Marco Chiesa: Ce que veut l’UE et les conséquences pour la Suisse
Ne vous laissez pas berner ! - Le nouvel accord prévu par le Conseil fédéral avec l’Union européenne est un traité de soumission. Il s’agit toujours de rattacher institutionnellement la Suisse à l’UE, ce qui détruirait notre démocratie directe, notre succès économique et notre prospérité.
Le Conseil fédéral a adopté le mandat de négociation avec l’UE. Le fait est que des fonctionnaires de l’UE et des fonctionnaires suisses ont déjà négocié à huis clos. Le résultat de ces négociations est ce que l’on appelle le « Common Understanding » (Entente commune).
Le premier point de cette « entente » indique clairement qu’il s’agit d’un accord institutionnel ; il est donc erroné de parler de « Bilatérales III ». Les accords bilatéraux supposent des partenaires d’égal à égal, or, l’accord institutionnel est une subordination de la Suisse à l’UE.
Concrètement, cela signifie que nous n’avons plus rien à dire dans notre propre pays. En effet, le droit international est supérieur au droit national. D’autre part, la Cour de justice européenne décide de manière contraignante de la manière dont le droit européen doit être interprété.
Bien sûr, la Suisse peut continuer à voter. Mais les votes ne doivent pas enfreindre le droit de l’UE. En cas de doute, ce sont les juges de l’UE et non le peuple suisse qui auront le dernier mot.
Quelles seront les conséquences de cet accord institutionnel pour nous, les Suisses ? Lisez ici notre commentaire sur ce traité de soumission.
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LeTemps.ch: Le Conseil fédéral mise sur la transparence pour convaincre dans le dossier européen
Ignazio Cassis a présenté le mandat de négociation avec l’Union européenne. Sa publication, très inhabituelle, marque la volonté du gouvernement de ne rien cacher dans ce processus complexe
Publié le 08 mars 2024
Les mots sont pesés, les attitudes réfléchies. Le Conseil fédéral a présenté le mandat définitif qui lui servira de base dans la négociation qui va prochainement s’ouvrir avec l’Union européenne (UE) en vue de conclure un accord qui fait défaut depuis mai 2021 et le choix du Conseil fédéral de ne pas signer le fameux accord-cadre pourtant négocié durant quatre ans. Ignazio Cassis est le seul conseiller fédéral à être venu s’exprimer devant la presse pour cette étape symbolique des relations de la Suisse avec son partenaire le plus vital. C’est que le Conseil fédéral a toujours accordé plus d’importance à l’ouverture d’une consultation qu’à sa clôture, «surtout s’il n’y a pas de surprise», a justifié le Tessinois, qui était tout de même entouré de plusieurs secrétaires d’Etat issus des départements fédéraux concernés, de directeurs d’offices, d’Alexandre Fasel, son secrétaire d’Etat, de Patric Franzen, négociateur en chef. Les négociations commenceront «vraisemblablement dans le courant du mois de mars». [...]
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lien vers le texte (7 pages) : https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/86555.pdf
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09.12.2022 – Le Conseil fédéral présente le projet de rapport État actuel des relations Suisse–UE
Lors de sa séance du 9 décembre, le Conseil fédéral a examiné le projet de rapport « État actuel des relations Suisse–UE ». Dans ce rapport, il arrive à la conclusion que la voie bilatérale reste la solution la plus avantageuse pour la Suisse. Le rapport a été adopté sous réserve des résultats de la consultation des commissions de politique extérieure des deux Chambres. Le Parlement avait exprimé à plusieurs reprises le souhait que le Conseil fédéral procède à une évaluation de la politique européenne.
source: https://www.eda.admin.ch/eda/fr/dfae/dfae/aktuell/newsuebersicht/2023/europa.html
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https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/86555.pdf
Mandat de négociation définitif
(selon la décision du Conseil fédéral du 8 mars 2024)
ment des institutions, ainsi que les principes découlant de la démocratie directe, du fédéralisme et de l’indépendance du pays seront préservés. En particulier, les compétences de la
Confédération, des cantons et des communes, ainsi que celles du Parlement et des tribunaux seront maintenues.
1. Electricité
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6. Éléments institutionnels
6.1. La Suisse vise à intégrer les éléments institutionnels dans chaque accord relatif au marché intérieur existant et futur. Ces éléments auront pour but de garantir l’homogénéité du droit au sein du marché intérieur en éliminant les obstacles à
l’accès au marché dans les secteurs couverts. Ils préserveront le fonctionnement des institutions suisses, notamment les principes découlant de la démocratie directe, du fédéralisme et de l’indépendance du pays.
6.2. La Suisse vise le maintien des exceptions existantes dans les accords.
6.3. Interprétation et application : L’interprétation et l’application uniformes selon les principes du droit international public seront garanties par les autorités des parties sur leurs territoires respectifs (modèle à deux piliers). La compétence du Tribunal fédéral pour interpréter le droit suisse et la compétence de la CJUE pour
interpréter le droit de l’UE, y compris les dispositions des accords impliquant des notions de droit de l’UE, seront respectées.
