Haut-Karabakh : les Arméniens brûlent leurs maisons avant d’être obligés de partir

«C'est ma maison, je ne peux pas la laisser aux Turcs», comme sont souvent qualifiés les Azerbaïdjanais par les Arméniens, a expliqué, le visage fermé, le propriétaire de l'une de ces maisons en jetant des planches de bois enflammées et tisons imbibés d'essence pour tenter d'incendier le parquet de son ancien salon, dans une habitation complètement vidée. (NDLR : Le chef de l’Office de la communication de la présidence turque Fahrettin Altun a partagé le message suivant : « Deux Etats, une Nation » en parlant de la Turquie et de l'Azerbaïdjan.)

 

 

 

 

«On attendait pour être fixé. Mais quand ils ont commencé à démonter la station hydro-électrique, on a compris», ajoute-t-il. «Tout le monde va brûler sa maison aujourd'hui (...) On nous a donné jusqu'à minuit pour partir». «On a aussi bougé la tombe des parents, les Azerbaïdjanais vont se faire un malin plaisir à profaner nos tombes, c'est insupportable», ajoute-t-il. La veille, au moins une dizaine d'habitations ont été incendiées dans ce même village et ses environs.

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Le Figaro

 

Haut-Karabakh. Le président azerbaïdjanais déclare : “On a chassé les Arméniens comme des chiens”

Le président russe, Vladimir Poutine, a confirmé un accord entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan de « cessez-le-feu total » des combats pour la région du Haut-Karabakh en vigueur depuis 22 heures, heure de Paris, lundi 9 novembre.

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Chassés « de nos terres comme des chiens »

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, s’est, lui, félicité d’une « capitulation » de l’Arménie. « Nous avons forcé [le premier ministre arménien] à signer le document, cela revient à une capitulation », a-t-il dit à la télévision. « J’avais dit qu’on chasserait [les Arméniens] de nos terres comme des chiens, et nous l’avons fait », a-t-il ajouté.

« L’Azerbaïdjan a remporté des gains importants sur le terrain et à la table des négociations. Je la félicite chaleureusement pour ce succès », a déclaré sur Twitter, mardi 10 novembre, le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Çavusoglu, dont le pays a pris fait et cause pour Bakou dans le conflit.

Une foule en colère

Une foule de milliers de manifestants en colère s’est rassemblée aux abords du siège du gouvernement arménien dès l’annonce de cet accord de fin des hostilités qui semble consacrer une victoire militaire de l’Azerbaïdjan. Des centaines d’entre eux ont pénétré dans les locaux, brisant des vitres et saccageant des bureaux, selon un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP) présent sur place.

Le Monde

 


 

 

 

 

 

 

Via Fdesouche

Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est “une question de vie ou de mort” pour les habitants du Haut-Karabakh

Laurent Leylekian, spécialiste de l'Asie mineure et du Caucase du Sud, décrypte les enjeux géopolitiques de cette guerre, qui dure depuis plusieurs décennies.

Un appel unanime. Les présidents russe, Vladimir Poutine, français, Emmanuel Macron, et américain, Donald Trump, ont appelé, jeudi 1er octobre, dans un communiqué commun, à "la cessation immédiate des hostilités" dans le Haut-Karabakh, ce territoire azerbaïdjanais séparatiste soutenu par l'Arménie. Depuis cinq jours, les combats entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie sont sanglants. La reprise des affrontements, les plus graves depuis 2016, font craindre une guerre ouverte entre Bakou et Erevan, à même de déstabiliser une zone déjà fragile où les intérêts de nombreuses puissances sont en concurrence.

La Russie, la France et les Etats-Unis, qui coprésident le Groupe de Minsk créé en 1992 pour rechercher un accord entre les deux pays, ne sont pas parvenus à trouver un règlement durable du conflit dans ce territoire en majorité peuplé d'Arméniens et ayant fait sécession de l'Azerbaïdjan. Une guerre au tournant des années 1990 y avait fait 30 000 morts.

Laurent Leylekian, spécialiste de l'Asie mineure et du Caucase du Sud, fait le point pour franceinfo sur les enjeux géopolitiques de ce conflit et sur le rôle éventuel des acteurs internationaux dans la résolution de la crise.

