Tritium dans l’eau potable : la polémique à la noix de l’été

La banane est un aliment radioactif, au point qu’on a inventé une « dose équivalente en banane » (DEB). La radioactivité de l’eau de la station de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) ? Une demi-banane !

Par André Heitz.

Dans la torpeur estivale…

Nous sommes en pleine torpeur estivale, certes inter-caniculaire, un peu bousculée par le lynchage médiapartique de M. François de Rugy, ci-devant ministre d’État de la Transition écologique et (un peu) solidaire.

Une tribune publiée dans L’Opinion – « La science ne saurait avoir de parti-pris ». L’appel de 250 scientifiques aux journalistes – le 14 juillet 2019 fait quelques vagues dans les médias et sur Twitter, et suscite des réactions curieuses chez des journalistes qui doivent se sentir visés. C’est que le collectif souhaite que « les sujets à caractère scientifique puissent être restitués à tous et à toutes sans déformation sensationnaliste ni idéologique et que la confiance puisse être restaurée sur le long terme entre scientifiques, médias et citoyens ».

… une alerte au tritium dans l’eau potable

Et voilà que le 17 juillet, Le Parisien, le plus prompt à exploiter une dépêche de l’AFP, a déclenché une mini-tempête dans un verre d’eau : « Du tritium décelé dans l’eau potable de 6,4 millions de personnes ». Un titre immédiatement suivi d’une « explication » au conditionnel journalistique :

« Quelque 268 communes seraient concernées par cette contamination radioactive, dont de « grandes agglomérations » comme Orléans, Blois, Tours, Angers, Nantes, et 122 communes d’Ile-de-France. »

Profitant de la torpeur estivale qui réduit le nombre de sujets d’actualité susceptibles de faire le buzz, l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (ACRO) a donné l’« alerte » et fait parler d’elle.

C’est une erreur reconnue !

Les données de base ont été fournies par le ministère de la Santé (ARS – SISE Eaux) et représentent la valeur moyenne de tritium présent dans l’eau potable sur les années 2016-2017. Le ministère n’a pas communiqué sur le sujet, et pour cause…

Il suffit de lire… Selon le communiqué de l’ACRO,

« … aucune valeur ne dépasse le critère de qualité fixé à 100 Bq/L instauré par les autorités sanitaires

Et, plus loin,

« Châtellerault présente des niveaux parmi les plus importants relevés. La moyenne sur 2016 et 2017 est de 31Bq/litre (18 prélèvements). »

L’alerte est donc dénuée de tout fondement sérieux.

L’arnaque du critère de qualité

Mais il y a mieux, ou pire : le critère de qualité n’est pas une norme sanitaire, mais un seuil qui, lorsqu’il est dépassé, entraîne une investigation complémentaire pour caractériser la radioactivité de l’eau.

La norme de potabilité – elle-même fixée avec une importante marge de sécurité – est dérivée d’une « valeur guide » recommandée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), évidemment sur la base d’un avis d’experts. En France, elle est « de 10 000 Bq/L pour le tritium dans l’eau de boisson, à considérer en cas de consommation permanente de l’eau », selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Les rejets sont donc bien en dessous de la norme. Plus de 300 fois dans le (pire) cas de Châtellerault.

Agitons la peur !

Tout cela ne fait pas une alerte bien sérieuse. Alors l’ACRO agite l’arme fatale, au prix de deux non sequitur : la peur fondée sur la présence supputée d’autres substances et sur l’hypothèse d’un accident nucléaire :

« … la présence régulière dans l’eau du robinet de tritium rejeté par les centrales nucléaires met en évidence un risque de contamination d’autres polluants radioactifs à des niveaux beaucoup plus élevés […] Le tritium est « un lanceur d’alerte » : en cas d’accident grave sur une des centrales nucléaires sur la Seine, la Vienne, ou la Loire, il n’y aura pas que le tritium rejeté et ce sont des millions de personnes qui risquent d’être privées d’eau potable ».

Le Parisien zappe des éléments de contexte importants

Dans « Une association alerte sur la présence de composés radioactifs dans l’eau », Le Monde , se fondant aussi sur la dépêche de l’AFP, nous apprend que, selon Le Canard enchaîné, le tritium représente 99,95 % des rejets des centrales. Pourquoi Le Parisien n’a-t-il pas apporté cette utile précision ?

Tout cela ne fait donc toujours pas une alerte bien sérieuse. Mais c’était suffisant pour que l’AFP se précipite et que les médias plongent.

