Budapest, Vienne et Berne

Stéphane Montabert
Suisse naturalisé, Conseiller communal UDC, Renens

Quelques jours après la victoire du FPÖ au premier tour des élections présidentielles autrichiennes, le changement de paradigme a bien eu lieu, s'inscrivant en lettres de feu dans la conscience des politiciens de Vienne. La politique migratoire devient le facteur décisionnel majeur de l'opinion, tous les autres aspects de la vie publique étant relégués à des rôles secondaires.

Les médias dénoncent désormais de "l'Orbanisation" de l'Autriche, selon l'adjectif façonné pour décrire la façon dont le dirigeant hongrois Viktor Orbán a décidé de faire face au flux migratoire, fermant la frontière hongroise avec des barbelés et mettant en place en urgence tout un train de mesures législatives pour criminaliser les franchissements intempestifs.

En Suisse tout particulièrement, de nombreux esprits brillants expliquent régulièrement sur les plateaux de télévision et dans les colonnes des journaux l'absurdité d'une politique de fermeture des frontières, trop chère, difficile, impraticable, et finalement impossible. Ils ont juste un petit problème avec ce graphique:

migrants_hongrie.gif

L'odieux Viktor Orbán a vraiment de quoi se faire détester. Non seulement son approche du problème est contraire à tous les principes de réalisme dont se gargarise le lobby pro-migratoire mais en plus, elle fonctionne. Quel abominable individu!

Si pareille information se diffuse fatalement mal dans nombre de pays européens où la caste dirigeante garde encore sa mainmise sur l'opinion publique, tel n'est plus le cas là où l'assaut migratoire est une réalité indiscutable, dont l'Autriche. La réussite hongroise a tardivement convaincu les politiciens d'agir dans le sens souhaité par la population.

Il serait cynique d'y voir une tardive réaction au score du FPÖ le week-end dernier, bien entendu. Pareil train de mesure se prend typiquement entre les deux tours d'un scrutin présidentiel...

Quoi qu'il en soit, l'impulsion est finalement arrivée. Les autorités autrichiennes prennent le taureau par les cornes. Les journalistes pro-immigration se lamentent:

Le mercredi 27 avril restera un jour noir pour les défenseurs des droits humains d’un pays, l’Autriche, qui fut longtemps synonyme de terre d’asile (...) les réfugiés syriens, afghans ou irakiens auront un permis de séjour limité dans le temps. Au bout de trois ans, la situation dans leur pays d’origine sera examinée. Si la guerre y est finie, ils devront rentrer chez eux. (...)

Anticipant une possible arrivée massive, cet été, de réfugiés en provenance d’Italie, Vienne veut pouvoir mettre en place un régime d’exception, valable deux ans, afin de refouler les migrants à ses frontières, si son administration se juge dépassée. Les réfugiés, même de nationalité syrienne ou irakienne, devront alors prouver qu’ils sont persécutés dans le pays par lequel ils sont arrivés en Autriche.

 

Apparemment, formaliser l'asile comme quelque chose de temporaire fait de vous la lie de l'humanité. De même que de chercher à préserver l'équilibre intérieur du pays d'accueil. De même que de poser une simple question de bon sens: "venez-vous seulement d'un pays où vous êtes persécuté?"

Pas le pays où vous êtes , pas le pays de vos ancêtre ou celui où vous viviez il y a trois, cinq ou dix ans, pas un pays où vous vous sentiriez malheureux, mais le pays d'où vous venez maintenant, un pays où vous seriez persécuté, alors que vous frappez à la porte de l'Autriche?

La question s'inscrit dans une conformité totale avec les Accords de Dublin, sur le fond comme sur la forme. Mais tout le monde semble avoir oublié les Accords de Dublin, en particulier ses plus fervents apôtres, ceux qui invoquent le Droit International à tout bout de champ. La fièvre anti-frontière fait perdre tout sens commun.

