La question essentielle pour la droite jurassienne est l’opportunité de changement qui s’annonce avec ce scrutin. Les réticences des jurassiens pro-bernois sont compréhensibles et à court terme leur intérêt politique est d’obtenir démocratiquement un non final à un conflit fratricide. Mais en cas de non au processus, la droite jurassienne se retrouvera toujours en situation de minorité politique exclue et maltraitée, alors qu’il est évident que les valeurs conservatrices ( responsabilité individuelle, liberté de pensée et d’expression, souverainisme, démocratie de proximité, culture d’entreprise, subsidiarité, culture identitaire et populaire) sont majoritaires mais pas représentées par la classe politique qui est prisonnière d’une image factice de progressisme qu’il faut obligatoirement exhiber.
JURA : le vote du 24 novembre est une opportunité historique de réconciliation, d’approfondissement démocratique et de « sortie par le haut » d’un conflit non résolu.
L’entrée en souveraineté du Canton du Jura, le 1.01.1979 a suscité des espoirs légitimes : idée qu’un petit Etat identitaire de proximité défendrait mieux les intérêts de ses citoyens qu’un Grand, éloigné et de surcroit germanophone de manière majoritaire ainsi que de religion réformée. Malheureusement, l’Unité n’a pas été sauvegardée et un Etat de trois districts seulement a pris le risque de se lancer seul, avec une volonté de faire exemple, d’être moderne, d’être un aimant attractif pour ceux qui avaient choisi par méfiance, de rester loyalistes et jurassiens bernois. Les traumatismes et les plaies liées à cette lutte fratricide ont laissé des traces de défiance, d’incompréhension, des convictions de supériorité culturelle qui frisent parfois l’arrogance. Les espoirs n’ont pas été tous confirmés et le Canton du Jura est devenu « normal » : clientélisme électoral, étatisme galopant, bureaucratie, dévalorisation de l’esprit d’entreprise, République au service des copains et des partis majoritaires, repli germanophobe. Implantation d’entreprises extérieures recourant à de la main-d’œuvre frontalière, dépendance de la péréquation financière de la Confédération, manque de diversité économique, recul de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Abandon des références culturelles et politiques identitaires pour céder aux sirènes politiquement correctes de l’option migratoire néocoloniale.
La classe politique institutionnelle, à travers le dialogue, mené par les partenaires, comme une partie « d’échecs » de l’Assemblée interjurassienne est arrivée à une proposition définitive de solution de « compromis ». La déclaration d’intention signée le 20 février par les Gouvernements des deux cantons propose de consulter simultanément le peuple des deux régions concernées, afin de savoir si un oui bilatéral pourra ouvrir la négociation à un avenir commun, puis la conclusion d’un concordat intercantonal, l’élection d’une assemblée constituante, l’élaboration d’un projet de constitution.
Les camps politiques se dessinent : Pour le OUI, l’ensemble des partis jurassiens (avec des bémols et des nuances pour l’UDC et le PLR), les autonomistes, une partie de la gauche du Jura méridional. Pour le NON : Force démocratique, l’UDC jura bernois, le Groupe Sanglier, le PLR, le Parti socialiste du Jura bernois. Une lecture politique traditionnelle peine à y retrouver la coupure gauche-droite classique. L’UDC Jura est favorable au processus, au contraire de l’UDC Jura bernois qui fait depuis belle lurette son fonds de commerce politique électoral avec ce positionnement.
La question essentielle pour la droite jurassienne est l’opportunité de changement qui s’annonce avec ce scrutin. Les réticences des jurassiens pro-bernois sont compréhensibles et à court terme leur intérêt politique est d’obtenir démocratiquement un non final à un conflit fratricide. Mais en cas de non au processus, la droite jurassienne se retrouvera toujours en situation de minorité politique exclue et maltraitée, alors qu’il est évident que les valeurs conservatrices ( responsabilité individuelle, liberté de pensée et d’expression, souverainisme, démocratie de proximité, culture d’entreprise, subsidiarité, culture identitaire et populaire) sont majoritaires mais pas représentées par la classe politique qui est prisonnière d’une image factice de progressisme qu’il faut obligatoirement exhiber. Les seules forces politiques qui auraient à gagner de la déconstruction démocratique du canton du Jura et de la construction plus ouverte et conservatrice d’une nouvelle entité sont l’UDC et le Parti socialiste. Il est fort vraisemblable que le reste de la classe politique dominante (PDC, PCSI, Verts, Gauche) n’ait pas vraiment intérêt au changement et que son soutien au processus est déclamatoire. Nous voulons voir, dans cette partie de poker, qui est prêt à remettre en cause les acquis, les avantages, qui est prêt à partager la souveraineté, quelle place sera laissée aux adversaires historiques, quelle ouverture sera possible dans la pensée unique, quel renoncement réel au clientélisme clanique sera envisageable. La perspective de la dissolution de l’Etat et de la reconstruction avec la création d’une nouvelle Constitution, définie cette fois, de bas en haut, par le peuple et non pas les partis historiques est une réelle chance qui ne se représentera jamais plus. La bataille n’est pas une question de chiffres et de comparaisons tendancieuses ou d’inventaires à la Prévert. Ensemble nous ferons mieux et nous réparerons les erreurs et déceptions du passé. Voilà ce que nous disons haut et fort, sachant que le processus aura un coût mais sera un gain de démocratie : le peuple doit pouvoir écrire la Constitution pour se protéger des abus de pouvoir de l’Etat comme le disent E. Chouard et C. Blocher. Nous voulons aussi que le Jura bernois puisse bénéficier dans cette procédure d’une sorte de discrimination positive protectrice qui garantisse sa représentativité et la nécessaire réconciliation et reconnaissance des erreurs d’autrefois.
Nous voulons plus de libertés, plus de souveraineté, plus de proximité, plus de valeurs identitaires, plus d’esprit de partage confédéré. Nous voulons la réconciliation, le respect des opinions politiques autres, l’égalité politique, moins d’Etat bureaucratique, plus d’esprit d’initiative, de développement et d’innovations locaux. Nous soutenons le OUI le 24 novembre. En cas d’échec, la classe politique jurassienne devra s’interroger sur son fonctionnement et une campagne perçue comme trop sûre d’elle-même et arrogante. En cas de OUI, les forces politiques exclues aujourd'hui auront leur mot à dire dans la reconstruction indispensable et légitime. Alors, encore un doute sur la réponse à la Question jurassienne ?
Dominique Baettig Ancien conseiller national , membre du comité directeur de l’UDC Jura, membre du comité « Construire ensemble ».
“les valeurs conservatrices […] sont majoritaires mais pas représentées par la classe politique qui est prisonnière d’une image factice de progressisme qu’il faut obligatoirement exhiber.”
Oui, et c’est notre malheur en Suisse (pas seulement au Jura) ! La classe politique veut bien faire mais oublie de vérifier si c’est bien ce que veut le peuple !