Nos lecteurs nous écrivent. Lettre ouverte à Mmes Géraldine Savary et Ada Marra : la burqa et les féministes

Lettre ouverte à Mmes Géraldine Savary et Ada Marra, en réaction à leurs propos tenus dans un article sur la burqa et les féministes paru dans « Le Matin Dimanche » du 27 mars 2016

Force est de constater que les femmes – certaines femmes dirons-nous pour éviter de généraliser - sont les pires ennemis … des femmes. Les réactions de Géraldine Savary et Ada Marra sont typiques du discours dogmatique socialiste qui ne peut concevoir d’adhérer à une initiative proposée par un autre parti, et surtout pas un parti de droite ! Que diable, on reste socialiste ou on ne l’est pas. Même si le bon sens et notre bagage occidental judéo-chrétien devraient naturellement les amener à soutenir cette initiative, le dogme agissant comme une chape de plomb les en empêche. C’est ce qui s’appelle avoir des priorités partisanes. C’est pour le moins rassurant et ça donne froid dans le dos.
Contre toute attente, il est consternant – pour ma part, cela se rapproche de l’écœurement - de les voir minimiser, défendre, justifier certaines causes qui in fine annihilent leur propre genre : de l’excision en Afrique en passant par les unions forcées, les mariages de jeunes filles mineures, la polygamie, jusqu’à la servilité des femmes et le port d’oripeaux vestimentaires au Moyen Orient, voire dans l’ensemble du monde musulman. Vous trouverez toujours des femmes qui, sur de telles thématiques, proclameront que nous devons respecter les minorités et leurs coutumes rétrogrades voire barbares au nom de l’ouverture de nos propres sociétés sur le monde et de l’acceptation des différences culturelles. De véritables petits soldats Mesdames Géraldine Savary et Ada Marra, qui soutiennent bec et ongles que la burqa n’est ni un problème, ni une menace dans nos sociétés.

Pour en revenir à leurs doutes existentiels sur le port de la burqa en Suisse et, par extension, dans nos pays occidentaux, il serait opportun de préciser certains concepts. Tout d’abord, il n’est pas question de « burqa » uniquement. En Arabie Saoudite, je comprends qu’on parle d’abaya, en Iran de tchador et en Afghanistan de burqa (ça a le gout de la modernité ces noms, ne trouvez-vous pas ?). A cela s’ajoute le voile islamique recouvrant le visage des jeunes filles dès leur puberté. Malheur, elles deviennent impures ! D’autres termes doivent fort probablement exister, mais je ne prétends pas être familier avec les méandres de la mode islamique pour pouvoir me prononcer de manière exhaustive sur le sujet. Par contre, c’est immanquablement le même schéma : il s’agit toujours d’attributs vestimentaires imposés aux femmes, et uniquement à ces dernières, en vertu soi-disant de textes religieux. Je crois comprendre qu’il n’en est rien et qu’aucune loi n’oblige à porter quoi que ce soit. Il s’agit encore une fois d’interprétation faite par des hommes – et oui – qui considèrent finalement que, par nature, les hommes sont jugés comme des êtres lubriques et faibles, et les femmes comme des séductrices. En somme, être bon musulman exige donc d’éviter tout contact tentateur avec l’autre sexe. Inévitablement, les femmes sont ségrégées et portent sur leur corps la culpabilité de leurs pouvoirs tentateurs - quelle horreur. Et bien non, Mesdames les donneurs-de-leçon moralisatrices ! La ségrégation en vertu de votre sexe s’appelle du sexisme et le sexisme est une forme abjecte de racisme qui touche 50% de notre population. Parlez-en à Madame Brunschwig Graf ; elle est sensée défendre et embrasser la cause.

Ça ne marche pas comme cela dans nos sociétés occidentales du XXIème siècle, et nous ne voulons pas que de telles coutumes – sous couvert d’interdits et d’obligations religieuses moyenâgeux - puissent être tolérées et se répandre comme une trainée de poudre dans notre pays. Pour mémoire, les premiers soubresauts médiatiques ayant trait au voile islamique en France (fichtre, même pas question de burqa) datent du début des années 90, à une époque où le législateur hexagonal n’avait pas encore pris la mesure du problème. Voyez le résultat aujourd’hui ! Je ne peux que vous conseiller, Mmes Savary et Marra, de faire preuve de velléités de globe-trotteur et de visiter Riyad, Istanbul, Téhéran, Lille, Berlin, Paris et, bien évidemment, Bruxelles (notre président vient tout juste d’y faire un bref séjour instructif). Mais pas besoin d’aller si loin en définitive : passez juste la frontière genevoise et allez vous balader à Annemasse. Encore plus près me direz-vous ? Et bien, déambulez dans les rues lausannoises entre Renens et la gare centrale ou encore à Genève depuis Vernier jusque Cornavin. Ah, cette fois, c’est bien chez nous. Cela vous permettra de descendre quelque peu de vos chaires magistrales et d’être confrontées à la réalité du terrain afin de vous rendre compte du changement opéré en quelques années au sein de nos environnements citadins. Si vous n’êtes pas encore convaincues (malheureusement, cela se pourrait étant donné votre ostracisme dogmatique), et dans l’éventualité où vous seriez mères, posez-vous cette simple question : est-ce bien cela que je veux laisser à mes propres enfants ?

A bon entendeur,
Philippe Audergon
Vaud