Socialisme à géométrie variable

De l’art de claironner dans le sens du vent, en fonction des besoins, tout en oubliant ce qu’on a dit la veille.

Le PS par la bouche de Géraldine Savary, conseillère nationale socialiste, dans Le Matin du 24 mai 2013:

"Le Tribunal fédéral a statué.

[...] On peut penser ce qu’on veut de cette initiative, craindre les pertes d’emplois, d’argent ou la désaffection des régions de montagne, mais on doit reconnaître que la justice a respecté la volonté du peuple et des cantons avec la plus grande des corrections. Ce n’est pas une République des juges qui s’est ainsi exprimée, mais au contraire l’instance suprême d’un Etat de droit qui fait honneur à sa fonction et à notre démocratie. Il est piquant de voir les partis politiques les plus virulents conspuer le Tribunal fédéral comme ennemi du peuple, lever le même poing rageur quand nos juges entendent faire respecter les volontés issues du scrutin. Cette décision rassure sur la justice."

On soulignera la légèreté avec laquelle une élue socialiste semble traiter la question du chômage qui attend le domaine de la construction en Valais. L'on rappellera aussi que la virulence des réactions est à l'aune de la dichotomie entre un texte disant "1er janvier de l’année qui suivra" et une décision ramenant le premier janvier 2013 au... 11 mars 2012; magique !

Et puis voici maintenant le PS à peine deux mois plus tôt:

"Le PS Suisse ne comprend pas que le Tribunal fédéral maintienne l’autorisation d’exploitation de la centrale de Mühleberg, une des plus vieilles installations nucléaires au monde, aujourd’hui en piteux état. Pour le conseiller national et vice-président du Groupe socialiste des Chambres fédérales Roger Nordmann, « le réacteur bernois présente tant de risques sur le plan de la sécurité que le rafistoler revient tout bonnement à jeter l’argent par les fenêtres. Il serait bien plus judicieux d’investir ces moyens dans la transition énergétique plutôt qu’à fonds perdus. »"

Mais comment est-ce possible ? Ces juges suprêmes, à deux doigts de l'infaillibilité et si enclins à respecter la volonté populaire ? "Il est piquant de voir les partis politiques les plus virulents conspuer le Tribunal fédéral... etc."

3 commentaires

  1. Posté par Ketterer le

    “La Loi est la Loi, … et une fois que le peuple suisse l’a acceptée, il faut l’appliquer, …ou je-ne-sais quelle autre faribole.”
    Excellent précepte.
    Alors pourquoi ne pas l’appliquer aussi – un exemple au hasard – à la Loi sur Pour le renvoi des étrangers criminels.

  2. Posté par Jean-Guy Berberat le

    Je ferai remarquer à Géraldine Savary qu’en démocratie “l’instance suprême d’un Etat de droit” ce n’est pas un tribunal, c’est le peuple, ce ne sont pas les juges, ce sont les citoyens! Si tel n’est pas le cas, on vit alors effectivement dans une “république des juges”!
    Qu’est-ce qui lui permet d’ailleurs de prétendre que “la volonté du peuple et des cantons” était vraiment d’appliquer la loi dès le lendemain du vote, puisque le texte de l’initiative disait autre chose?
    La Suisse est hélas de plus en plus entraînée dans une dérive “judiciariste”. Et encore cette envahissante république des juges, inquiétant avatar du “droit-de-l’hommisme” intégriste, est-elle sous tutelle. Non sous celle du législateur national, mais sous celle d’autres juges, étrangers au pays et à son peuple, désignés nul ne sait trop ni par qui ni comment, et contre lesquels il n’est pas de recours.

  3. Posté par von Siebenthal Vincent le

    à “Socialisme à géométrie variable”, Observateurs partiaux et transigeant avec la réalité ?
    Je rappelle tout de même que la nouvelle “Lex Weber” a été approuvée par une majorité, certes faible, du peuple ainsi que des cantons; en revanche, il n’y a pas eu (mais corrigez-moi si je me trompe !) de votation populaire à propos du maintien de l’autorisation d’exploitation de la centrale nucléaire de Mühleberg. La décision de nos juges suprêmes n’a donc pas la même légitimité dans un cas et dans l’autre. Vous évoquez ensuite les conséquences dramatiques, et supposées, du chômage en Valais. Outre que la “Lex Weber” ne concerne pas uniquement le Valais, que faudrait-il alors faire ? Obliger les suisses à voter une nouvelle fois, on leur expliquant combien ils se sont trompés la dernière fois ? La Loi est la Loi (“dura Lex, sed Lex” comme disait l’autre), et une fois que le peuple suisse l’a acceptée, il faut l’appliquer, sans multiplier les dérogations à tels ou tel canton qui serait plus touché que d’autres, ou je-ne-sais quelle autre faribole. Une Loi qui ne lèse les intérêts de personne, ça n’existe pas. Ce à quoi se sont livré certaines communes valaisannes et grisonnes s’apparente à un abus de droit. Pire, à la fraude à la loi (procédé consistant à utiliser des dispositions légales pour vider la loi de tout contenu, et l’empêcher de déployer ses effets). Les communes concernées étaient tout-à-fait conscientes qu’elles se trouvaient dans une zone juridique “grise”; malgré les recommandations du Département fédéral des transports, de l’énergie et des télécommunications, elles ont décidé de ne pas attendre les clarifications du Tribunal Fédéral quant à cette incertitude juridique. Elles ne peuvent donc pas être au bénéfice de la bonne Foi. Elles ont joué, elles ont perdu. Ne comptez pas sur moi pour verser une larme.

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