De nombreux dysfonctionnements et une situation financière précaire jette le doute sur l’avenir de Coallia. Cette association d’aide aux migrants ne garde la tête hors de l’eau que grâce aux subventions publiques.
Coallia (ex-Association pour la Formation des Travailleurs Africains et Malgaches – AFTAM) est l’un des opérateurs français spécialisé dans le logement des travailleurs migrants et des populations « fragiles ».
Portée par l’intensification des flux migratoires, elle a mené une politique de croissance sans maîtrise ni contrôle. En 2021, elle employait près de 4 300 salariés répartis entre 755 établissements.
Proche de la cessation de paiement en 2016, l’association, perfusée avec de l’argent public, a remanié sa gouvernance en 2017, mais sans réformer radicalement son organisation et sa gestion.
Résultat, elle fait l’objet d’un rapport de la Cour des comptes qui souligne que si elle a pu éviter la cessation de paiements en dégageant quelques liquidités de court terme, sa viabilité n’est pas assurée.
Il est temps « … que les services de l’État eux-mêmes, en tant que commanditaires et financeurs principaux de Coallia, exercent une vigilance toute particulière dans le suivi des restructurations à mener, qui seules sont à même de garantir la pérennité de Coallia » écrivent notamment les magistrats financiers.
La situation de Coallia, lourdement endettée, est plombée par la croissance des redevances payées pour l’occupation des locaux où elle loge des migrants et une activité d’habitat social déficitaire.
Elle est détentrice d’un parc immobilier vieillissant dont le rendement ne suffit pas à dégager la marge de manœuvre financière nécessaire à sa modernisation.
Les dirigeants de Coallia pointés du doigt
Les magistrats financiers pointent du doigt les responsables de Coallia qui ne sont pas parvenus à déployer un nouveau système d’information des ressources humaines qui devait pourtant « faciliter, fiabiliser et sécuriser » la gestion des personnels.
Parmi les exemples à charge cités par la Cour, l’incapacité d’un suivi infra-annuel de la masse salariale ou encore la « fiabilisation des éléments de paie ».
L’administration de Coallia accepte des documents non standardisés, notamment pour la paie des salariés, « ce qui est une source potentielle d’erreurs de traitement » commente pudiquement l’institution de la rue Cambon.
Malgré un total de 411 millions d’euros de produits d’activités sur l’ensemble de ses métiers (2021), Coallia ne garde la tête hors de l’eau que grâce aux subventions publiques.
Elle est passée d’un modèle économique fondé sur des dotations publiques pérennes à la recherche de subventions annuelles fournies par des tiers financeurs, à commencer par le contribuable.
Parmi ses recommandations, la Cour des comptes préconise un renforcement du contrôle interne et de maîtrise des risques ainsi que la restructuration de la filière administrative, comptable et financière de l’association avec mise en place d’une comptabilité d’engagement.
De même sont conseillés la mise en place d’un plan de redressement des activités structurellement déficitaires et une correction des valeurs inscrites au bilan au titre des immobilisations corporelles (immeubles, etc.).
Après avoir traversé une grave crise révélée par l’Ancols en 2017, Coallia a changé de gouvernance, amélioré sa trésorerie et répondu aux sollicitations de l’État pendant les crises sanitaire et ukrainienne. Mais l’association présente encore des “fragilités multiples” qui “soulève[nt] de sérieuses interrogations sur [s]a viabilité”, écrit la Cour des comptes dans un rapport paru le 19 janvier 2024. Un rapport déjà daté, répond son DG Arnaud Richard, car l’association a adopté un nouveau projet d’entreprise en décembre 2023, qui va être mis en œuvre par de nouveaux dirigeants.
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