L’escalade de la CRIIRAD

Le Monde rapporte aussi l’avis de la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD) – c’est une association, malgré son nom ronflant, créée en mai 1986 par Mme Michèle Rivasi à la suite de l’accident de Tchernobyl :

« Les autorités acceptent, pour les polluants radioactifs, des niveaux de risque cancérigène plus de 100 fois supérieurs au maximum toléré pour les cancérigènes chimiques ! […] la limite applicable à une contamination durable par le tritium ne devrait pas dépasser 10 à 30 Bq/L ».

La première allégation peut nous laisser pantois : comment évalue-t-on un rapport de tolérances d’un risque ? Du reste, quel rapport de tolérances entre le tritium dans l’eau et, par exemple, l’alcool, le tabac, la charcuterie, les bains de soleil, les boissons chaudes, etc. ?

Quant à la deuxième, 30 becquerels/litre, n’est-ce pas la moyenne de Châtellerault ? Et 10 Bq/L la radioactivité moyenne de l’eau issue de l’usine de potabilisation de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) ?

Nous sommes aussi radioactifs !

Pour rappel, le tritium est l’un des isotopes de l’hydrogène qui, avec l’oxygène produit de l’eau (H2O ou monoxyde de dihydrogène). Il est produit par l’industrie nucléaire mais est aussi présent à l’état naturel en faible quantité (1 atome de tritium pour 1018 atomes d’hydrogène).

Il est faiblement radioactif, avec une période radioactive de 12,32 ans. L’eau douce naturelle a ainsi une activité massique de 0,1 Bq/L. Hypocondriaques, ne buvez plus, ne mangez plus… surtout pas de bananes, un des aliments les plus radioactifs car elles contiennent du potassium 40.

On a du reste inventé une « dose équivalente en banane » (DEB – 19,5 Bq pour une banane typique de 150 g).

Un litre d’eau de Choisy-le Roy, c’est donc une demi-banane. Ça craint…

En fait, nous sommes aussi radioactifs et émettons quelque 8000 becquerels.

Le pire n’est jamais certain

Le 14 juillet 2019, le collectif NoFakeScience lançait donc « un cri d’alerte sur le traitement de l’information scientifique dans les médias »… le 17 juillet, Le Parisien et d’autres médias apportèrent la preuve éclatante de la justesse et de la pertinence de son appel.

Le pire : tous les éléments permettant une contextualisation de l’indigente poussée militante de l’ACRO ont été fournis, de sorte qu’il n’y a aucune excuse pour le traitement alarmiste de l’« information ».

Le pire du pire : certains médias se mettent à gloser sur l’existence d’un danger, mais sans répondre franchement, comme pour créer ou entretenir une psychose. Ou encore avec des bévues magistrales, comme France 3 Régions Nouvelle-Aquitaine qui écrit : « … En janvier dernier, ce taux était de 310 becquerel/litre alors que selon la norme ce taux ne doit pas dépasser les 100 Bq/l. »

C’est révoltant.

Source: https://www.contrepoints.org/2019/07/20/349423-tritium-dans-leau-potable-la-polemique-a-la-noix-de-lete

André Heitz

André Heitz est ingénieur agronome et fonctionnaire international du système des Nations Unies à la retraite. Il a servi l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) et l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). Dans son dernier poste, il a été le directeur du Bureau de coordination de l’OMPI à Bruxelles

Voir aussi: https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/07/18/une-association-alerte-sur-la-presence-de-composes-radioactifs-dans-l-eau_5490787_3244.html

Notre camp politique serait “d’extrême-droite”

