Les opposants à l'initiative contre les pédophiles veulent remplacer les interdictions systématiques par une foi aveugle dans le pouvoir d'appréciation des juges. Lesquels juges doivent, selon la loi, en référer aux experts en ce qu'ils ne sont pas censés tout savoir.
Pour l'alliance PDC-PLR-Verts-PS, cet axe juge-expert est si fort, si infaillible, en soi que ceux qui auraient osé exprimer le moindre doute n'ont plus que le droit de se taire.
Les ratés du système, Lucie, Marie, Adeline, seront qualifiés de "faits divers", de "prix à payer" pour le bon fonctionnement du système. Protestez, vous êtes un "populiste" et, quoi que vous puissiez dire, vous aurez tort.
La république des psychologues
Une simple question, à quel point les experts psychiatres ou psychologues sont-ils fiables ? Sont-ils les nouveaux demi-dieux de la conscience humaine ou simplement des hommes comme les autres ? Difficile d'en juger au vu de l'adoration que politiques et médias s'accordent à leur vouer.
Cependant, quelques exemples se présentent à nous, qui permettent de juger de la pérennité et de la fidélité des opinions d'un psychologue parmi les plus reconnus - et les plus consultés par les grands médias - sur un problème simple: l'interdiction de travailler avec des enfants d'un pédophile condamné.
Philip Jaffé en avril 2014
Le professeur Philip Jaffé, docteur en psychologie à l'Université de Genève et directeur de l’Institut universitaire Kurt Bösch (IUKB) à Sion est l'auteur d'un article remarqué, paru dans La Tribune de Genève du 12 avril dernier, intitulé: "Tous les délinquants sexuels ne sont pas des Marc Dutroux."
L'opinion est désormais classique de la palette argumentative des opposants à l'initiative: simulacre d'une opposition entre initiative et révision du code pénal, qui s'annuleraient au lieu de se compléter, ce qui est faux. L'initiative serait "incomplète" en ce qu'elle ne réglerait pas tous les problèmes liés à la pédophilie, ce qui est profondément fallacieux. En clair, Philip Jaffé s'oppose à une initiative qui propose d'interdire à un pédophile condamné de retravailler en contact avec des enfants, pour la seule raison que cette initiative ne fait rien pour combattre la pédophilie en milieu familial. Si l'initiative se confine à un seul objet, elle est "incomplète", si elle en recouvre plusieurs, voilà qu'on crie à la "surenchère sécuritaire". Si l'on a vraiment le souci de mesures complètes, rien n'est plus complet que la conjonction entre l'initiative et la révision du code pénal. Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage, l'argumentation des opposants n'a pas beaucoup de sens.
Dans les vidéos qui accompagnent l'article, le Dr Jaffé insiste encore sur le fait que l'initiative ferait condamner de très jeunes gens au titre de pédophiles dangereux. La récurrence de cet argument démontre d'autant plus la mauvaise foi des opposants que les initiants ont été d'une clarté limpide sur leurs intentions et le sens à donner à leur texte. Passons sur l'appellation trompeuse de "contre-projet" pour qualifier la loi fédérale de révision du code pénal.
Philip Jaffé en mars 2014
Comble de la confusion, moins d'un mois à peine avant cette opposition frontale à l'initiative, le 20 mars 2014, il confiait au micro d'En Ligne directe, de la RTS (dès 19:14):
"Je dis, je peux voter pour cette initiative [...] Adoptons cette initiative."
Le 12 avril, la TdG sous-titre:
"Le professeur Philip Jaffé, docteur en psychologie à l'Uni de Genève, évoque le climat qui entoure l'initiative de la Marche blanche sur les pédophiles et les problèmes que pose le texte, auquel il est opposé."
A n'y plus rien comprendre !
Philip Jaffé en 2013
Le 22 mars 2103, le Conseil national venait d'accepter l'initiative, le Dr Jaffé, lors d'une interview accordée au Journal du Matin de la RTS, faisait cette déclaration (dès 00:48):
"Bien entendu, d'accord avec l'esprit de l'initiative. Le potentiel de récidive du plus grand nombre de pédophiles est tel qu'il vaut mieux appliquer un principe de précaution très large pour éviter que tout enfant, dans le futur ne soit pas revictimisé par le même pédophile. Donc, voilà, bien entendu que c'est une bonne idée [...]"
Il est toutefois favorable à la conservation d'une certaine liberté d'appréciation des juges, précisant cependant que:
"C'est très difficile de combattre l'idée globale que les pédophiles restent dangereux, les exceptions pourtant existent et c'est cela qu'il faut reconnaître."
