Suisse-UE. Quelque chose se passe en Suisse. Refus de l’accord cadre et fin du régime oligarchique. Référendum obligatoire. Le scandale a déjà commencé

Michel Piccand, 29.11.2025

 

 

Quelque chose se passe en Suisse. Refus de l’accord cadre et fin du régime oligarchique. Référendum obligatoire. Le scandale a déjà commencé

 

27.10.2025

[Article / Dossier]

En Suisse, surtout en Suisse alémanique, des renversements majeurs d’opinion sont en train de se produire au sujet de l’UE. La politique de soumission à Bruxelles qui nous est imposée depuis plus de dix ans semble désormais avoir atteint ses limites. Les récents désistements au sein des partis pro‑UE montrent clairement que pour certains de leurs membres la situation va aujourd’hui trop loin.

Lorsque le parlement d’un pays, telle une oligarchie, confisque la volonté du peuple et refuse d’appliquer sa demande de restreindre l’immigration (le vote du 9 février 2014 n’est toujours pas appliqué bien qu’il figure dans la Constitution) et que les partis continuent sans aucuns scrupules à se moquer des gens, alors forcément arrive un moment où ceux qui hier encore se taisaient commencent à parler. Vous pouvez pousser quelqu’un dans l’eau une fois, pas deux.

Les discours bêtifiants que l’on nous a servi en 1992 pour nous faire accepter la libre circulation des personnes (bon pour la jeunesse, l’ouverture sur le monde, etc.) ne pourront pas se reproduire.

Sauf peut-être en Suisse-romande qui du point de vue médiatique ressemble à une sorte de prison mentale. Comme l’a encore montré la récente élection partielle du conseil d’Etat à Genève, où la gauche, pour s’opposer à un candidat UDC modéré, n’a rien trouvé de mieux que de lancer sur les réseaux sociaux un appel général à un front républicain pour s’opposer au fascisme. Oui vous avez bien lu, pour s’opposer au fascisme. On nage là en plein délire. L’utilisation de copiés-collés de politique française montre bien que ces gens n’ont plus aucun contact avec la réalité de notre pays.

 

De l’autre côté de la Sarine c’est assez différent.

Un ponte du PS zurichois vient de démissionner en critiquant son parti au niveau national, et en l’accusant d’avoir été livré aux mains des fundis (fondamentalistes), entendre, aux mains du couple de co-présidents du parti socialiste suisse, l’argovien Cédric Wermuth et la zürichoise Mattea Meyer. [1] Ce n’est pas en Suisse-romande que l’on verra de tels revirements. La pensée unique y a déjà confisqué tout débat.

Au-delà des points de divergences (Gaza, genrisme) entre Hartmuth Attenhofer et son parti le désaccord a porté sur ce que l’on explique depuis plus de vingt ans, le parti socialiste d’aujourd’hui n’est plus le parti responsable que l’on connaissait hier.

La responsabilité envers le pays y a été remplacée par un internationalisme croissant qui a désormais entièrement supplanté chez eux l’intérêt national. Comment en effet ne pas voir la différence avec l’ancien conseiller fédéral socialiste Otto Stich qui exigeait une gestion rigoureuse des finances du pays ?

Dans sa lettre de démission Attenhofer reproche aux socialistes d’aujourd’hui de distribuer de manière insensée l’argent public au détriment d’une politique sociale forte et durable. Exactement ce contre quoi Otto Stich déjà mettait en garde. Si vous distribuez à tous sans compter et désormais invitez en permanence le monde entier à s’y joindre, à la fin il ne restera plus grand chose.

Il y a les socialistes qui comprennent comment fonctionnent les comptes publics et ceux qui ne le comprennent pas, ceux qui dirigent aujourd’hui le PS ne font plus partie de la première catégorie.

Dans son interview à la NZZ, Attenhofer, après cinquante ans de militantisme, dit que pour lui « Être membre du PS était devenu insupportable, un véritable fardeau. » Si ça ce n’est pas une langue qui se délie on ne sait pas ce que c’est.

