsabilités des parties en présence, la communauté internationale surprit par son unanimité et sa rapidité de réaction. Venait-elle de tomber une nouvelle fois dans un complot dans la grande tradition des couveuses du Koweït?
Le Guardian analyse
La principale faiblesse de la dénonciation d'une attaque chimique venait de ses sources initiales - l'OSDH et l'UOSSM, une obscure association internationale de médecins syriens autorisés à travailler dans la zone aux mains des rebelles. Face à ces témoignages peu fiables, l'interprétation russe était tout à fait recevable.
Le 5 avril, le journal britannique The Guardian publia un premier article sur l'attaque avec les commentaires de Richard Guthrie, un expert britannique en armes chimiques. Il défaussa assez rapidement la version russe de l'explosion d'un stock d'armes aux mains des rebelles:
[Cette hypothèse] ne cadre pas avec les observations de terrain pour plusieurs raisons. Un raid aérien larguant des charges explosives sur un dépôt de munitions aurait détruit l'essentiel du gaz sarin immédiatement, et répandu le reste dans une zone bien plus petite.
"La distribution des victimes ne colle pas à la diffusion de matériau toxique que vous auriez eu avec la destruction d'une enceinte contenant des produits chimiques rompue par un bombardement. Elle cadre davantage avec des conteneurs de produit répartis sur une population plus grande", dit Guthrie. (...)
Le Sarin est trop compliqué et cher à produire pour que les rebelles en fabriquent eux-mêmes, et bien qu'ils aient potentiellement obtenu quelques stocks de gaz innervant ou d'autres gaz, il est très improbable qu'ils disposent de plus de quelques kilos.
Un autre expert, Gordon De Bretton, expliqua que le grand nombre de femmes et d'enfants parmi les victimes ne cadrait pas avec l'attaque d'un dépôt militaire. Un troisième intervenant, Dan Kaszeta de l'armée américaine, rappela enfin que le Sarin est un composé instable, devant être fabriqué au plus quelques jours avant son utilisation. L'alcool isopropylique hautement inflammable étant un des deux précurseurs du gaz, l'attaque d'un laboratoire de production de sarin aurait provoqué une boule de feu dont nul n'a rendu compte.
Le lendemain, The Guardian publia le témoignage direct de Kareem Shaheen, premier reporter d'un média occidental à rejoindre le site des atrocités. Pour la première fois il était possible de rendre compte sans dépendre des services de Bachar ni de ses adversaires islamistes. Il ne trouva qu'un petit cratère contenant le reste de la bombe qui dévasta semble-t-il le quartier.
Tout ce qui reste de l'attaque sur la ville de la province d'Idlib tenue par les rebelles est une mauvaise odeur qui dérange les narines et quelques fragments verdâtres de la bombe. Les maisons alentours sont vides de tout être vivant.
Le Guardian, premier média occidental à visiter le site de l'attaque, examina un entrepôt et des silos directement à proximité de l'endroit où le projectile atterrit, et ne trouva rien d'autre qu'un espace abandonné recouvert de poussière et des silos à demi détruits empestant le grain moisi et le fumier. Les résidents affirmèrent que les bâtiments furent endommagés six mois plus tôt et restèrent inutilisés depuis lors.
"Vous pouvez regarder ; il n'y a rien là-bas hormis peut-être du grain et des excréments animaux, et même un bouc mort asphyxié par l'attaque", expliqua quelqu'un. Les habitants répondirent par l'incrédulité aux allégations russes.
Il n'y avait aucune preuve d'un bâtiment récemment atteint ces derniers jours près de l'endroit où tant de gens furent tués et blessés par un agent chimique attaquant le système nerveux. Les maisons de l'autre côté de la rue ne semblaient pas endommagées. Il n'y avait pas de zone de contamination près du moindre bâtiment. A la place, la zone de contamination semblait avoir pour centre un cratère dans la route.
Autant dire que la version de l'usine d'armes chimiques frappée par surprise ne colle pas avec les observations sur le terrain...
À qui profite le crime, deuxième partie
"Le régime syrien n'avait apparemment rien à gagner et tout à perdre en brisant le tabou de l'utilisation d'armes chimiques", écrivais-je quelques paragraphes plus haut en me faisant l'écho de nombreux analystes. Mais ce n'était pas tout à fait exact. Propagande oblige, le régime de Bachar el-Assad vole de victoire en victoire avec son allié russe ; en réalité, l'armée syrienne est épuisée par des années de guerre et les batailles remportées ne sont pas aussi nombreuses qu'il y paraît. L'énorme empiètement dont disposent encore l'État islamique et les diverses milices sur le territoire national syrien témoignent du chemin encore à parcourir.
Rétrospectivement, une attaque chimique sur Khan Cheikhoun n'était pas une bonne idée pour le régime de Damas. Entre la riposte américaine immédiate et la perte du statut de "moindre mal" que Bachar el-Assad était parvenu à acquérir face à l'État islamique, le recul géopolitique est énorme, et sans rapport avec les gains négligeables obtenus sur le terrain avec des armes interdites. Mais ce n'est pas parce que le plan n'a pas donné les résultats escomptés qu'il n'a pas existé.
Bachar el-Assad gageait sans doute que l'utilisation de l'arme chimique susciterait la terreur chez ses ennemis ; il pensait peut-être aussi disposer d'une fenêtre d'impunité grâce aux ouvertures diplomatiques américaines, à l'impréparation du nouveau président, et aux tergiversations permanentes de la communauté internationale. Mal lui en prit. Le retour de flamme le place dans une position précaire et il ne peut s'en prendre qu'à lui et à ses généraux.
L'attaque chimique de Khan Cheikhoun passera peut-être à la postérité comme un tournant dans la guerre en Syrie - un calcul cynique qui n'a pas fonctionné.
Stéphane Montabert - Sur le Web et sur LesObservateurs.ch, le 11 avril 2017
Proche et Moyen Orient – Un peu de bon sens
L’alliance de l’Occident avec tel ou tel pays musulman, cette alliance doit être considérée comme une alliance tactique à court terme, même si elle est renouvelable pendant un certain laps de temps, mais pas comme une alliance globale à long terme. De façon plus détaillée, il s'agit, primo, de cesser d’appréhender, d’une part, l’islam en terre d’islam ; et d’autre part, l’islam en Occident. Car il s’agit, dans les deux cas, du même islam, du même coran et des mêmes hadîths. Le discours "islamophile" (du genre "l'islam, une chance pour la France") ne changera rien à cette réalité.
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Secundo, en Occident, l’islam doit respecter l’ordre constitutionnel et laïc. Les zones de non-droit sont à remettre au pas, par la force légale et par le droit. En outre, l'Occident doit exiger de la part des pays musulmans qu'ils pratiquent la réciprocité : si le musulman bénéficie de la liberté religieuse chez nous, alors le chrétien en terre d'islam doit bénéficier de cette même liberté religieuse dans les pays musulmans.
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Tertio, l’alliance de l’Occident avec tel ou tel pays musulman, cette alliance doit être considérée comme une alliance tactique à court terme, même si elle est renouvelable pendant un certain laps de temps. Quarto, l’Occident doit admettre, une bonne fois pour toutes, que l’islam est imprévisible ; et que par conséquent, la stratégie globale à moyen et long terme de l’Occident, face à l’islam, reste, essentiellement, un ensemble de tactiques à court terme, modifiables à tout instant.
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Quinto, l’Occident a tout intérêt à maintenir un équilibre des forces entre islam sunnite et islam chiite. Et si les deux branches de l’islam, la branche sunnite et la branche chiite, sont en guerre, l’Occident doit apprendre à en tirer profit. Car le temps que ces deux branches consacrent à se combattre signifie un temps de répit pour l’Occident. En clair, l'Occident devrait oser la question suivante : des musulmans tuent d'autres musulmans ; et nous, en tant que non-musulmans, en quoi cela nous concerne-t-il ?
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Pour conclure avec un sujet complexe, à savoir la Syrie, je dois admettre que la crise syrienne me pose un problème. Je n'ai jamais eu la moindre sympathie pour le clan Assad. Notamment parce que j’ai vu de mes yeux les monstruosités perpétrées par le clan Assad contre les Chrétiens au Liban dans les années 1980. Cela dit, lorsque quelques années plus tard, dans les années 1990, je me suis rendu en Syrie, j’ai été bien obligé d’admettre que la situation des Chrétiens y était bonne.
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C’est un paradoxe typiquement levantin. Le clan Assad a voulu chasser les Chrétiens du Liban afin de pouvoir annexer ce pays. Et ce même clan Assad, dans son propre pays, la Syrie, a ménagé - et ménage encore - les minorités, y compris les minorités chrétiennes, du fait que ce clan est, lui aussi, une minorité, en l'occurrence une minorité alaouite issue du chiisme, dans un pays majoritairement sunnite de tendance islamiste (à ce propos, on parle de sunnites islamistes "modérés" et c'est une sinistre plaisanterie).
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Je sais très bien qu’actuellement le clan Assad fait à son propre peuple ce qu’il avait déjà fait pendant plus de quinze ans aux Chrétiens libanais. Du reste, à l’époque, j’étais très seul dans ma défense de ces Chrétiens libanais, persécutés dans leur propre pays, et dont le sort, laissait le monde entier indifférent. En résumé et en conclusion, je ne peux pas, aujourd’hui, prendre parti contre le clan Assad, car si un Califat islamique sunnite lui succède, ce sera le chaos islamique, les chrétiens de Syrie, d'Irak et du Liban n’auront plus qu’à faire leurs valises. Et qui les accueillera ? Personne.
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Michel Garroté pour https://lesobservateurs.ch/
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2017 sera-t-elle l’année de la Russie ?
Michel Garroté - Olivier d'Auzon est écrivain, juriste, consultant auprès de la Banque mondiale et auteur du livre "Le grand échiquier de Poutine". Il a tout récemment publié une analyse intitulée "2017 devrait être l'année de la Russie" ; analyse à la fois non-conformiste et pertinente (notamment en ce qui concerne le Proche et le Moyen Orient), dont je publie ci-dessous des extraits adaptés.
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Olivier d'Auzon (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Theresa May, Donald Trump et François Fillon partagent l'idée qu'il convient de renouer diplomatiquement avec Moscou. Et il y a plus, les cartes du Moyen-Orient sont rebattues par le spectaculaire retournement de la situation en Syrie en faveur du régime de Bachar El-Assad. De fait, en septembre 2015, les rebelles syriens, aidés par les Occidentaux, les pétromonarchies du Golfe et la Turquie croyaient pouvoir s'emparer de Damas. Mais l'intervention russe a sauvé in extremis le régime et permis la reconquête d'Alep, la seconde ville du pays. Dès lors, les Russes se substituent aux Américains comme grande puissance de référence dans la région. L'idéalisme moralisateur comme masque d'un interventionnisme rapace a fait des ravages qu'on ne peut plus ignorer.