Il explique encore que l'on ne peut pas soigner un pédophile, seulement tenter de le contrôler, "malheureusement on se trompe parfois", admet-il.
"On peut en soigner, en prendre en charge un certain nombre, mais c'est une minorité et, encore une fois, la précaution demeure. Evitons de prendre des risques pour des enfants."
Et de reprendre sa parenthèse sur les jeunes auteurs d'actes pédophiles qui ne seraient pas tous enclins à devenir des Marc Dutroux en puissance (les exemples du contraire existent malheureusement). Il appelle à mieux venir en aide aux jeunes, "et je ne pense pas que les initiants soient fondamentalement contre cette idée" (03:17), précise-t-il.
Philip Jaffé en 2009
Et Philip Jaffé est magnifiquement placé pour connaître les intentions des initants. En effet, avant même de lancer son initiative, Christine Bussat, responsable de la Marche blanche, avait approché le Dr Jaffé pour lui demander conseil et lui présenter son projet de texte. Projet de texte que Jaffé lui renverra, par courrier électronique du 26 juin 2009, dûment augmenté et corrigé, avec ce bref commentaire, pour le moins approbateur:
"Pas mal... Quelques petites suggestions de reformulation."
Et oui, le texte de l'initiative, c'est un peu son oeuvre. (1)
Il faut dire qu'à l'époque, la Marche blanche venait de remporter haut la main son initiative sur l'imprescriptibilité (que Philip Jaffé dit soutenir dans son interview du 22 mars 2013). Il aura suffit qu'un parlementaire de gauche, Carlo Sommaruga, fasse le tour des popotes, accusant la Marche blanche d'extrémisme pour avoir accueilli l'UDC Oskar Freysinger au sein de son comité, pour que certains tournent subitement casaque.
D'où cette simple question, lequel des Dr Jaffé croire ? Si l'on est juge, lequel croire ? Celui de 2009, qui pense que c'est une bonne idée d'interdire professionnellement les pédophiles ? Celui de 2013, qui assure que la récidive existe, qu'un enfant peut-être une nouvelle fois victime du même agresseur et qu'il faut appliquer un strict principe de précaution ? Ou celui de 2014, qui atermoie, demande qu'on ne "stigmatise" pas tous les pédophiles et condamne une initiative à la rédaction de laquelle il a pourtant lui-même collaboré ? Et encore faut-il pouvoir choisir entre celui de mars ou bien d'avril...
La fin des psychologues
En Valais, où l'IUKB gère de nombreuses expertises sur des cas pénaux de pédophilie, les Observateurs ont appris que le Dr Jaffé aurait contresigné des expertises conduites par certaines de ses étudiantes - lesquelles contrediraient des expertises de l'Office de la protection de l'enfance, menées pourtant sur près d'une quinzaine de mois -, mettant en doute la parole d'enfants se disant victimes depuis des années contre celle d'un de leur parent prévenu de pédophilie. Philip Jaffé a raison, on ne fait pas assez pour combattre la pédophilie en milieu familial.
Le Tribunal fédéral semble avoir pris le parti de mettre un coup d'arrêt à certains excès à répétition, statuant, dans un arrêt du 13 février de cette année, que l’expertise judiciaire des auteurs d’infractions pénales était du ressort des psychiatres, les psychologues ne présentant pas l’assurance de disposer des connaissances nécessaires à cette fin. Evidemment, la Fédération Suisse des Psychologues (FSP) a immédiatement protesté dans un communiqué.
Un détail anecdotique permet de percer à jour la psychologie réelle du Dr Jaffé, cette curieuse habitude de terminer chacun de ses e-mails par cette citation:
""The truth is more important than the facts". FRANK LLOYD WRIGHT (1869-1959)"
"La vérité est plus importante que les faits"... Voilà qui dit tout.
Journal du Matin, RTS, 22.03.2013
(1) En mars 2014, sur les ondes de la RTS, il accusera le texte de l'initiative d'être mal rédigé et imprécis. A qui la faute !
Voir encore
Ce ne sont pas “des opposants à l’initiative contre les pédophiles” mais de militants pour les droits des pédophiles, nuance.
Toutes les récidives condamnent… oui, condamnent, tous ces experts : et aucuns n’a été condamnés, s’ils assumaient leur choix alors il y aurait une justice… il faut arrêter ce cirque : les experts, les juges sont inattaquables… alors il faut accepter l’initiative des deux mains pour que ces experts incapables, ces juges incapables ne puissent sévir !