Ce que reproche Attenhofer aux socialistes c’est de suivre un populisme idéologique au détriment de tout pragmatisme et des capacités réelles du pays. Donc de ne plus avoir ces qualités qui ont fait la Suisse et son succès.

La rupture devient radicale lorsqu’il rajoute que « le PS est malheureusement infiltré par des gens qui gagnent 100’000 francs ou plus par an et qui luttent pour leurs propres intérêts ». De tels propos dans la bouche d’un ponte socialiste montrent bien qu’une fracture d’importance pourrait bien s’y préparer, ce que personne d’un peu responsable ne saurait regretter.

« Distribuer des cadeaux est facile. Mais le PS ne répond pas à la question de savoir qui les finance. C'est irresponsable envers les générations futures » précise-t-il encore en enfonçant le clou. Attenhofer montre ici qu’il est d’abord un Suisse avant d’être socialiste, ce qui manifestement ne semble plus être le cas pour un grand nombre d’entre eux.

Bien sûr, ce n’est pas le premier désistement socialiste à Zürich, mais justement il en montre encore plus l’importance, après ceux de l'ancienne conseillère nationale Chantal Galladé, de Mario Fehr, ou du conseiller national et ancien chef de groupe parlementaire zürichois Daniel Frei, qui déjà en 2019 déplorait la « jusofication » du PS, c’est-à-dire selon ce dernier et toujours dans la NZZ « la prise de pouvoir progressive au sein des instances du parti par de jeunes idéologues de gauche intransigeants et rompus aux relations publiques et aux campagnes électorales. »  Et là encore tout est dit.

A l’heure où la question capitale de l’accord-cadre avec l’UE va devoir être tranchée on voit donc ici les signes annonciateurs d’une fracture majeure à gauche entre ceux qui auront à cœur de défendre les intérêts du pays et ceux qui s’en contrefichent, une question elle aussi capitale qui va se poser à tout militant de gauche et dont on ne peut que se réjouir.

Quelque chose est en train de changer. Va changer. C’est inévitable. Les lignes sont déjà en train de se fissurer. Il se pourrait bien que la Suisse de demain ne ressemble plus à celle d’aujourd’hui. Parce que les désistements et les désaccords ne se manifestent pas seulement à gauche, ils s’étendent désormais à tous les partis politique et particulièrement au PLR. Le Centre ne demandant qu’à suivre bientôt.

On assiste ici à un rebattage radical des cartes au sein des partis favorables à l’UE. La question de l’accord-cadre va chez eux faire des dégâts. Les problèmes à venir ne pourront plus être écartés.

La gauche notamment devra expliquer à ses militants que la protection des salaires qu’agitent les syndicats relève du trompe l’œil. Avec l’accord cadre ce ne sont pas seulement les loyers qui vont continuer d’augmenter mais ce sont les déficits comptables de toutes les assurances sociales qui vont exploser.

L’accord cadre élargit de manière si considérable le droit d’établissement et le regroupement familial pour les citoyens de l’UE qu’il va augmenter drastiquement les coûts de l’aide sociale et de la santé en Suisse.

On peut estimer que dix ans après l’entrée en vigueur de l’accord cadre les Suisses devront verser au minimum 2 milliards de plus chaque année pour la protection sociale. Le maximum on ne peut pas l’évaluer ni le prévoir. [2] Et la question est d’ores et déjà de savoir qui va payer ?

Quel que soit le scénario, son financement passera soit par une hausse d’impôts ou des cotisations soit par une baisse des prestations sociales. Et ici la gauche ne dit pas qui va payer. Encore une fois, et sans surprise chez eux, la charrue est mise avant les bœufs sans aucune préoccupation sur la soutenabilité à long terme de leurs décisions.

Dans une société rationnelle la question de savoir qui devra supporter une dépense supplémentaire devrait être décidée avant le vote qui l’engendre. Pas après.

Mais ça chacun sait qu’à gauche à tout le moins ça ne se passe pas comme ça. Et que bien d’autres en Suisse semblent aussi l’avoir oublié. On dépense d’abord et on voit après.