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Plus personne ne nie aujourd'hui les conséquences de la mauvaise définition des ennemis et des alliés puis de l'identification erronée de la menace par une Amérique privée de contre-pouvoir. Son hyper puissance arrogante a été préjudiciable à l'équilibre mondial. Au Moyen-Orient, la Russie a désormais beaucoup d'atouts dans son jeu, alors que les Occidentaux y sont affaiblis, constate Jean-Dominique Merchet dans L'Opinion. Moscou parle avec les acteurs essentiels : la Turquie, l'Iran, l'Égypte, Israël. Grâce à son intervention militaire, Vladimir Poutine est en position de force et il cherche manifestement une issue politique. Celle-ci devra ménager les intérêts de chacun, l'Iran notamment. Dans cette situation, il serait inconscient de souhaiter un échec du président russe au nom de nos rancœurs. Pour l'heure, les Russes ont marginalisé les Américains, ces derniers qui peinent à « soutenir sans soutenir » les djihadistes et essayer de maitriser leur allié turc indocile.
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Les Russes dominent le front diplomatique et cherchent à réunir autour d'eux un panel crédible et représentatif de la diversité syrienne pour un processus politique qui débouchera sur des élections et surtout sur le maintien de l'unité syrienne même dans l'hypothèse d'une structure étatique fédérale. A l'inverse, au Quai d'Orsay, au lieu de s'insérer dans cette approche pragmatique, on persiste à criminaliser Vladimir Poutine, à parler d'Assad comme du bourreau unique de son peuple, à minorer le soutien populaire au régime de Damas pour accréditer l'idée qu'on pourrait, de l'extérieur, imposer un casting représentatif qui pourtant a sombré sans équivoque dans le discrédit et en est lui-même réduit à proposer « de parler avec la Russie » pour ne pas quitter tout à fait la scène. Et la guerre continue. Dans ce contexte, "Il faut choisir. On ne peut pas continuer simplement à s'indigner", tranche François Fillon. "Les Européens ne sont pas responsables des crimes commis en Syrie, mais un jour, l'Histoire dira qu'ils sont coupables de n'avoir rien fait pour les en empêcher".
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À ce titre, la libération d'Alep, est un tournant non seulement militaire mais aussi psychologique. Moscou, est de facto l'arbitre du jeu diplomatique face à une Amérique en retrait et à l'orée d'un changement de président à Washington. Aujourd'hui n'est–il pas urgent de changer de logiciel et cesser de croire que l'islamisme radical n'est pas soluble dans la pensée occidentale ? Le recul des djihadistes à Alep n'est en effet que la manifestation d'une déroute militaire globale, et d'un rapport de forces russo-américain où Washington perd pied. Même John Kerry dans sa déclaration de Bruxelles du 6 décembre 2016, à l'occasion de la réunion des ministres des Affaires étrangères de l'OTAN, semble jeter l'éponge. Etant entendu qu'il est dorénavant apparemment convaincu que le renversement du régime syrien et l'éclatement du pays sont inéluctables. Et c'est ainsi qu'il cherche habilement à dédouaner l'Amérique d'un soutien aux mouvements rebelles radicaux devenu indéfendable et surtout sans issue.
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La rivalité Washington-Moscou restera vive, au moins jusqu'à l'entrée en fonction de Donald Trump le 20 janvier 2017. Alep est tombée sous les coups de canons de Bachar El-Assad ? Il n'en est rien. "Alep n'est pas tombée, Alep est libérée". "Si vous ne le croyez pas, vous devriez venir ici et voir de vos propres yeux les gens fêter sa libération. Comment pouvez-vous dire qu'Alep est tombée ? "s'exclamait il y a peu un Alepin. Dans la même veine, Peter Ford, ancien Ambassadeur de la Grande–Bretagne en Syrie de 1999 à 2003, déclarait à la veille de Noël 2016 sur les antennes de la BBC: "Ecoutez, ce soir, il y a un sapin de Noël et des festivités au centre d'Alep. Je pense que si Assad était renversé et que l'opposition était au pouvoir, vous ne verriez pas de sapin de Noël à Alep. La diabolisation du régime a pris des proportions grotesques. Dans ce contexte, "La chute d'Alep a affaibli la position de négociation de l'opposition syrienne et de ses alliés", notamment les pays du Golfe, qui "devraient s'engager sur la voie d'un règlement politique car une solution militaire est devenue plus que jamais improbable", confie Ibrahim Fraihat, analyste et professeur au Doha Institute for Graduate Studies.
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Maintenant, "le défi pour les pays du Golfe, ce n'est pas Assad lui-même, mais la nouvelle alliance entre la Russie, la Turquie et l'Iran", indique Matthieu Guidère. Selon Abdulkhaleq Abdulla, professeur de sciences politiques émirati, la Turquie est en effet passée du camp qui cherchait à renverser M. Assad au camp qui souhaite son maintien. "Ceux qui avaient parié sur une alliance Turquie-Arabie-Qatar ont perdu". L'arrivée au pouvoir en janvier 2017 aux Etats-Unis de Donald Trump pourrait encore plus modifier la donne pour les pays du Golfe. "Les Saoudiens et d'autres savent que, sous le président Trump, la dérive occidentale vers Assad va s'accélérer", estime l'expert Neil Partrick, un autre spécialiste du Golfe. "Cela veut dire l'abandon de l'objectif d'un Etat client syrien, dominé par des sunnites, où l'Arabie saoudite rivaliserait ensuite avec les Turcs et les Qataris". Et "si l'Arabie saoudite était sage, elle enverrait des signaux à Assad maintenant, comme les Turcs et les Egyptiens l'ont fait" récemment.
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Chemin faisant, on s'interrogera tout à la fois sur la portée de l'assassinat de l'Ambassadeur russe en Turquie, le 19 décembre 2016 et sur l'attentat revendiqué par l'EI commise contre une discothèque d'Istanbul pendant la nuit du nouvel An 2017. Ce dernier pourrait signifier au président Erdogan qu'il ne peut impunément jouer sur tous les tableaux. De fait, la Turquie s'est en effet longtemps impliquée dans la déstabilisation du régime syrien, avant de reconnaître officiellement à la fin de l'été dernier, que Bachar El-Assad était un interlocuteur sinon légitime du moins incontournable. Avec cet attentat, Ankara est en passe d'expérimenter les limites de son jeu très habile de son positionnement acrobatique entre Moscou et Washington, souligne judicieusement Caroline Galactéros. La Turquie a simplement fini par devoir admettre qu'elle pèserait plus, y compris vis-à-vis de Washington, dans une alliance avec la Russie - qui s'est imposée comme principal décideur du futur syrien- que contre elle.
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Face à ce réalisme froid, nous restons malheureusement intellectuellement sidérés et sans rebond. Nous avons manifestement le plus grand mal à comprendre l'ampleur du bouleversement stratégique en cours. Un bouleversement mondial dont le Moyen-Orient n'est que l'un des théâtres d'expression. Au-delà des enjeux régionaux, cet acte tragique est la rançon du succès global de la Russie, revenue dans le jeu international à la faveur de son implication militaro-diplomatique efficace en Syrie, confie Caroline Galatéros. Pour l'heure on soulignera volontiers que la Turquie et la Russie se sont entendues sur un accord de cessez-le-feu qui est entré en vigueur le 28 décembre 2016. Cet accord devrait être la base des négociations politiques entre le régime et l'opposition que Moscou et Ankara souhaitent organiser à Astana, au Kazakhstan.
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De fait, selon le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, les préparatifs aux négociations de paix sur le règlement du conflit syrien doivent avoir lieu prochainement à Astana, à l'initiative de la Russie. "Nous commençons avec les Turcs et les Iraniens à préparer la rencontre à Astana", a-t-il indiqué, alors qu'Ankara et Téhéran ont affiché leur volonté d'être avec Moscou des garants d'un accord de paix entre le régime syrien et l'opposition qui pourrait être conclu à Astana. Ne nous en déplaise, Vladimir Poutine est le seul à pouvoir faire en sorte que "les armes se taisent" en 2017. Dans le même temps, le prix du baril de pétrole va continuer de remonter et permettra à la Russie de surmonter la terrible crise économique.
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Et peut-être même que les sanctions contre la Russie seront abandonnées, par les Etats-Unis, si Donald Trump tient ses promesses de campagne, ce qui pourrait aussi animer un François Fillon réputé pro-russe et hostile aux sanctions s'il arrivait aux affaires. Pour toutes ces raisons : la remontée du baril de pétrole, le virage majeur en Syrie, ou encore le reset de Donald Trump/Fillon avec Moscou – et la nomination annoncée de Rex Tillerson comme futur Secrétaire d'Etat à Washington, 2017 devrait être l'année de la Russie, pronostique Alexandre Del Valle, auteur de "Les vrais ennemis de l'Occident", conclut Olivier d'Auzon (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Introduction & Adaptation de Michel Garroté pour https://lesobservateurs.ch/
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http://www.huffingtonpost.fr/olivier-d-auzon/2017-devrait-etre-lannee-de-la-russie/?utm_hp_ref=fr-homepage
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A propos d’Alep – La vérité si je mens
"L’Occident a perdu son honneur à Alep" (selon nos médias). "Je demande pardon au peuple d'Alep" (encore selon nos médias). "Avec la chute de l'ex-capitale économique de la Syrie, dans l'indifférence de la communauté internationale, c'est le dernier symbole d'une possible alternative à la dictature du régime d'Assad qui s'effondre" (toujours selon nos médias). J'aimerais, pour commencer, signaler que les rebelles islamistes empêchent les civils de quitter les quartiers assiégés d'Alep-Est et qu'ils s'en servent comme boucliers humains.
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Rebelles islamistes à Alep qui sont notamment membres du Fatah al Cham, du Ahrar al-Sham, du Fastaqim, du Noureddine al-Zenki, du Sultan Mourad et du Jabha Shamya, bref, des allumés aussi aimables que l'étaient, il n'y a pas si longtemps que ça, ceux d'al-Qaeda (qu'ils ont évincé d'ailleurs...). Quant à Barack Hussein Obama, il a jeté définitivement l’éponge devant les terribles images en provenance d’Alep et il a préféré prendre des vacances avec sa famille dans l’archipel d’Hawaï, comme l'écrit Freddy Eytan dans Le Cape.
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Je note, par ailleurs, qu'à l'ONU, une journaliste a démonté la rhétorique des médias traditionnels sur la Syrie. Sa démonstration a eu lieu lors d'une conférence de presse ayant pour thème « Contre la propagande et le changement de régime en Syrie ». Etaient invités à y participer les journalistes et activistes internationaux. Parmi les participants, la journaliste canadienne Eva Bartlett, qui s'est plusieurs fois rendue en Syrie depuis 2014, travaillant à y recueillir les témoignages directs des habitants de ce pays.
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Ci-dessous, je publie un certain nombre d'analyses sérieuses (parfois un peu longues...) et de commentaires (judicieux...) sur ce qui c'est vraiment passé - et se passe encore - à Alep.
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Ainsi, le Père Ziad Hilal, chargé des projets de l’AED en Syrie (donc sur place), qui est interviewé (ci-dessous, extraits de l'interview ; voir lien vers source en bas de page) :
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Quelle est la situation actuelle à Alep ? Le cessez-le-feu est-il respecté ?
