Les terroristes libérés des prisons britanniques risquent de « passer à travers les mailles du filet » et de commettre des attentats

Un agent pénitentiaire qualifie de « risibles » les moyens mis en place par le gouvernement pour la lutte contre l’extrémisme

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Un nombre toujours plus grand de terroristes libérés des prisons britanniques risquent de « passer à travers les mailles du filet » et de commettre des attentats, car les autorités n’ont pas les moyens de les surveiller.

Tel est l’avertissement lancé par Ian Acheson, ancien directeur de prison qui a passé en revue l’extrémisme islamiste dans les prisons du Royaume-Uni. Selon lui, le nombre record de terroristes emprisonnés risque d’accélérer la radicalisation déjà en cours.

« Il y a un problème depuis des années et le Service des prisons et de la probation dort », a-t-il déclaré à The Independent. « Le message diffusé par les groupes islamistes est très séduisant et si la prison n’a pas d’alternative à offrir, faute de programmes de réhabilitation suffisants, ce n’est qu’une mascarade.

« Le personnel n’a pas les moyens de contrer les idéologies. Nous avons des espaces hors de contrôle et c’est là que l’extrémisme prospère. »

 

Une crise provoquée par la surpopulation carcérale, le manque de personnel, le désordre, la violence et la drogue a atteint son paroxysme ce mois-ci lorsque les agents sont sortis dans la rue en signe de protestation et que le directeur du Service des prisons et de la probation  a démissionné.

La privatisation partielle de la probation par le gouvernement en 2014 a laissé un système fragmenté qui permet aux condamnés de récidiver encore et encore.

Pendant ce temps, un nombre record de personnes sont condamnées pour terrorisme et les nouvelles lois proposées multiplieraient encore les emprisonnements.

 

Il y a actuellement 228 personnes incarcérées pour des infractions liées au terrorisme, dont 82 % d’islamistes, 13 % d’extrême droite et 6 % d’« autres ».

Mais le ministère de la Justice affirme qu’il gère un nombre beaucoup plus important de détenus – 700 – dans le cadre d’un processus de gestion des cas dans la lutte contre le terrorisme.

Un agent pénitentiaire travaillant dans le quartier de haute sécurité, et qui a requis l’anonymat, a déclaré à The Independent que ce chiffre est très inférieur au nombre réel d’extrémistes islamistes en liberté.

« J’aurais ajouté un zéro et plus encore », dit-il.« Les extrémistes disposent d’hommes de main qui radicalisent les petits délinquants. »

« Vous avez quelqu’un qui est là pour cinq ou six ans, un criminel ordinaire, et tout à coup, il est radicalisé et il déteste tout ce qui est occidental. »

Selon lui et de nombreuses autres sources, le phénomène des détenus qui disent s’être convertis à l’islam en prison et qui ont rejoint des gangs musulmans est très répandu.

Il n’a constaté « aucun changement » depuis la création, en avril 2017, d’une unité commune du Service des prisons et de la probation et du Ministère de l’Intérieur consacrée à la lutte contre l’extrémisme. Pour lui, cette unité n’est qu’un exercice bureaucratique « risible ».

Les responsables ont prétendu que le personnel serait en mesure « d’identifier, de signaler et de contrer les opinions extrémistes et de prendre des mesures », mais l’agent a déclaré que ses collègues étaient trop peu nombreux et trop surchargés pour appliquer les mesures prévues.

« Le problème est trop grand. Il n’y a pas de temps dans une journée ordinaire de gardiens de prison pour réhabiliter qui que ce soit. Et personne ne vient vérifier si ces choses sont faites. »

 

Pour M. Acheson, il est « ridicule » de s’attendre à ce que les gardiens de prison puisse contrer l’action les extrémistes alors qu’ils arrivent déjà à peine à maintenir l’ordre. […]

Adam Deen, un ex-membre du réseau terroriste al-Muhajiroun d’Anjem Choudary, qui travaille maintenant à la lutte contre l’extrémisme, s’inquiète du fait que les prisonniers risquent de simplement faire tout ce qu’on attend d’eux afin d’être jugés aptes à une libération conditionnelle.

« Tout criminel a envie de sortir de prison le plus tôt possible. Les extrémistes islamistes ne font pas exception et ils sont prêts à dire n’importe quoi ».

En conséquence, « il est impossible de savoir si quelqu’un est déradicalisé ou non. On ne peut le savoir que par ses actions et alors il est peut-être trop tard. »

M. Deen […] ajoute que les extrémistes convaincus peuvent lancer un attentat terroriste « à tout moment », même plusieurs années après leur libération. […]

 

Anjem Choudary, le célèbre prédicateur islamiste dont le réseau a été impliqué dans une série de complots terroristes, doit être libéré sous peu. Il a purgé plus de deux ans de prison pour avoir fait la propagande de l’Etat islamique. Une fois libéré, il restera sans doute sous haute surveillance. Mais ce qui inquiète aussi les spécialistes, ce sont les extrémistes moins connus, qui ne seront peut-être pas surveillés d’aussi près.

La police mène déjà un nombre record de 650 enquêtes sur les « individus les plus dangereux », et les services de sécurité admettent qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires pour surveiller les 20'000 personnes qui sont apparues sur leur radar dans le passé, et dont le nombre continue d’augmenter. […]

Le MI5 avait enquêté sur l’auteur de l’attentat à la bombe de Manchester, Salman Abedi, mais avait mal interprété des renseignements qui auraient permis d’empêcher l’attaque. Les espions n’étaient pas au courant du complot concernant le pont de Londres, bien que le cerveau du complot, Khuram Butt, ait été placé sous surveillance après avoir planifié des attentats. La surveillance avait été suspendue en mars dernier « en raison d’une insuffisance de ressources due à un grand nombre d’enquêtes plus prioritaires », et le niveau de dangerosité de Butt avait été abaissé.

Avec 13 complots islamistes et quatre d’extrême droite déjoués depuis mars 2017, plusieurs personnes ayant planifié des attentats ont été emprisonnées à vie et placées dans des unités de séparation pour les empêcher d’influencer d’autres prisonniers.

Mais un plus grand nombre d’extrémistes ont été condamnés pour des infractions terroristes de niveau inférieur, notamment pour avoir diffusé la propagande de l’EI et envoyé de l’argent à ses combattants depuis la formationdu groupe en 2014.

La grande majorité des auteurs d’infractions terroristes ne purgeront que cinq ans au maximum […].

Les courtes peines d’emprisonnement ont été liées à la récidive pour tous les crimes, et plusieurs terroristes ont déjà récidivé. […]

 

M. Acheson ne croit pas que les autorités aient la capacité de surveiller les terroristes ou de les réintégrer dans la société.

« Nous n’avons aucune idée claire de l’effet qu’une longue peine de prison aura sur leur engagement idéologique. Si la surveillance est insuffisante, il y a le risque qu’un délinquant dangereux passe entre les mailles du filet. » […]

 

Source : The Independent

Traduction libre Cenator pour LesObservateurs.ch

 

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