6.4. Surveillance : Les accords seront surveillés par les autorités des parties de manière autonome sur leurs territoires respectifs conformément aux principes du
droit international public (modèle à deux piliers).
6.5. Reprise dynamique : L’actualisation régulière des accords existants et futurs relatifs au marché intérieur sera assurée à travers la reprise dynamique, à condition
que (i) la Suisse puisse participer aux développements du droit de l’UE qui la concernent (decision shaping), (ii) ses procédures constitutionnelles soient respectées et (iii) il n’y ait pas reprise des développements du droit de l’UE qui tombent dans le champ d’application d’une exception.
6.6. Règlement des différends : En cas de différend, les parties chercheront une solution politique dans le comité mixte. À défaut d’un règlement dans le comité mixte, il sera possible pour l’une ou l’autre des parties de soumettre le différend
à un tribunal arbitral paritaire. Si le différend soulève une question concernant une exception à l’obligation de reprise dynamique et le différend n’implique pas l’interprétation ou l’application de notions de droit de l’UE, le tribunal arbitral tran
chera le différend sans faire appel à la CJUE. Si le différend soulève une question relative à l’interprétation ou à l’application d’une disposition d’un accord ou du droit de l’UE dont l’application implique des notions de droit de l’UE et si l’inter-
prétation de cette disposition est pertinente pour le règlement du différend et nécessaire pour permettre au tribunal arbitral de trancher, le tribunal arbitral devra soumettre cette question à la CJUE pour une interprétation qui sera contrai-
gnante pour le tribunal arbitral. Dans tous les cas, la décision sur le différend sera prise par le tribunal arbitral.
6.7. Mesures de compensation : En cas d’infraction constatée par le tribunal arbitral, des mesures de compensation proportionnées pourront être prises dans l’accord
concerné par l’infraction respectivement dans un autre accord relatif au marché intérieur. La Suisse vise à ce que les mesures de compensation n’entrent en vigueur qu’une fois que le tribunal arbitral aura décidé sur leur proportionnalité.
L’objectif est notamment d’éviter d’éventuels dommages en cas de mesures de compensation qui seraient déclarées disproportionnées par la suite.
6.8. Coopération parlementaire : La Suisse vise à instaurer une coopération parlementaire entre l’Assemblée fédérale et le Parlement européen.
7. Libre circulation des personnes (LCP) en général :
La Suisse vise à assurer une application complète et l’actualisation régulière de l’Accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) par l’inclusion des éléments institutionnels prévus au point 6 dans cet accord.
8. LCP – immigration
8.1. La Suisse vise une mise en adéquation du droit dans le domaine de l’immigration selon le champ d’application de l’ALCP avec le droit de l’UE en vigueur dans ce
domaine avec le but (i) de maintenir l’orientation de l’immigration vers l’activité économique, limitant les conséquences pour les systèmes sociaux et luttant
contre les abus, (ii) de respecter la Constitution fédérale (Cst.) en matière d’expulsion pénale et (iii) de sauvegarder des formes d’annonce pour des séjours de courte durée à but économique.
8.2. Pour atteindre ce but, le droit de l’UE pertinent, y compris la Directive 2004/38/CE et le Règlement (UE) 2019/1157, sera repris en respectant les éléments suivants :
8.2.1. Des exceptions selon lesquelles (i) la Suisse ne reprendra pas les dispositions de la Directive sur la protection renforcée contre l’expulsion pénale incompatibles avec la Cst., (ii) le droit de séjour permanent sera limité auxpersonnes actives économiquement et sans dépendance de l’aide so-
ciale, ainsi qu’aux membres de leurs familles, et (iii) la Suisse profitera d’un délai pour la mise en place d’une carte d’identité biométrique pour voyager dans l’UE.
8.2.2. Des clarifications selon lesquelles la Suisse peut, sous certaines conditions, (i) retirer le droit de séjour aux personnes en situation de chômage involontaire ne coopérant pas dans la recherche d’emploi et (ii) maintenir des formes d’annonce pour les personnes actives économiquement pendant des courtes durées.
8.3. La Suisse vise à concrétiser les mécanismes de l’ALCP pour adresser des effets inattendus.
[...]
9. LCP – protection des salaires
[…]
9.2.3. La Suisse vise également une clause de non-régression pour éviter la reprise des modifications des directives susmentionnées ou de nouveaux actes juridiques de l’UE dans le domaine du détachement des travailleurs si leur effet est d’affaiblir le niveau de protection des travailleurs détachés en matière de conditions de travail et d’emploi, en particulier la rémunération et les frais. [...]
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Le Conseil fédéral approuve le mandat de négociation définitif
Lors de sa séance du 8 mars 2024, le Conseil fédéral a approuvé le mandat de négociation avec l’Union européenne (UE) sous sa forme définitive. Le mandat adopté tient compte des résultats de la consultation auprès des Commissions de politique extérieure (CPE) et des autres commissions intéressées du Parlement, des cantons ainsi que des prises de position des partenaires sociaux et économiques.