Pascal Schmid, conseiller national et responsable de la politique d'asile au sein de l'UDC a dessiné les nouveaux scénarios possibles à teneur de la reprise de l’accord cadre et de la directive sur la citoyenneté.

Concrètement, dit-il, cela signifie qu'un Syrien naturalisé en Allemagne dans le cadre du programme de naturalisation accélérée pourra immigrer en Suisse et y faire venir directement de Syrie toute sa famille, y compris ses petits-enfants, grands-parents, oncles et tantes ayant besoin d'aide. [2]

La question de savoir qui devra financer ces dépenses supplémentaires si elles surviennent  (et à notre avis elles vont survenir) doit être posée à la gauche et à tous  ses militants maintenant. Aujourd’hui. Pas demain. Elle doit être posée à l’ensemble de la classe politique qui veut nous faire reprendre l’accord cadre. Nous voulons la réponse maintenant, pas après.

Il n’est en effet pas acceptable qu’un citoyen vote sur l’accord cadre sans savoir qui devra payer. Nous voulons avoir un engagement juridique contraignant de la part de ces partis politiques « avant » le vote.

Le citoyen a le droit de voter librement et en toute connaissance de cause.

Le temps des belles paroles et des belles promesses jamais tenues est désormais révolu.

On peut pousser quelqu’un dans l’eau une fois, pas deux.

 

ETRE OU NE PAS ETRE, TELLE EST LA QUESTION

Dans le même ordre d’idée de ces langues qui se délient, toujours le même journal a publié le même jour une interview de l’historien libéral helvetico-britannique Oliver Zimmer.

Bien que l’on ne soit pas d’accord avec certaines de ses analyses, ou avec  sa manière de dire du bout des lèvres que «Nous savons que nous avons un peu trahi la démocratie» lorsqu’il parle de l’inapplication de l’initiative sur l’immigration de masse (il s’agit en réalité d’une violation de notre Constitution et d’un coup de force permanent toujours en cours) les propos qu’il tient dans cette interview méritaient assurément d’être portés à la connaissance des citoyens romands, ce que la presse de ce côté de la Sarine ne fera évidemment pas. [3]

Le regard d’un historien suisse expatrié durant 27 ans au Royaume-Uni (revenu en 2021) et ayant été durant sept ans professeur titulaire d'histoire européenne moderne à Oxford et donc témoin privilégié du Brexit ne saurait manquer d’intérêt, en particulier ses analyses actuelles concernant le nouvel accord cadre que l’on nous demande d’accepter avec l’UE.

A la question de l’inapplication du vote sur l’immigration de masse il soutient qu’elle est due selon lui à une supranationalisation de la politique en Suisse, entendre d’une politique qui se fait désormais au-dessus de la nation. Ce n’est qu’un avant-goût de ce que nous connaitrons en signant l’accord-cadre avec l’UE, dit-il, et qui transformera notre démocratie en pure démocratie de forme.

Lorsque le journaliste lui dit que le Conseil fédéral n’est pas de cet avis il répond que le Conseil fédéral dit des choses qui sont fausses et que les notes explicatives de l’accord cadre montrent bien le contraire, ce que dit lui aussi dans un autre article mais d’une manière moins directe l’ancien conseiller fédéral PLR Johann Schneider-Amman. [4] Qui l’eût cru ?

Et là ça commence quand même à faire beaucoup de monde pour rejoindre les analyses que l’UDC vient de livrer et dont on peut la remercier. [5] Et ce d’autant que la liste grandissante des opposants PLR à l’accord cadre compte désormais parmi ses rangs des personnalités de tout premier plan, comme Jean-Pierre Bonny, ancien directeur de l'Office fédéral de l'industrie, du commerce et du travail (OFIAMT qui plus tard sera remplacée par le SECO) et qui a failli devenir conseiller fédéral, ou Filippo Leutenegger, président du PLR zurichois. La RTS romande peut donc bien continuer de chercher à désinformer le public en lui faisant croire qu’hormis l’UDC il y aurait unanimité dans tous les autres partis pour accepter l’accord cadre, ce n’est pas la réalité.

