La France est moins démocratique que la Russie

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Oser écrire, comme je le fais ici, que la France est moins démocratique que la Russie, ou, inversément, que la Russie est plus démocratique que la France, c'est politiquement très incorrect, mais alors vraiment, très, très incorrect. Je ne suis ni Russe, ni Français. Je ne vis ni en France, ni en Russie. Mais depuis quelques années, j'ai le sentiment hautement désagréable que la France n'est plus gouvernée et qu'elle est en fait soumise à un régime : le régime socialiste français.
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En tant que chrétien, je pense que la liberté d'être chrétien est mieux défendue en Russie qu'en France. En tant que libéral conservateur, je pense qu'il est plus facile de faire des affaires en Russie qu'en France. En tant que politologue, je pense que les analystes et experts russes sont intelligents et que leurs homologues français ne le sont pas. Voilà, tout est dit, écrit, en toute simplicité.
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Ci-après, on lira les extraits adaptés d'une longue interview accordée par Yvan Blot, à propos de la sortie de son livre "La Russie de Poutine", livre préfacé par Philippe de Villiers. Yvan Blot déclare notamment (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Les médias occidentaux se placent dans le cadre d’un courant qui consiste à vouloir créer artificiellement une opposition entre la Russie et l’Europe, cela pour le seul avantage des États-Unis. Cela correspond à la doctrine Brzezinski, qui souhaite depuis plusieurs années couper la Russie de l’Europe le plus possible. Les médias sont souvent dans cette ligne.J’ai une expérience de la Russie depuis de nombreuses années. Je me suis occupé de la Russie quand j’étais au Parlement européen et, depuis trois ans, je fais beaucoup de coopération avec la Russie et je travaille avec deux clubs de réflexion russes en science politique.
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Yvan Blot : J’ai voulu casser un certain nombre de mythes sur la Russie, avec des expériences vécues ou des éléments statistiques difficiles à contester, notamment en provenance de la Banque Mondiale. J’ai voulu m’attaquer à quelques mythes. Le premier, c’est que la Russie serait intrinsèquement un pays d’agresseurs, ceci pendant toute son histoire : or, mon sentiment est que la Russie a plutôt été l’agressée. C’est un pays qui a été envahi par les Mongols, par les Suédois, par les chevaliers teutoniques, les Polonais, Napoléon et, pour finir, Hitler. Ils ont toujours fini par triompher. Donc, pour moi, c’est un peuple de résistants, beaucoup plus que d’agresseurs. Le deuxième mythe – c’est celui qui surprendra le plus – c’est qu’à mon avis, la Russie est un pays plus démocratique que la France.
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Yvan Blot : Ensuite, on nous explique que c’est un pays sous-développé. J’ai entendu des responsables politiques français importants dire que la Russie n’était pas différente de l’Arabie Saoudite, car c’est un pays qui ne vend que du pétrole. Ce n’est pas très sérieux. Si vous vous référez aux chiffres de la Banque Mondiale, vous constaterez que le pétrole c’est 9% du PIB de la Russie, contre 45% en Arabie Saoudite. Ensuite, le produit intérieur brut de la Russie a rattrapé celui de l’Allemagne en 2014. On peut dire que l’économie russe a à peu près la même force de création de richesses que l’économie allemande. On ne trouve cela nulle part, sauf dans les statistiques du FMI et de la Banque Mondiale.
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Yvan Blot : En matière de technologies, la Russie a prouvé qu’elle était capable de faire des produits de haute technologie. Elle exporte des centrales nucléaires, elle exporte des armements extrêmement sophistiqués et, si vous voulez aller dans une station orbitale, il faut prendre une fusée russe parce que les Américains n’en fabriquent plus. Yandex, qui est le moteur de recherche le plus connu en Russie, a été créé deux ans avant Google. L’antivirus Kaspersky, que tout le monde a sur son ordinateur, c’est un brevet russe également. La plus grande surprise s’est produite il y a quelques mois, lorsqu’un bateau de guerre américain est passé en mer Noire, un avion russe est passé au-dessus et le commandant du bateau a constaté que les radars n’avaient pas indiqué la présence de cet avion.
