Fondement de la liberté des peuples, libératrice de tant de jougs tyranniques d'Ancien Régime, la démocratie ne semble avoir été bonne qu'à asseoir le pouvoir d'une caste prétendument représentative. Quand les peuples développent soudain une fâcheuse tendance à vouloir s'en servir librement, les panégyriques changent alors subitement de ton.
"Anticonstitutionnel", assure un journaliste de la RTS pris de fièvre légaliste, score "soviétique" renchérit Le Temps, les russophones de Crimée ne sont pas un peuple nous explique encore un professeur d'université, ils n'ont pas droit à l'autodétermination, oubliant que tous les Etats sans exception ont fondé leur existence sur la violation du droit précédent. Les trois du Grütli avaient-ils le droit de chercher à se libérer de la tutelle Habsbourg ? Certainement pas au vu du droit international. Droit international dont on découvre finalement qu'il n'est là que pour servir la raison du plus fort en toute circonstance. Rien d'étonnant au vu de l'histoire, la seule chose qui surprend étant, somme toute, la vision de ces légions de journalistes, d'ordinaire si prompts à célébrer la conquête des libertés minoritaires sur les ordres établis, rentrer si docilement dans le rang au moindre froncement de sourcil des gouvernants.
Les récents "incidents" démocratiques, survenus en lisière de l'Union européenne, et la réaction quasi unanime de la classe médiatique nous doivent être une preuve que le journaliste n'est plus un esprit libre, indépendant, doué du pouvoir d'analyse, mais un outil, une arme du pouvoir sur le champ de bataille politique. Une arme qui a été utilisée contre l'existence même de la démocratie, par une force - l'Union européenne, qui ne tolère d'ailleurs pas la démocratie en son sein -, au nom du mantra aussi mal compris qu'incessamment asséné de la lutte pour les droits démocratiques. Depuis quelques semaines, le refrain démocratique du "monde libre" occidental sonne aussi faux que lorsque les adeptes des démocraties "populaires" en rebattaient les oreilles du monde entier. On a créé une vertu mais on l'a vidé de son sens, l'idole est en toc et l'on comprend que son clergé n'y a jamais cru. En fait, la démocratie n'est pas censée rendre libre, et ne croyez pas que vous le serez jamais vraiment... libres.
Le vote suisse du 9 février était parfaitement "constitutionnel" et son score à mille lieues d'être "soviétique", qu'importe, cette manifestation excessive de liberté démocratique est aujourd'hui sujette à sanction, les Suisses ignoraient qu'ils n'étaient pas libres de choisir. Et comme, de l'aveu même d'une euro-députée, le vote du 6 décembre 1992 fut "réparé" en catimini, gageons qu'il en sera de même de celui-ci. Le peuple suisse ne vit plus que dans l'illusion de la démocratie, comme un vieux monarque déchu, perclus de sénilité, à qui quelques vieux courtisans feraient croire qu'il règne encore pour lui épargner un choc fatal. Cette démocratie n'est en somme qu'un hochet à ralentir quelque peu l'agenda mondialiste et à forcer ses partisans à trouver de nouveaux expédients pour parvenir tout de même à leurs fins, ce qui explique l'agacement et l'impatience de l'establishement au lendemain du 9 février: Quoi ? Il va encore falloir faire des pieds et des mains pour faire semblant de respecter la volonté populaire, quelle barbe !
Quoi qu'on puisse penser du résultat du référendum en Crimée, sachant bien que la démocratie est toujours sujette aux influences des puissances, de l'argent, des partis, des médias, le rejet de son résultat par l'alliance politico-médiatique occidentale est de même nature que celui qu'a dû essuyer le vote suisse, c'est le rejet d'une idée de liberté qui se passe de toute autorisation officielle ou légale, le rêve d'un peuple qui se croit libre, c'est, en son principe, le refus de l'idée même de la démocratie.
L’aventure de la Crimée et des récents évenements en Ukraine sont très intéressants sur de nombreux plans. Par exemple, Kiev est au milieu de l’ouest de l’Ukraine, qui a voté contre Yushchenko aux dernières élections, alors que la majorité de l’électorat, qui a voté pour Yush, se situe dans l’Ukraine de l’est. En d’autres termes une minorité a pu renversé un gouvernement élu par une majorité, grâce au placement géographique de la capitale. On a là affaire à une premiere secession qui ne se reconnait pas comme telle, convaincue qu’elle est de représenter l’ensemble du pays. Un détail piquant, relevé par le jérusalem post, est que c’est la Crimée, lors des dernieres votations présidentielles, qui a fait penché la balance en faveur de Yush, d’environ 1 demi million de votes, en d’autres termes, avec la séparation d’avec la Crimée, il peut y avoir dorénavant un oligarche élu à Kiev, du genre Tymoschenko, qui soit en accord avec la population de l’ouest de l’Ukraine et au service de l’union européenne qui a besoin de Lebensraum (main d’oeuvres bon marché), Chevron pour le fracking etc… Maintenant, est il acceptable par la communauté politico-financière internationale (internationale c’est à dire Wall Street et City of London) que l’héritage culturel de Nikita Kroutschev soit endommagé par la population de Crimée, qui prétend choisir ce qu’elle veut faire d’elle même, le temps le dira et comme disait Bertold Brecht, si le gouvernement central n’est pas content avec le peuple, pourquoi n’en élit t’il pas un autre tout simplement. Tout comme la pomme tombe peu loin du pommier, l’EU est tombée peu loin du 3ème Reich.