Au bout du compte, Budapest trouve une solution. Vienne, après l'avoir beaucoup critiquée, lui emboîte le pas. Et à Berne?

A Berne, rien du tout. Rien n'est plus frappant que le contraste entre le réalisme désormais affiché des capitales d'Autriche et de Hongrie et le cirque perpétuel du Palais Fédéral helvétique. A Berne, Mme Simonetta Sommaruga supporte tellement peu la critique qu'elle la fuit lorsque M. Roger Köppel rappelle ses contradictions, en parlant de l'extension de la libre-circulation des personnes à la Croatie:

« Je m’étonne de voir avec quelle manière frivole, avec quelle légèreté, vous, Madame Sommaruga, vous vous asseyez sur des dispositions constitutionnelles que jusqu'à il y a peu vous défendiez avec véhémence. »

Et M. Köppel n'est pas seul, j'avais moi-même formulé un constat identique.

Les journalistes locaux font bien sûr leur travail "d'information" sur l'accrochage. Ils tentent de rameuter l'opinion pour soutenir la gentille conseillère fédérale contre l'odieux tribun zurichois. La sauce ne prend pas. Lui n'a rien à se reprocher et les internautes s'interrogent: "Je ne vois pas ce qu'il y a de virulent dans les propos de Roger Köppel." Sur 20 minutes, on prend carrément fait et cause pour le conseiller national UDC.

Les médias, surtout, déploient des trésors d'ingéniosité pour ne pas évoquer le fond. Accordons-leur au moins que la situation est effectivement différente: Viktor Orbán doit rendre des comptes à son peuple ; les politiciens autrichiens manœuvrent dans la peur dans l'attente d'un second tour électoral difficile en mai ; en Suisse, en revanche, Mme Sommaruga n'a de comptes à rendre à personne. Soutenue par la majorité des parlementaires, elle peut ignorer royalement tant l'opinion publique que la crise des migrants et tout ce qui s'ensuit. Pareilles choses valent bien peu face à un crime de lèse-majesté.

Quelle ironie! La Suisse se veut une démocratie directe exemplaire mais la démocratie n'y est nulle part plus méprisée par sa classe politique. Il y a pourtant urgence: le flot des migrants ne faiblit pas et se rapproche toujours plus de la Suisse. S'il faut arriver en Allemagne et que l'Autriche se referme, par où passeront les hordes qui s'échouent en Italie? Si Budapest et Vienne ferment les portes et que Berne dilapide un temps précieux en crises d'ego, que va-t-il se passer?

Je vous laisse deviner.

Stéphane Montabert - Sur le Web et sur Lesobservateurs.ch, le 29 avril 2016

12 commentaires

  1. Posté par Un observateur le

    Si l’Europe avait fermé ses frontières de suite , nous n’en seriont pas là car le message serait vite passé et le flux des immigrants se serait arrêté ( comme en Australie).
    Nous assistons bien à une invasion/colonisation/islamisation/destruction rendue possible par la mollesse, la division et la lâcheté de l’Europe
    Ces immigrants économiques illégaux ont comme principal but de profiter du désordre actuel pour CHOISIR le pays le plus PROSPERE pour s’y installer définitivement sans retour et faire venir famille et enfants ( les mesures de retour à son pays d’origine après 3 ans découragent et font très mal….).
    Evidemment, le droit d’asile est le seul outil pour y arriver. C’est pourquoi tous disent être menacés , persécutés etc…
    L’autriche a compris quelle solution appliquer à cette invasion et sauver sa cohésion sociale, son mode de vie , ses organismes sociaux et surtout son âme, son histoire , son identité et ses valeurs communes.
    Les accords et lois d’après guerre sont totalement inadaptées à la situation actuelle inédite qui en réalité est un déplacement de populations pauvres vers des pays riches. Ce n’est que le début vu que l’Afrique est en train de doubler encore pour aller à 2,4 milliards…une bombe pour l’Europe dont ni l’ONU, ni l’Europe n’en parle….

