Echec du plan assurance santé.
De notre correspondant permanent aux Etats-Unis. – Répétons-le car c’est essentiel : Trump n’est ni de gauche ni de droite. Trump est un populiste. Le populisme a toujours été capable d’intégrer à sa dynamique aussi bien des idées de gauche que des idées de droite, sans pour cela faillir ni à sa mission ni à sa nature. On ne comprendrait rien au personnage de Trump si on perdait de vue ces notions fondamentales. De plus, sa spectaculaire victoire de novembre dernier resterait inexplicable. Et sa gestion des affaires de l’Etat depuis le 20 janvier se couvrirait d’un épais mystère. Tout devient clair si l’on considère que Trump, pour sortir d’un mauvais pas, est susceptible de se tourner aussi bien vers les républicains que vers les démocrates, sans pour autant paraître plus opportuniste ou plus démagogue qu’un autre. La preuve par l’échec du plan gouvernemental qui devait remplacer le système d’assurance santé précédent appelé Obamacare.
Un cuisant revers : surtout lorsque vendredi dernier, le texte préparé par Paul Ryan, président de la Chambre, ne fut même pas mis aux voix des 435 députés. On saborda le projet avant le vote – avant le naufrage. Le pouvoir sauva la face de justesse mais le mal était fait : confronté au contrepoids des représentants du peuple, Trump venait de mordre la poussière pour la première fois au cours de ses cent jours de fonction qui se termineront le 30 avril. Le coup est rude mais il fourmille de leçons dont trois pèsent lourd. D’abord, l’habileté légendaire avec laquelle Trump a bâti sa fortune – l’art subtil de la négociation – devient presque inopérante lorsqu’il s’agit de s’imposer au milieu de parlementaires dont la logique n’est pas celle de patrons d’entreprises. Ensuite, Trump a eu le tort de s’acharner à « vendre » un projet de loi sans avoir suffisamment exploré son contenu, ni surtout les lacunes qu’il contenait. Ses réflexes ont été ceux d’un commerçant plaçant un produit que d’autres avaient eu la charge de fabriquer.
La troisième leçon est tout aussi importante que les deux précédentes : Trump a été trahi par une bonne trentaine d’élus républicains regroupés autour d’un Freedom Caucus – Rassemblement de la liberté. Des élus qui auraient dû, à un moment pareil, obéir comme un seul homme à la discipline de vote. Ils ont bloqué le processus parlementaire dès qu’il s’est mis en marche. Déloyal et écœurant. Des élus de la droite molle qui se sont crispés aussitôt que les intérêts égoïstement conservateurs étaient en jeu. Ces intérêts, on les connaît : sauver le financement de leurs campagnes électorales en protégeant, dans cette affaire d’assurance santé, les filons d’or que se sont appropriés depuis longtemps les compagnies d’assurances, les laboratoires pharmaceutiques et, bien sûr, l’univers hospitalier. Comment le populisme de Trump pourra-t-il être mis en œuvre si une trentaine d’individus parviennent à gripper le mécanisme législatif ?
Sur les décombres de l’Obamacare, Trump avait promis avant d’être élu d’agir dans deux directions : abaisser d’une manière substantielle le montant des primes mensuelles, et faire en sorte que pas un seul Américain ne reste sans assurance. Défi titanesque qui exigeait autant d’autorité que de sens du compromis. Ryan a prouvé qu’il n’avait ni l’un ni l’autre. Restera-t-il sur son « perchoir » de la Chambre ? Qu’importe. Dans tout échec, il faut bien une victime. Le crucial est ailleurs : Trump a l’intention de compenser les troupes qui lui font défaut par des démocrates. On entend déjà les conservateurs crier « au fou ». Trump a l’habitude. N’oublions pas : c’est un populiste.
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