L’appui aux cibles d’immigration actuelles est en chute libre. Entre 2022 et 2023, la proportion de Canadiens susceptibles de dire qu’il y a trop d’immigrants dans le pays a bondi de 17 points de pourcentage, ce qui vient renverser radicalement une tendance qui remonte à des décennies.Quelque 27 % des Canadiens considéraient l’an dernier que « le Canada accueille trop d’immigrants ». Cette année, ils sont 44 % à affirmer une telle chose, une croissance record de 17 points.
Ces données sont tirées d’un sondage probabiliste en partie réalisé et financé par l’organisme Initiative du siècle, qui promeut l’idée d’une population de 100 millions d’habitants d’ici 2100.
« On a déjà vu des périodes où l’opinion restait en mouvement, mais là, c’est un saut. On peut dire que c’est du jamais vu », explique Andrew Parkin, l’un des chercheurs de cette étude. Il faut remonter au début des années 2000 pour observer une telle frilosité à l’égard des seuils d’immigration.
Ce changement d’opinion touche autant les Canadiens les plus fortunés (+20 %) que les immigrants de première génération (+20 %). Il touche aussi les partisans libéraux (+11 %), néodémocrates (+9 %) ou encore conservateurs (+21 %).
Ces chiffres sont sujets à caution, un sondage du début octobre trouvait que 75 % des Québecois étaient pour réduire l'immigration jusqu'à ce que la pénurie de logements se résorbe... alors qu'un autre en septembre indiquait que 53 % des Canadiens souhaitent moins d'immigrants que prévus pour 2023...
Économie et crise du logement
Selon ce sondage, ce n’est pas le malaise culturel que peuvent susciter les néo-Canadiens qui cause cette volte-face dans l’opinion publique, souligne le rapport. C’est plutôt le contexte économique difficile et la pénurie de logements qui fondent cette nouvelle réticence.« Ça ne veut pas dire que les immigrants sont la cause de la crise du logement ou du manque de logements abordables, soutient Andrew Parkin. C’est plus : “Est-ce que c’est le bon moment pour avoir plus d’immigration étant donné qu’il y a une crise du logement ?” C’est une nuance. […] Le contexte économique touche tout le monde également. Ça touche aussi les immigrants, qui cherchent aussi à acheter une maison. »
Malgré tout, une majorité (51 %) de Canadiens rejettent encore l’idée que les niveaux d’immigration seraient trop élevés. Et ils sont très peu nombreux à voir l’immigrant comme un problème en soi.
« Certains disent qu’on utilise la crise du logement comme excuse pour se tourner contre les immigrants. Ce n’est pas ça. Le nombre de Canadiens qui disent que l’immigration empire leur communauté, c’est juste 9 %. Au Québec, c’est 4 %. »
Le Québec plus ouvert
Le Québec suit la tendance canadienne, mais demeure le territoire où le sentiment général reste le plus ouvert aux nouveaux arrivants. Environ un tiers (37 %) des Québécois considèrent que les immigrants sont trop nombreux, contre 50 % en Ontario et 46 % dans le reste du Canada.La vision du Québec sur cette question a grandement évolué depuis les années 1990. Pas moins de 57 % des Québécois considéraient en 1993 que les immigrants « menaçaient la culture du Québec » ; ils ne sont plus que 38 % à avoir cette opinion aujourd’hui. [La proportion des Québécois pure laine a aussi baissé entretemps...]
Le Canada a franchi cette année le cap des 40 millions d’habitants, en raison notamment d’un flux migratoire toujours plus important.
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