Démocratie ou commissaires du peuple ?

Jan Marejko
Philosophe, écrivain, journaliste
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Le mot de démocratie renvoie à tout et donc à n’importe quoi. A ce point, les choses deviennent graves. C’est tout cela qu’on voit se dessiner à l’horizon de la pétition Versus13, proposée aux Valaisans. Il s’agirait, selon cette pétition, de mettre en place des garde-fous qui protégeraient la démocratie. Comme personne ne sait ce qu’est la démocratie, personne ne peut non plus dire ce que seraient des garde-fous. Commissaires du peuple serait plus précis.

Partout, on ne parle que de démocratie. On ne fait d’ailleurs pas qu’en parler, on fait de profondes courbettes devant elle, comme si elle était un dieu ou une idole. Mauvais signe, car si une démocratie est possible, elle ne l’est que par des libres citoyens, non des courtisans ou des flagorneurs. Il y a pire encore.

 

Des initiatives, en effet, sont lancées pour défendre la démocratie. C’est nouveau. Autrefois, on se contentait d’encourager la démocratie parce qu’on savait qu’elle constituait un idéal inatteignable. Aujourd’hui, il s’agirait de la protéger comme si elle était descendue du ciel sur la terre. Le problème est que personne ne sait ce qu’elle est et comment il faut la protéger. Tous les régimes de la planète se veulent démocratiques, la Corée du Nord aussi bien que la République du Congo. Même chose avec les partis politiques : en France, les partisans de l’UMP se présentent comme des démocrates face à la gauche qui clame elle aussi qu’elle est démocrate tout en soupçonnant la droite de ne pas l’être. En Suisse, l’UDC honnie, se dit pourtant démocrate devant ses adversaires, qui n’en croient rien et reniflent en elle les pires desseins. Bref, une chatte n’y retrouverait pas ses petits. Dès lors, la question se pose : défendre la démocratie, d’accord, mais qu’est-ce qu’on défend et contre qui puisque tout le monde est démocrate ?

 

Le mot de démocratie renvoie à tout et donc à n’importe quoi. Ce n’est pas une réalité particulière, bien définie, circonscrite. Dès lors, peu importe ce que ce mot désigne. On peut le prononcer n’importe où et n’importe comment. C’est un mot qui invite tout le monde à s’agenouiller devant lui et qui fait de celui qui le prononce le porte-parole du bien. C’est si agréable de se présenter ainsi et ça fait tellement ronronner de plaisir. Mot également intimidant et qui fait respecter ceux qui le prononcent. Enfin, c’est par lui qu’on fait le silence autour de soi, comme avec une formule magique ou religieuse. Qui oserait se présenter comme hérétique ? Personne n’ose se dire antidémocrate, car ce serait alors l’excommunication, l’obscurité, l’exclusion, malgré toutes les ouvertures à l’autre. Vraiment, il y a de quoi le bénir, ce mot.

 

Les chrétiens, les juifs et les musulmans bénissent le nom de Dieu qui, lui aussi, renvoie à toute la création, à toutes les créatures, à tous les hommes et à tous les poissons. La démocratie, elle, ne renvoie pas à tous les hommes, ni même aux poissons, mais à un régime politique particulier. N’empêche, il faut la défendre urbi et orbi. D’autant qu’elle aurait aujourd’hui de sournois ennemis posant des bombes ou, dans nos contrées, avançant masqués. Il s’agirait de les combattre, c’est-à-dire soit de les démasquer, soit de les exterminer (si l’on a affaire à des djihadistes).

 

A ce point, les choses deviennent graves. Lorsqu’on lutte pour défendre une entité vague comme l’est aujourd’hui la démocratie, n’importe qui peut devenir un suspect ou un ennemi et donc une personne à arrêter ou à éliminer. Qui décidera quels sont les suspects et les ennemis ? Un comité de salut public, un comité central, une commission fédérale pour la préservation des valeurs ?

