Union européenne : La Hongrie veut « secouer » Bruxelles

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Ses ennemis politiques le disaient « plus isolé que jamais » au sein du club européen. Le résultat de sa défense sans relâche des valeurs traditionnelles ou de son obsession à plaider pour la paix en Ukraine. Et voilà que les hasards du calendrier institutionnel ont propulsé le Hongrois Viktor Orbán à la tête du Conseil de l’Union européenne, ce lundi 1er juillet, au lendemain de l’élection des 720 députés du nouveau Parlement européen, qui consacre la victoire, avec 188 sièges, des conservateurs du Parti populaire européen (PPE) sur les progressistes et, plus encore, celle de sa famille des droites patriotes, qui n’aura jamais été si nombreuse (228 sièges) à Strasbourg.

Dire que ses adversaires avaient caressé l’idée, en début d’année, de supprimer son tour de présidence, avant d’y renoncer très vite par peur du scandale. Ou que la Commission européenne, laisse entendre l’intéressé, a sciemment reporté après le vote l’annonce de la condamnation de l’État hongrois à une amende record de 200 millions d’euros, assortie d’une astreinte de 1 million d’euros par jour, pour non-respect du droit communautaire en matière d’asile et de migration. Son tort ? Avoir expulsé des demandeurs d’asile avant qu’ils aient épuisé leurs recours devant les tribunaux.

​Budapest veut rentabiliser sa présidence en « secouant » le système européen

À l’approche du 1er juillet, la Hongrie revendiquait toutefois d’être au-dessus de la mêlée pour assumer ce mandat après celui de la Belgique. C’est en « arbitre honnête » ( “honest broker” ), confie l’ambassadeur de Hongrie à Paris, Georges Habsbourg-Lorraine, que « nous endossons cette charge, alors que les défi s se multiplient pour l’Europe : la guerre, la compétitivité économique, l’immigration, la démographie, l’agriculture, la cohésion interne, l’ouverture aux Balkans occidentaux ». Ce qui n’empêchera pas Budapest de rentabiliser sa présidence en « secouant » le système européen.

« Pendant six mois, nous serons en charge du futur de tous les membres de l’Union européenne, et pas seulement de la Hongrie, et nous croyons que l’institution doit être inclusive », souligne à dessein le ministre hongrois des Affaires étrangères, Péter Szijjártó, lors de l’entretien exclusif qu’il a accordé à notre journal la semaine dernière. Viktor Orbán achevait sa tournée des grandes capitales à Paris afin de présenter ses priorités à ses pairs. À Strasbourg, la coalition majoritaire sortante au Parlement se reformait et s’accordait seule sur le nom des futurs grands dirigeants de l’institution : reconduction de l’Allemande Ursula von der Leyen à la tête de la Commission ; désignation de l’ancien Premier ministre socialiste portugais, António Costa, à la présidence du Conseil européen, et de la Première ministre estonienne, la libérale Kaja Kallas, comme haute représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité.

Pas d’opposition à l’aide à l’Ukraine

​Un retour inadmissible au statu quo ante , explique le ministre hongrois : « C’est une honte que les conservateurs du PPE passent outre la volonté du peuple et se tournent à nouveau vers l’aile gauche pour recréer une coalition avec les socialistes et les libéraux. C’est malheureusement clair maintenant que le centre droit est passé au centre gauche. Nous, nous espérons que la véritable aile droite du Parlement sera suffisamment forte pour parler clairement et remporter des succès. » Le diplomate poursuit : « C’est un constat et non un jugement politique, sous la présidence d’Ursula von der Leyen, la Commission a fait du mauvais travail. Si vous comparez l’Union européenne d’il y a cinq ans à celle d’aujourd’hui, le déclin est évident, que ce soit en matière économique ou de sécurité. »

​À Paris, on nuançait volontiers la portée des critiques hongroises. « Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’approche de l’exercice de la présidencetournante du Conseil de l’Union européenne conduit aussi à revoir un certain nombre de positionnements », confie une bonne source à l’Élysée. Le champion des eurosceptiques ne s’est finalement opposé ni au vote des 50 milliards d’euros supplémentaires d’aide militaire à l’Ukraine pour la période 2024-2027, ni à l’ouverture offi cielle, fin juin, des négociations d’adhésion de l’Ukraine et de la Moldavie à l’Union européenne, ni à l’adoption du quatorzième paquet de sanctions antirusses. Pour tout bilan, Orbán peut brandir une exemption pour la Hongrie du soutien militaire des Vingt-Sept à Kiev.

Son ministre des Affaires étrangères assume complètement : « Nous avons bloqué tous les projets qui allaient contre notre intérêt national, car c’était en notre pouvoir. Pour les autres, qui ne le heurtaient pas directement, nous n’avons pas bloqué, mais nous avons dit haut et fort que c’étaient de très mauvaises idées. » Le diplomate prend date pour la suite. Les choix des nouveaux dirigeants « démontrent que l’Union européenne devient une institution exclusive, en cela qu’une famille politique se réserve l’exclusivité du leadership. Nous, nous pensons au contraire que chaque membre doit y être représenté pour que l’institution soit équilibrée et donc efficace ».

Relancer l’économie européenne

​Fin politique et redoutable manœuvrier, Viktor Orbán a placé la restauration de la compétitivité économique de l’Union en tête de ses sept priorités pour les six prochains mois. L’objectif est consensuel bien que les mesures pour y parvenir fassent débat. Trait d’union entre l’Asie et l’Occident, Budapest s’oppose, par exemple, à la mise en œuvre de lourdes taxes à l’importation sur les automobiles électriques chinoises. Le pays accueille à la fois des usines allemandes et chinoises. Orbán souhaite aussi relancer l’aide au développement de l’Afrique et accroître les crédits octroyés aux pays de départ de l’émigration vers le Vieux Continent. Une idée déjà défendue par l’Italienne Meloni, que la France pourrait soutenir, avance Péter Szijjártó.

​La semaine dernière, après son déjeuner en tête à tête avec Emmanuel Macron, Viktor Orbán a filé rencontrer Marine Le Pen, « avec qui il partage une vision commune sur les principaux problèmes européens ». En cas de victoire du Rassemblement national ce 7 juillet, assurent les Hongrois, la « coopération entrera dans une dimension totalement nouvelle ». Et l’équilibre politique à Strasbourg pourrait évoluer. « Les partis qui parlent de paix en Europe sont aussi les plus souverainistes et patriotes », rappelle simplement le chef de la diplomatie hongroise. Rendez-vous mi-juillet pour la première session du nouveau Parlement européen.

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