 

 

 

 

Franceinfo : Quels sont les enjeux pour l'Azerbaïdjan et l'Arménie dans ce conflit ?

Laurent Leylekian : Pour l'Azerbaïdjan, c'est essentiellement une question de fierté. Tandis que pour les Arméniens qui vivent dans la région du Haut-Karabakh, c'est une question de vie ou de mort. On présente ce conflit entre deux Etats comme s'il avait lieu sur une terre qui serait vide de population. Or, des gens vivent au Haut-Karabakh. Il y a 150 000 habitants au total, et tous sont Arméniens. Ils se sont constitués en Etat indépendant après la guerre qui a eu lieu entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, il y a trente ans (1988-1994).

Le choix pour ce territoire, c'était d'être indépendant ou d'être mort. Pour comprendre, il faut regarder l'exemple d'une autre enclave : le Nakhitchevan. L'Arménie et l'Azerbaïdjan s'en sont disputé le contrôle et ce territoire dépend aujourd'hui de l'Azerbaïdjan. Au début du XXe siècle, il y avait pas loin de 100% d'Arméniens sur cette terre. Comme au Karabakh. Et en raison d'un processus violent d'homogénéisation ethnique, il n'y a tout simplement plus d'Arméniens sur ce territoire. Ils ont été expulsés ou massacrés. Et c'est précisément cela que craignent les habitants du Haut-Karabakh. Les Arméniens ont gagné la guerre il y a trente ans et aujourd'hui, ils ne veulent absolument pas revenir dans le giron azerbaïdjanais. Ils ont construit un Etat plus démocratique que l'Azerbaïdjan, qui est, rappelons-le, une dictature. Et ils craignent pour leur vie. Car il s'est développé en Azerbaïdjan une rhétorique raciale anti-arménienne très claire.

 

Pourquoi la Turquie se mêle-t-elle du conflit ?

La Turquie soutient de manière claire et avérée l'Azerbaïdjan. Car il y a une vraie fraternité entre les Turcs et les Azéris. Ce sont des peuples cousins. Ils parlent la même langue et ont même un slogan pour montrer leur union : "Une nation, deux Etats".

Mais pour l'instant, la Turquie se mêle du conflit de manière préventive, pour des raisons qui relèvent de sa politique intérieure. Car en 2023, il y aura des élections générales et Recep Tayyip Erdogan n'est pas du tout sûr de gagner, pour la première fois depuis vingt ans. C'est pour cela qu'il mène des guerres ou des bras de fer un peu partout (on l'a vu en Grèce, en Libye, en Syrie).

 

 

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Erdogan a donc poussé le dirigeant de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, à faire la guerre. Ilham Aliyev voulait la gagner rapidement. Ce qui était possible, en théorie, puisque le budget militaire total de l'Azerbaïdjan représente à lui seul celui de l'Arménie et celui du Haut-Karabakh. L'Arménie et l'Azerbaïdjan ne jouent pas dans la même cour de ce point de vue. Mais le Karabakh est un terrain montagneux, difficile d'accès. Donc le conflit s'embourbe.

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Francetvinfo.fr

Ce qui se joue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Antoine Colonna -Valeurs actuelles

Le rédacteur en chef des pages internationales de Valeurs actuelles explique la guerre en Azerbaïjan, dans la province du Haut-Karabakh.

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Analyse RTS: https://www.rts.ch/play/radio/forum/audio/le-conflit-dans-le-haut-karabakh-ne-faiblit-pas-interview-de-vicken-cheterian?id=11634326

Le conflit dans le Haut-Karabakh ne faiblit pas: interview de Vicken Cheterian, chargé de cours à l’Université de Genève, spécialiste du Caucase.

Vicken Cheterian:  Les mercenaires djihadistes qui se battent sur le terrain ont une motivation purement matérielle.

RTS: Est-ce qu'il y a un conflit civilisationnel?

Vicken Cheterian ne le croit pas, c'est un conflit extra-territorial, la logique du conflit de civilisation ne marche pas.

