QUE SE PASSE-T-IL AUX ÉTATS-UNIS ?

 

Par Michel Piccand
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Tout le monde a remarqué que depuis deux semaines la politique des États-Unis ressemble à une véritable gabegie, la presse mainstream américaine et européenne se réjouissant de l’avoir annoncée : vous voyez, on vous l’avait dit que Trump ne serait pas capable.
Force est de constater que Trump est revenu sur plusieurs des promesses faites durant sa campagne, du moins c’est ce que la presse mainstream raconte. Il ne veut plus désigner la Chine comme une manipulatrice de devise, l’Export-Import Bank [Eximbank] n’est plus l’ennemie à abattre, Obamacare ne peut plus être immédiatement abrogé et ce qui est souvent présenté comme la clé de ces revirements, la figure de la droite alternative Steve Bannon que Trump avait nommé Chef stratégiste semble gentiment poussé vers la sortie.
Alors petit décodage pour vous permettre d’y voir un peu plus clair.
Depuis deux mois un concept est devenu central pour comprendre ce qui se passe, c’est celui de DEEP STATE, que l’on pourrait traduire pas État profond, en Europe et en Suisse on parlerait plutôt d’administration ou d’État dans l'État. Si les têtes hiérarchiques de l’administration américaine peuvent en partie être changées par le nouveau président, la totalité du personnel de l’administration reste le même, et si ce personnel est opposé au nouveau président alors on comprend que dans la réalisation de ses plans politiques c’est un élément qui ne va pas collaborer.
[C’est aussi un problème en Suisse, les cadres de l’administration publique étant principalement mis en place par le PLR, PDC et PS. Et souvent le citoyen l’ignore mais les lois et les études économiques ne sont guère le fait des politiciens mais plutôt celui des économistes et des juristes de l’administration.]
Un exemple frappant que l’on peut associer au problème de DEEP STATE est celui de l’attitude qu’ont eue les juges américains face à l’ordre exécutif de Donald Trump de renforcer le contrôle de l’entrée des voyageurs en provenance de 7 pays musulmans, appelé de manière totalement trompeuse muslim ban. Que des juges s’opposent d’eux-mêmes à une mesure de sécurité intérieure, car c’en est une [l’ordre exécutif de mieux contrôler les voyageurs en provenance des 7 pays musulmans est lié à l’ordre enjoint pour l’armée US de préparer un plan pour en finir avec ISIS] est tout simplement surréaliste, si Obama ou même un autre président républicain avait pris des mesures identiques, et de telles mesures ont été prises par d’autres présidents, alors il n’y aurait pas eu d’opposition de ces juges. Pour ma part nul doute que sur cette question Trump aura raison devant la Cour suprême.
Ce qui s’est passé montre une chose, c’est que le président Trump a beaucoup d’ennemis et que l’administration est remplie d’opposants qui vont chercher par tous les moyens à contrarier ses décisions, à seule fin de les discréditer.
Un élément fondamental a par ailleurs été soigneusement caché aux lecteurs par la presse mainstream et particulièrement en Europe, c’est que les premiers ennemis de Trump ce sont les Républicains eux-mêmes et non les Démocrates, que le parti républicain des Bush n’attend que de mettre Trump à terre et le neutraliser.
La presse mainstream à force de vouloir dissimuler ce qui était en train de se passer aux USA a complétement occulté les éléments qui permettent de comprendre, et l’un de ces éléments est que contrairement à ce qui a été raconté il y a toute une idéologie derrière le mouvement qui a porté Trump au pouvoir, un mouvement populiste dans un pays où ce terme n’a pas le sens péjoratif qu’il a en Europe et qui veut en finir avec le crony capitalism, le capitalisme de connivence ou de copinage, qui concerne tant les Républicains de la famille Bush que les Démocrates d’Hillary Clinton. Ce qu’il y a dans le mouvement qui a porté Trump au pouvoir c’est une révolution du capitalisme et dont Steve Bannon est le représentant qui est en train d’être poussé apparemment vers la sortie.
Le fait que derrière ceux qui ont voté Trump il y avait une idéologie, une véritable idée de changement, a soigneusement été dissimulé, et pour cause. Si tous ceux qui ont voté pour Trump sont désignés méthodiquement comme aussi dangereux que les répliques d’un monstre comme Hannibal Lecter c’est qu’il y a une raison, ce seul fait devrait attirer l’attention. Derrière Steve Bannon, le chef stratégiste qu’on est en train de pousser vers la sortie, désigné comme l’homme le plus dangereux de la politique américaine, il y a une idéologie dont on comprend qu’elle fasse peur à l’establishment républicain-démocrate des États-Unis et aux pouvoirs en place en Europe.