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Père Ziad Hilal - Non, après une trêve, les combats ont visiblement repris. Nous entendons des bombes et des tirs de roquettes à une distance relativement faible. Non loin de nous, il y a deux secteurs où se sont retranchés les rebelles qui ne veulent pas capituler. Jusqu’à maintenant, nous continuons d’entendre des combats.
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Et dans votre secteur ?
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Père Ziad Hilal - Dans notre secteur, les choses sont calmes. Beaucoup de gens ont quitté l’Est de la ville pour venir à l’Ouest. De nombreuses organisations sont sur place pour les aider. Il a fait très froid aujourd’hui. Mais il y a tout juste quelques jours, notre couvent a été l’objet d’une attaque. Samedi soir, vers 18 heures, une roquette a explosé dans notre bâtiment, causant des dégâts matériels. À cette heure-là normalement, nous célébrons la messe dans notre église, mais ce samedi-là, nous participions à une retraite chez une congrégation de religieuses. C’est ce qui nous a sauvés.
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Comment évaluez-vous la situation à Alep-Est actuellement ?
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Père Ziad Hilal - Pour la première fois depuis cinq ans, j’ai pu visiter aujourd’hui la partie Est de la ville et me faire une idée de la situation, en particulier dans le quartier chrétien de Al-Midan. Le spectacle qui s’offre à vous est celui d’une destruction totale. Notre centre Saint-Vartan est lui aussi très endommagé.
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Les médias font état de massacres de la population civile par l’armée syrienne et ses alliés…
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Père Ziad Hilal - J’ai des doutes quant à ces récits. Il existe peut-être des cas isolés, mais nous n’en avons pas entendu parler ici. Il faut savoir que ces temps-ci, on diffuse beaucoup d’informations erronées et aussi de fausses images. Les organisations sur place comme la Croix Rouge n’ont pas diffusé ce genre de nouvelles jusqu’à présent. Le problème est que les gens tendent à exagérer alors qu’aujourd’hui justement, il ne faut pas provoquer, mais au contraire garder son calme. Il importe maintenant d’encourager les gens à s’accepter mutuellement et à oser la réconciliation.
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Voyez-vous des signes de cette réconciliation ?
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Père Ziad Hilal - Pas encore. Nous avons détruit la ville parce que jusqu’à maintenant, nous ne sommes pas parvenus à nous mettre d’accord dans le dialogue. Nous avons perdu notre civilisation et détruit notre histoire ! Pourquoi ? C’est une tragédie.
Beaucoup de Syriens accusent les puissances étrangères d’être le principal responsable de la guerre…
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Père Ziad Hilal - Nous ne devons pas montrer les autres du doigt : ce sont d’abord nous-mêmes qui sommes responsables. Il faut néanmoins dire que les médias jouent un rôle déplorable dans cette guerre. Ils provoquent les deux parties et les montent l’une contre l’autre. Ces provocations doivent cesser.
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Maintenant que la partie Est de la ville est quasiment vide, y a-t-il selon vous l’espoir d’un rapprochement ?
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Père Ziad Hilal - La bataille d’Alep a été acharnée. La plupart de la ville est totalement détruite et la simple obtention d’un cessez-le-feu a déjà été un malheureux jeu de patience. Mais nous devons garder espoir, pourquoi sinon sommes-nous encore là ? Alep a connu bien des conquérants au cours de son histoire. Des milliers de personnes y sont mortes et elle a été détruite à plusieurs reprises. Et elle s’est pourtant toujours relevée. Gardons espoir.
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Y a-t-il quelque chose que l’Occident peut faire aujourd’hui ?
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Père Ziad Hilal - Avant tout : cessez les provocations. Appelez les hommes politiques à la raison pour qu’ils recherchent un discours modéré et la réconciliation. Le Proche Orient doit devenir une région paisible où tout le monde cohabite pacifiquement. Il deviendra sinon un enfer pour nous (fin de l'interview ; voir lien vers source en bas de page).
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Par ailleurs, lors d'une conférence, la journaliste canadienne Eva Bartlett a été interrogée par son collègue (gauchiste) norvégien du journal 'Aftenposten'. Il cherchait à comprendre comment elle pouvait accuser nos médias de mensonges sur la situation en Syrie. Deux minutes ont suffi à Eva Bartlett pour faire voler en éclats le mythe de la crédibilité des médias (https://youtu.be/0DZSPy5KkWg).
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Sur LSB, Paula Corbulon écrit (extraits adaptés) : En France, les réalités sont non seulement totalement ignorées des medias du régime socialiste, mais noyées sous une avalanche de bobards hystériques, qui marquent le désarroi de l'oligarchie hors-sol devant un échec, au moins temporaire, de sa campagne de déstabilisation de la Syrie, conclut Paula Corbulon.
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De son côté, Olivier Hanne, cité sur LSB, écrit notamment (extraits adaptés) : Le désastre diplomatique français au Proche-Orient est lié à l’irréalisme de notre politique depuis 2011, laquelle a toujours voulu défendre les principes du droit contre Bachar al-Assad, sans prendre en compte les réalités du terrain et la complexité des sociétés concernées. La France est le seul pays, avec l’Arabie Saoudite, à avoir toujours voulu le départ du président syrien. Cette opiniâtreté a coûté à la France sa place dans la région, puisqu’elle a été dépassée par le dynamisme russe et le pragmatisme américain. En fermant son ambassade à Damas et en refusant toute négociation, même parallèle, Paris s’est privé de tout levier semi-officiel en Syrie et a dû se rabattre sur les groupes rebelles qui, dès 2012, étaient tous pénétrés par l’idéologie djihadiste.
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Contre Bachar, la France a démontré l’usage d’armes chimiques et a défendu cette position même après avoir été lâchée par les États-Unis, puis elle a utilisé la qualification de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, ce qu’elle n’a fait ni envers le régime irakien qui a pilonné les villes sunnites en 2012-2013, ni envers Riyad pour son action au Yémen ; contre Bachar, la France a refusé de frapper les troupes de Daech qui se sont emparé de Palmyre en mai 2015 puis à nouveau en décembre 2016, et elle ne l’a pas fait justement pour ne pas être accusée d’aider le régime, même indirectement ; contre Bachar, la France a soutenu la rébellion kurde dans le nord de la Syrie, quitte à fragmenter le pays et à fermer les yeux sur les exactions commises par certains groupes kurdes ; contre Bachar, la France a même fourni des armes à des groupes constitutifs de l’alliance Jabhat al-Nosra ; contre Bachar, la France a permis à l’Arabie Saoudite de financer la mouvance djihadiste de Syrie, la même qui a empêché par la terreur les civils de quitter Alep lorsque les Russes ont ouvert des corridors humanitaires ; contre Bachar, la France a laissé toute latitude à l’Arabie Saoudite pour conduire une coalition au Yémen du Nord afin d’y écraser dans le sang la rébellion des Houthis, faisant plus de 30'000 morts ; contre Bachar, la France a fermé les yeux sur les manœuvres turques visant à s’implanter sur la frontière syrienne.
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Accuser la France de ne pas s’être investie dans le dossier syrien est une ineptie et un mensonge. Certes, la France a d’abord parlé et n’a agi qu’indirectement. Mais qu’est-ce que les experts interrogés par Le Monde souhaitaient de plus ? Une intervention militaire directe de la France ? Toute seule, à la Cyrano, pour le panache ? Avec quelles troupes ? Avec les 3'000 soldats qui tentent de barrer la route au djihadisme au Sahel à travers l’opération Barkhane ? Avec les 10'000 soldats épuisés par l’opération Sentinelle ? Et contre qui la France aurait dû envoyer ces troupes ? Contre l’armée syrienne et son allié russe ? À Alep ou à Damas ? Les deux, mon général.
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Nos hommes auraient été immédiatement pris entre le marteau de Daech et l’enclume syro-russe, et ils auraient été accusés de néo-colonialisme, comme ils le sont déjà au Sahel ! Nous aurions déclenché une guerre avec la Russie sans aucune assurance de rétablir une paix quelconque. La France est allée jusqu’au bout de sa logique, celle des principes, mais depuis la fin des blocs, les principes ne suffisent plus à déterminer le camp du bien, et le Moyen-Orient est trop complexe pour supporter le manichéisme. Si la France est condamnable pour ce qui s’est passé à Alep, alors elle l’est aussi pour Saada au Yémen, pour Falloujah en Irak. Mais jusqu’où faudra-t-il s’accuser ? Une chose est sûr : les experts ne sont pas faits pour gouverner, conclut Olivier Hanne (fin des extraits adaptés).
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De son côté, Maxime Perrotin écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : La bataille d’Alep touche à sa fin après 4 ans de conflit. L’armée syrienne progresse dans les toutes dernières poches de résistances des quartiers Est de la ville qui pourraient être reprises dans les heures qui viennent. Un épilogue qui provoque un tollé général dans les médias français. Florilège. « La libération totale d'Alep est proche », c'est ce qu'annonçait une source militaire de Sputnik dès le 12 décembre au soir. Une libération qui pourrait être pleinement effective « d'ici 48 heures », si on en croit le témoignage de Pierre le Corf, français vivant à Alep Ouest où de nombreux habitants sont descendus dans les rues pour célébrer cette libération «imminente» et la fin des combats et des bombardements.
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Si 98% de la ville est à présent aux mains de l'armée syrienne, les médias semblent, contrairement à de nombreux « combattants rebelles », ne pas déposer les armes. En effet, depuis ce matin, les médias français mainstream se livrent à une surenchère de titres tous plus alarmistes les uns que les autres, comme par exemple Courrier International : « Syrie. À Alep, les civils attendent la mort », ou Libération : « Bataille d'Alep: "C'est le jour du jugement dernier" » « Alep, une fin dans le sang et les flammes » pour France Inter, quant à Le Monde : « Alep, en passe de tomber aux mains du régime de Bachar Al-Assad » (rappelons qu'un million et demi de civils vivent actuellement à Alep en zone gouvernementale).
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D'autres médias titrent sur le spectre des massacres et autres « atrocités contre les civils », tel que RFI ou L'Express. La palme revient néanmoins à l'Obs, qui semble affectionner les comparaisons historiques, via Rue89, « Alep: "C'est Srebrenica qui parle. Impuissance" », quelques heures plus tard, autre article autre titre, « ALEP. Comme à Grozny, la stratégie russe est simple: c'est la destruction totale ». Christian Harbulot, Directeur de l'École de Guerre Économique (EGE), voit dans la couverture médiatique de la libération d'Alep, une sorte de « danse de Saint-Guy » des journalistes français : « Nous assistons hélas à un concert de protestations qui relèvent plus de l'intention d'influencer l'opinion publique que le devoir d'informer l'opinion publique française », conclut Maxime Perrotin citant Christian Harbulot (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Quant à Gilles William GOLDNADEL, il écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Autant l'écrire tout de suite, je ne me fais pas l'ombre d'une illusion. Dans ce conflit syrien inextricable et confus, ma parole est inaudible. Et le message écrit qui va suivre est pratiquement illisible, d'autant plus qu'il est écrit à l'encre antipathique. Mais je l'écris tout de même. Pour me regarder sans honte et prendre date.