Et cette opposition ne devrait que grandir chez les Verts aussi lorsque sa  base se rendra compte que l’accord-cadre va lui faire perdre du pouvoir politique à elle aussi. Le militant de gauche Daniel Graf de la plateforme Wecollect a depuis longtemps annoncé que la reprise dynamique du droit européen allait fortement diminuer la capacité d’opposition politique de leurs partis et organisations. Quant aux électeurs écologistes ce n’est qu’une question de temps pour qu’ils se rendent compte qu’avec l’accord cadre il leur deviendra très difficile voire impossible en Suisse de s’opposer par exemple à un pesticide homologué par un grand groupe industriel dans un état européen moins regardant.

Pour en revenir au PLR, Zimmer remet en cause directement ses instances dirigeantes actuelles, il leur reproche de ne plus comprendre ce qui a fait le succès du libéralisme suisse c’est-à-dire un « ancrage » et un rapport de confiance avec la base citoyenne de ce pays. (Nous le disons depuis plus de vingt ans).

Si nous suivons la voie tracée par le Conseil fédéral conclut-il, et en particulier par le pouvoir décisif que l’accord cadre donne à la Cour de justice de l’Union européenne il en sera définitivement fini de notre indépendance, et en particulier dans le domaine selon lui explosif de l’immigration. Il rajoute que « Même les partis pro-UE le savent : le paquet de traités est un raccourci vers l'adhésion à l'UE. Mais ils refusent d'en parler ». Ici tout est dit.

On ne peut que s’en réjouir, mais aussi déplorer qu’il aura fallu vingt ans pour que les libéraux se rendent compte de leurs erreurs et finissent par admettre finalement que Souverainistes nous avions raison lorsque nous prédisions ce moment où Bruxelles exigerait la fin de notre indépendance. Nous y sommes. Qui peut encore dire le contraire ?

Pouvons-nous être confiants ? Certainement pas. Les oligarchies électorales à Berne nous ont déjà confisqué une fois notre Constitution et elles pourraient bien le faire une seconde fois, elles ont déjà montré que c’était possible et que rien ne les arrêtait. Et en réalité elles ont déjà commencé (voir ci-après).

Historien à Oxford, spécialiste européen, et donc témoin privilégié de ce qui s’est passé avec le Brexit, Zimmer encore prévient.  L'UE a tenté d'infliger un préjudice maximal à la Grande-Bretagne après le Brexit, et si Bruxelles craint une chose ce sont des systèmes politiques alternatifs au sien qui ont plus de succès. La lutte sera donc probablement sans pitié envers la Suisse. Les manipulations sans limites. Nous devons y être prêts. En réalité nous le sommes depuis toujours et la bonne nouvelle c’est que nous sommes de plus en plus nombreux tant les pro-européens ont abusé des citoyens dans notre pays ces dernières années.

En principe, lorsqu’on lit la perte hallucinante de souveraineté que l’accord cadre nous promet celui-ci devrait être un accord mort-né.

 

LE SCANDALE A DÉJÀ COMMENCÉ

Comme chacun le sait la Suisse connait deux sortes de référendums, le référendum obligatoire et le référendum facultatif. Le référendum obligatoire est une procédure de double majorité qui requiert la consultation du peuple au niveau national et la consultation du peuple dans chacun des cantons. Cette double majorité est requise pour toute modification de notre Constitution.

Le Conseil fédéral et le parlement n’ont ici rien à dire ni à décider. C’est le peuple qui est au-dessus, c’est lui le souverain.

Et comme il est le souverain c’est à lui, et à lui seul, qu’il appartient de modifier sa Constitution.

Mais concernant l’accord-cadre avec l’UE, le Conseil fédéral et la Conférence des gouvernements cantonaux en ont décidé autrement. Selon eux, l’accord cadre ne modifie en rien notre Constitution et n’a donc pas à être soumis au référendum. [6]

Chacun aura compris qu’il s’agit là de balivernes et d’une énième supercherie.