Il est important pour la Suisse de disposer d’un accès sur mesure au marché intérieur de l’UE. La mise à jour de cinq accords existants, l’élaboration de deux nouveaux accords sur le marché intérieur, des modalités de coopération plus contraignantes et la pérennisation de la contribution de la Suisse permettront de développer et de stabiliser les relations entre la Suisse et l’UE. © DFAE
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08.03.2024 – Le Conseil fédéral approuve le mandat de négociation définitif
L’approche sectorielle du Conseil fédéral
La Suisse souhaite développer ses relations avec l’UE. Le Conseil fédéral a donc mis au point, en février 2022, de nouvelles propositions fondées sur une approche sectorielle et pris les décisions suivantes:
- les questions institutionnelles, plutôt que d’être réglées dans un accord appelé à fournir un cadre pour d’autres accords (approche horizontale), doivent être réglées individuellement dans chaque accord (approche sectorielle);
- les discussions doivent porter non pas sur un seul accord, mais sur un paquet d’accords, globalement mieux équilibré. Cela permet d’assurer un large équilibre des intérêts et d’améliorer les perspectives de réussite d’éventuelles négociations.
La Suisse souhaite participer aux programmes de l’UE et pouvoir conclure de nouveaux accords, par exemple dans les domaines de l’électricité, de la sécurité alimentaire et de la santé.
Elle doit, pour certains accords, prévoir des exceptions et des clauses de sauvegarde en vue de préserver ses intérêts essentiels. En ce qui concerne la libre circulation des personnes, il faut veiller à ce que la constitutionnalité soit garantie et à ce que les évolutions du droit de l’UE ne favorisent pas une immigration visant à profiter du système social et ne tirent pas vers le bas les conditions de travail et de rémunération.
La revendication d’un régime d’exceptions tient au fait que la Suisse n’est pas membre de l’UE et, par conséquent, n’a pas les mêmes droits ni les mêmes obligations qu’un État membre de l’UE. La Suisse vise une participation élargie au marché intérieur de l’UE tout en conservant son indépendance politique.
Entretiens exploratoires avec la Commission européenne
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L’accord institutionnel, sujet à bien des controverses
Les divergences sur des points essentiels pour la Suisse étaient insurmontables:
- la remise en question de la protection contre le dumping salarial, système qui a fait ses preuves (mesures d’accompagnement);
- la crainte de voir augmenter le nombre de bénéficiaires de l’aide sociale provenant de l’UE et l’impossibilité de renvoyer les personnes faisant l’objet d’une condamnation pénale et de leur retirer leur droit de séjour (directive sur la libre circulation des citoyens de l’Union);
- les questions restées en suspens concernant la réglementation des aides d’État (level playing field).
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Suisse-UE: des relations étroites
La Suisse et l’UE entretiennent des relations étroites et partagent des valeurs communes. En témoignent les exemples suivants:
- L’UE est de loin le principal partenaire commercial de la Suisse. Près de la moitié des exportations suisses est à destination de l’UE, et environ deux tiers des importations en proviennent.
- La Suisse compte parmi les principaux partenaires commerciaux de l’UE et l’UE est le principal partenaire de la Suisse. Dans le secteur des services, la Suisse était en 2021 le troisième partenaire de l’UE après les États-Unis et le Royaume-Uni.
- Fin septembre 2022, 374'000 frontaliers travaillaient en Suisse. Autrement dit, la Suisse a trouvé 374'000 travailleurs au sein de l’UE et de l’AELE.
- Coopération dans le domaine de la recherche : parmi les pays tiers, la Suisse représentait de 2014 à 2019 le principal bailleur de fonds pour le budget de l’UE, avec une contribution s’élevant à 2,2 milliards d’euros ; 80 % de cette somme étaient consacrés à la recherche et à l’innovation.
- En construisant la nouvelle ligne ferroviaire à travers les Alpes (NLFA) pour un montant d’environ 23 milliards de francs, la Suisse a augmenté de manière significative les capacités de transport écologique des marchandises et contribué à réduire les entraves au commerce dans le marché intérieur européen.
- Pour l’essentiel, l’UE et la Suisse partagent les mêmes valeurs politiques (communauté de valeurs) : un engagement inconditionnel en faveur des droits de l’homme, d’une société ouverte et libérale, d’une démocratie pluraliste garantissant la liberté d’expression et la liberté des médias, et du libre-échange en tant que facteur de prospérité et de sécurité. Ces aspects revêtent une importance toute particulière aujourd’hui, alors que la guerre fait rage et que l’on observe une montée des régimes autoritaires.
Il est important que les relations entre la Suisse et l’UE soient basées sur un cadre réglementaire. C’est là une garantie de prospérité et de stabilité pour les deux parties.
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15.12.2023 – Le Conseil fédéral approuve le projet de mandat de négociation avec l’Union européenne
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