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Gilles William GOLDNADEL : Le message scellé dans une bouteille lancée dans la mer des sarcasmes est le suivant : la prétendue realpolitik – à la mode aujourd'hui, plus à droite qu'à gauche, et qui exige que même lorsque les enfants d'Alep, dans les hôpitaux et dans les écoles, expient les fautes qu'ils n'ont pas commises, il faille soutenir Assad – est non seulement immorale, mais irréaliste.
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Gilles William GOLDNADEL : Elle est évidemment totalement immorale, car trop c'est trop. Un régime dictatorial et sanguinaire qui cible délibérément et spécifiquement des écoles et des hôpitaux et envoie sur eux les gaz et des tonneaux incendiaires est insoutenable et inexcusable. Mais ceux qui me connaissent savent que je ne souhaite pas particulièrement être enterré au paradis des moralistes désincarnés et que je sais surtout l'enfer pavé des meilleures intentions.
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Gilles William GOLDNADEL : Mais c'est sur le terrain du réel que j'entends contester l'expertise supposée des défenseurs de la realpolitik. Tout d'abord, à Alep, l'organisation État islamique et ses détestables suppôts sont pratiquement absents. Dans la ville martyre, c'est principalement le front al-Nosra qui combat Assad et ses supplétifs iraniens et hezbollahis. Entre ces deux rivaux islamistes radicaux utilisant la terreur – l'un sunnite, l'autre chiite –, notre cœur moral et notre cerveau raisonnant ne sauraient balancer d'une quelconque manière.
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Gilles William GOLDNADEL : La Syrie est condamnée à tout jamais à être divisée. Je sais bien, et mes amis à droite me le serinent souvent, que le régime bassiste syrien est plus tolérant à l'égard de la minorité chrétienne que les islamistes de tout poil. Je leur donne raison et j'en sais quelque chose. Qu'on me permette l'anecdote : en ma qualité de président de France-Israël, j'avais invité au début de la guerre civile une sœur syrienne d'origine palestinienne venue dire à l'assemblée que quand bien même elle n'approuvait pas le régime cruel d'Assad, elle le préférait aux bourreaux islamistes qui détruisaient les églises et massacraient les fidèles à la croix.
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Gilles William GOLDNADEL : Qu'avais-je fait là ! Je ne sais plus quel folliculaire de La Règle du jeu, la revue de BHL, m'accusa ni plus ni moins d'être un suppôt du régime. Moi qui, pratiquement dans le désert depuis plus de 20 ans, reprochait à Hafez puis à son rejeton les massacres commis en masse à Hama ou ailleurs dans l'indifférence la plus totale d'un journal du soir qui à l'époque disait officiellement et le bien et le mal.
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Gilles William GOLDNADEL : Mais pour autant, et alors même que quoi qu'il arrive désormais, la Syrie est condamnée à tout jamais à être divisée, est-on tenu de délivrer un chèque en blanc à la radicalité chiite, à l'Iran obscurantiste des mollahs et au Hezbollah terroriste ? Mes amis de droite me serinent encore que Churchill, pourtant anticommuniste de bon aloi, avait bien dû choisir Staline plutôt que Hitler. C'est vrai, et il avait eu raison.
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Gilles William GOLDNADEL : Sauf que. Sauf que c'était après avoir vainement bataillé contre les pacifistes irréalistes britanniques qui avaient refusé de s'armer contre Hitler. Sauf que Staline, au moment du choix churchillien déchirant, était infiniment moins puissant que Hitler. Dans notre présente espèce, l'État iranien et le Hezbollah sont infiniment plus puissants que le pseudo État islamique sur le recul et non présent à Alep. Sauf que, après Stalingrad, et contrairement à la crédulité (déjà) de son allié américain, Churchill commençait à envisager Staline avec une méfiance redoublée.
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Gilles William GOLDNADEL : À présent que l'organisation État islamique recule partout, il est temps de regarder avec une égale méfiance la radicalité islamiste chiite. Je l'ai dit, je me fais peu d'illusions sur mes chances d'être entendu. D'autant plus que l'on dira que mes sympathies pour Israël ne sont pas pour rien dans l'envoi de cette bouteille en Méditerranée. Et on aura parfaitement raison.
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Gilles William GOLDNADEL : On voudra bien pardonner effectivement le fait que le régime de Téhéran – qui fait graver sur ses missiles balistiques, dans l'indifférence absolue du monde, « Israël doit être détruit » – ne m'inspire pas une sympathie ou une confiance illimitée. Mais lorsqu'on s'intéresse de près au drame du Proche-Orient, il n'est pas impossible d'avoir quelques intuitions d'ores et déjà confirmées pour partie.
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Gilles William GOLDNADEL : Même s'il est antipathique et cruel de le faire observer : l'offre politique au sein du monde arabo-islamique est encore aujourd'hui entre le mauvais et le mauvais. Raison pour laquelle je n'ai jamais cru au printemps arabe, contrairement à tous les bons esprits qui m'accablaient alors et parlent avec la même assurance aujourd'hui.
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Gilles William GOLDNADEL : Qu'il me soit enfin et surtout permis, avec une immense amertume, de constater que les défenseurs autoproclamés des droits de l'homme, ceux que j'appelle les islamo-gauchistes, qui étaient descendus en masse dans les rues de Paris pour crier leur haine d'Israël – quand ce n'était pas des juifs – sous le prétexte de la guerre à Gaza déclenchée par le Hamas, se sont mis aux abonnés absents durant toute la durée du grand massacre.
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Gilles William GOLDNADEL : Que l'on s'en souvienne : Quand les Arabes sont massacrés par des Arabes, quand des musulmans sont massacrés par d'autres musulmans et non par des Occidentaux chrétiens ou juifs, ils ne méritent pas qu'on mette le nez dehors. Il y a quatre ans, l'ensemble des journaux télévisés ouvraient systématiquement sur le conflit israélo-palestinien, il est vrai qu'il était plus sûr pour un journaliste d'être présent à Gaza – dès lors qu'il était docile à l'égard du Hamas – plutôt qu'à Alep. Dans ce cadre médiatique et intellectuel déjà bien psychologiquement balisé, les diplomates, les politiques, l'ONU n'entendaient précisément regarder le conflit que sous un angle prétendument purement moral.
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Gilles William GOLDNADEL : Et pourtant, les missiles islamistes partaient de Gaza, les boucliers humains existaient déjà à Gaza, et les frappes chirurgicales israéliennes ne visaient pas les hôpitaux. Pour imparfaites, elles étaient autrement moins meurtrières et bouchères que celles du camp Assad et de ses alliés. Je prends date, vous dis-je. Il est des jours où la morale rejoint le droit et l'intérêt. Même un point de vue tristement et dramatiquement réaliste ne saurait nous faire abandonner ces enfants d'Alep qui sont aussi les nôtres, conclut Gilles William GOLDNADEL (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Michel Garroté pour https://lesobservateurs.ch/
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http://www.aed-france.org/syrie-situation-a-alep-interview-p-ziad/
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https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201612131029159921-alep-djihadistes-medias/
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http://blognadel.over-blog.com/2016/12/goldnadel-alep-l-encre-antipathique.html
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Les islamistes syriens veulent le départ d’Assad
Michel Garroté - L'opposition islamiste syrienne a dévoilé un "plan de transition politique" prévoyant une phase de négociations avec le régime actuel, assortie d'une trêve, et, devant aboutir, primo, au départ du président Bachar al-Assad ; et secundo, à de nouvelles élections, locales, législatives et présidentielles.
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Ce "plan de transition politique" a été présenté par les principaux représentants de l'opposition islamiste syrienne et les principaux représentants de la rébellion islamiste syrienne. Il est appuyé par trois pays islamistes : la Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar.
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Parmi les participants aux pourparlers durant la réunion, figurent, notamment, les chefs de la diplomatie du Royaume-Uni, de la Turquie, de l'Arabie saoudite, du Qatar, de l'Italie, de l'Union européenne et de la France, tandis que le chef de la diplomatie américaine doit intervenir par visioconférence. L'Allemagne est également représentée.
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Cette réunion (inutile comme toutes les autres ?) devrait permettre l'élaboration d'une position à faire valoir auprès des Etats-Unis, alors qu'il y aurait - selon l'opposition islamiste syrienne - des "rumeurs" sur la conclusion d'un accord russo-américain (on voit mal Poutine et Obama s'accorder sur un accord...).
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En clair, ce que veulent, de façon obsessionnelle, l'opposition islamiste syrienne et la rébellion islamiste syrienne, c'est - encore et toujours - le départ de Bachar al-Assad. Autant dire que ce nouveau "plan de transition politique" n'aboutira pas.
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Risque d’intervention turque et saoudienne en Syrie
Le président syrien Bachar al-Assad estime (ndmg - et sur ce point il a raison) qu'il existe le risque d'une intervention militaire turque et saoudienne en Syrie. "C'est une possibilité que je ne peux pas exclure pour la simple raison que (le président turc Recep Tayyip) Erdogan est quelqu'un d'intolérant, de radical, un pro-Frères musulmans et qui vit le rêve ottoman. Il en est de même pour l'Arabie saoudite".
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Michel Garroté
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La Syrie comme si vous y étiez
Extraits adaptés d'un entretien avec Bouthaina Chaabane, Conseillère politique du président Bachar el-Assad, entretien conduit par Frédéric Pichon, chercheur associé à l'équipe "Monde arabe Méditerranée" de l'université François Rabelais (Tours) : Les réformes ne peuvent venir que de l'intérieur. Nous l'avons vu en Libye et en Irak (lien en bas de page) :
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Bouthaina Chaabane : chaque fois que les médias ou les gouvernements occidentaux ont tenté de promouvoir la démocratie, cela a tourné au fiasco. Les « printemps arabes » se sont mués en « catastrophe arabe ». Quand est venu le tour de la Syrie, les mêmes ont commencé à parler de démocratie, de liberté, de droits de l'homme. Malheureusement, les gens soutenus par l'Occident pour mener à bien cette mission étaient soit des individus qui vivaient hors de Syrie depuis longtemps et qui ignoraient tout du pays, soit des extrémistes auxquels l'idée de démocratie était totalement étrangère. Dans leur esprit, le problème n'était pas politique ; il ne s'agissait pas d'encourager un changement de gouvernement ou de président. En fait, dès le départ, les Occidentaux avaient décidé de briser la Syrie.
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Bouthaina Chaabane : C'est pourquoi la crise actuelle met en cause la sécurité de notre pays et son existence même. Les tentatives occidentales visant à mettre des pays à terre sous prétexte de se débarrasser de personnages comme Saddam Hussein, Kadhafi ou Bachar el-Assad constituent des ingérences inacceptables, illégales au regard du droit international. La Syrie a beaucoup perdu dans ce conflit. Elle a perdu ses meilleurs hommes, elle a perdu ses enfants, ses infrastructures, mais l'Occident, aussi, a beaucoup perdu. L'Occident a perdu sa crédibilité. Franchement, comment prendre au sérieux des gens comme Obama, Cameron ou Hollande ? Tant de mensonges ont circulé : on a vendu à vos opinions publiques une opposition dite « modérée » qui s'est avérée collaborer avec l'État islamique !
