Initiative 1:12, une utopie néfaste

Jean François Rime
CN, Industriel, Pdt USAM  

Croissance, emploi, équilibre budgétaire, stabilité des prix: la Suisse affiche des performances économiques à faire pâlir d’envie l’ensemble des pays de l’OCDE. Mais des nuages menaçants s’amoncellent sur ce petit coin de paradis. Plusieurs initiatives populaires, prêtes à passer en votation, s’attaquent aux fondements mêmes du modèle helvétique à succès.

 

Parmi celles-ci, l’initiative «1:12 – Pour des salaires équitables», lancée par la Jeunesse socialiste suisse, sur laquelle nous devrons nous prononcer le 24 novembre prochain. Les initiants préconisent d’inscrire dans la Constitution fédérale un nouvel article «Politique salariale», selon lequel, dans la même entreprise, le salaire le plus élevé ne doit pas être plus de douze fois supérieur au salaire le plus bas.

Faire triompher l’idéal de justice salariale en luttant contre les bonus mirobolants des managers et en revalorisant les bas salaires des travailleurs et des travailleuses sous l’œil bienveillant de l’Etat, tel est l’avenir radieux promis par les jeunes camarades socialistes. Utopie inutile puisque, en termes de revenu, la Suisse est l’un des pays les plus équitables du monde.

Utopie coûteuse car, selon le Conseil fédéral, près de 10'000 personnes gagnant plus de 500'000 francs par an seraient concernées par les rêves égalitaires de la gauche. Ces 10'000 salariés devront se serrer la ceinture. Mais en sabrant les salaires, on réduit les recettes fiscales  et les contributions aux assurances sociales. Une première estimation montre que cela représente une perte sèche de 1,6 milliard de francs pour la collectivité. Une perte qui devra être compensée. Et, une fois de plus, c’est la classe moyenne qui passera à la caisse.

L’initiative 1:12 n’est qu’un leurre. Loin de contribuer à augmenter les bas salaires, elle va pousser les chefs d’entreprises à recourir à toutes sortes de stratagèmes afin de contourner ce corset constitutionnel.  Et en la matière, la créativité entrepreneuriale risque d’être féconde: des transferts à des sous-traitants des activités à bas salaires sont à prévoir. Au final, ô paradoxe, les travailleurs les moins bien rémunérés feront les frais des lubies socialistes.

Fixer un ratio salarial dans la Constitution représente une fâcheuse intrusion, à la fois rigide et arbitraire, dans la politique salariale des entreprises. Il s’agit là d’une grave atteinte à la liberté d’entreprendre. Ce diktat fait fi des principes d’autorégulation, de décentralisation et d’autonomie, piliers de notre réussite, et vide le partenariat social de son contenu.

L’étatisation des salaires repose inévitablement sur la mise en place d’un dispositif de contrôle. Des dérives bureaucratiques sont à craindre. Avec effroi, on imagine déjà la création d’une armée d’inspecteurs des salaires chargés de vérifier le respect du rapport 1:12. De nouvelles procédures devront être élaborées afin de sanctionner les entreprises récalcitrantes.

La gauche rêve de lendemains qui chantent, mais sans capitalisme. Et pour réaliser ses lubies, elle recourt sans modération à la démocratie directe. L’initiative 1:12 n’est qu’un amuse-bouche. Suivront les initiatives sur les salaires minimaux, pour un revenu de base inconditionnel et sur la fiscalité successorale. Vaste programme qui nous conduit tout droit vers un modèle économique à la française et ses 3 millions de chômeurs. A quand les 35 heures?

 

Jean-François Rime, président de l’union suisse des arts et métiers usam

 

 

 

3 commentaires

  1. Posté par Le pragmatique le

    En complément a la considération de Century que j’approuve, j’ajouterais : « sans patrons, pas de social ». Ça c’est moins drôle.

    Et la baisse des cotisations AVS qui va la payer ? Et les bien-pensants ne pensent-ils pas que les salaires ou autres rémunérations seront versés par déplacement des bénéfices dans des sociétés du groupe sous des cieux plus cléments.

    Cette initiative est aussi candide que le cours d’économie de la gentille Ségolène Royal qui voulait interdire les délocalisations en France. Que tout cela est mignon; mais franchement, sur le terrains vous pensez vraiment que ça fonctionne ? Moi pas.

  2. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Je ne suis pas doué, mais je tente un petit calcul. Si le plus bas salaire est de 4000, le revenu du boss sera de 48000. Donc 576000 par année. Au lieu de 5 millions par exemple. Ce qui fait une différence de 4’424’000 francs. Lesquels, répartis en, disons 1000 employés, représentent pour eux une augmentation mensuelle de 368 Francs. C’est ma foi fort appréciable. Évidement, pour la Poste suisse, qui occupait , en 2012 selon Wikipédia, 62000 employés, ça ne fait que 6 francs. Par ailleurs, Mais qu’en sera-t-il de la motivation du PDG? règle devrait s’appliquer aussi aux Conseiller fédéraux! Non?
    Ceci dit les jeunes socialistes peuvent recevoir le mandat de redistribuer cet argent aux défavorises, aux cabossés, aux victimes. Mais!
    Mais les socialistes sont généralement athées. La théorie de l’évolution des espèces de Darwin est pour eux pain béni! Mais il y a un os! Que nul, à ma connaissance, n’a relevé! La théorie contient aussi la sélection naturelle, la loi de la jungle, du plus fort et du plus démerde! Alors pourquoi donc les socialos persistent-ils à sauvegarder une espèce en déclin? Demeurés, dégénérées, asociaux dont la seule activité consiste à se plaindre et à exiger la satisfaction de leurs droits! J’exagère? Il est possible que certains sont capables de s’en sortir. Mais pas sans une secousse sévère. Et pas de l’ouate sur les béquilles pour soulager leurs aisselles!
    Vous souvenez-vous de cette affiche de campagne des jeunes socialistes encourageant ainsi l’irresponsabilité? « Faites l’amour, NOUS nous occupons du reste »! Charmante conception de la démocratie! Et personne, à ma connaissance, ne les a mouché! Et ce sera tout, pour ce jour! Car j’ai encore quelque flèches dans mon carquois.

  3. Posté par certeny le

    La jeunesse socialiste devrait apprendre à travailler et à créer des entreprises et, une fois patrons, qu’ils limites leur rémunération. Le PS a toujours été irresponsable et, par cela, insupportable. L’URSS ? …non merci!

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