Un Valaisan nominé pour le prix du Salon du Livre

Olivier Grivat
Olivier Grivat
Journaliste indépendant, auteur d'ouvrages liés à l'histoire de la Suisse
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Avec «Le féminin du temps» paru chez Favre, le psychologue signe un roman à rebondissement, où un physicien du CERN tombe fou amoureux d’une jeune artiste de 20 ans plus jeune que lui. Une passion qui va bouleverser sa vision du monde.

Comme dans votre dernier roman «L’Ordre des femmes»*, on retrouve la femme au cœur du récit…
Il y a une fascination pour la Femme, c’est certain. Mais c’est aussi un personnage utile pour le scénario lui-même. C’est encore une fois un scénario teinté de mystère. L’autre sexe est toujours mystérieux pour nous. Cela m’aide à placer le mystère au cœur du récit. Chacun de mes livres tourne autour du mystère de la femme.

Avec un message plus particulier dans celui-ci ?

Pour humaniser le temps, il faut découvrir une autre vision que l’écoulement irréversible des heures. Pour qu’il ne soit pas vécu  comme quelque chose d’angoissant, de froid, d’impitoyable, il faut se connecter à son aspect féminin. L’idée du livre, c’est le fait de relier le temps à des instants émotionnellement riches. Ma méthode est toujours d’enrober dans un polar toute une série de thèmes plus scientifiques ou philosophiques.

Quelle est la part d’impressions personnelles en tant que psychologue passionné par la vulgarisation?

L’idée d’écrire vient toujours d’un questionnement personnel. J’ai écrit «L’Ordre des femmes» alors que j’étais en train de divorcer ; j’avais besoin de métaboliser cette séparation, cette disparition d’un amour. Pour «Le féminin du temps», l’idée du livre est apparue quand j’ai vu approcher la barre des 50 ans. J’ai senti monter une espèce d’angoisse, l’idée de vieillir, du temps qui passe que je n’avais pas du tout eue à 40 ans.

Ecrire est une sorte de thérapie ?

C’est en tout cas une manière de faire le tour  d’une problématique qui me touche. Il m’a fallu apprivoiser le fait que le chemin parcouru est plus grand que celui qui reste à parcourir. J’ai commencé à bouquiner, à chercher des angles d’approche sur le phénomène du temps. J’ai cherché à comprendre comment les sciences, la philosophie et la mythologie le perçoivent. C’est un thème très riche. Dans mon roman, je l’aborde notamment sous l’angle de la physique quantique et de la génétique des populations. Les recherches dans ces domaines offrent une vision passionnante sur les nouvelles manières de concevoir le temps.

On est loin de la psychologie?

Non, car dans la psychologie, il y a toute la question des archétypes postulés par la théorie de Carl Jung. Ils représentent une autre façon d’appréhender le temps. J’ai toujours comme fil rouge la théorie jungienne ; elle est extrêmement riche et l’on peut y trouver toutes sortes de matières à scénario. Au départ, cela devait s’appeler le temps de l’anima, un concept jungien pour décrire ce temps vécu du côté féminin, du côté émotionnel, qui est plus acceptation que volonté de contrôle. Pour Jung, chaque homme a en lui une partie féminine dans son inconscient. Il appelle cet archétype féminin l’anima. Et chaque femme a une partie plus masculine qu’il appelle l’animus. Jung dit très joliment qu’un couple n’est jamais formé de deux personnes, mais de quatre : l’époux, l’épouse, l’anima de l’homme et l’animus de la femme. Pour lui, l’anima et l’animus sont des sortes de médiateurs qui nous permettent d’entrer en contact avec notre inconscient.

Pour l’homme et la femme, c’est sensiblement la même chose?

L‘animus est un archétype qui nous pousse à analyser, à contrôler, à ordrer, c’est le côté masculin, tandis que l’anima est l’archétype qui nous conduit vers l’émotion, vers l’acceptation, vers le sentiment, vers une vision plus synthétique de la réalité, mais aussi  vers une quête ou l’idée qu’il faut aller plus loin. Jung essaie de décrire comment ces énergies agissent au fond de nous. Sa théorie est que, plus on est conscient de leurs effets, moins on risque de se faire piéger par elles. Le piège de l’anima pour l’homme, c’est évidemment la passion destructrice. Dans « Le féminin du temps », le temps psychologique est abordé à travers l’archétype de l’anima.

Est ce que la peur de vieillir est différente chez l’homme ou chez la femme?

C’est une bonne question. Il est probable que chez la femme le vieillissement est plus dur à supporter au regard d’une société qui prône jeunesse, beauté et sex-appeal. Un homme aux cheveux gris peut avoir du charme aux yeux de certaines  jeunes femmes. Une femme qui affiche ses rides est probablement vue comme moins attirante par les jeunes hommes. En termes de séduction physique, l’homme et la femme ne sont pas vraiment égaux face au temps qui passe. Mais tout cela est peut-être en train d’évoluer. Et de toute façon, il arrive toujours un âge ou le physique ne peut plus être le facteur premier dans l’attirance. Je crois aux amours qui transcendent le temps et le vieillissement. C’est aussi ce que j’ai voulu montrer dans mon livre.

* Valaisan, de Montana-Crans, Daniel Cordonnier (52 ans) est docteur en psychologie de l’Université de Genève. Il dirige à Sion une équipe de 40 psychologues de l’Office d’orientation scolaire et professionnelle de l’Etat du Valais. «Le féminin du temps » est son deuxième roman après « L’Ordre des femmes », mais son quatrième  livre.  «Ecrire est mon hobby», confie l’auteur qui a déjà publié un traité de psychologie et un essai préfacé par Albert Jacquard : «Le pouvoir du miroir».

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