Tout le monde connaît l'initiative Minder. Ce n'est pas sans une certaine habileté que les médias d'Etat ont tenté de faire passer l'initiative du député schaffhousois pour la vengeance démago d'un petit patron frustré par l'affaire Swissair. L'Etat a gros à perdre dans la bataille, la justification de son utilité, et de son pensionnement, auprès de la haute finance et des conseils d'administration où siègent la quasi-totalité de nos parlementaires, mais pas seulement.
Ce qui semble porter le député Minder, c'est le retour du pouvoir au peuple, principal actionnaire de l'Etat dans une démocratie directe. Pour preuve une motion déposée en septembre, passée totalement inaperçue dans la presse et rejetée aussi sec sur avis du Conseil fédéral.
Thomas Minder y réclamait l'extension de la motion populaire au niveau fédéral. S'il concède que « les droits politiques [...] sont les piliers de notre démocratie directe » et que la motion populaire, dans les cantons où elle a été introduite, « a pu contribuer favorablement au débat politique », le Conseil fédéral écarte la proposition au prétexte que plus d'instruments démocratiques signifierait un... « un affaiblissement des droits populaires ». Le Conseil fédéral s'inquiète surtout de ce que ce droit serait l'exclusive des citoyens suisses et, pour l'exécutif suprême, des droits démocratiques réservés au peuple légitime d'une démocratie représentent « un préjudice » pour les... autres; allez comprendre.
Sans doute le député Minder n'est-il que le révélateur de ce lent retrait, tant en finance qu'en politique, de ses pouvoirs à la base, de ce passage discret d'une démocratie directe à une autre représentative. Une énarchie d'élites autoproclamées, élues à grands coups d'affiches publicitaires hors de prix, où, une fois le pouvoir confisqué, les dernières voix du peuple pour s'insurger seront traitées en parias, en quérulents, en patrons vindicatifs frustrés par leur perte de droits.
Et vous, qu'en pensez vous ?