On peut aimer ou ne pas aimer Steve Bannon, le personnage n’a rien de sympathique, il ne cherche pas à l’être, mais lorsqu’il décrit le capitalisme de connivence et les multiples copinages où tant les Républicains que les Démocrates s’enrichissent sur le dos des classes moyennes et laborieuses il est difficile de rester indifférent. Lorsqu’il explique comme lors de sa conférence au Vatican que le capitalisme d’aujourd’hui est re-devenu un capitalisme qui objectifie les gens, les titrise, les traite comme de simples marchandises, s’en sert comme d’un matériel jetable pour augmenter les profits des élites qu’elles soient de droite ou de gauche et qu’il faut leur opposer le retour à un capitalisme moral, Bannon dit un capitalisme chrétien, alors on comprend pourquoi les ententes du capitalisme néolibéral le désignent comme un homme dangereux.
Les propos et la position de Steve Bannon expliquent à peu près tout ce qui se passe en ce moment.
Lorsqu’on voit l’ancien président de la BNS Philippe Hildebrand, aujourd’hui l’un des vice-président de BlackRock, le plus gros fond d’investissement au monde, défendre l’élection du « socialiste » Macron en France - une hypothèse totalement surréaliste, l’hyper capitaliste défendant le socialiste - alors on comprend que cette alliance contre nature a une raison, et cette raison est la révolution populiste que Bannon décrit comme mondiale et qu’il prédit venir au pouvoir partout et qu’il nomme révolution mondiale de TEA party.
Si les gauches et les droites du crony capitalisme et du copinage, leurs médias aux ordres s’allient pour détruire absolument la révolte qui a mis Trump au pouvoir c’est qu’elles en ont peur. Trump hier était encore pour eux impossible, mais la révolte a eu lieu.
Avec l’élément Bannon, la révolte d’un capitalisme moral, la lecture de ce qui se passe aux États-Unis ces jours en devient plus facile. Trump est-il en train d’être pris dans les filets du crony capitalisme ? Il est clair que si les Républicains s’allient aux Démocrates pour l’empêcher d’agir sa marge de manœuvre n’ira pas loin. Mais alors attention au retour de bâton si le mouvement de la droite alternative qui l’a mis au pouvoir se sent trahie, l’équilibre intérieur des États-Unis pourrait devenir explosif et tout simplement voler en éclat.
On comprend alors que Trump a probablement très mal distribué les cartes à l’intérieur de son gouvernement, avec son beau-fils Jared Kushner, époux d’Ivanka, nommé conseiller spécial de la présidence, et qui toute sa vie a voté Démocrate… qui est un représentant type de ce crony capitalisme que le mouvement qui a porté Trump au pouvoir déteste et cherche à renverser. La contradiction parait insurmontable.
Steve Bannon est selon des sources internes à la Maison Blanche en train d’être gentiment poussé dehors et précisément par Jared Kushner, le beau-fils de Trump. Les propos de Trump sur Bannon semblent désavouer Bannon. Si ce dernier devait être exclu du gouvernement alors on peut s’attendre à des événements à l’intérieur même des États-Unis.
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Michel Piccand
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Pour en savoir plus sur les fondements de cette révolution dans le capitalisme, lire la Conférence au Vatican de Steve Bannon ici. *
La configuration politique des États-Unis se retrouve peu ou prou partout, avec Marine le Pen en France qui se voit opposer des alliances de socialistes avec des milliardaires français. En Suisse le peuple qui s’oppose désormais à l’alliance PLR-PDC-PS. Il semble que Bannon en voyant une révolution mondiale de TEA party partout dans le monde, y compris avec l’élection du premier ministre indien Modi, ait raison. Si la révolte du peuple américain échoue elle pourrait se passer dans bien d’autres endroits du monde, le Brexit qui en est la version britannique est en train de réussir, le Tea party américain y a contribué. On pourrait imaginer que des soutiens arrivent bientôt du monde anglo-saxon pour soutenir le peuple suisse qui vient de se faire voler sa Constitution par le capitalisme de copinage helvétique nommément la trinité PLR-PDC-PS, même si j’espère que les Suisses seront plus fiers que ça et vont enfin commencer à vraiment réagir et ne plus simplement attendre les initiatives de l’UDC sur notre souveraineté qui, on vient de le voir, ne sont de toute façon pas appliquées.
Pour rappel la notion de TEA party, « Taxed Enough Already » (déjà assez taxé), est plus qu’un mouvement de révolte fiscale mais représente bien dans son concept des alliances disparates parmi le peuple pour se révolter contre les abus gouvernementaux des partis politiques au pouvoir et contre leur confiscation de la démocratie.
Ce texte peut librement circuler et être partagé.
 
