Christophe Blocher au cinéma: un scandale?

Uli Windisch
Rédacteur en chef

Plus on parle de Blocher plus on rend service à l’UDC et à son créateur.
Ou quand la haine idéologique et la misère de l’analyse politique de la gauche offrent un appui inespéré à l’UDC, que pourtant cette même gauche aimerait tant annihiler.
La gauche ferait mieux de tenter, enfin, d’essayer de comprendre pourquoi l’UDC est devenue le premier parti de Suisse et a ravi une grande partie de l’électorat populaire à la gauche, plutôt que de s’indigner de manière d’ailleurs tout à fait anti-démocratique…

 

Plus on parle de Blocher plus on rend service à l’UDC et à son créateur.

La gauche a une telle aversion pour ce personnage politique suisse majeur- qu’on l’apprécie ou non- qu’elle ne peut s’empêcher de s’en prendre à lui à chaque occasion. Le film sur Blocher, de Jean-Stéphane Bron : L’Expérience Blocher, en est une nouvelle occasion, et cela donc avant même la sortie du film mardi 13 août au Festival du film de Locarno !

Ou quand la haine idéologique et la misère de l’analyse politique de la gauche offrent un appui inespéré à l’UDC, que pourtant cette même gauche aimerait tant annihiler.

La gauche ferait mieux de tenter, enfin, d’essayer de comprendre pourquoi l’UDC est devenue le premier parti de Suisse et a ravi une grande partie de l’électorat populaire à la gauche, plutôt que de s’indigner de manière d’ailleurs tout à fait anti-démocratique de la participation de la Confédération au financement de ce film.

La mauvaise foi des protestations montre que la gauche est vraiment à la peine et que les intellectuels de gauche qui ont fait autrefois le succès d’une certaine gauche en Europe deviennent une rareté, dans la mesure où ils  existent encore. Je cherche vainement des noms... On a même parfois l’impression que la réflexion politique de la gauche ressemble de plus en plus à une espèce de pensée réflexe mue par un vernis idéologique caricatural sur fond d’inculture généralisée.

Telle conseillère nationale socialiste se scandalise de manière véhémente de cette participation financière de la Confédération mais oublie un même soutien apporté  précédemment à un film sur Jean Ziegler, etc. La gauche a tous les droits. Elle croit en plus être seule dans le vrai. Et veut constamment donner des leçons de morale à tout un chacun, jusqu’à prôner parfois, elle-même le fameux « Berufsverbot ». J’en sais personnellement quelque chose !

Christophe Blocher pourrait se payer lui-même un tel film !

L’argent de la Confédération est-il réservé au socialisme ?

Un film sur Blocher devient nécessairement un film de propagande !

Le film de Jean-Stéphane Bron, contre lequel les agités du bocal protestent, serait dénué d’intérêt ? Alors pourquoi de telles protestations ?

En fait, sans avoir vu le film, on peut déjà penser que ce cinéaste apportera une contribution à la connaissance des raisons du succès de Blocher et de l’UDC, et donc implicitement aux raisons de l’échec de la gauche ( et d’autres partis aussi) à garder en leur sein les couches populaires. Là est en effet la vraie question. Pourquoi les couches populaires fuient massivement la gauche et tombent dans les bras de l’UDC ?

On a le droit d’uriner « artistiquement » sur Blocher, mais lui n’aurait pas le droit d’expliquer sa façon de voir la réalité suisse. Lui ne peut que mentir, être démagogue, ne pas respecter les institutions ! Or, qui veut par exemple en finir avec le service militaire obligatoire, voire supprimer l’armée, une institution constitutive du pays ? etc.

Autre élément fondamental et très grave : la liberté de parole et de création a des limites partisanes pour la gauche. Là on est en plein régime pré- autoritaire. Dans un tel cas, il faut se demander ce que ferait ce socialisme-là s’il avait les pleins pouvoirs. Cette question, scandaleuse pour les socialistes, doit être constamment rappelée.

