Doit-on défendre notre « civilisation » ? Peu importe de savoir s’il est possible de définir une « civilisation » européenne ; on sait que quelque chose, quelque culture, quelque mode de vie européen et occidental est attaqué par le terrorisme islamiste. Prendre les étendards, les slogans et les crayons, c’est bien. Défendre la patrie, c’est bien. Défendre la nation, l’identité, aussi. Mais que défend-t-on, au juste ? Et, surtout, ce qu’on veut protéger vaut-il le coup d’être protégé ?
Notre lutte contre le terrorisme islamique ne doit pas cautionner notre propre terrorisme occidental, sorte d’auto-attentat contre nos propres enfants, contre notre propre peuple et contre notre propre conscience d'être humain.
Une civilisation qui élimine massivement ses enfants à naître, par confort et sans garde-fous, souvent pour préserver une certaine continuité dans la jouissance ; une civilisation qui pratique une sélection générale des êtres vivants au moyen d’une technoscience devenue incontrôlable, laissant des populations entières disparaître dans le silence des avortoirs, parce que trop faibles, non désirées et invisibles ; une civilisation qui décrit la faiblesse humaine comme une statistique et qui modifie le vivant pour ses besoins ; une telle civilisation, mérite-t-elle d’être défendue ?
Le terrorisme islamique face au terrorisme européen
Le terrorisme islamique menace de détruire notre civilisation, entend-t-on çi et là. Mais n’est-ce pas notre civilisation qui couve en elle-même les gemmes de sa propre destruction ? Au-delà de la haine de soi, si fréquemment dénoncée par les penseurs réellement dissidents, comme Renaud Camus (la décivilisation), Eric Zemmour (le suicide français) ou Bernard Antony (le génocide français), notre société développe et protège des discours génocidaires et des postures auto-destructrices.
Un discours lancinant, perpétuel, plus ou moins déguisé par la science fiction et les lumières du progrès, développe une véritable haine de l’humain : c’est celui du transhumanisme et de ses corrélats, l’antispécisme et le déconstructivisme. Comme l’écrit Rémi Brague,
« on conteste le droit de l’homme à dominer la nature, comme le fait le mouvement écologique(…) ; puis on nie la supériorité morale de l’homme par rapport aux autres animaux (…) ; enfin on voudrait n’y voir qu’un animal parmi d’autres, un singe un peu plus chanceux peut-être, voilà tout… »[1].
C’est dans cette ambiance de fin des temps et de fin de l’homme, au sens heideggérien de la stimmung, que les officines transhumanistes opèrent idéologiquement et, déjà, concrètement. « Le transhumanisme est une idéologie appuyée sur tout un ensemble de techniques, de recherches et de réalisations, et qui fonctionne comme un véritable parti, avec ses militants, son langage propre, et une considérable puissance financière. »[2] Le travail de Christian Godin est rempli de références à ces organisations; des exemples frappants :
L’église d’euthanasie, dont le mot d’ordre est « Save the planet, kill yourself - Sauvez la planète, tuez-vous vous-mêmes », « veuillez ne pas procréer » ou encore « Apprenez à vous masturber » ; voyez encore le Gaia Liberation Front, qui milite carrément pour l’extinction de la race humaine afin de libérer la planète de ce « parasite » qu’est l’homme. C’est une écologie radicale qui milite par exemple pour la « libération animale » (voir La terre d’abord !).
Quand l’écologie vire ainsi à l’ecofascisme, c’est anti-humanisme qui règne. Car l’« humanisme » lui-même est devenu suspect : suspecté d’égoïsme, d’egocentrisme, d’anthropocentrisme, voire de « chauvinisme ». Plus qu'une bête parmi les bêtes, cette bête est plus bestiale que les autres : l'homme est devenu une bête à abattre (pour préserver la planète), une bête à découper (pour en organiser la revente) et une bête à faire évoluer (vers le point de rupture du principe de singularité, qui transformera l'homme définitivement).
De la priorité du combat pour la vie
Ces discours sont peut-être un peu « allumés », mais déjà – et malheureusement - des actes les suivent. Ces actes se développent avec la connivence du silence que lui impose le débat public et celle de politiques qui collaborent, bon gré mal gré, peut-être sans le savoir, à la fin de l’humanité.
L’Occident postmoderne et technoscientifique semble contribuer au premier chef à cette fin de l’humanité. 600 enfants continuent d’être supprimés, chaque jour, par avortement. Des ventres de femmes se vendent et se louent par GPA. Des embryons humains servent de cobayes pour des expériences scientifiques, ou sont stockés dans des congélateurs géants, en attendant des jours génétiquement plus avancés. Des organisations qui ont pignon sur rue – comme le Planning familial US – découpent des embryons humains et les revendent par petits bouts. Une population entière est en train de disparaître au moyen d’une discrimination ultra-violente, basée sur un racisme chromosomique ; ce genre de racisme en blouse blanche, qui s’exprime à coups de scalpel ou d’aspirateur, jusqu’à 9 mois de grossesse en IMG : c’est le génocide, silencieux, des enfants trisomiques.
