La Suède ne se contente pas de construire des avions de combat, elle produit aussi des sous-marins ou des blindés remarquables comme le CV-90, en dotation dans notre armée…
L’achat d’un nouvel avion de combat a déjà fait couler beaucoup d’encre et gageons que ce sera encore le cas jusqu’à une hypothétique votation populaire. Il est d’ailleurs bien légitime qu’un tel investissement, qui engage notre pays et sa politique de sécurité sur plus de trente ans (si l’on présume que le nouvel avion remplacera aussi le F/A-18 à l’orée 2025), suscite un débat public. Une décision positive du Souverain ne peut que renforcer la crédibilité de notre système de défense et son effet dissuasif.
Aux yeux de certains, c’est le « plus mauvais » avion qui a été choisi, parce que c’est le meilleur marché et parce qu’il n’afficherait pas les mêmes performances que ses concurrents, voire des performances inférieures. Voilà un argumentaire qui laisse pantois. En effet, le savoir-faire de l’industrie aéronautique suédoise est reconnu et ne date pas d’hier. Depuis la Seconde Guerre mondiale, les Suédois construisent des avions de combat. Le Gripen a pour prédécesseurs des avions aussi remarquables que le Draken ou le Viggen (photo), des avions faciles d’entretien et conçus pour pouvoir décoller et atterrir sur des pistes courtes. Autant de caractéristiques que l’on retrouve chez le Gripen. D’ailleurs, la Suède ne se contente pas de construire des avions de combat, elle produit aussi des sous-marins ou des blindés remarquables comme le CV-90, en dotation dans notre armée.
En raison du coût d’un tel investissement, l’achat d’un nouvel avion de combat ne peut se résumer à la seule comparaison des performances techniques des différents modèles en compétition. Pour un pays comme la Suisse, qui entend conserver sa neutralité (armée, faut-il le préciser), les aspects politiques et industriels revêtent une importance primordiale. Il en va du maintien de notre base industrielle de défense. Dès lors, vouloir sauvegarder les activités de Ruag, en particulier de sa branche aéronautique, est un objectif nécessaire. Quant au partenariat avec la Suède, il correspond bien à un choix politique, celui de nouer une coopération militaire avec un pays qui nous est proche et avec lequel des relations militaires existent de longue date.
Tout comme la Suisse, la Suède est confrontée à l’évolution de son environnement géostratégique. Jusque dans les années 1990, le royaume affiche une politique de neutralité et de non-alliance, et fait reposer son indépendance sur un haut degré d’autonomie industrielle et technologique. Sa base industrielle de défense reste importante, eu égard à la taille du pays. La fin de la Guerre froide remet en cause cette doctrine et change profondément la donne pour l’industrie d’armement suédoise. Tout en conservant une posture de pays non aligné (avec la non-adhésion à l’OTAN), la Suède fait le choix d’un modèle d’armée au format réduit et dédié aux opérations internationales. Bien que réduites en volume, les forces armées suédoises doivent être technologiquement beaucoup plus sophistiquées. Pour le ministère de la défense, il faut donc faire mieux avec moins. Les forces armées considèrent aussi qu’un haut niveau d’autonomie technologique n’est plus nécessaire dans tous les domaines et que la chute des budgets militaires rend impossible le lancement de nouveaux programmes nationaux d’armement. Les futurs programmes seront donc lancés en coopération ou ne le seront pas. Il n’est donc pas étonnant que la « sécurité par la coopération » se traduise pour les Suédois, outre la reconnaissance de la clause de défense mutuelle inscrite dans le traité de Lisbonne, par une participation active à des programmes clés comme le drone de combat Neuron lancé par la France (avec la participation de Ruag), les programmes de missiles air-air Iris T et Meteor, la munition d’artillerie Excalibur avec les Etats-Unis, le programme d’arme antichar Next-generation Light Anti-tank Weapon (NLAW) avec le Royaume-Uni ou encore le missile de croisière Taurus avec l’Allemagne. Autant de projets qui peuvent présenter un intérêt pour la Suisse également, si l’on pense au futur de notre artillerie, à la nécessité de disposer d’une arme antichar polyvalente ou encore aux missiles qui équiperaient le Gripen suisse.
Au-delà du choix de l’avion, c’est donc bien d’un choix en matière de politique de sécurité dont il est question et qui doit être au cœur du débat, pour autant que celui-ci ait bien lieu un jour …
Malika, « La saga des avions Saab », partie 1 :
http://www.youtube.com/watch?v=ACnQKLobnGE
Les dernières nouvelles du Gripen :
http://psk.blog.24heures.ch/archive/2012/09/20/la-suede-confirme-le-gripen-e1.html
Et vous, qu'en pensez vous ?