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Bouthaina Chaabane : On a fait taire certains journalistes occidentaux parce qu'ils disaient la vérité. Ces pratiques vont à l'encontre de tous les principes du journalisme. En disant cela, je ne me livre pas à une attaque en règle ; mais, puisque vous me donnez l'occasion de m'exprimer, j'essaie juste d'expliquer à vos lecteurs que la situation est bien plus complexe qu'il n'y paraît et qu'ils ont été floués par les médias. Nous n'avons pas compris pourquoi la France a adopté une position si extrême. Ce faisant, elle a sciemment encouragé le terrorisme en Syrie. Pour être franche, je n'y vois qu'une seule explication : le Qatar a acheté une partie du patrimoine français et il exige un retour sur investissement. Cette attitude arrogante s'appuie sur des considérations, hélas, bien éloignées de la démocratie ou des droits de l'homme conclut Bouthaina Chaabane (fins des extraits adaptés d'un entretien avec Bouthaina Chaabane ; lien en bas de page).
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Michel Garroté, 4.1.2016
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http://www.politiqueinternationale.com/revue/read2.php?id_revue=146&id=1347&search=&content=texte
Les secrets divulgués par Poutine à Assad
L’on s’est montré « surpris » du tout récent voyage de Bachar Al-Assad à Moscou, où il a eu un entretien avec Vladimir Poutine. L’on s’était déjà montré « surpris » du récent voyage-éclair de Binyamin Netanyahu à Moscou, où il a eu, lui aussi, un entretien avec Vladimir Poutine. L’on n'a donc visiblement toujours pas compris que la donne a changé, que les Israéliens et les Syriens sont intelligents et que les Européens sont des idiots…
Un analyste russe a tenté de décortiquer le secret de cette visite d’Assad chez Poutine. Le « mystère » du voyage du Président Syrien, c’est qu’il s’agissait pour Poutine de mettre Assad au courant d’une « opération spéciale » (ci-dessous, extraits adaptés ; voir liens vers sources en bas de page).
Un avion de transport Il-62M de la compagnie Rossiya Airlines, immatriculé RA-86539, a décollé le 20 octobre, de l’aéroport Chkalovsky de Moscou et a atterri sur la base aérienne de Hmeymim en Syrie. L’avion avait couplé le transpondeur et l’indicatif de reconnaissance était RFF7093.
Le lendemain, avec le président syrien à bord, le même avion a été repéré avec son transpondeur, sans indication de reconnaissance au-dessus de la mer Caspienne, au nord de l’Iran. Une fois entré dans l’espace aérien de la Russie, l’équipage a couplé le transpondeur pour afficher un indicatif officiel : RFF7094. Très probablement, Assad est retourné en Syrie dans un autre Il-62M, immatriculé RA-86559 qui s’est envolé avec le transpondeur en marche pendant toute la durée du voyage, mais sans l’indicatif.
Poutine aurait dit à Assad, lors de la rencontre à Moscou, que tout Etat qui soutient les rebelles islamistes, d’une manière qui mette en danger les forces russes déployées en Syrie, deviendra une cible légitime pour la Russie, précisant qu’il ne faisait pas seulement allusion à la fourniture des systèmes AA portables (MANPADS).
Il est de notoriété publique que depuis le début des bombardements aériens russes, les rebelles islamistes demandent à leurs commanditaires de leur livrer des missiles AA via la Turquie. La reconnaissance aérienne russe a d’ailleurs trouvé un complexe AA de type OSA-AKM (9K33M3), dans les territoires contrôlés par l’EI.
Le complexe a été aussitôt neutralisé par un bombardier Su-34. Poutine a tenu à préciser que le lancement des 26 missiles de croisière 3M-14T Kaliber, à partir de la mer Caspienne sur des cibles de l’EI en Syrie, sur une distance de 1500 km, avait aussi pour objectif de mettre en garde tous les États impliqués sur le terrain en Syrie, que les prochaines cibles des missiles de croisière russes pourraient être des objectifs militaires de ceux qui fourniront aux terroristes islamistes des armes qui seront utilisées contre le contingent russe de Syrie.
La marine militaire russe possède des missiles de croisière- 3M-14T Kaliber sur des frégates et des sous-marins de la flotte de la mer Noire, et aussi sur des frégates et sous-marins déployés en Méditerranée. Ils possèdent également des missiles de croisière KH-101, avec une portée de 3'000 à 5’000 km, qui sont une variante de l’armement des bombardiers à grand rayon d’action Tu-160 et Tu-95 MS. D’autres bombardiers, les Tu-22 M3, sont armés de missiles de croisière plus petits Kh-555, avec une portée de 2 500 kilomètres.
Obama et ses acolytes se sont précipités pour déclarer qu’ils ne tireront pas sur les avions russes en Syrie, qu’ils ne mèneront pas de frappes sur les bases aériennes russes en Syrie et qu’ils et n’armeront plus les rebelles islamistes « modérés » avec des missiles AA (fin des extraits adaptés ; voir liens vers sources en bas de page).
Michel Garroté
http://mil-avia.livejournal.com/127654.html
http://tass.ru/politika/2364398
http://www.ziaruldegarda.ro/ce-secret-i-a-divulgat-putin-lui-bashar-al-assad-la-moscova/
http://reseauinternational.net/quels-secrets-poutine-a-t-il-divulgue-a-bachar-al-assad-a-moscou/
L’Otan bombe…le torse
Les Etats-membres de l’Otan (actuellement dirigée par un gauchiste norvégien) entament actuellement des manœuvres militaires, les plus importantes menées depuis plus de dix ans, en Méditerranée centrale, au moment où la Russie tente de combattre l’Etat islamique (EI) Proche-Orient. L'instabilité croissante dans certains pays d'Afrique du Nord et de la région proche-orientale a incité l'Otan à réagir face aux menaces présentes « à ses frontières ». Quelque 36’000 soldats, 230 unités, 140 avions et 60 navires seront mobilisés pendant cinq semaines afin de tenter de démontrer que les Alliés seraient en mesure d'intervenir dans ce qu’un Etat-membre de l’Otan a décrit comme « un monde plus sombre et plus dangereux ».
« L'Otan a besoin d'une stratégie pour le Sud, dans cet arc d'instabilité qui va de l'Irak à l'Afrique du Nord », a commenté un autre Etat-membre l'Otan. « Nous devons aussi trouver un accord au sein de l'Alliance sur une approche à long terme à l'égard de la Russie », a-t-il ajouté La Russie -- qui mène d'importantes manœuvres impliquant plus de 45’000 soldats et a procédé à des exercices en Méditerranée avant de s'engager en Syrie -- a été conviée comme « observatrice » de ces exercices de l’Otan. Depuis l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, l'Otan a tenté de « rassurer » les nouveaux membres de l'Alliance, notamment les États baltes, quant à sa capacité de dissuasion face à l’armée russe.
Les 28 pays membres de l’Otan ont créé une série de centres de commandement et de contrôle allant de l'Estonie à la Bulgarie pouvant être appuyés par des forces d'intervention rapide en cas d'agression. L'effondrement de la Libye, l'émergence de l'État islamique (EI) en Syrie et en Irak et l'incompétence de l'Union sont devenus des problèmes auxquels les l’Otan prétend elle-même répondre. « Nous avions l'habitude de traiter la menace orientale et la menace méridionale, mais désormais les deux n'en font plus qu'une », a commenté un responsable de l’Otan qui semble enfin avoir compris que les conflits en Ukraine, en Libye et en Syrie sont liés.
Pour essayer de répondre à cette évolution de la situation, l'Otan a imaginé la création d'une force de pointe de 5’000 hommes capable de se déployer en moins d'une semaine. Les manœuvres, baptisées Trident Juncture, ont pour objectif de vérifier les capacités de cette force disposant d'unités aériennes et maritimes et de forces spéciales afin qu'elle soit totalement opérationnelle en 2016. Les effectifs de Trident Juncture seront intégrés à une force de réaction rapide composée de 40’000 hommes. L’Otan ne précise pas comment ces effectifs seront répartis dans le contre des conflits en Ukraine, en Syrie et en Lybie.
Vous avez dit Libye ?
A propos de l’homme qui a créé les chaos islamique en Libye, je veux parler de Sarkozy, Silvio Berlusconi raconte, dans un livre-entretien avec le journaliste britannique Alan Friedman, ‘My Way’, paru en français le jeudi 15 octobre 2015 : « Sarkozy sortait d'une des antichambres où nous étions rassemblés avant l'ouverture formelle de la réunion. Bien que nous ayons des désaccords, je m'approche de lui pour le saluer et je dis 'Ciao Nicola !' de façon très amicale, comme je le suis toujours. Je lui tends la main. Il me fixe et refuse de me serrer la main. Mais ce n'est pas tout. Il repousse brutalement mon bras. Je me suis dit : 'Quel crétin', Quelle arrogance !’ ».
« Personne ne s'est jamais comporté comme ça avec moi. Sarkozy est la seule personne qui ait jamais refusé de me serrer la main ». Autre scène, en ouverture du sommet du G8 dans un restaurant de Deauville au printemps 201 : « Tous les chefs d'Etat eurent droit aux bises et à l'accolade de Carla, sauf Silvio Berlusconi ».
Quelques lignes plus loin, Silvio Berlusconi décrit une autre anecdote : Sarkozy était d'une hostilité incroyable envers moi, et pour plusieurs raisons. L'une d'elles était qu'il était obsédé par l'argent, il enviait ceux qui étaient fortunés. Il était jaloux, parce que j'étais riche et lui non ». Berlusconi ne peut s'empêcher de rire au souvenir de sa rencontre avec Sarkozy peu après son mariage avec Carla Bruni : « Après son mariage, Sarkozy me dit : Tu vois Silvio, maintenant, je suis riche. Comme toi ». Sarkozy réélu président en 2017, ça promettrait…
L’exception hongroise
« L'islam n'a jamais appartenu à l'Europe, il s'y est invité ». Ce sont les propos du Premier ministre hongrois Viktor Orban : « L'islam n'a jamais appartenu à l'Europe, il s'y est invité. Spirituellement, l'islam n'appartient pas à l'Europe. C'est un corpus de règles d'un autre monde. Nous, en Hongrie, décidons nous-mêmes si nous en voulons ou pas. Nous n'en voulons pas ». Avec 1’5 millions de « migrants syriens », rien qu’en Allemagne, prévu pour la période de janvier à décembre 2015, on peut comprendre la réaction de Viktor Orban.