   
Michel Garroté - L'hebdomadaire français de gauche Le Point reprend une dépêche de l'agence de presse d'extrême-gauche AFP intitulée "Ces médias à la droite de la droite qui veulent réinformer les Français". Lorsque l'AFP s'épenche sur ce qu'elle appelle "extrême-droite", il y a toujours matière à rire. L'AFP met toutes les "droites de la droite" dans le même sac. L'AFP prétend voir l'extrême-droite là où elle n'est pas. L'AFP, dans sa dépêche, ne fait pas de différence entre "Egalité et réconciliation", "Fdesouche", "Boulevard Voltaire" et "Valeur Actuelles". Encore un petit effort et l'AFP va nous dire que Le Figaro est d'extrême-droite...
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"Ces médias à la droite de la droite qui veulent réinformer les Français", c'est donc une dépêche typiquement AFP, une dépêche un brin délirante et parano, dans laquelle on peut lire, avec amusement (extraits adaptés et commentés par mes soins ; voir lien vers source en bas de page) : Egalité et réconciliation, Fdesouche, Boulevard Voltaire ou encore Russia Today... Depuis une décennie, des médias au positionnement très droitier ont fait leur apparition sur la toile, avec l'objectif de "réinformer" les citoyens. "Trop à gauche" ou encore "pas suffisamment représentatifs", c'est bien souvent en ces termes que les Français jugent leurs médias (Michel Garroté - En effet, les journalistes sont trop à gauche et pas suffisamment représentatifs, c'est même un euphémisme que de le dire).
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Les sondages réalisés élection après élection ne démentent pas ces impressions. En juin 2012 par exemple, un sondage Harris Interactive estimait à 74% le taux des journalistes ayant voté à gauche lors de la présidentielle. Pour lutter contre "la gauchisation des esprits" - selon la formule de Jean-Marie Le Pen - des médias à la droite de la droite ont ainsi fait leur apparition (Michel Garroté - Et ça y est, hop, l'AFP fait exprès de metre dans le même sac l'opinion des Français et l'opinion de Jean-Marie Le Pen. Si les Français, notamment ceux qui s'informent sur Internet, veulent lutter contre la gauchisation des esprits, le fait que Le Pen pense ou ne pense pas la même chose n'a ici aucun intérêt, sauf pour l'AFP).
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Pour Jean-Marie Charon, sociologue des médias, la montée des "médias de masse", et notamment la télévision, a banni "les opinions minoritaires" de l'espace médiatique: "de l'avènement de la télévision jusque dans les années 1990, les courants minoritaires dont l'extrême droite n'ont plus eu accès à la télé officielle", explique-t-il. Privés de leur droit de cité dans les médias, "ces courants minoritaires" ont, selon le sociologue, "profité de l'essor du numérique pour lancer leur propre plateforme d'information" (Michel Garroté - En France, tous les sociologues sont d'extrême-gauche depuis 50 ans. Et accessoirement, je trouve amusant, ce mépris, à peine "voilé", si j'ose dire, pour les courants "minoritaires").
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Hétéroclites, ces médias partagent néanmoins une vision du monde et un positionnement idéologique. Toutefois, deux stratégies se font face : d'un côté, un choix en faveur d'un discours presque exclusivement identitaire et de l'autre, une stratégie plus "confusionniste", dont l'intérêt selon Tristan Mendès France, enseignant en cultures numériques à l'université Sorbonne-Nouvelle, est de créer "des passerelles" entre extrême droite et extrême gauche (Michel Garroté - C'est, là encore, du charabia de journalistes et  d'enseignants. Du reste, c'est totalement faux d'alléguer que les sites et blogues de la droite de la droite et les sites et blogues de la droite libérale-conservatrice partagent une même "vision du monde" et un même "positionnement idéologique").
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Le site Egalité et réconciliation par exemple, traite régulièrement de la question du TTIP (traité de libre échange transatlantique) ou encore du Big Pharma (...) En clair, des thèmes qui pourraient être traités par des médias d'extrême gauche, relate l'enseignant à l'AFP (Michel Garroté - "Créer des passerelles entre extrême droite et extrême gauche" ? Tiens donc ! Selon l'AFP et ses interlocuteurs, Mélenchon crée des passerelles avec Marine Le Pen qui elle crée des passerelles avec Mélenchon ? L'AFP et l'université Sorbonne-Nouvelle devraient préciser un peu leur postulat, comme ça nous comprendrons -- peut-être -- de quoi il retourne ici).
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Dans la même lignée, le site Agence Info Libre, co-fondé par David Bonapartian et qui propose d'offrir "un regard libre et différent" sur l'actualité, brasse lui aussi un large choix de sujets. A contrario, Fdesouche, qui fonctionne comme un agrégateur d'informations, ou encore La Gauche m'a tuer se concentrent eux presque exclusivement sur les thématiques identitaires (Michel Garroté - Pas un mot sur Riposte Laïque, pas un mot sur Résistance Répuclicaine, et, pas un mot, sur Les Observateurs, notre site libéral-conservateur suisse, dont un tiers des lecteurs sont des Français vivant en France... L'AFP a-t-elle omis de les mentionner ? Ou est-ce de la censure pure et simple, envers ces trois sites Internet incontournables et qui comptent un nombre très élevé de lecteurs ?).