*[si le livre vous est inaccessible sous .fr essayez .com ou .de]

2 commentaires

  1. Posté par miranda le

    En lisant cet article on a l’impression que GOUVERNER DEVIENT DE PLUS EN PLUS UN ACTE ACROBATIQUE, VOIRE DANGEREUX, selon les alliances directes ou indirectes, les différents acteurs dans la hiérarchie de l’état, les multipes trahisons ou véritables engagements de l’entourage.

    On le savait « intuitivement », mais quand des articles nous le confirment avec précision, ON SENT AUSSI QUE CEUX QUI GOUVERNENT ONT PERDU DE VUE L’ESSENTIEL : LA FOI EN UNE NATION, LA VOLONTE DE LA PROTEGER, DE LA PROLONGER.

    Aujourd’hui, ce qui prédomine, c’est « la marche économique » non pas pour le pays, pour les ^citoyens qui la composent, mais pour le PROFIT DE QUELQUES UNS. C’est une marche économique suicidaire puisqu’à concentrer le pouvoir économique vers quelques uns, elle s’assèche, elle se désertifie EN SE PRIVANT DE L’ENERGIE VITALE DE SES MEMBRES..

    L’économie est avant tout UN PERPETUEL ECHANGE DES ENERGIES VITALES DE SES MEMBRES.

    L’oublier c’est devenir UN ARBRE qui, faute de n’avoir pas su alimenter ses branches, productrices de vie et de renaissance grâce à leurs graines fertiles , est sur le point de DEVENIR UN TRONC SEC engagé dans la mort…

    L’Amérique d’EN HAUT s’épuise peu à peu dans son INAPTITUDE, SON INCAPACITE A AIMER LE MONDE QUI LA COMPOSE ET LE MONDE GLOBAL. L’Amérique avance dans sa décadence. Ne la laissons pas nous y entraîner.Ne la laissons pas nous imposer ce modèle de décadence. Nous sommes dignes de mieux.

    A écouter MARINE LE PEN, hier soir sur LCI lors de sa conférence à BERCY, j’ai le sentiment qu’elle a compris tout cela et qu’elle est en capacité d’aimer une nation, qu’elle sait que l’arbre France a des racines capables d’alimenter ses branches pourvoyeuses d’énergies vitales et de renaissance.

  2. Posté par Le Taz le

    Excellente analyse. La question est qui contrôle le deep state ? Mon petit doigt me dit qu’il faut lorgner du côté de la Federal Reserve…

Et vous, qu'en pensez vous ?

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