Ce que nous apprend Jean-Marie le Méné, dans son dernier livre (les premières victimes du transhumanisme), c’est que le génocide des trisomiques est la matrice des génocides futurs. Puisqu’on peut dépister et débusquer des maladies et des imperfections avant la naissance, nous ne sommes pas à l’abri d’un génocide plus important et d’une sélection plus précise. Si nos « garde-fous » moraux ont tous plié devant le génocide des enfants trisomiques, pourquoi ne plieront-ils pas devant les prochains desiderata ?
Face aux forces monstrueuses qui instrumentalisent l’homme, le contrôlent, le modifient et le vendent, le combat pour la défense de la vie constitue peut-être la dernière chance de ressaisir ce que « civilisation » peut bien vouloir dire, malgré tout. Le combat contre les monstruosités de l’état islamique ne doit pas nous empêcher de porter un regard sur nos propres monstruosités. Vu les renoncements et le nombre d’aveugles qui nous dictent la bonne parole, regarder et dire l’horreur à nos portes demande déjà du courage ; mais avoir le courage de regarder nos propres horreurs, c’est presque exceptionnel. Et tout aussi fondamental.
Conclusion
Puissent ces attentats islamistes réveiller les consciences occidentales sur leurs propres violences, leurs propres ventes d’humains, leurs propres attentats et leurs propres génocides.
Rester sur les murailles de la cité terrestre et construire, tant que faire se peut, la cité céleste, comme le demande saint Augustin, voilà une tâche pour nous, qui avons pris le risque de la lucidité. Nous ne sommes ni charlie, ni charia ; ni planning familial, ni état islamique ; ni des transhumains, ni des soumis d’Allah. Nous sommes les vrais humanistes.
Vivien Hoch, 30 mars 2016
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[1] Rémi Brague, « L'humanisme est-il en voie de disparition ?. », Cités 3/2013 (n° 55) , p. 95
[2] Christian Godin, « Le post-humain, la barbarie qui vient. », Cités 3/2013 (n° 55) , p. 82
Nous y sommes une religion comme l’écologisme veut prendre la place …de la religion: L’homme est un animal religieux, et parfois délirant.
Intéressant, merci.
Excellent article
Je crois que l’avenir de l’homme passe obligatoirement par l’écologie. Pas l’écologie qui nierait la spécificité de l’homme (l’écologie dite profonde), tout comme elle ne doit pas nier la spécificité de telle espèce en la préservant du mieux possible, mais l’écologie comme alliée la plus précieuse, l’agencement divin en quelque sorte, m^me si les soubresauts de la terre ou de l’univers immédiat nous rappellent la fragilité infinie de cet édifice. Une alliée oserai-je dire bien plus fiable que l’homme lui-m^me pour mener sa propre évolution. En effet, et l’actualité tragique nous le démontre, l’homme, sans axe spirituel vrai, est bien capable du pire dans l’autodestruction: matérialisme exacerbé menant à la ruine des ressources en tous genres, libre cours aux vices humains (les péchés diraient la religion chrétienne), religions basées sur la crédulité et le mensonge, etc, etc. Et l’interpénétration actuellement en cours entre la plaque tectonique musulmane et les autres plaques notamment européenne n’est qu’une des péripéties de la constante tragédie de la vie humaine. A nous de résister en gommant du mieux possible nos faiblesses “occidentales”: excès du droit rigide primant sur l’humanité, excès du matérialisme occultant la spiritualité, qui du coup se trouve totalement niée chez nos envahisseurs, nous privant là d’un avertisseur ô combien nécessaire, occultation des limites en tous genres (physiques, scientifiques, sociétales) pourtant indispensables à notre survie.
Telles son bien les raisons pour lesquelles les tenants et aboutissants de la Religion du “Progrès” contre l’humanité ,l’Occident oxydé , si ne n’est avarié, a bien du mal à se mettre en branle pour faire réellement la guerre à la guerre qu’il a en grande partie d’ailleurs, suscitée.Dans la mesure où tout se vaut , d’un anti-humanisme à un autre , pourquoi s’affoler ? Ne sommes-nous déjà pas trop nombreux sur cette “planète terre ” selon autant de médecins anthropologues à la sauce Guillotin, ? Ne sont ,somme toute, guère “destinés à vivre” comme dirait l’un de ces médecins-anthropologues , le Docteur Léonetti à la piquouse sensible, que ces savants oligarques et autre séides médiatiques accaparés à se partager un monde “régénéré” à leur obscure et bien peu alléchante image ?
L’ennui c’est que nombre de ces bonnes consciences libérales, tel Jean-Marie Le Méné ont perdu beaucoup de temps à dialoguer avec le diable avec de bien petites cuillères, jugeant alors ceux qui osaient dénoncer le danger en temps utile, “intransigeants”, infréquentables, et assurément peu dignes , merci pour eux, de se voir décernée , une légion d’honneur couverte de sang …qu’on chante d’ailleurs étrangement “impur “.