Terreur au sein de l’administration suisse (2)

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Jean-Pierre Sow – Lors de l’édition précédente (N° 233 – 21 août 2024), nous avons rapporté dans les grandes lignes l’article de la Weltwoche qui traitait de l’écartement des deux divisionnaires Mathias Tüscher et Guy Vallat, mais également des ambassadeurs Jean-Daniel Ruch et Thomas Greminger.
Dans le cas de Tüscher, un élément n’a pas été officiellement mis en lumière qui pourtant s’avère capital : selon nos informations, le divisionnaire aurait refusé la nomination de la première «aumonière» militaire musulmane au sein de sa Division. Mis sous pression à ce sujet, puis interrogé de façon insistante sur sa vie privée, il aurait finalement présenté sa démission pour mettre fin aux interrogatoires inquisiteurs. Quelles sont les raisons profondes de cet écartement et qu’est-ce qui relève du prétexte ? Notons que la Loi sur La sécurité de l’information (LSI) propose explicitement les quatre conditions (individuellement suffisantes) pour pouvoir établir un contrôle de sécurité négatif : manque d’intégrité ou de loyauté ; vulnérabilité au chantage ou à la corruption ; absence de pleine capacité de jugement ou de décision. Les motifs sont donc graves.

Selon nos informations exclusives
D’autres procédures sont en cours, les personnes touchées ayant été suspendues de leurs fonctions jusqu’à nouvel avis. Il est notamment reproché à un employé du DFAE d’avoir rencontré un diplomate russe sans en avoir averti ses services. Or aucune interdiction ni mise en garde n’avait pourtant été communiquée ; de plus, ledit employé rencontrait régulièrement des membres d’autres corps diplomatiques et organisations internationales, puisque son travail consistait notamment en la constitution de réseaux liés à la sécurité. En l’occurrence, ayant publié sur les sujets de la neutralité et de la présence russe en Afrique, il était particulièrement intéressé à échanger sur ces sujets. Son intérêt relevait donc plus de la curiosité personnelle que de la relation professionnelle. Pourtant, son contrat de travail est menacé d’être dénoncé d’ici la fin de l’année.
On est en droit de se demander qui sont ces inspecteurs internes qui œuvrent dans l’ombre à trier l’ivraie du bon grain. Qui les a sélectionnés et selon quels critères ? De quelles qualifications disposent-ils ? Sont-ils eux-mêmes soumis à un contrôle ? Finalement, qui définira l’intégrité, la loyauté, ou la vulnérabilité au chantage ou à la corruption ? Il semblerait hélas que chaque individu concerné devra porter son affaire devant les tribunaux pour savoir s’il reste au sein des autorités de ce pays une once de bon sens et de bonne foi. Dans le cas précis, relevons que ledit employé avait publié un article sur la politique de neutralité deux mois avant sa suspension. Un hasard ?
Quoi qu’il en soit précisément, il se passe au sein du Secrétariat d’État en charge des questions de sécurité du DDPS – précisément celui pour lequel les ambassadeurs Ruch et Greminger avaient été écartés – un phénomène inquiétant: les procédures se durcissent, l’atmosphère se crispe, les rapports se durcissent. Si même des employés subalternes se voient considérés comme des «risques pour la sécurité» du pays en raison d’échanges publics et courtois avec les représentants de certains États désormais considérés comme infréquentables, les mots ont-ils encore un sens ? Comment peut-on punir si gravement sans base légale ni réglementaire ? Notons encore que l’employé concerné est officier volontaire au service de son pays depuis 21 ans.
Les Conseillers fédéraux Cassis et Amherd n’avaient sans doute pas imaginé toutes les conséquences de leur changement historique de posture par rapport aux conflits du monde. Peut-être réalisent-ils à présent, ce que signifie la politique partisane qu’ils ont initiée voilà plus de deux ans. Pour autant qu’ils aient pleine conscience de leurs actes, ils portent la lourde responsabilité, non seulement d’avoir entamé la crédibilité de notre pays à l’extérieur, mais aussi d’avoir réduit l’espace de sécurité et de liberté sur notre territoire. Nous reviendrons dans un troisième article sur un cas de refus de visa qui a mené à la rupture d’un contrat de travail avec une organisation internationale. —

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Newsletter N° 234 – 30 août 2024 | Source : Perspective catholique

 

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