Ses adversaires comme ses anciens alliés le traitent de saboteur, d’inconséquent ou de déloyal, mais il reste incontournable. Grand vainqueur des élections législatives de 2023, Geert Wilders, l’enfant terrible de la scène politique néerlandaise, a fait chuter, début juin, la coalition au pouvoir. L’homme à la coiffure peroxydée avait dû renoncer au poste de Premier ministre, mais son parti s’était vu attribuer neuf postes au gouvernement.
Depuis son siège au Parlement, le leader du Parti pour la liberté (PVV) a pu s’attribuer les mérites de l’action gouvernementale tout en se tenant à distance de ses échecs. Au bout de trois cent trente-six jours d’une gouvernance chaotique, en coalition avec le Parti populaire pour la liberté et la démocratie (VVD, libéral), le Nouveau Contrat Social (NSC, centriste) et le Mouvement agriculteur-citoyen (BBB), Geert Wilders a claqué la porte, quand ses trois partenaires ont refusé d’avaliser son plan en dix points sur l’asile et l’ immigration comportant, entre autres, la mobilisation de l’armée pour surveiller les frontières, l’expulsion des réfugiés syriens et le gel du regroupement familial.
Retour aux fondamentaux : l’immigration
Alors que les élections législatives ont lieu ce mercredi 29 octobre, ses supporters semblent le croire sur parole : ce n’est pas l’incompétence mais le sabotage de ses partenaires de la coalition qui ont, selon lui, empêché le PVV d’atteindre ses objectifs. Peu importent les maigres résultats obtenus par Marjolein Faber, ministre PVV de l’Asile et de la Migration, la campagne électorale a permis à Geert Wilders de reprendre son thème favori en exigeant le refus de toute demande du statut de réfugié, la fin du regroupement familial et la fermeture des centres d’accueil pour les demandeurs d’asile (AZC). Sans compter le renvoi dans leur pays de tous les hommes adultes ukrainiens. Ce retour aux fondamentaux se révèle payant : le PVV devrait rester la force politique dominante pour la deuxième élection consécutive. « Pour les partisans du PVV, l’immigration est un problème existentiel » , explique Bas Heijne, rédacteur en chef du quotidien NRC Handelsblad . « C’est la peur d’une perte radicale d’identité, d’être dépassé ou anéanti. »
Benjamin d’une famille de quatre enfants, Wilders a été élevé par une mère d’origine indonésienne dans la province reculée du Limbourg, une expérience qui l’a préparé au rôle d’outsider. De son propre aveu, c’est à l’âge de 17 ans, lors d’un séjour dans une colonie israélienne en Cisjordanie, qu’il a appris à « se battre comme l’ennemi » en s’affranchissant du « politiquementcorrect ». Plus tard, assistant politique du VVD à La Haye, son fort accent du Sud et son absence de diplôme universitaire ne l’empêchent pas de gravir les échelons jusqu’à devenir député. Avec son humour mordant et ses répliques incendiaires, il se distingue par sa dénonciation de l’islam, jusqu’à rompre, en 2004, avec la ligne du parti en s’opposant à la candidature de la Turquie à l’Union européenne. La même année, l’assassinat du réalisateur Theo Van Gogh, éminent critique de l’islam, intervient deux ans après celui de Pim Fortuyn, le premier homme politique néerlandais qui s’est positionné sur l’hostilité à l’immigration musulmane. « Geert Wilders a très vite comblé le vide politique laissé par Fortuyn, décrypte l’analyste Lisa Johan. D’autres ont émergé dans le même sillage, tels que le Forum pour la démocratie (FVD) de Thierry Baudet et Juste Réponse (JA21) de Joost Eerdmans, mais aucun n’a atteint la popularité du PVV. »
Les idées de Wilders ont infusé dans tout le Parlement
Président et seul membre du PVV, Wilders dirige son parti en solo, entouré d’un petit groupe de fidèles, sans congrès ni sections locales. Pendant des années, le PVV est resté à l’écart du pouvoir, jugé trop extrémiste pour gouverner. Geert Wilders s’est résigné à vivre sous protection policière 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, accompagné partout par des gardes du corps. Tout a changé lors des dernières élections, en novembre 2023, lorsque sa formation a remporté une victoire historique avec 23,49 % des voix et 37 sièges sur les 150 de la Seconde Chambre. Devenu le premier parti politique des Pays-Bas, le PVV a enfin accédé au pouvoir. Considéré comme trop toxique pour diriger le gouvernement, Wilders a pu choisir le Premier ministre, l’ancien chef du renseignement Dick Schoof. Mais cette expérience de moins d’un an a laissé des traces. Les partis associés au PVV dans la coalition sortante en paient aujourd’hui le prix : les centristes du NSC devraient quitter le Parlement et, à la veille du scrutin, le parti BBB plafonnait à 3 % des intentions de vote, tandis que le VVD chutait à environ 10 %. Geert Wilders a beau proclamer haut et fort que, cette fois-ci, il deviendra Premier ministre, les partis centristes, issus du libéralisme, de la démocratie chrétienne ou de la social-démocratie, semblent exclure de former un gouvernement avec un allié aussi encombrant et peu fiable.
Dans le système électoral néerlandais basé sur la représentation proportionnelle, chaque parti obtient un nombre de sièges correspondant à sa part des suffrages exprimés. Pour gouverner, une alliance d’au moins 76 sièges sera indispensable. Quelle que soit l’issue des négociations de coalition, Geert Wilders, plus à l’aise dans la protestation que dans l’art de gouverner, pèsera de tout son poids sur l’équation politique. « Le centre a peut-être davantage l’initiative, mais la droite radicale a injecté ses idées dans le débat national et domine l’agenda politique », souligne le journaliste Guus Valk. Désormais, les libéraux du VVD ne sont plus les seuls à s’approprier les thèmes de l’immigration et de l’asile, suivis par le parti de centre gauche D66. Même l’alliance du Parti du travail (PvdA) et de la Gauche verte (GroenLinks), conduite par l’ancien commissaire européen Frans Timmermans, souhaite désormais un maximum net de 40 000 à 60 000 migrants par an.
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