L’industrie de la sécurité et des techniques de défense constitue un pilier essentiel d’une politique suisse de sécurité indépendante. Elle garantit que l’armée, la police et les sociétés de sécurité privées soient correctement équipées pour accomplir leur mission en faveur de la population.
«Il est important pour la sécurité nationale de préserver la capacité industrielle de l’industrie d’armement suisse», peut-on lire dans le Rapport sur la politique de sécurité 2010. Nombre d’autres documents officiels soulignent l’importance d’une industrie de défense nationale (1). En outre, la population suisse s’est exprimée à plusieurs reprises en faveur du maintien d’une industrie de la sécurité performante – la dernière fois en date en rejetant sans appel l’initiative du GSsA pour l’interdiction des exportations en novembre 2009.
Le matériel protège notre milice
Quelle est exactement l’importance de disposer d’une base industrielle propre? Prenons l’exemple de l’armée, le principal acteur de la sécurité. La qualité de l’armée dépend d’une série de facteurs, comme le personnel, la doctrine, l’instruction, l’organisation et aussi le matériel. L’armée, ainsi que les citoyennes et citoyens effectuant leur service militaire, ont le droit de disposer du matériel le plus adéquat pour l’accomplissement de leur mission. La qualité du matériel a donc un impact non seulement sur le succès des interventions, mais aussi, en dernière conséquence, sur la vie des soldats.
Naturellement, s’approvisionner de manière entièrement autonome en matériel de défense national n’est ni réaliste, ni souhaitable pour un petit pays comme la Suisse. Mais, même sans viser l’autarcie, une industrie nationale des techniques de défense forte accroît la sécurité nationale. Premièrement, le niveau d’indépendance d’approvisionnement détermine la mesure dans laquelle la Suisse dépendrait d’autres Etats et d’entreprises étrangères en cas de crise. Deuxièmement, une indépendance unilatérale est ainsi remplacée par des dépendances mutuelles, ce qui accroît la liberté d’action de la Suisse.
La montée en puissance requiert des capacités industrielles
Ces dernières années, l’armée suisse a de plus en plus été réorientée pour faire face à des interventions probables. Que l’on se félicite de cette évolution ou qu’on la critique, elle est une réalité. Le «système de montée en puissance» prévoit que l’armée n’ait pas en permanence la pleine capacité de défense contre une attaque militaire (pouvoir-faire). Il se limite à préserver et à développer les connaissances et capacités requises à cet effet (savoir-faire).
Pour que le matériel nécessaire puisse être acquis en temps voulu, il faut une planification à long terme et des capacités industrielles. En effet, des fabricants basés en Suisse donneraient assurément la priorité aux commandes de l’armée suisse, tandis que les industries d’armement étrangères satisferaient en premier lieu les besoins de leur patrie et de ses alliés.
L’industrie suisse est soumise à un régime très strict des exportations.
Dans une comparaison internationale, la législation suisse en matière d’exportations des techniques de défense est très stricte. Elle a les suffrages de l’industrie suisse d’exportation, qui la respecte dans son intégralité. Les rares cas de transfert illégal de biens d’équipements exportés – comme les grenades à main suisses que l’on suppose être réapparues en Syrie – sont regrettables, mais ne peuvent être totalement exclus, ni pour les technique de défense ni pour les autres biens d’exportation. Un renforcement de la législation sur les exportations raterait sa cible et pénaliserait les entreprises suisses de haute technologie agissant dans les règles.
Voir aussi le site du Cercle de travail Sécurité et techniques de défense (www.cstd.ch), dont Jean-François Rime est le co-président.
(1) Par exemple: Rapport sur la politique de sécurité du 23 juin 2010, Rapport sur l’armée du 1er octobre 2010, Principes du Conseil fédéral en matière de politique d’armement du DDPS du 30 juin 2010, Message concernant l’initiative populaire «pour l’interdiction d’exporter du matériel de guerre» du 27 août 2008, article 1 de la loi sur le matériel de guerre (LFMG) du 13 décembre 1996.
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