En cas de désaccord entre la Suisse et l’UE c’est la Cour de justice de l’Union européenne qui aura le dernier mot. Les textes européens seront repris automatiquement dans notre ordre juridique. Mais cela ne pose aucun problème de souveraineté ? Qui peut donc croire une chose pareille ?

Encore une fois les autorités trompent le peuple et lui racontent que la démocratie et la souveraineté ne seront pas touchées. Alors que le droit de l’UE sera imposé à la Suisse par un processus de colonisation juridique qui sera supérieur à sa Constitution.

Dans les matières concernées, la Suisse n’aura plus aucune autonomie législative, son droit devra obéir à celui de l’UE. Si nous n’acquiesçons pas au droit européen, ou nous y opposons par référendum, alors l’UE pourra prendre des sanctions contre nous. Nous ne serons plus dans une démarche bilatérale. Ce qui est mis en place c’est un procédé d’intégration de la Suisse dans l’UE, par une soumission de notre droit à celui de l’UE (voir ci-après les détails dans les remarques en annexe).

L’UE est en train de nous coloniser par le droit. Le peuple suisse et sa démocratie y seront évincés, privés de leur liberté de choix car soumis en permanence à des sanctions européennes s’ils n’obéissent pas. Nous serons sous la crainte permanente de conséquences économiques ou politiques dont nous ignorerons le contenu par avance. Et nos autorités disent que nous restons souverains ? C’est juste une plaisanterie.

Pour ceux qui doutaient encore qu’en Suisse un régime oligarchique travaille à d’autres intérêts que ceux de notre peuple ils en auront ici une nouvelle preuve des plus cruelles.

Après la confiscation du vote sur l’immigration de masse c’est un nouvel exemple par lequel ces mêmes partis politiques pro-UE, pourtant très minoritaires, mais alliés sur cette question, sont une nouvelle fois en train de nous confisquer notre Constitution, en nous privant du référendum obligatoire.

On peut pousser quelqu’un dans l’eau une fois, pas deux. Cette dégénérescence politique doit s’arrêter. Ce régime oligarchique doit prendre fin.

Notre souveraineté n’est ni à vendre ni négociable.

L’oligarchie est un régime politique dans lequel le pouvoir politique est confisqué par une classe restreinte et privilégiée. Et si nous ne sommes pas ici face à une oligarchie alors que l’on nous dise qui nous a confisqué le vote sur l’immigration de masse et qui nous confisque aujourd’hui pour la deuxième fois notre Constitution en nous privant du référendum obligatoire ?

Cela doit s’arrêter. Le scandale a déjà commencé. Pour la deuxième fois, oui, pour la deuxième fois on nous confisque notre Constitution. Et c’est précisément pour ça qu’en masse nous allons dire non à l’accord-cadre avec l’UE.

Le parlement peut d’ores et déjà arrêter de discuter et de gaspiller notre argent. C’est déjà terminé.

On peut pousser quelqu’un dans l’eau une fois. Pas deux.

 

Michel Piccand

 

N.B.

La question de savoir si l’accord cadre sera finalement soumis au vote des Suisses dépend de la réponse qu’en donnera le parlement. Nous n’en sommes pour l’instant qu’à la fin de la période de consultation des divers groupes de la société civile.

C’est le parlement qui lorsqu’il acceptera l’accord cadre (ce qu’il fera certainement) devra constater s’il est soumis au référendum obligatoire ou non, et il l’inscrira dans l’acte adopté. Et c’est ici qu’apparait (parmi d’autres et encore une fois) l’une des failles inacceptables de notre système constitutionnel, à vrai dire l’un de ces trous béants qui sont une véritable honte pour notre démocratie.

La doctrine constitutionnelle dit que le parlement dans sa décision va devoir « constater » si le texte considéré est soumis au référendum obligatoire ou non.