  2. Posté par Myrisa Jones le

    Vienne et Berlin craignent un afflux massif de migrants en provenance d’Italie

    10.000 migrants restent bloqués à la frontière greco-macédonienne, suite à la fermeture de la route des Balkans. Beaucoup d’entre eux refusent de partir, confiants que la frontière finira par rouvrir, ce qui leur permettrait de poursuivre leur route vers l’Allemagne ou l’Autriche.

    http://www.fdesouche.com/724535-vienne-et-berlin-craignent-un-afflux-massif-de-migrants-en-provenance-ditalie

  3. Posté par groudonvert le

    Paraît que Norbert Hofer est le dirigeant du FPÖ. Y sont forts les journalistes français quand même =D

  4. Posté par Toriello le

    Il faut vraiment redéfinir ce que “terre d’asile” veut dire. Sauver des personnes en réelles danger de mort OK ! Cependant, la plupart ne sont pas ou plus en danger de mort, de plus, ces immigrants ont la “terre d’asile sélective”, soit surtout l’Allemagne, l’Angleterre et les pays nordiques.

  5. Posté par Daniy Dan le

    Dixit Parmelin à la radio : “il faut s’attendre à un certain chaos en Suisse, dans nos gares” etc..
    Et ils veulent diminuer la moitié de l’armée ! les Bildelbergers ont donné des ordres…. les Citoyens instruits conscients de leurs racines doivent disparaitre, les Chrétiens Fidèles doivent être exterminés, et personne ne doit s’opposer au NOM / NWO. Les “faschos”, “complotistes”, “nationalistes”, “patriotes”, ont RAISON…. malheureusement pour tous, Suisse et Etrangers qui aiment le pays ou ils vivent….

  6. Posté par groudonvert le

    Je me demande quelle politique migratoire le parlement et le Conseil Fédéral vont mettre en place, si l’UDC gagne ce référendum après avoir gagné le 18 octobre dernier.

    Dans tous les cas, ce référendum doit servir pour mettre un terme à la politique de Sommaruga.

  7. Posté par Le Taz le

    Monsieur Montabert bravo, excellent article.

  8. Posté par André Verk le

    Exemple parlant de la politique migratoire suisse: à cause de la guerre en Syrie, deux centres de réfugiés ont été récemment ouverts dans la région de Villars-sur-Ollon.
    La presse, citant les services de l’immigration, a précisé qu’il s’agirait surtout de familles avec enfants en bas âge.
    Depuis, quelques dizaines de jeunes mâles célibataires venus de Somalie et d’Erythrée s’y sont installés.

  9. Posté par Jeferson le

    @Jean-François Morf: Stalinovna ne “tourne pas autour du pot”. Elle s’asseye dessus. Comme sur les règles démocratiques d’ailleurs…

  10. Posté par Myrisa Jones le

    Il faut juste attendre que la situation s’envenime et cela est inévitable.
    C’est seulement à ce moment là qu’il y aura une réaction et que ce genre de personnes n’auront plus rien à dire. Espérons simplement qu’il ne s’agira pas d’années, mais de mois…

  11. Posté par P. Monnard le

    Le seul problème avec votre graphique et votre texte, M. Montabert, c’est qu’ils représentent la réalité. Les socialistes, on le sait bien, abhorrent cela tout comme leur porte-parole, la RTS.

    Le réel n’est qu’un détail embarrassant dans la construction de la société socialiste en cours.

  12. Posté par Jean-Francois Morf le

    Ce qu’ils peuvent tourner autour du pot, au lieu d’interdire tout simplement la sharia, les mosquées, les juges étrangers (imams, mollahs, rabbins, inventeurs de la sharia).
    “principe de précaution”: interdire l’islam, qui n’est ni une race ni une religion, mais une législation étrangère, la sharia, contraire aux droits de l’homme.
    Attentats en: USA, France, Belgique, Suède, soit des pays mahométanisés n’ayant pas appliqué le “principe de précaution”…

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