Victoire de la gauche radicale au Mexique sous le couvert d’une campagne anti establishment

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De notre correspondant en Amérique latine.

Les deux ex-présidents socialistes du Brésil, Dilma Roussef, destituée pour maquillage des comptes publics, et Lula da Silva, actuellement purgeant une peine de prison de douze ans pour corruption, ne se sont pas trompés en saluant la victoire d’Andrés Manuel Lopez Obrador, 64 ans, comme un événement non seulement important pour le Mexique, mais également pour toute une Amérique latine où la gauche était en perte de vitesse.

Après deux précédents échecs en 2006 et 2012, la victoire d’Andrés Manuel Lopez Obrador – surnommé AMLO – est sans appel. Avec 53,1% des voix exprimées, il laisse loin derrière les candidats des deux partis qui se sont partagé le pouvoir depuis près d’un siècle : le candidat de la coalition droite-gauche Por México al Frente, Ricardo Anaya, qui a remporté 22,5% des suffrages, et Jose Antonio Meade, le candidat du parti sortant, le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel), avec 16,2% des voix.

AMLO, puisque c’est ainsi qu’il faut l’appeler, a su se faire porter au pouvoir par la révolte générale des Mexicains contre une corruption endémique qui frappe tous les secteurs de la société, en prônant notamment l’exemplarité, un refrain familier. Il est également parvenu à séduire l’électorat en s’engageant à être le président des destitués, et à élever le niveau de vie des classes moyennes, et surtout celui des plus pauvres qui représentent la moitié des 125 millions de Mexicains. Il a également promis de juguler l’omniprésente violence à sa façon en offrant l’amnistie aux criminels, et en mettant un terme à l’utilisation de l’armée dans la lutte contre le narcotrafic. Ses déclarations sur le sujet furent qu’ « on ne pouvait lutter contre la violence par la violence », et qu’ « il préférait les embrassades aux balles ».

Un malheur n’arrivant jamais seul, le parti d’AMLO, le Morena (Mouvement pour la régénération nationale), a remporté six des neuf élections gouvernementales – Veracruz, Morelos, Puebla, Chiapas, Mexico et Tabasco – avec pour la première fois une femme à la tête de Cuidad Mexico, Claudia Sheinbaum. Le parti Morena a également obtenu la majorité aux deux chambres, avec 210 sièges sur 300 à la chambre des députés, et 53 sièges sur 96 au sénat. La gauche de la gauche semble donc bien installée aux postes de commande officiels, les marchés craignent un endettement du pays par le financement de programmes sociaux, et un arrêt des privatisations, notamment dans le secteur de l’énergie.

Les relations du Mexique avec les Etats-Unis devraient subir peu de changement, car si le candidat AMLO n’a pas ménagé ses attaques contre le président Trump durant sa campagne, le président élu AMLO va très certainement adopter une attitude pragmatique car la marge de manœuvre des gouvernements mexicains est très limitée en la matière.

Peu après l’annonce de sa victoire, le président élu a déclaré vouloir « rester dans l’histoire du Mexique comme un bon président. » « C’est un jour historique, a-t-il lancé, nous allons réussir une transformation du pays sans violence, de manière pacifique, et bannir du pays la corruption. Nous allons chasser la mafia du pouvoir ! »

Cependant, le conte de fée risque fort d’être de courte durée et le réveil brutal, car les résultats de cette élection vont probablement montrer où se situe le vrai pouvoir au Mexique. La campagne qui vient de s’achever a été la plus meurtrière dans l’histoire du pays avec pas moins de 145 personnalités politiques et une trentaine de journalistes assassinés (une forte augmentation par rapport aux élections de 2012 qui n’avaient compté que dix assassinats politiques). Les commanditaires et exécutants de ces crimes, narcotrafiquants, politiciens et fonctionnaires mafieux, militaires et policiers corrompus, vont désormais avoir un champ encore plus libre pour exercer leur mainmise sur de vastes régions et sur des secteurs entiers d’activité du pays.

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