A nulle part cependant la Constitution ni la loi sur le parlement ne donnent au parlement (pas plus qu’au Conseil fédéral) le pouvoir de discuter ou d’interpréter la portée ou la nature juridique du texte qui est présenté ou de décider s’il est soumis au référendum obligatoire ou non.

La réponse à la question de savoir si le texte doit être soumis au référendum obligatoire c’est la Constitution qui la donne.  Si ce texte entraine une modification du fonctionnement de notre ordre constitutionnel alors il doit être soumis au référendum obligatoire et à l’approbation du peuple et des cantons. Ce qui décide ce sont des critères juridiques fonctionnels et non la volonté ou l’interprétation politique du parlement ou du Conseil fédéral.

S’il est possible de « constater » que le texte peut avoir des conséquences matérielles sur le fonctionnement constitutionnel de la Suisse, c’est-à-dire qu’il puisse entraîner une modification du fonctionnement concret et actuel de notre souveraineté, alors il tombe inévitablement et par analogie dans la catégorie des cas de révision de la Constitution soumis au référendum obligatoire.

Et cela ne sort pas de nulle part. Si les modifications de la Constitution sont soumises à l’approbation du peuple et des cantons c’est parce que le peuple constituant lui-même a entendu protéger sa souveraineté contre le risque qu’on ne la lui confisque.

Il en découle, que s’il y a modification ou risque de modification dans l’exercice concret de la souveraineté du peuple, alors l’acte ou le texte juridique qui pourrait en être la cause doit obligatoirement être soumis à l’approbation du peuple et des cantons. Il n’existe pas d’autres lectures possibles.

N.B. La doctrine constitutionnelle longtemps enseignée dans nos universités va exactement dans ce sens (Auer, Malinverni, Hottelier). Si l’acte sans modifier formellement la Constitution (i.e. sans changer son texte) modifie matériellement l’exercice concret de la souveraineté alors nous sommes face à un cas de référendum dit de souveraineté qui doit obligatoirement être soumis au peuple et aux cantons. Ce raisonnement est exactement celui qui a été appliqué pour nous faire voter sur l’accord refusé sur l’EEE en 1996 et sur notre entrée dans l’ONU en 2002. Ces deux votes ont été soumis obligatoirement au peuple et aux cantons car ils modifiaient des éléments fondamentaux de notre souveraineté. Souveraineté qui précisément est aussi modifiée et sans aucun doute plus que jamais par l’accord cadre que l’on veut nous faire accepter. (Cf. ci-après la Remarque sur l’accord cadre).

Au surplus, même si l’on admettait ici qu’il y a doute, il n’est pas difficile de comprendre, au vu d’une matière si importante, que ce doute ne pourrait être levé que par le peuple lui-même et qu’il aurait alors fallu lui demander au préalable ce qu’il en pense en lui posant la question. De toute éternité ce qui relève de la matière constitutionnelle dans notre pays n’appartient par principe et par essence qu’au peuple et à lui seul. A nul autre.

Mais ici les élus ont fait exactement le contraire, ils se sont octroyé le pouvoir de choisir ce qui convient le mieux à leur désir politique, ils se sont octroyé un pouvoir de trancher et de décider qu’ils n’ont pas. C’est un abus.

C’est une deuxième et nouvelle violation de notre Constitution qui sans surprise concerne toujours nos relations avec l’UE. Un nouvel abus contre lequel le peuple n’a pas le pouvoir de s’opposer puisque selon notre même Constitution il ne peut pas contester en justice les décisions du parlement.

Ce qui se passe ici, encore une fois, montre (après la confiscation du vote sur l’immigration de masse par le parlement en décembre 2016) que la Suisse, si elle entend préserver sa démocratie, et quoi qu’il en soit du futur de l’accord cadre, ne pourra pas échapper dans les années qui viennent à la question d’une réforme radicale de sa Constitution.

