Mercredi 25 mai 2016
Madame la Conseillère fédérale,
J’ai lu ce matin, dans Le Temps, que la bénédiction du tunnel de base du Gothard, le 1er juin prochain, sera faite par l’Abbé d’Einsiedeln et que celui-ci sera assisté d’un rabbin et d’un imam ; il semble qu’aucun représentant des églises protestantes de Suisse n’a été convié à se joindre à cette bénédiction.
Auriez-vous l’obligeance d’indiquer au modeste protestant que je suis pour quel motif l’on tient ainsi à l’écart une communauté aussi importante que la communauté réformée et qu’en parallèle, l’on donne une telle place à une religion qui pose des problèmes grandissants dans notre pays ?
Je vous en remercie d’avance et vous prie de croire, madame la Conseillère fédéral, à l’expression de ma haute considération.
Jean-Luc Addor
Conseiller national
Monsieur le Conseiller national,
Je vous remercie de votre courriel auquel je réponds volontiers comme suit :
Je peux vous assurer que l’Église réformée n’a pas du tout été laissée pour compte. Bien au contraire, l’idée initiale était de montrer le caractère unificateur du tunnel dans la bénédiction. C’est pourquoi il était prévu qu’un représentant de chaque religion (mais pas de chaque confession) accomplisse la bénédiction : un chrétien, un juif et un musulman. Cette cérémonie interreligieuse aurait dû symboliser l’unité des chrétiens (un pour tous). À notre demande, le Comité de la Communauté de travail des Églises chrétiennes en Suisse (CTEC) a désigné à l’unanimité le Père Martin Werlen comme représentant de tous les baptisés et a approuvé que cette représentation par une personne symbolise l’unité des chrétiens.
Or force est de constater que cette idée n’a pas été comprise par de nombreux croyants. Apparemment, ce qui divise les confessions chrétiennes est plus fort que ce qui les unit. Pour cette raison, lors d’une réunion présidée par le DETEC, il a été décidé que les chrétiens seraient représentés par deux personnes, l’une issue de la tradition catholique et l’autre de la tradition protestante.
Dans l’intervalle, la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) a nommé Simona Rauch, pasteure réformée italophone, de Vicosoprano. Madame Rauch assurera donc la cérémonie en compagnie du Père Martin Werlen et des autres représentants (un rabbin, un imam et un représentant des personnes sans appartenance religieuse).
J’espère que ces explications auront dissipé vos préoccupations.
Veuillez agréer, monsieur le Conseiller national, l’expression de mes salutations distinguées.
Doris Leuthard
Conseillère fédérale
Madame la Conseillère fédérale,
Je vous remercie pour votre réponse et prends acte de ce qu’au moins, les chrétiens réformés seront représentés. Je m’en félicite, évidemment. Et contrairement à vous, je n’y vois nul signe de division, mais la simple reconnaissance de la diversité des chrétiens de ce pays.
Cela étant, je me permets de vous rappeler que dans mon courriel du 11 mai dernier, j’avais soulevé une seconde question liée, elle, à la présence d’un imam pour la bénédiction de l’ouvrage qui sera inauguré le 1er juin.
A cet égard, permettez-moi de penser qu’il est inacceptable que pour participer à la bénédiction de ce que vous présentez comme la plus grande infrastructure que la Suisse ait jamais réalisée, donc pour un élément de fierté pour notre pays, vous invitiez un étranger (un Macédonien, si j’ai bien compris) à la représentativité douteuse (qu’est-ce, finalement que cette organisation faîtière dont il est président ?) et qui pourrait avoir pour le moins des liens avec des milieux islamistes radicaux à l’étranger. Permettez-moi-même d’aller plus loin et de contester la légitimité de la participation, à cette bénédiction, du représentant d’une religion qui, en Suisse, n’est ni traditionnelle ni officielle, qui est en réalité une religion politique dont certains principes sont incompatibles avec ceux de notre civilisation, voire de notre ordre juridique (je pense en particulier à une certaine idée de la dignité de la femme à laquelle nous sommes attachés – vous aussi, j’espère – dans ce pays).
Ainsi, je suis fier, évidemment, avec mes compatriotes, de ce que notre pays ait été capable de réaliser un tel ouvrage. Mais vous comprendrez, je l’espère, que je n’entends pas en revanche cautionner, même si ma présence serait fort modeste, ce que je considère comme une forme de soumission face à une religion politique conquérante dont certains représentants (peut-être d’ailleurs entre autres certains imams avec lesquels l’imam Bekim Alimi aurait des contacts si j’en crois ce que j’ai lu dans les médias) déclarent ouvertement leur hostilité à l’Occident chrétien et à notre civilisation.
Je vous prie en conséquence de bien vouloir excuser mon absence à la cérémonie et aux festivités du 1er juin.
Je vous remercie d’avance pour votre compréhension et vous prie de croire, Madame la Conseillère fédérale, à l’expression de ma haute considération.
Jean-Luc Addor, conseiller national