Témoignages exclusifs : les mercenaires syriens d’Erdogan se déploient au Haut Karabakh contre l’Arménie

Depuis la mi-septembre, plus d'un millier de miliciens ont été recrutés en Syrie par la Turquie et acheminés dans la région séparatiste où s'affrontent l'Arménie et l'Azebaïdjan. L'Express a pu joindre des responsables militaires sur place.

 

 

Après le Nord de la Syrie et la Tripolitaine en Libye, les mercenaires syriens à la solde de la Turquie sont désormais déployés dans la région séparatiste à majorité arménienne du Karabakh, en soutien de l'Azerbaïdjan, qui tente de reconquérir par la force cette zone depuis samedi dernier. Depuis la mi-septembre, plus d'un millier de miliciens supplétifs ont été recrutés en Syrie et acheminés par avions dans le Caucase, selon des responsables de ces groupes armés. L'information, vivement contestée par l'Azerbaïdjan, a circulé sur les réseaux sociaux et a pu être confirmée grâce à plusieurs témoins directs, joints par téléphone depuis leur nouveau terrain de guerre.

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Lexpress.fr

L’Azerbaïdjan et l’Arménie au bord de la guerre. L’islamiste Erdogan promet de soutenir l’Azerbaïdjan

L’opération azerbaïdjanaise a commencé à 7 h 10, heure locale, tout le long de la «ligne de contact» du Haut-Karabakh. Un déploiement de forces terrestres et aériennes «probablement plus massif que lors de la guerre des quatre jours d’avril 2016», déplore un expert militaire occidental en poste dans le Caucase. Avions de chasse, hélicoptères, drones de combat, chars T-72, Bakou s’est lancé dans une offensive de grande envergure après avoir, la semaine passée, mobilisé ses réservistes et réquisitionné des pick-up 4 × 4 de particuliers.

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Mise en garde

La répétition du scénario de 2016 inquiète en ce que l’Azerbaïdjan ne peut pas faire moins cette fois-ci, en termes de territoires reconquis. Il y avait eu alors 230 morts de part et d’autre, militaires et civils. À l’occasion d’autres échauffourées début juillet, plus au nord sur la frontière internationale entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, d’importantes manifestations s’étaient produites à Bakou pour demander la reconquête de cette province placée sous la juridiction de leur République pendant l’ère soviétique, bien que peuplée majoritairement d’Arméniens. Elle a été reprise par le côté arménien au terme de la guerre de 1988-1994.

Le président de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliev, doit certes satisfaire l’humeur nationaliste de son peuple, qu’il contribue à entretenir depuis des années par ailleurs. «Mais cela va au-delà», confie un diplomate très au fait du dossier. «Aliev est aussi extrêmement frustré par le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, après avoir cru qu’il ferait progresser le dialogue. Il lui reproche aujourd’hui de faire du populisme en se servant du Karabakh, de se rendre trop souvent dans cette province et de l’avoir aidée à renforcer ses infrastructures de défense.»

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a promis de «soutenir nos frères azerbaïdjanais», ce à quoi le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a répondu par une mise en garde contre l’ingérence «agressive» de la Turquie. Sur le front diplomatique, l’acteur clé dans ce conflit qu’est la Russie a appelé à un «cessez-le-feu immédiat», elle qui mène actuellement de grandes manœuvres militaires dans le Caucase du Nord. Cependant, diverses sources à Bakou et dans la région estiment que les Russes ont encouragé Aliev à passer à l’offensive du fait que Pachinian «les énerve beaucoup». Ils lui reprochent à la fois le succès de la «révolution de velours» du printemps 2018, et d’avoir pris des décisions «hostiles» à la Russie, comme l’emprisonnement de l’ancien président pro-russe Robert Kotcharian. «Le problème vient aussi du manque de médiation internationale proactive, laquelle aurait dû être engagée après les clashs de juillet dernier», estime Olesya Vartanian, analyste Caucase du Sud de l’International Crisis Group.

Le secrétairegénéral de l’ONU, Antonio Guterres, tout comme Washington, a appelé dimanche «à cesser immédiatement les combats». Emmanuel Macron a fait part de sa «vive préoccupation» et a dit «sa disponibilité à contribuer à un règlement pacifique et durable de la question du Haut-Karabakh».

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Le Figaro