La Suisse doit désormais introduire une responsabilité juridique et personnelle des élus envers le peuple. Une responsabilité qui à tout le moins doive permettre au peuple de s’opposer et de casser directement les actes illégaux du parlement ou du Conseil fédéral et dont on voit bien ici qu’elle serait désormais le seul moyen de forcer les élus à respecter nos règles et notre Constitution.

En ce qui concerne le référendum pour l’accord-cadre avec l’UE, la suite logique c’est que l’UDC va être obligée de réunir les signatures pour demander un référendum facultatif qui, lui, ne sera alors plus soumis qu’à la majorité simple du peuple sans devoir réunir la majorité des cantons.

Le scandale est déjà consommé.

C’est la deuxième fois (2), après l’inapplication du vote sur l’immigration, que les élus de ce pays confisquent la Constitution du peuple. Et ils nous disent que nous pouvons leur faire confiance ainsi qu’à l’Union européenne et qu’il n’y a aucun problème de souveraineté. Ce sont juste des balivernes.

 

REMARQUE SUR L’ACCORD CADRE

LA PERTE DE L’AUTONOMIE LEGISLATIVE

Du point de vue global le but de l’accord cadre dans les matières concernées est de rendre conforme le droit suisse au droit européen, et là aussi on a déjà presque tout dit.

Rendre conforme (ou adapter) un droit à un autre droit cela veut dire qu’un des deux droits prime sur l’autre, et cela a pour conséquence que dans les matières concernées il deviendra au niveau des principes impossible pour la Suisse de légiférer de manière contraire au droit de l’UE. C’est une modification radicale et concrète du fonctionnement de nos institutions et de notre souveraineté.

Ce qui se passe c’est un peu comme si deux voisins constataient que les règles qu’ils   ont dans leurs maisons diffèrent et qu’il se disent que pour leur bonne entente ils veulent les harmoniser. Il y a en principe ici deux manières de faire. Dans la première on regarde comment les lois se ressemblent et diffèrent et alors on construit une loi pour les faire coexister paisiblement et pour régler les désaccords qui pourraient survenir, c’est typiquement ce qui se fait dans un accord bilatéral.

Or, dans cette affaire de l’accord cadre ce n’est plus du tout la même chose. L’UE dit mes règles sont comme ça et désormais les vôtres devront être pareilles, elles devront s’y adapter. Elle rajoute qu’en cas d’adaptation non conforme de nos lois dans le sens qu’elle nous dit alors elle pourra prendre des mesures contre nous, autre manière de dire des sanctions.

Et là on voit bien que l’un à la maitrise de la loi et que l’autre ne l’a pas. Qu’il n’y en a plus qu’un seul qui est le maitre de la loi et qui a le pouvoir. C’est une perte de souveraineté concrète. C’est concrètement une perte de souveraineté même si formellement aucune virgule n’est changée dans notre Constitution.

Tous les arguments byzantins et pseudo-techniques dont on assomme les citoyens passent totalement à côté de cette vérité première. Dans les domaines concernés nous ne serons plus les maitres de nos lois. Formellement ce sera toujours nous qui les déciderons mais avec l’obligation de faire les mêmes que celles de l’UE. Si pour une raison ou une autre nous voudrons faire une loi différente par exemple pour défendre un secteur particulier de notre société ou de notre économie alors ce ne sera plus possible.

On nous répond que c’est faux, car nous restons souverains et que nous aurons toujours la possibilité de dénoncer ces accords en d’en sortir, ce qui en théorie est vrai, mais qui dans la pratique sera presque impossible. Nous avons vu avec quelles difficultés un Etat puissant comme le Royaume-Uni a dû batailler pour y arriver. Un exemple de rupture dont beaucoup de Suisses par ailleurs en ignorent toujours la cause puisque si le Royaume-Uni est sorti de l’UE c’est parce qu’il n’arrivait plus à y défendre ses intérêts et à se faire entendre (voir explication ci-après).

Ce que nous perdons avec l’UE c’est notre autonomie juridique et législative. Tout discours qui évite de parler de cette perte d’autonomie relève de la supercherie. Nous ne pourrons plus avoir de lois contraires. C’est l’UE, la Commission de Bruxelles, les juges à Luxembourg et à Strasbourg qui deviendront les maitres de nos lois.

