A la suite du jugement scandaleux du Tribunal fédéral dans l'affaire Claude D., Jean-Luc Addor vient de déposer au Conseil national une interpellation dont voici le texte :
Le 8 février 2004, 56,2 % des Suisses et presque tous les cantons acceptaient l'initiative populaire "Internement à vie pour les délinquants sexuels ou violents jugés très dangereux et non amendables".
Le 24 mars 2006, le Parlement fédéral adoptait des dispositions d'application (FF 2006 3431) qui sont en vigueur depuis le 1er janvier 2007.
Depuis lors, l'internement à vie n'a été semble-t-il définitivement prononcé que dans un unique cas : celui d'un condamné qui a renoncé à recourir contre le jugement. En revanche, le Tribunal fédéral a systématiquement annulé tous les jugements cantonaux qui avaient prononcé cette mesure, la dernière fois le 26 février 2018 dans un cas qui a provoqué une forte émotion : celui de Claude D. (ATF 6B_35/2017).
De fait, on peut raisonnablement considérer que tant la volonté populaire que l'article constitutionnel que le peuple a introduit le 8 février 2004 (art. 123a Cst.) sont restés lettres mortes. C'est évidemment inacceptable. Il est inconcevable que le peuple suisse ait pu vouloir une telle situation et encore plus inconcevable qu'il s'en accommode. C'est la crédibilité des institutions qui est aujourd'hui mise en cause.
Avant de choisir une voie qui permettra de la rétablir et d'appliquer vraiment la volonté populaire et la constitution, quelques questions méritent d'être éclaircies, indépendamment de ce que l'on peut penser de la jurisprudence du TF et dans le respect du principe de la séparation des pouvoirs.
1. Avec quelques années de recul maintenant, le Conseil fédéral considère-t-il que les dispositions introduites par la loi fédérale du 24 mars 2006 (FF 2006 3431) ont permis de mettre en œuvre la volonté populaire exprimée le 8 février 2004 et l'art. 123a de la constitution fédérale ?
2. Du refus, de fait, du TF de confirmer le moindre internement à vie, même dans un cas aussi emblématique que celui de Claude D., le Conseil fédéral ne doit-il pas tirer la conclusion que ces dispositions sont insuffisantes pour atteindre l'objectif de sécurité publique voulu par le peuple ?
3. Le droit en vigueur ne subordonne-t-il pas l'internement à vie à des conditions trop strictes ?
4. Pour mettre en œuvre, vraiment, la volonté populaire et la constitution, le moment n'est-il pas venu de remettre l'ouvrage sur le métier et d'entamer un processus de révision des dispositions légales relatives à l'internement à vie ?
Jean-Luc Addor, conseiller national UDC