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Yvan Blot : Les techniciens se sont aperçus que tout le système électronique du bateau était entièrement paralysé. L’avion s’est éloigné et, à partir d’un certain moment, tous les appareils se sont remis à fonctionner. C’est de cette manière que l’on a découvert que certains avions russes avaient la capacité de paralyser totalement tous les équipements électroniques d’un adversaire. Ce qui fait qu’à l’OTAN, on s’est beaucoup inquiété et l’on s’est dit que les Russes, en cas de conflit, étaient capables de paralyser toutes les communications des armées occidentales. Donc, dire qu’ils n’ont pas de technologies, cela ne tient pas debout.
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Yvan Blot : L’idée la plus répandue dans les médias, c’est que Vladimir Poutine est un dictateur, mais l’état d’avancement de la démocratie en Russie, notamment à travers ce comité qui permet au peuple de vérifier que toutes les réformes sont bien faites, en faisant remonter leur expérience vis-à-vis de chaque fonctionnaire. C’est une organisation qui a des ramifications un peu partout, qui s’appelle le front national pan-russe, qui comprend des milliers de citoyens qui ont pour tâche de surveiller le parti au pouvoir et de surveiller les élus aussi, parce que Vladimir Poutine n’a pas confiance dans les corps intermédiaires et il se méfie de la bureaucratie. Donc, à l’intérieur de son propre système, il a créé un mécanisme de contrôle démocratique pour s’assurer que les décrets sont bien appliqués par les fonctionnaires et les élus locaux.
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Yvan Blot : C’est très ingénieux comme système et c’est un élément de démocratie à l’intérieur du système russe. Par ailleurs, en matière d’élections, les dirigeants politiques sont élus et même de façon plus directe en Russie. Les maires sont élus directement, alors que chez nous ce n’est pas le cas, et les préfets, qui étaient nommés autrefois, sont maintenant élus par la population. C’est une décision de Vladimir Poutine et les Russes ont beaucoup apprécié la possibilité d’élire leurs propres préfets. Enfin, pour une dictature, vous trouvez des journaux pro-Poutine et des journaux anti-Poutine en quantité. Or, à l’époque soviétique, il n’y avait jamais de journaux contre le gouvernement. Les Russes peuvent sortir de Russie et revenir en Russie quand ils le veulent.
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Yvan Blot : A mon avis, c’est une démocratie plus forte que la France, parce que le gouvernement fait la politique que le peuple souhaite. C’est pour cette raison que Poutine a 80% de soutiens. En France, comme les élites politiques ne font pas du tout la politique que les gens souhaitent, Hollande se retrouve avec 15% à 20% de soutiens. La Russie est plus démocratique que la France, car la France est une oligarchie qui pratique une politique sur des tas de sujets, qui n’a rien à voir avec ce que souhaite le peuple : je pense à la fiscalité, l’immigration, l’insécurité ou le chômage. Est-ce ce qui explique les 80% d’opinions positives pour Poutine en Russie ? C’est indiscutable.
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Yvan Blot : Les sondeurs occidentaux sont étonnés par leurs propres résultats, parce que ce ne sont pas des sondages faits par le Kremlin. Pour eux, Poutine c’est la stabilité et la croissance économique. Il faut voir que le niveau de vie des Russes a quadruplé depuis que Poutine est là, les deux dernières années ont été stagnantes, c’est vrai, mais la richesse par habitant a quadruplé. Il y a une très forte croissance qui est due, bien sûr, au gaz et au pétrole, mais tout ne s’explique pas par cela. La production d’électricité de la Russie est le double de celle de l’Allemagne, c’est le quatrième pays du monde. C’est un pays qui a très fortement progressé et le niveau de vie est maintenant celui d’un pays occidental, conclut Yvan Blot (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Michel Garroté, 18.4.2016
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http://www.kernews.com/yvan-blot-a-mon-avis-la-russie-est-un-pays-plus-democratique-que-la-france/3825/
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La situation française après les attentats du 13 novembre 2015