 

C’est tout cela qu’on voit se dessiner à l’horizon de la pétition Versus13, proposée aux Valaisans. Il s’agirait, selon cette pétition, de mettre en place des garde-fous qui protégeraient la démocratie. Comme personne ne sait ce qu’est la démocratie, personne ne peut non plus dire ce que seraient des  garde-fous. Commissaires du peuple serait plus précis.

5 commentaires

  1. Posté par Jan Marejko le

    Je ne comprends pas plusieurs commentaires et ne vais pas essayer de les décrypter. Je retiens et apprécie cette proposition de Lafayette : « La démocratie n’est pas l’application d’une volonté massivement manipulée. »Cela dit, qu’est-ce qu’une volonté qui n’est pas manipulée ? Chaque jour, je découvre en moi des couches de manipulation. Enfin, Moïse, commenté par Pierre-Henri Reymond. Effectivement, il n’était pas un commissaire du peuple puisqu’il agissait au nom de Dieu qui n’était… personne.

  2. Posté par G. Vuilliomenet le

    Fergile, vous avez oublié de rappeler à lafayette que ses potes de l’extrême-gauche commettaient bien plus d’agressions que les membres de l’extrême-droite. Mieux, ses potes se comportent comme les nazillons des années 30, tout mettre en oeuvre pour faire taire leurs opposants. Et cela ose s’autoproclamer « antifa »!

    “Les fascistes de demain s’appelleront eux-mêmes antifascistes”
    Winston Churchill (1874-1965)

  3. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Aie! Le Coran est mentionné! (Dans un commentaire) Celui des djihadistes! Ceux que nous croyons connaître. Mais, si ma mémoire est bonne, le djihad est le combat contre soi-même! Un combat promptement réglé quand on tranche sans hésitation. Lorsque on sort l’épée du fourreau contre les autres, on n’a pas tranché en soi-même! Mais quoi trancher?
    J’en viens au commissaires! En saluant le regard lucide de Jan Marejko. Son propos rappelle les commissaires du peuple de l’URSS. Et ceux, du peuple aussi (selon les traductions) en Égypte! Les commissaires soviétiques veillaient à la conformité à la doctrine! Celle du peuple donc! Qui, en cette occurrence, était le prolétariat. Comme l’étaient les hébreux en Égypte! Or voici que Dieu demande à Moïse de réclamer la libération du Peuple à Pharaon! Or Moïse demande, qui m’envoie? Ce qui signifie qu’il ne sait pas que le Tout-Puissant l’envoie?! Qu’il veut un mandat en bonne et due forme!’et Dieu lui répond: « je serais qui je serais »! Donc ni le Ministère de la justice, ni la Police, ni le PLR, ni l’UDM, ni l’UDC, ni le FN, ni rien! Même pas la Gestapo. N’y a-t-il pas matière à réflexion? Réflexion qui se complique quand on sait qu’Israël a regretté ce qui était associé aux commissaires! La bidoche! Que l’on ne me dise pas que cette histoire est sans valeur, une vieillerie! J’y étais!

  4. Posté par Fergile le

    Lafayette, je pense que vous vous êtes trompé d’endroit: ce n’est pas ici le lieu de nous réciter la propagande habituelle des médias romands.
    Car vous parlez de djihadistes concernant cette UDC qui n’a jamais commis le moindre meurtre, contrairement aux adeptes du coran, et usez de « liberté » au sujet de sa traduction allemande, qui signifie « Parti du Peuple Suisse », afin uniquement d’insulter qui n’a pas votre caution.
    On déjà a vu plus démocrate et nettement moins fasciste, notamment au sein de l’UDC mais, il est vrai, bien plus rarement (et probablement jamais) à gauche.

  5. Posté par Lafayette le

    Et pourquoi définir la démocratie en tant que pouvoir ?
    La démocratie est le droit de chacun (non-politique) d’avoir un droit politique.

    Mais ne soyons pas contre une certaine crainte envers les djadistes de l’UDC ou SVP traduit librement en ‘parti des moutons’. La démocratie n’est pas l’application d’une volonté massivement manipulée.

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