A propos de la Syrie
Sous la plume d'Alexandre Latsa : « Après deux semaines d’engagement, il est possible de tirer un premier bilan de l’opération militaire russe en Syrie. Il y a tout d'abord l'intensité croissante des frappes de l'aviation russe. Si lors des premiers jours le nombre de frappes russes était inférieur à une dizaine, l'armée russe a exécuté 64 sorties samedi 10 octobre et les estimations militaires sérieuses estiment que l'aviation russe devrait pouvoir augmenter la cadence pour atteindre des moyennes de 100 à 150 frappes par jour, avec des pointes à 200 ou 250 en cas d'extrême urgence. C'est autant, voir plus que le volume de sorties de l'armée syrienne, mais l'aviation russe est dotée d'équipements plus modernes favorisant largement un appui précis et efficace à l'infanterie, ce qui n'était pas ou peu le cas jusque-là ».
Alexandre Latsa ajoute : « La grande offensive au sol lancée par l'armée syrienne, appuyée par la chasse russe, semble se concentrer sur certains fronts bien précis. Le nord de Homs tout d'abord, où une vaste poche territoriale est aux mains des rebelles (voir ici), poche traversée par l'autoroute allant de Damas à la côte et qui devrait faciliter le transfert d'équipements militaires lourds de la capitale vers le nord. Cela est d'autant plus crucial que l'Etat syrien fait à ce jour face à deux fronts particulièrement sensibles dans la région », conclut Alexandre Latsa.
Michel Garroté, 19 octobre 2015
Syrie – La « pax putinica » qu’ils disent
L’information est confirmée : deux hauts gradés des Gardiens de la Révolution islamique iranienne (GRI) ont été tués en Syrie. Le général de division Farshad Hasounizadeh et le brigadier-général Hamid Mokhtarband ont été tués en combattant les terrorises du groupe Etat islamique (EI). Un autre commandant des GRI, le général Hossein Hamadani, avait déjà été tué la semaine dernière près d'Alep.
L'Iran avait, en effet, récemment envoyé - et continue d’envoyer - ses soldats en Syrie pour participer, avec le Hezbollah libanais, à l’offensive des forces de Bachar al Assad contre les terroristes de tout poil dans la province d'Alep, dans le nord-ouest du pays, offensive menée avec l'appui de frappes aériennes russes. Et sur ce front-là, Poutine a engrangé les victoires.
En clair, ce qu’Obama refuse de faire depuis quatre ans, Poutine l’a fait - et continue de le faire - en quelques jours. Ce qui, bien entendu, déplaît profondément aux médias européens, qui, du coup, intensifient leur ridicule propagande antirusse de manière exponentielle.
J’ai déjà eu l’occasion d’écrire qu’une alliance occidentale avec tel ou tel pays musulman, fut-il laïc, ne peut être qu’une alliance tactique régionale à court terme, éventuellement renouvelable ; mais en aucun cas une alliance stratégique globale à long terme. Si, en ce moment, les pays occidentaux ont intérêt à « ménager » le clan alaouite, et donc chiite, de Bachar al Assad, c’est uniquement pour contenir - et si possible repousser - l’Etat Islamique sunnite (EI).
Cet Etat Islamique qui, en douce, est notamment soutenu par Obama, la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar. Il ne s’agit donc aucunement, ici, de conclure une alliance stratégique globale à long terme avec Bachar al Assad, l’Iran et le Hezbollah. Il s’agit uniquement de « ménager », pour l’instant, Bachar al Assad et de laisser faire, pour l’instant, Poutine en Syrie.
Evelyne Joslain, sur Les 4Vérités, écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Cette expression de « pax putinica », trouvaille du journaliste Arthur Herman, serait amusante si elle ne décrivait pas une réalité inquiétante : l’abandon gratuit de 60 années de « pax americana » au Moyen-Orient par Obama. Comment ce « remplacement » de l’arbitre indispensable au Moyen-Orient s’est-il opéré ?
Evelyne Joslain : 2011 : Le mal nommé « printemps arabe » trouble 4 régimes autoritaires qui ne présentaient aucune menace pour les Occidentaux, mais Obama décide de « diriger de l’arrière » l’absurde « croisade humanitaire » de BHL, Sarkozy et Cameron. En Égypte, il favorise les Frères musulmans, mais « délègue » la question syrienne à Poutine, car il ne peut pas demander aux Iraniens chiites de cesser leurs livraisons d’armes à Assad sans compromettre son projet-phare : un traité permettant aux ayatollahs de rentrer dans le concert des nations.
Evelyne Joslain : 2013 : Assad franchit la « ligne rouge » fixée par Obama en liquidant ses opposants en masse avec des armes chimiques. Obama se dit vertueusement « indigné ». 2014 : Poutine menace les États-Unis contre toute tentative de changement de régime en Syrie tandis que l’État islamique (qui, dans les faits, est plus un État que la Syrie) vise Damas. Été 2015 : Poutine achemine désormais ouvertement vers la Syrie du matériel militaire sophistiqué, 2’000 soldats de la 810e Brigade de marine (troupes d’élite) et 1’700 « experts ».
Evelyne Joslain : Chassée du Moyen-Orient en 1970 par l’Égypte, la Russie reprend pied dans la région. Fin septembre, au lendemain de sa visite à Obama et de son discours à l’ONU, avec un cinglant mépris des déclarations faites (« s’unir pour combattre l’État islamique »), Poutine ordonne une attaque surprise, non contre l’EI, mais contre les opposants d’Assad. Obama fait, de nouveau, l’indigné. Toutefois, le désaccord entre Poutine et Obama n’est peut-être que virtuel. Tous deux semblent favoriser l’une des deux grandes sectes, tout en ménageant l’autre, Obama par idéologie pacifiste sans frontières, Poutine par ambition géopolitique. Tous deux abritent un ressentiment personnel contre l’Occident. Tous deux n’ont pas forcément intérêt à éliminer l’État islamique, pas davantage qu’Assad.
Evelyne Joslain : Nul ne sait s’il existe des musulmans « modérés » dans la région, ni qui sont vraiment les opposants d’Assad. Nul ne sait non plus jusqu’où ira Poutine, mais on peut affirmer sans trop se tromper qu’il est désormais l’interlocuteur incontournable au Moyen-Orient, comme l’ont compris les pétromonarchies, Israël, la Turquie et même la Grèce de Tsipras. Poutine a démontré que la solution pour ramener un semblant d’ordre au Moyen-Orient est bien militaire. Et il a compris, lui, ce que les Occidentaux naïfs ne veulent toujours pas admettre : que le but de l’« organisateur de communauté » Obama (agitateur professionnel) a toujours été de créer le chaos, et non d’y remédier.
Evelyne Joslain : Ceux qui, chez nous, nourrissent l’illusion romantique d’un Axe Paris-Berlin-Moscou devront attendre, même s’il y a des signes encourageants pour eux, comme les simulations d’une invasion de l’Europe auxquelles se livre l’appareil militaire russe. Mais, pour l’heure, Poutine est prioritairement engagé dans un autre axe, Russie-Syrie-Iran, qu’il est difficile de ne pas voir comme un nouvel « axe du mal ». Poutine va vite et lui ne dirige pas « de l’arrière ». Il lui reste 15 mois pour risquer une avancée de plus en Ukraine et dans l’Arctique. Sans parler de l’impensable : l’imperium sur tout le Golfe persique, donc sur les ressources pétrolières dont l’Amérique pourrait se passer, mais pas nous.
Evelyne Joslain : On peut admirer qu’avec une si mauvaise donne (la baisse du prix des matières premières, donc du gaz russe, le rouble au plus bas, des sanctions qui l’affaiblissent…), Poutine ait pu parvenir à dominer la situation au Moyen-Orient. On peut admirer le culot, la détermination, la vision et l’intelligence du prédateur. Mais si fort soit-il, rien de tout cela n’eût été possible sans la couardise des Européens et le double jeu d’Obama. Avons-nous un nouveau policier du monde ? En tout cas, ce ne sera pas sans contrepartie, conclut Evelyne Joslain (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
De son côté, Mgr Hindo, archevêque syro-catholique d’Hassaké, au nord-est de la Syrie, salue l'efficacité des offensives russes, dans La Croix (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : L’intervention de Moscou est positive, parce qu’elle cible réellement Daech, et la milice est en train de fuir. Ils ont fui la région d’Hassaké, dans l’empressement, à bord d’environ 20 véhicules. Ils ont dû abandonner 20 autres voitures sur place. C’est le signe qu’ils ont vraiment dû battre en retraite.
Mgr Hindo : L’archevêque critique en revanche les opérations de Washington, qui seraient juste pour amuser la galerie et qui laisseraient les terroristes agir librement. Les Américains ne bombarderaient pas les milices djihadistes, mais le gouvernement syrien. Il ne s’agit pas d’être pour ou contre le gouvernement. Mais les gens d’ici n’ont jamais cru dans les attaques américaines. Seuls les Kurdes ont réellement combattu sur le terrain, mais pour tenir leurs positions. Il affirme que les États-Unis, la France et le Royaume-Uni ne parlent que d’attaquer Daech, mais pas le Front al-Nosra et les autres milices islamistes liées à Al-Qaida.
Mgr Hindo : La nuit du 23 février, quand Daech a attaqué, les avions américains ont survolé la zone pendant longtemps, sans intervenir. Ensuite, pendant trois jours, nous n’avons plus vu d’avions. Ils ont laissé le champ libre aux militants. Ceci nous fait penser que, d’une certaine manière, les djihadistes ont été aidés par l’attitude ambiguë des Américains.
Mgr Hindo accuse les gouvernements occidentaux de travailler pour diviser la Syrie et l’Irak, afin de mettre la main sur les richesses de ces pays. Il existe également un enjeu concernant les pipelines que l’Arabie saoudite et le Qatar voudraient construire vers l’Occident. Damas n’a pas accepté leur passage sur son territoire, et voilà le résultat, conclut Mgr Hindo (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
De son côté, Christian de Moliner, sur Boulevard Voltaire, écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : L’intervention russe a sans doute sauvé le président el-Assad. Si M. Poutine n’avait pas lancé ses frappes, l’armée syrienne se serait probablement désagrégée et, en six mois, Damas serait tombée aux mains des islamistes présentés comme modérés (tout est vraiment relatif. Ils sont modérés par rapport à l’État islamique mais restent furieusement islamistes) et qui sont devenus les alliés des Américains par l’intermédiaire des Saoudiens.
Christian de Moliner : Mais la situation reste chaotique. El-Assad, malgré la contre-offensive lancée par ses troupes, n’a aucune perspective de victoire. Il faudrait, pour qu’il l’emporte, un renfort de 100’000 hommes iraniens ou russes, renfort qu’il n’aura jamais. Téhéran a envoyé 20’000 combattants (libanais, gardiens de la révolution, chiites irakiens) et ne peut pas faire plus, même en raclant les fonds de tiroirs. Les Russes sont bien trop avisés pour envoyer des forces terrestres. Leur échec et celui des Américains en Afghanistan montrent à l’envi qu’il est facile de commencer une guerre en pays musulman et impossible de la gagner.
