« Il faut supprimer l’initiative populaire rédigée en termes précis »

Astrid Epiney (photo), rectrice de l'Université de Fribourg, souhaite régler la problématique de l'application des initiatives opposées aux engagements internationaux de la Suisse. Sa solution: ne voter que sur des textes d'ordre général.

Invitée de la grande interview du dimanche dans l'émission Forum de La Première, Astrid Epiney, rectrice de l'Université de Fribourg, estime que le peuple ne devrait se prononcer que sur des initiatives formulées en termes généraux.

Selon elle, cela éviterait les frictions qui apparaissent lorsqu’un texte constitutionnel rédigé en termes précis est en contradiction avec la Constitution ou les engagements internationaux de la Suisse.

Adhésion populaire difficile

Et "il n’y aurait pas moins de démocratie", puisque le peuple aurait toujours le mot de la fin puisque le peuple pourrait toujours combattre la loi d'application par référendum, précise cette professeure de droit de 49 ans.

Astrid Epiney, qui a pris ses fonctions de rectrice il y a une semaine, reconnaît que sa proposition de biffer le droit d’initiative formulée en termes précis a peu de chances aujourd'hui de rencontrer l'adhésion populaire.

Mais elle en est convaincue: si les frictions continuent de se multiplier ces prochaines années - comme pour le renvoi des criminels étrangers ou l'initiative anti-immigration de l'UDC -, on finira par y arriver.

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Ces votes du peuple qui dérangent tant nos élus !

Par Claude -Alain Voiblet

Refuser la construction de minarets, de renvoyer les criminels étrangers ou de limiter l’immigration, sont autant de décisions politiques, soutenues par le peuple et les cantons, qui imposeraient à nos gouvernants de changer leur politique ! Pour autant le Conseil fédéral et les chambres fédérales ne veulent pas de ces décisions incontestables du souverain !

Au lieu de renvoyer 18000 criminels étrangers par année, nos autorités renvoient péniblement 500 personnes ; au lieu de limiter l’immigration de masse, elles mettent en place les conditions pour un nouveau vote du peuple permettant de changer cette décision ! Ce n’est pas ce que nous attendons de représentants du peuple mais nous exigeons d’eux qu’ils respectent la démocratie directe et les décisions du souverain.

Comment nos élus peuvent-ils d’un revers de main balayer ces décisions ? En invoquant la Cour européenne des droits de l’homme, le droit étranger et les juges étrangers ! Cela n’est plus acceptable pour notre pays qui, rappelons-le, est un Etat indépendant et souverain. La sauvegarde de l'indépendance du pays est une mission de notre Etat, un pays est vraiment indépendant lorsqu’il fixe lui-même ses propres règles.

La Suisse va signer avec l’UE un accord qui vise à reprendre de manière dynamique - donc automatique - le droit UE par notre pays. Cet accord nous contraindra à reprendre le droit étranger et à accepter des juges étrangers en restreignant l'autodétermination et la démocratie directe.

Il diminuera notre indépendance en donnant la priorité au droit international sur notre Constitution permettant ainsi de ne plus appliquer les décisions du peuple !

Pour contraindre nos gouvernants à s’exécuter devant les décisions du souverain, l’UDC a lancé une initiative «Le droit suisse au lieu de juges étrangers» car il est temps que les décisions du peuple soient respectées par ses représentants !

Droit national et droit international.

Il ne reste à l'UDC que la voie de l'initiative populaire

Le Conseil national a rejeté deux autres initiatives parlementaires de l'UDC qui visaient à clarifier les rapports entre le droit national et le droit international.

Le Conseil national a rejeté hier deux autres initiatives parlementaires de l'UDC qui visaient à clarifier les rapports entre le droit national et le droit international. La semaine dernière, la Grande Chambre avait déjà refusé de revenir à la règlementation qui a fait ses preuves, à savoir de rétablir la Constitution fédérale comme source suprême de droit de la Confédération suisse. Plusieurs décisions prises ces dernières années par des autorités politiques et judiciaires ont donné la priorité au droit international par rapport au droit suisse qui, lui, est démocratiquement légitimé. La voie parlementaire permettant de corriger ces déficiences ayant été refusée à l'UDC, il ne reste donc à celle-ci que le moyen de l'initiative populaire. Le 25 octobre prochain, l'assemblée des délégués de l'UDC Suisse prendra une décision de principe quant au lancement d'une telle initiative.

En octobre 2013, le Tribunal fédéral a statué dans un arrêt que même le droit international non impératif doit, d'une manière générale, avoir la priorité sur la Constitution fédérale. Cette décision constituait le point culminant d'une stratégie poursuivie depuis longtemps par des élus politiques et professeurs de droit qui refusent d'appliquer des décisions du peuple ou n'acceptent de les appliquer que partiellement. L'influence grandissante des organisations et tribunaux internationaux, comme la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), sur le droit suisse va dans le même sens. Le législateur a de moins en moins de compétence de décider du droit valable en Suisse. Qui plus est, un projet d'accord institutionnel entre la Suisse et l'UE contraindrait la Suisse de reprendre du droit européen dans tous les domaines importants. Pour faire bonne mesure, des juges UE décideraient de l'interprétation des accords entre la Suisse et l'UE.

L'initiative populaire est prête

L'UDC a donc présenté récemment un projet d'initiative qui redonne au droit suisse la priorité par rapport au droit international. L'initiative populaire "pour l'application des décisions du peuple – le droit suisse prime le droit international" combat l'affaiblissement et l'invalidation des droits démocratiques. Il ne sera plus permis d'empêcher l'application de la Constitution fédérale sous le prétexte qu'elle est contraire au droit international. Si un traité d'Etat est en contradiction avec la Constitution fédérale, il devra être renégocié ou, si cela n'est pas possible, résilié. Des nouveaux traités d'Etat contraires à la Constitution ne pourront évidemment plus être conclus. Seul le droit international impératif aura la priorité sur la Constitution fédérale – comme cela est déjà prévu dans la Constitution actuelle. Pour empêcher que cette notion soit abusivement étendue, elle devra être définie conformément à la Convention de 1969 sur le droit des traités d'Etat.

Le 25 octobre prochain, les délégués de l'UDC Suisse prendront une décision de principe quant au lancement d'une telle initiative populaire. Il n'y a plus d'autre solution, le Conseil national ayant définitivement fermé la porte à la voie parlementaire. Cette initiative populaire rétablira la sécurité du droit dans des domaines importants.

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