« La prison est devenue l’école de la délinquance », dénonce un surveillant pénitentiaire de Salon-de-Provence

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Le 27 mai dernier, un surveillant pénitentiaire de la prison d’Aix-Luynes a reçu un coup de poing au visage. Trois jours plus tard, dans ce même centre de détention, un autre agent a été projeté au sol par un détenu. Même chose, le même jour à Salon-de-Provence, cette fois. Enfin, le samedi 31 mai, toujours au centre de détention de Salon-de-Provence, un prisonnier a craché au visage d’une surveillante. Pour les gardiens de prison, les jours se suivent et se ressemblent.

Valeurs actuelles. Ces quinze derniers jours ont donné lieu à de multiples agressions dans les prisons des Bouches-du-Rhône. La proximité temporelle de ces faits est-elle un hasard ?
David Delacourt. Non, aujourd’hui on constate tous les jours des menaces, des insultes. On est passé à un cran au dessus. Avec une frange de la population pénale, on est constamment dans la menace. « Dès que je sors, je m’occupe de toi » : ces phrases sont quasi quotidiennes. Avant, il y avait une poignée de détenus à problème, aujourd’hui, c’est un flux important. La médiatisation de la DDPF [Défense des prisonniers français, Ndlr] a aussi fait augmenter les choses au sein des enceintes pénitentiaires. On leur a fait une publicité et par conséquent la population pénale a pris une autre amplitude. À l’intérieur des prisons, les détenus se sentent de plus en plus à l’aise. La prison ne fait plus peur.

Ce sont principalement les relations entre détenus qui sont tendues ou celles avec les surveillants ?
Il y a les deux, on ne va pas se voiler la face. Aujourd’hui, on est confronté à une recrudescence de livraisons par drone de produits stupéfiants, de téléphones et autres. A l’intérieur, ça crée des trafics et donc des tensions entre détenus. Les tensions créent des bagarres comme à Aix-Luynes à coups de couteau, le 30 mai dernier. La surpopulation carcérale amène aussi des conflits. Puis, à l’ouverture de la porte de la cellule, le premier rempart c’est le surveillant.

Les difficultés que vous avez à tenir les prisons peuvent-elles aussi être la conséquence d’une trop grande liberté accordée aux détenus ?
Il faut des activités pour évacuer et avoir une baisse des tensions. Malheureusement, il y a beaucoup de défaillances. Quand on offre des soins du visage à un détenu, ce n’est pas possible.

Et les visites culturelles…
On est dans un principe de réinsertion pour éviter la récidive, mais le système n’est pas bien ficelé, sinon pourquoi aurait-on autant de détenus et autant de récidivistes ? Le problème, c’est que nous sommes tenus par des règles européennes. C’est de la politique et nous ne sommes que des exécutants.

Est-ce qu’il y a un problème d’effectif, d’expérience ou de qualification, dans les rangs des gardiens ?
Les agents sont à bout, tous proches du burn-out. On est toujours en train de tirer sur la corde. J’ai des collègues qui dépassent plus de 108 heures supplémentaires. Comme tout le monde, un surveillant est un humain et il a besoin de repos mais on est rappelé sans cesse. On est en sous effectif et notre métier n’est pas attractif du tout. Vous faites le travail de deux ou trois personnes et les conflits ne cessent d’augmenter. Autre constat : à Aix-Luynes, les agents ne veulent pas rester parce qu’ils n’ont pas les moyens de se loger sur place avec les salaires qu’ils perçoivent.

Que faudrait-il, selon vous, pour que les prisons soient mieux tenues ?
Il faudrait du personnel, un recrutement massif de personnel avec un programme pour le garder dans les établissements grâce à des logements et des moyens de transports adaptés. Et après, des places de prison. Il faudrait faire des prisons adaptées avec des petits délinquants séparés des gros délinquants car aujourd’hui, la prison est devenue l’école de la délinquance. Quelqu’un qui rentre pour un petit délit côtoie à l’intérieur des personnes d’influence, des gros délinquants, des détenus qui les font entrer système beaucoup plus important.

La semaine prochaine, Mohammed Amra, connu pour son évasion lors d’un transfert qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, doit être extrait de la prison de Condé-sur-Sarthe pour être présenté à la justice. Comment les surveillants pénitentiaires ont accueilli cette information ?
C’est un scandale. Suite à l’assassinat de nos deux collègues, il y avait un protocole qui avait été signé pour que ce type de détenu ne soit plus extrait. Aujourd’hui on est face à un accord signé qui ne sera pas respecté. Pour nous c’est l’incompréhension. D’autant plus, quand on voit les moyens financiers qui vont être engagés pour cette extraction alors qu’on nous dit qu’il n’y a plus d’argent. C’est la plus mauvaise des options qui a été choisie.

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