Je n’ai pas été surpris par ces attentats car depuis cinq ou six ans, de nombreux projets d’attentats sont déjoués régulièrement par les services français. Le recrutement de nouveaux terroristes est le problème le plus grave pour l’avenir. Les mouvements islamistes radicaux, comme Al Qaida ou Daech disposent d’idéologues qu’il ne faut pas sous-estimer. L’idéologie qui est la leur est trop mal connue. Elle fut fondée notamment par un lettré égyptien Sayid Qutb avant la seconde guerre mondiale. Sayid Qutb fut condamné à mort après avoir milité avec les Frères Musulmans. Son idéologie, reprise par les dirigeants d’Al quaida et de Daech exige une lutte à mort contre les démocraties car seul Dieu doit légiférer. Les démocrates se prennent pour Dieu et méritent la mort. Les combattants radicaux sont des héros qui iront au paradis.

Face à cela, les sociétés occidentales, surtout depuis 1968, sont devenues de plus en plus matérialistes et individualistes. Les anciens idéaux, patriotisme, charité chrétienne, ont perdu de leur force. Des jeunes déracinés sont donc tentés par cette idéologie qui porte la mort. Il serait nécessaire de faire appel aux valeurs traditionnelles et notamment au patriotisme français comme c’est fait en Russie.

Pourquoi la France est-elle visée particulièrement ? La première raison est que la France est considérée par les islamistes radicaux comme un pays hostile à toutes les religions, islam compris. La loi française de 2004 d’interdiction des signes religieux démonstratifs dans les lieux publics et la loi de 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public sont très critiquées par les islamistes radicaux. La deuxième raison est la coopération militaire entre la France et l’Algérie car l’armée algérienne a réprimé les islamistes sévèrement, notamment après les élections où ils avaient triomphé en 1992. Les islamistes reprochent à la France d’équiper et de former l’armée algérienne. Enfin, l’engagement de la France en Syrie contre Daech donne une raison supplémentaire et plus récente de détester la France.

Les extrémistes islamistes recrutent dans des banlieues où l’intégration de trop nombreux immigrants n’a pas pu se faire. Le chômage est grand ainsi que la criminalité. Si vous allez dans une prison française comme je l’ai fait professionnellement, on est frappé du nombre de prisonniers dont l’origine est l’Afrique du nord, même si c’est après plusieurs générations. Cette délinquance créé des relations tendues entre les français de souche et les français immigrés, et certains de ces derniers ont alors une raison de plus de rejoindre les islamistes radicaux.

L’attitude de l’ambassade des Etats-Unis a été souvent étrange, offrant des stages à des animateurs d’associations d’immigrés pour qu’ils fassent de la politique active, n’hésitant pas à laisser entendre que l’Etat français serait raciste. Que diraient nos amis américains si l’on cherchait à exciter les minorités noires aux Etats-Unis contre le gouvernement américain ? (voire l’article d’Alexandre Latsa sur « l’offensive américaine sur les banlieues françaises » paru sur le site de La Voix de la Russie le 3 novembre 2012 à partir de renseignements de Wikileaks). La France doit aussi prendre garde à l’égard de pays qui semblent aider les terroristes discrètement : des accusations sont formulées à l’égard de l’Arabie Saoudite et d’autres pays du golfe, voire même la Turquie, tous pays alliés aux Etats-Unis traditionnellement. La politique russe est par contre une chance de plus d’affaiblir l’Etat islamiste plus rapidement.

Restent à voir les conséquences de l’attentat récent (et d’autres qui pourraient suivre, de l’avis de l’ancien responsable anti-terroriste Trévidic) sur les prochaines élections régionales début décembre prochain. Le Front National pourrait augmenter ses voix et peut être gagner la majorité dans deux ou trois régions. Une concurrence est lancée auprès des électeurs qui réclament plus de fermeté contre le terrorisme mais aussi contre l’immigration illégale entre le Front National e le parti de Sarkozy, les Républicains. Les socialistes ont sur ces sujets une image de marque désastreuse.

Ainsi, les attentats du 13 novembre ont non seulement créé un climat d’insécurité accru en France mais risquent de modifier à terme le paysage politique français.

Yvan Blot, le 16 novembre 2015