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Si chacun dispose d'une ligne éditoriale propre, tous partagent le même objectif : "réinformer" les citoyens. Le concept de "réinformation" n'est pas nouveau. Mais il est promu depuis quelques années par l'intellectuel d'extrême droite Jean-Yves Le Gallou. En 2003, comme acte fondateur, il lance Polémia, un cercle de réflexion qui met sur pied une critique des médias (Note de Michel Garroté - Décidément, l'AFP ne supporte pas les sites et blogues de réinformation, elle enrage, elle voudrait qu'ils n'existent point).
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En 2010 naissent les Bobards d'or, une cérémonie destinée à dénoncer les journalistes "qui n'hésitent pas à mentir délibérément pour servir le politiquement correct". Deux ans plus tard, il co-fonde l'OJIM (observatoire des journalistes et de l'information médiatique) afin "d'informer sur ceux qui nous informent" (Michel Garroté - Polémia et les Bobards d'or, encore de quoi irriter l'AFP, mais enfin, comment osent-ils nous accuser de mentir délibérément pour servir le politiquement correct, nous, l'AFP, la crème de l'info ?).
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Pour Tristan Mendès France, cette critique des médias vise à "discréditer les journalistes. En optant pour un discours de l'alternative, ils s'assurent les faveurs d'un public déçu ou méfiant des médias traditionnels", décrypte-t-il auprès de l'AFP. Pourtant, note Dominique Albertini, journaliste et co-auteur de l'ouvrage "La Fachosphère", la "réinformation" est avant tout "un concept marketing car la plupart de ces médias sont des médias d'opinion". Qu'importe, la "réinformation" est un créneau qui fonctionne : s'il n'y a pas de chiffres officiels mesurant l'audience de ces sites, ils sont souvent cités comme faisant partie des blogs politiques les plus populaires (Michel Garroté - les gens comme nous s'assurent les faveurs d'un public déçu ou méfiant des médias traditionnels. Oui. Et alors ?).
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Une audience qui attise les convoitises d'un pays en particulier: la Russie, qui voit en la "réinformation" une façon de diffuser sa vision du monde. Présente en France pendant de nombreuses années à travers le titre "La Voix de la Russie", c'est en 2014 que la Russie modernise son offre française avec le lancement de Sputnik, un service d'informations multimédia (Michel Garroté-J'avoue qu'en effet, Sputnik est plus agréable à lire que Le Monde, Libération, L'Obs, ou encore, l'omniprésente et déficiente AFP subventionnée avec les impôts des Français).
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Mais c'est le lancement en octobre du site Russia Today, du nom de la chaîne d'information internationale qui émet notamment en anglais, en arabe et en espagnol, qui intrigue. Doté d'une large palette d'intervenants allant du souverainiste Pierre Lévy, à l'économiste euro-critique Jacques Sapir en passant par le directeur de la publication du droitier Valeur Actuelles, Yves de Kerdrel, il est, selon Nicolas Hénin, auteur de l'enquête "La France russe", adepte du confusionnisme : "la chaîne cultive, sciemment un discours confusionniste, dans le but de faire émerger un souverainiste, même de gauche, favorable à la Russie" (Michel Garroté - Cerise sur le gâteau ! Nous serions à la botte de Poutine, l'homme à abattre !).
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Mais la chaîne ne s'arrête pas là. Pour parfaire son image de média alternatif, elle recrute fin novembre Philippe Verdier, présentateur météo de France 2 licencié après la parution de son livre controversé sur le climat. Une façon de dire que, contrairement aux médias "dominants", elle ne censure pas ses journalistes (Michel Garroté - J'ignore à quel point Poutine censure les médias russes. Ce dont je suis sûr, en revanche, c'est que la Russie n'a rien à envier à la France, pour ce qui concerne la censure, 'intox, la médisance, la calomnie et les allégations mensongères. En France, 99% des journalistes sont de gauche, voire d'extrême-gauche, qui dit mieux ?).
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Pour la spécialiste de la Russie Anne Nivat, ce positionnement n'a rien d'étonnant : "les Russes veulent incarner l'alternative dans chaque pays où ils s'implantent et en France, l'alternative selon eux c'est de relayer les thèses de la droite dure (Michel Garroté - Mais bon sang mais c'est bien sûr ! Poutine, c'est le patron occulte du Front National et Marine Le Pen voudrait même l'épouser, sauf qu'hélas, Poutine est déjà marié) - (fin des extraits adaptés et commentés par mes soins ; voir lien vers source en bas de page).
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Introduction, adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://www.lepoint.fr/politique/ces-medias-a-la-droite-de-la-droite-qui-veulent-reinformer-les-francais-03-09-2016-2065633_20.php
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