Christian de Moliner : Le but de la coalition soutenue par M. Poutine est modeste. Il ne vise que la sécurisation de la façade méditerranéenne. Il faudra pour cela chasser les islamistes « modérés » des zones qu’ils contrôlent. Et cette bataille, féroce, est loin d’être gagnée malgré l’appui des avions russes. L’intervention de Moscou a soudé les diverses factions qui se faisaient, en l’absence de danger, une guerre larvée mais qui, désormais, présentent un front uni face à leur nouvel adversaire, conclut Christian de Moliner (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
Michel Garroté, 14 ocotobre 2015
http://www.les4verites.com/international/la-syrie-et-la-pax-putinica
http://www.bvoltaire.fr/christiandemoliner/apres-lintervention-russe-avenir-syrie,212130
Syrie – Poutine joue aux échecs. Les autres feignent l’idiotie
Dans le Figaro Vox, André Bercoff écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : C'est ce vide quasiment abyssal qui semble régner sur la politique étrangère de la France, et ce, depuis quelques années. Sarkozy voulut se débarrasser de Kadhafi au nom de la liberté et des droits de l'homme, mais ce faisant, il a complètement ignoré le fait qu'une dictature peut en cacher une autre, pire encore. Résultat des courses : la voie des grandes migrations fut ouverte avec fracas. Le choix, dramatique mais incontournable, oppose les dictatures militaires à l'enrégimentation de l'islamisme radical, dont l'ambition est précisément et irréversiblement la mainmise implacable, policière et punitive sur la totalité de la vie quotidienne.
André Bercoff : Voilà pourquoi Poutine est aujourd'hui au centre du jeu: il joue aux échecs en calculant à six coups d'avance, alors que nous jouons à la belote en brandissant bruyamment nos sains principes. Un examen à peu près lucide du paysage moyen-oriental aurait montré à nos gouvernants que le rapport de force modèle plus que jamais les situations et qu'entre deux maux, il faut continuer de choisir le moindre (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
Sur Boulevard Voltaire, Dominique Jamet écrit notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : « Les mois puis les années passant, une première évidence a fini par pénétrer des dirigeants politiques qui semblaient postuler pour le titre des plus bêtes du monde : Bachar n’était ni aussi seul à l’intérieur de son propre pays, ni aussi isolé par rapport au reste du monde qu’ils l’avaient cru et proclamé. Une deuxième, encore plus importante, s’est imposée depuis plus d’un an. Ce n’est pas Bachar mais bien Daech qui met en danger la paix de la région, du Moyen-Orient et du monde, et c’est encore Daech dont les crimes surpassent encore en horreur ceux du régime syrien » (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
De son côté, le site Aleteia publie un entretien avec Maria Saadeh, chrétienne, députée au Parlement syrien (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) :
Aleteia : Pourquoi avoir choisi soudain de devenir députée du parlement Syrien alors que rien ne vous y destinait ?
Maria Saadeh, architecte, chrétienne, députée au Parlement syrien : En tant que citoyenne et femme syrienne j’estime que vos gouvernements n’ont pas le droit de sélectionner qui peut représenter ou non la Syrie. Pour cette raison j’ai estimé qu’il fallait que je rentre au parlement pour avoir une tribune légale afin de parler au nom du peuple syrien et refléter au mieux la réalité et pour transmettre un message à l’occident : « vous avez commis une grande erreur, en détruisant notre état, notre histoire et notre patrimoine ».
Que répondez-vous à ceux qui vous accusent d’être élue au service d’un régime dictatorial ?
Ce sont les occidentaux qui se permettent de juger que notre société est sous une dictature. Les Syriens quant à eux, les premiers concernés, sont loin de penser cela. Ce n’est pas du droit des occidentaux de proclamer que c’est un régime dictatorial. Seuls nous, Syriens, vivons au quotidien dans la société syrienne, il n’y a que nous qui sommes en mesure de juger le gouvernement syrien. Il n’y a que nous qui avons connu la situation avant la guerre et maintenant et qui pouvons donner notre avis sur la situation politique du pays. La Syrie est le berceau des civilisations, de l’Histoire et des religions, c’est une terre qui appartient à l’humanité toute entière et aujourd’hui nous devons faire face à la monstruosité. Sous le prétexte de s’attaquer au régime, vos gouvernements détruisent le patrimoine de l’humanité.
Au début de la crise Syrienne, qui manifestait pour réclamer une société plus « démocratique » ?
Laissez-moi vous donner un exemple, et vous jugerez. Comme architecte j’avais un chantier et des ouvriers sous ma responsabilité. Au début de la crise et des manifestations, mes ouvriers avaient abandonnés leur poste. J’ai finalement compris que les islamistes déjà présents, les payaient pour manifester : pour une heure ils touchaient 500 livres syriennes tandis que les organisateurs eux, recevaient 1000 ou 2000 livres syriennes. Cela représente plus d’une journée de travail ! Vous imaginez donc quel succès cela a rencontré.
Quelle est votre position face à l’engagement de la Russie dans votre pays ?
Nous avons une grande relation historique avec l’occident, mais aujourd’hui le peuple syrien ne se fait plus d’illusion quant à l’attitude extrêmement agressive de l’occident. Dans le même temps, la Syrie ne peut pas affronter seule cet ennemi redoutable qu’est l’Etat islamique, elle doit trouver de nouveaux partenaires, la Russie en est un. Tous les états qui sont volontaires pour participer à l’effort de guerre sont les bienvenus.
Un gouvernement de transition peut-il aider à la réconciliation ou bien faut-il que Bashar Al-Assad reste coûte que coûte à la tête de l’Etat syrien ?
Bashar Al-Assad ne doit quitter ses responsabilités qu’après une décision populaire du peuple syrien et de lui seul. Son départ, si départ il y a, ne doit en aucun cas être le résultat de pressions issues de l’extérieur de la Syrie (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
Michel Garroté, 29 septembre 2015
Syrie – La donne a-t-elle enfin changé ?
Depuis le début de cette semaine, les différents scénarios concernant le conflit en Syrie se bousculent. Poutine se prépare à des frappes aériennes unilatérales contre l'Etat Islamique en Syrie si les Etats-Unis rejettent sa proposition d'unir leurs forces. En outre, l'armée russe s'apprête à intervenir directement - au sol - en Syrie. La Russie a déjà depuis longtemps une base dans le port syrien de Tartous et elle fournit des armes à l'armée syrienne, mais désormais, c'est l'armée russe elle-même qui intervient. Dans ce nouveau contexte, l’armée israélienne est prête à renseigner la Russie sur les cibles djihadistes en Syrie. Du reste, lundi 21 septembre 2015, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président russe Vladimir Poutine avaient annoncé que leurs armées allaient coordonner leurs opérations militaires en Syrie afin d’éviter tout incident.
La chancelière allemande Angela Merkel a déclaré, jeudi 24 septembre 2015, qu’il faut parler avec le président syrien Bachar el-Assad pour résoudre le conflit d’une Syrie déchirée. De son côté, le ministre des Affaires étrangères autrichien a déclaré que l'Occident devrait impliquer le président syrien Bachar al-Assad dans la lutte contre l’Etat islamique. A propos de troupes au sol, soulignons que des Français, à titre privé et en conformité avec la loi, combattent déjà aux côtés des Chrétiens et des Kurdes, en Syrie aussi bien qu’en Irak, sauvant ainsi l’honneur de l’Occident qui n’a rien fait pour protéger les non-musulmans dans les régions contrôlées par l’Etat islamique (voir les trois liens vers sources en bas de page).
A ce propos, voici des extraits adaptés de la lettre de Mgr Jeanbart, archevêque catholique de la ville syrienne d’Alep : « Le diocèse d’Alep est l’un des diocèses les plus anciens de l’Eglise Universelle, il existait déjà au troisième siècle, en 325 son Archevêque était présent au Concile de Nicée. Aujourd’hui et au moment où j’écris ces lignes, des bombes tombent, comme de la pluie, sur les quartiers résidentiels de la ville. Sans travail, sans ressources, sans sécurité, sans eau, sans électricité, privés de toute pitié espérée et du secours attendu en vain de l’Occident Chrétiens. Les gouvernements occidentaux semblent, les uns insouciants et les autres injustes, pour ne pas dire pervertis ».
De son côté, Mgr Antoine Audo, évêque chaldéen d’Alep, confie à l’AED la dramatique situation que vivent actuellement les chrétiens à Alep (extraits adaptés) : « Les riches sont partis, la classe moyenne est devenue pauvre, et les pauvres sont devenus misérables. Plus de 80% de la population est au chômage. Une partie de la ville est contrôlée par le gouvernement, tandis que le reste est aux mains de groupes fondamentalistes qui attaquent sans cesse la zone contrôlée par l’armée, où réside la majorité des chrétiens. La situation à Alep est l’une des plus dramatiques qui soit, parce que nous nous trouvons à seulement 40 kilomètres de la frontière avec la Turquie, qui continue d’armer et d’accueillir les fondamentalistes » (ndmg - en effet, le régime islamique turc soutient l’Etat islamique et massacre les Kurdes).
Mgr Antoine Audo ajoute : « Cela fait des années que nous attendons une solution politique, un peu d’espoir que la guerre puisse se terminer. Mais au niveau international, il semble qu’il y ait la volonté de faire continuer la guerre, comme cela est arrivé en Libye. Une détermination liée aux intérêts stratégiques au Proche-Orient et, aux intérêts liés au commerce des armes », conclut Mgr Antoine Audo (ndmg - en effet, Obama ne fait rien, de vraiment concret, contre l’Etat islamique, en Syrie et en Irak ; et l’Union européenne ne prend aucune mesure sérieuse contre les flux migratoires musulmans, en provenance notamment de la Libye).
Michel Garroté, 24 septembre 2015
http://www.christianophobie.fr/communique/irak-des-combattants-volontaires-francais-aux-cotes-de-dwekh-nawsha#.VgPQ0peb7-Y
https://www.facebook.com/groups/449715791860712/
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Sur le retour du chemin de Damas
Michel Garroté -- Dans l’actuel climat de confusion générale, notamment après la visite de quatre parlementaires français en Syrie, il n’est peut-être pas inutile de rappeler quelques points stratégiques. Concernant Bachar al-Assad, l’opinion publique a de la peine à admettre que dans le climat actuel, le dictateur syrien est certes dangereux, mais moins dangereux que les islamistes. Israël surveille de très près les activités du régime Assad. Il y a quelques années, Israël a préventivement bombardé un site nucléaire syrien en construction.
Avec les islamistes, la situation est différente. Même Israël, avec ses puissants moyens de surveillance et de prévention, n’est pas en mesure de contrôler tout ce que fait l’Etat Islamique (EI) en Irak et en Syrie. Pour les Chrétiens en terre d’islam, les dictatures arabes laïques, pour la plupart d’entre elles, les ont laissé vivre tranquilles. Avec l’Etat Islamique, c’est l’inverse : les Chrétiens sont, au mieux, réduits à des dhimmis (citoyens de seconde zone, opprimés et soumis à l’islam) ; et, au pire, déportés ou exterminés. Le régime syrien de Bachar al-Assad n’est pas notre allié stratégique à long terme. Il est seulement et provisoirement un partenaire tactique à court terme.
