De notre correspondant en Suisse. – Les Verts, sous toutes les latitudes, jouent la provocation. Ces nostalgiques de Mai 68 ont les mêmes aspirations que leurs aînés, le même look et le même langage. Sauf que ce n’est plus la lutte des classes ou l’égalité sous toutes ses formes qui agitent ces camarades mais la lutte pour le climat, les minorités sexuelles et cherchent in fine à déstabiliser le pouvoir. Concernant ce dernier, l’opération qui a totalement pris de court la police cantonale bernoise de ce lundi matin, dès 4 h 30, en squattant la place du Palais fédéral, à Berne, là où siègent actuellement les élus nationaux, est parfaitement réussie et met à nouveau les autorités sur les pattes de derrière.

Minutieusement préparée, elle réunit pour la première fois tous les mouvements de lutte pour le climat – non seulement Extinction Rebellion, mais aussi Greenpeace et les grévistes du climat – qui ont uni leurs forces pour frapper les consciences des élus fédéraux. En moins d’une demi-heure, ils ont investi la place Fédérale, bien que toute manifestation soit interdite durant les travaux des Chambres. Ils ont transformé le lieu en camping, érigeant une vingtaine de tentes, une cuisine et des stands d’information. Ils ont déployé de nombreuses banderoles et rappelé l’urgence climatique en écrivant sur la rue en lettres géantes : « Agissez maintenant ».

Certes rien de bien nouveau. Si ce n’est l’affrontement entre les présidences des Chambres fédérales qui s’attendaient à ce que les autorités bernoises fassent respecter la loi sur la place Fédérale aussi vite que possible. Dans une note au canton et à la ville de Berne, la délégation administrative de l’Assemblée fédérale écrit qu’elles devraient constater l’illégalité de cet événement non autorisé et veiller au respect des dispositions légales applicables.

Au parlement, les réactions n’ont pas manqué. La gauche, bien qu’un brin embarrassée, a dans l’ensemble montré beaucoup de compréhension. « Même si la manifestation est illégale, je ne suis pas particulièrement choqué. Il faut trouver une solution pacifique », a commenté le président du PS Christian Levrat. La droite se montre, quant à elle, beaucoup plus sévère : le conseiller national Hans-Peter Portmann (PLR/ZH) a même sermonné le maire de Berne vert Alec von Graffenried. « C’est une honte. Tu n’assumes pas tes responsabilités », s’est-il emporté.

Les activistes pour le climat sur la place Fédérale ne sont pas impressionnés par l’ultimatum du gouvernement bernois. Rien n’indique qu’ils quitteront volontairement le camp érigé lundi. Au contraire : sur les réseaux sociaux, ils ont appelé leurs sympathisants à les rejoindre sur place. S’il y a suffisamment de monde sur la place fédérale, alors la police ne pourra pas procéder à une évacuation, argumentent-ils. « Nous sommes venus pour rester », indique un appel diffusé sur le service de messagerie Telegram.

Jean-Luc Addor, conseiller national UDC, observe sur sa page facebook : « La place Fédérale transformée en une zone de non-droit. Pour le climat, avec une délicieuse odeur de beuh ». Toute cette agitation pourrait toutefois être refroidie par le principal concerné : on annonce la pluie et le froid pour ces prochains jours. Comme quoi la nature est bien faite. •

Eric Bertinat

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