La polémique sur ce film, non encore vu, aura donc aussi montré l’intolérance de la gauche, sa soif de censure, ainsi que la  pauvreté de sa pensée politique dont l’essentiel se réduit de plus en plus à vouloir changer l’homme, la société et maintenant notre civilisation !

Cette polémique va aussi engendrer des effets non voulus : une fabuleuse pub gratuite pour l’UDC, ce que la gauche aimerait pourtant éviter absolument !

Pire, le parti UDC que beaucoup espéraient à la peine, avec un leader qui aurait fait son temps, est en train de revenir en force avec, en plus, un engagement nouveau et fort d’une partie de la jeunesse, engagement dû pour beaucoup à une gauche devenue hors sol, insolente, coupée d’une grande partie de la population, et perçue comme anti-nationale, prête à brader le pays et à s’aligner sur l' UE, une UE qui ne sait pas concilier le national et le supra-national et qui en plus devient dirigiste et autoritaire, de plus en plus rejetée, car coupée des peuples dont elle veut faire le bonheur malgré eux. Une chanson connue, de même que sa fin.

A propos de la gauche, une nuance s’impose au milieu de ce climat d’indigence politique, d’arrogance, de flicage et de prétention : il existe encore des personnalités qui pourraient poursuivre la longue et importante tradition des sociaux démocrates suisses qui ont payé de leur vie pour l’amélioration des plus démunis et qui méritent notre reconnaissance.

Qu’ils sortent du bois. Certains viennent de le faire, justement à propos de L’Expérience Blocher, en approuvant ce projet. Ces derniers pourraient,simultanément, affirmer haut et fort leur distance face à la folle exaltation idéologique et aux résultats désastreux et ruineux de la politique de leurs camarades du pays d’à côté.

En Finlande, par exemple, à la suite du succès subit du parti dit néo-populiste, le « Parti des Finlandais » , on a chercher à comprendre les raisons de son succès plutôt que de s’acharner sur son leader Timo Soini. Quelques raisons avancées: l’immigration, comme dans d’autres pays ! ; le plan d’aide massif à la Grèce ; la priorité nationale, la défense du pays, l’attention aux préoccupations populaires, une politique économique sociale, défense de l’Etat social, « nationalisme ethnique et populiste », euroscepticisme, « social authoritarianisme », critique de la globalisation ; en plus, on reconnaît au leader ses compétences de débatteur et son sens de l’humour.

Remonter aux causes d'un phénomène pour en tirer conséquences et leçons politiques !

Une attitude différente de celle qui consiste à donner libre cours à une bouffée affectivo-politique généralisée, doublée d’une volonté de censurer la liberté de création, en fait de censurer la liberté tout court.

C’est vraiment grave!

Bis repetita placent.

Uli Windisch

 

 

 

 

 

2 commentaires

  1. Posté par Gérald Vernez le

    A la lecture des commentaires dans les réseaux sociaux depuis le lancement de la campagne contre l’initiative du GSsA contre l’obligation de servir, votre commentaire sur la pauvreté des idées socialistes sonne particulièrement juste. Pourtant veillons-nous, car le même risque frappe aussi le camp d’en face ou l’on confond trop souvent nostalgie avec politique de sécurité. Au fait, interrogez ceux qui mettent des autocollants sur leur voiture par rapport à la votation du 22 septembre et qui se la font rayer. Ils vous diront combien il apprécient la tolérance de la pensée de gauche et la créativité politique de ses membres….

  2. Posté par Derek Doppler le

    “…que ferait ce socialisme-là s’il avait les pleins pouvoirs?” Mais voyons, c’est très simple: il rajouterait d’autres morts à la centaine de millions déjà à son actif! Que ce cancer sociétal n’ait pas déjà été proprement neutralisé, voila le vrai scandale.

Et vous, qu'en pensez vous ?

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