A ce propos et de façon plus générale, il faut cesser d’appréhender, d’une part, l’islam en terre d’islam ; et d’autre part, l’islam en Occident. Car il s’agit, dans les deux cas, du même islam et du même coran. Le discours islamophile ne changera rien à cette réalité. En Occident, l’islam doit respecter l’ordre constitutionnel et laïc. Les zones de non-droit sont à remettre au pas, par la force légale et par le droit. Les Eglises d’Occident doivent exiger la réciprocité de la part de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI) : si vraiment les musulmans ont droit à des mosquées en occident (sujet à débattre), alors les chrétiens d’Orient ont droit à des églises en terre d’islam (qui fut terre judéo-chrétienne bien avant de devenir terre dite d’islam).
L’alliance de l’Occident avec tel ou tel pays musulman, cette alliance doit être considérée comme une alliance tactique à court terme, même si elle est renouvelable pendant un certain laps de temps. L’Occident doit admettre, une bonne fois pour toutes, que l’islam est imprévisible ; et que par conséquent, la stratégie globale à moyen et long terme de l’Occident, face à l’islam, reste, essentiellement, un ensemble de tactiques à court terme, modifiables à tout instant. L’Occident a tout intérêt à maintenir un équilibre des forces entre islam sunnite et islam chiite. Et si les deux branches de l’islam, la branche sunnite et la branche chiite sont en guerre, l’Occident doit apprendre à en tirer profit. Car le temps que ces deux branches consacrent à se combattre signifie un temps de répit pour l’Occident.
Une délégation de l’Organisation des Nations Unies s'est rendue, lundi 2 mars 2015, à Alep, en Syrie, en dépit du rejet - par l'opposition islamique - d'un cessez-le-feu partiel dans cette ville du nord de la Syrie, cessez-le-feu proposé par le médiateur de l'ONU, Staffan de Mistura. L'émissaire de l'ONU veut finaliser un accord sur un cessez-le-feu à Alep, divisée entre milices islamiques et forces gouvernementales, pour permettre l'entrée d'aide humanitaire. L'ONU espère ensuite étendre ce cessez-le-feu à d'autres zones et encourager ainsi une trêve, puis un règlement politique du conflit en Syrie, qui a fait plus de 220’000 morts depuis mars 2011 et a poussé à la fuite plus de la moitié de la population du pays. Le rejet - par l'opposition islamique - du cessez-le-feu, risque de compliquer les choses.
François Jourdier, sur Boulevard Voltaire, écrit notamment (voir lien vers source en bas de page) : Ce qui est intéressant, c’est la versatilité de nos dirigeants : le président Assad avait assisté au défilé du 14 juillet 2008 sur les Champs-Élysées. Il est maintenant voué aux gémonies. Il y a une chose sur laquelle on insiste peu, dans le communiqué de presse de Jacques Myard sur la visite que les quatre députés « gugusses » ont faite à Bachar el-Assad : c’est le soutien que le patriarche catholique Grégorius III et le patriarche grec orthodoxe, Ignace IV Hazim, apportent à la politique du gouvernement syrien.
François Jourdier : La France est, depuis des siècles, investie de la protection des chrétiens d’Orient et s’est longtemps acquittée de cette responsabilité (Note de Michel Garroté - Sauf que la République laïque française, de 1975 à 1990, a laissé les Chrétiens du Liban se faire massacrer…). Le combat que nous menons depuis trois ans contre le président Assad y va à l’encontre, car qui peut croire qu’un pouvoir islamique même modéré (s’il y en a) ne réduirait pas, au mieux, les chrétiens en dhimmitude et plus probablement les contraindrait au départ.
François Jourdier : L’exemple de l’Égypte débarrassée des Frères musulmans est éloquent. Il a fallu l’arrivée au pouvoir du maréchal Al-Sissi pour rassurer les coptes qu’on avait commencé à persécuter et dont on brûlait les églises. Ce qui est intéressant, c’est la versatilité de nos dirigeants : le président Assad avait assisté au défilé du 14 juillet 2008 sur les Champs-Élysées. Il est maintenant voué aux gémonies.
François Jourdier : De même, le colonel Kadhafi avait pu planter sa tente bédouine en décembre 2007 sur les gazons de l’hôtel Marigny avant d’être reçu par le président Sarkozy et d’être sauvagement assassiné en 2011. Qui ne le regrette, maintenant que la Libye est livrée au chaos, que les chrétiens y sont martyrisés, que les islamistes prolifèrent au Sahel et que les immigrants envahissent l’Europe depuis les côtes libyennes ?, conclut François Jourdier, sur Boulevard Voltaire (voir lien vers source en bas de page).
On peut lire sur Les 4 vérités (voir lien vers source en bas de page), que le député français Jacques Myard, de retour de Syrie, a notamment communiqué : J’ai effectué avec trois parlementaires de l’Assemblée Nationale du groupe amitié France-Syrie, un voyage à Damas du 23 au 26 février. Ce voyage a été organisé avec le concours d’un certain nombre de personnes connaissant bien le proche orient et ayant des cabinets de consultants pour les entreprises françaises au Liban et en Syrie. Ce voyage a suscité la colère des plus hautes autorités de l’Etat. Si le sujet n’était pas sérieux, je pourrais en rire. En effet, la diplomatie n’est pas l’art de parler qu’avec ses amis mais d’essayer de trouver des solutions politiques à une guerre civile qui a déjà fait plus de 200’000 morts. Camper sur des postures dites morales, la main sur le cœur et refuser d’agir en prenant en compte les réalités est 100 fois pire qu’une faute morale. C’est une faute politique géostratégique qui ne peut aboutir qu’à la continuité de la guerre civile, avec son cortège d’horreurs.
Jacques Myard : Nous avons rencontré sur place du côté des autorités gouvernementales, le Président du Parlement, Jihad Allaham, le ministre des Affaires étrangères, Walid Moallem, le Vice- Ministre des Affaires Etrangères, le docteur Ayman SOUSSAN francophone, ainsi que l’Ambassadeur de Syrie à Beyrouth et nous avons été reçus à dîner par le grand Mufti, Ahmad Badr Al Din Hassoun, entouré du patriarche catholique Grégorius III et du patriarche Grec Orthodoxe, Ignace IV Hazim. Les deux patriarches chrétiens nous ont fait part de leur soutien à la politique du gouvernement. Nous avons rencontré également Sœur Agnès Mariam de la Croix, de manière inopinée, dans le hall de l’hôtel. Nous avons visité un hôpital généraliste où nous avons malheureusement vu des fillettes entre la vie et la mort. Il nous a été indiqué qu’il y avait un embargo sur les médicaments et les pièces de remplacement des équipements médicaux. Ce n’est pas acceptable.
Jacques Myard : Nous avons visité une ancienne école qui accueille 40 familles de réfugiés, rendu visite au centre sanitaire du Croissant Rouge où nous avons pu obtenir des informations intéressantes sur la situation sanitaire, rencontré la responsable de la Croix Rouge, Mariam Gasser, visité le Lycée Charles de Gaulle où malgré l’adversité, 250 enfants franco-syriens, continuent à apprendre le français dans des conditions périlleuses, deux roquettes étant tombées sur cet établissement sans faire heureusement de morts. Le lycée ne reçoit plus de subsides du gouvernement français : c’est inadmissible. De plus, à l’hôtel où nous étions nous avons rencontré une délégation américaine dirigée par l’ex-Attorney-General à la Cour Suprême, Ramzy Clark ce qui prouve qu’il existe bien des contacts certes indirects avec les Américains. De l’ensemble de ces prises de contact et aussi des entretiens que nous avons eus avec des responsables libanais à Beyrouth, très inquiets de la situation en Syrie, je retiens les éléments suivants à l’exclusion de notre conversation avec Bachar Al Assad dont je rendrai compte personnellement par écrit au Président de la République.
Jacques Myard : Il n’existe pas à ce stade de possibilités de victoire militaire sur le terrain d’un parti ou de l’autre. Le gouvernement tient une grande partie du pays (60 % ? ) mais il existe toujours des zones d’insécurité y compris dans le voisinage de Damas. Les terroristes syriens seraient entre 50’000 et 80’000 selon diverses sources. L’ensemble de nos interlocuteurs nous ont clairement indiqué que si la France continue à exiger le départ de Bachar au motif qu’il est infréquentable, la Syrie éclatera car il est le seul à pouvoir maintenir l’unité de l’armée, le Liban sera balayé, le chaos s’installera sur tout le Proche et Moyen Orient.
Jacques Myard : Seul un règlement politique peut ramener la paix. A ce titre, il convient de relever : que Damas a donné son accord pour un cessez le feu de 5 semaines au représentant de Benkimoun. Stéphane de Mistoura négocie avec 5 groupes d’insurgés à Alep ; qu’il y a eu récemment des négociations directes entre le gouvernement de Damas et des opposants à Moscou ; que le gouvernement a mis en place un comité de conciliation nationale avec des députés Kurdes qui « déclarent leur volonté de rester dans la patrie syrienne ». L’amnistie a été accordée à des terroristes repentis qui ont déposé les armes. Il est évident qu’au-delà des postures qui ne font en rien avancer la sortie du conflit, il faut des initiatives pour avancer à petits pas. Le point n’est pas de savoir si on aime ou pas Bachar, il est un élément du conflit incontournable. Exiger son départ, c’est à coup sûr, poursuivre une guerre civile pendant des années.
Jacques Myard : Droits de l’Homme : j’avais avec moi une dépêche AFP mentionnant que des défenseurs de la liberté d’expression, membres du centre syrien pour les médias, étaient emprisonnés. J’ai donné cette liste au Vice-Ministre des Affaires Etrangères en disant qu’il serait bien de faire un geste. Sur ce point précis, j’en ai personnellement parlé à Bachar Al-Assad lors de notre entretien. De retour à Beyrouth, mercredi soir dans la nuit, j’ai appris qu’Ulaï Hussein avait été libéré sous caution. Je n’ai pas la prétention de dire que c’est à la suite de mon intervention mais je le constate.
Jacques Myard : La France doit urgemment changer de politique en Syrie. Certains experts dénoncent l’incohérence de la France dans la lutte contre les terroristes. Nous luttons contre eux au Sahel, au Mali, au Nord Nigéria, en Irak, mais nous avons une politique confuse et brouillée en Syrie. Je rappelle qu’à l’Assemblée Nationale, Alain Marsaud a montré aux députés des fusils Famas, livrés à l’opposition dite modérée et qui se sont retrouvés dans les mains d’Al Nosra. Tous nos interlocuteurs, au-delà du cercle gouvernemental, ont dénoncé le double langage et la complicité de l’Arabie Saoudite, du Qatar et de la Turquie, ce dernier pays commerce avec Daech et lui permet ainsi d’avoir des subsides financiers importants. Un dernier point : nous avons appris qu’un gouvernement arabo-musulman emblématique devrait établir prochainement des relations diplomatiques avec Damas, conclut Jacques Myard sur Les 4 vérités (voir lien vers source en bas de page).
Michel Garroté
Sources :
http://www.les4verites.com/islam/jacques-myard-de-retour-de-damas