Pour être précis il faut rajouter que ce phénomène de reprise des lois et des jurisprudences de l’UE a déjà en partie commencé et que l’on peut déjà en constater les effets négatifs et destructeurs dans notre pays.

Les vols et la criminalité ont explosés en Suisse mais selon les principes européens nous n’avons plus le droit de contrôler strictement nos frontières ou le droit de circulation et d’établissement des ressortissants (même illégaux) des États membres dans notre pays. Des milliers d’Européens trouvent du travail en Suisse mais selon les principes européens nous n’avons plus le droit de privilégier nos nationaux. Idem pour le logement. Plus l’emprise législative européenne s’étend dans les divers secteurs de notre société et plus nos conditions de vie se dégradent.

En 2008, lors de la crise des subprimes nous nous sommes retrouvés dans l’obligation d’aider de toute urgence la banque UBS sous peine de voir toute notre économie paralysée du jour au lendemain. Les principes européens et les jurisprudences qui limitent les aides d’Etat et que l’on veut nous faire accepter aujourd’hui nous auraient alors empêchés de soutenir l’UBS avec la même rapidité et avec les mêmes moyens.

Avec les principes européens de limites des aides d’Etat (dont beaucoup de leurs États membres par ailleurs continuent d’abuser en trichant) notre économie entière pourrait se retrouver paralysée du jour au lendemain.

En comparant le montant d’aide reçue par l’UBS avec ceux bien moindres dont ont pu bénéficier sous lois UE les banques européennes en 2008, il ne fait aucun doute que la Commission européenne et les juges européens s’y seraient opposés comme faussant la concurrence. Aucune banque européenne n’a pu être recapitalisée aussi vite et avec autant d’argent que l’UBS qui a incontestablement bénéficié d’un avantage concurrentiel à cette occasion (cf. dans le même ordre d’idée le nombre de banques européennes qui toujours aujourd’hui ne sont considérées que comme des banques zombies à la limite de la survie).

Qu’on imagine alors ce qui se serait passé avec de grandes banques européennes françaises ou allemandes, proches de la Commission de Bruxelles, et qui alors auraient pu essayer d’en profiter pour tenter de faire tomber la place financière suisse dans leur escarcelle.

Vous pensez que c’est impossible ? C’est exactement ce que ces banques ont essayé de faire avec le Royaume-Uni durant les années précédant le Brexit, en cherchant à forcer des secteurs entiers de la place financière londonienne à se relocaliser en zone euro, c’est-à-dire à Paris et Francfort. Cette tentative de forcer les Britanniques à relocaliser une partie de leurs activités financières en zone euro est l’unique raison qui a poussé les conservateurs britanniques et David Cameron à voter le Brexit alors que nombre d’entre eux auraient préféré rester dans le marché unique de l’UE.

(Cet épisode du Brexit est totalement passé sous silence en Suisse, il est exposé en détail dans « Brexit: L'adhésion du Royaume-Uni à la CEE ». Disponible en ligne.

https://www.amazon.fr/Brexit-Ladh%C3%A9sion-Royaume-Uni-%C3%A0-CEE-ebook/dp/B01GDIQE7U#averageCustomerReviewsAnchor ).

L’autonomie juridique et législative est essentielle à la conduite d’une nation. Seule l’autonomie juridique et législative permet à un pays d’adapter ses lois à ses besoins. Sans elle il n’a plus d’autonomie politique.

Dans le cours ordinaire des choses lorsque deux partenaires veulent coopérer la matrice de l’accord repose sur l’échange de droits : je te donne ce droit tu m’en rends l’équivalent. C’est la matrice même de tous les accords bilatéraux que nous échangeons avec tous les pays du monde. Mais l’UE, elle, veut autre chose.

Nos accords avec elle sont déjà bilatéraux, ce que les entreprises et les citoyens suisses peuvent  obtenir sur le territoire de l’UE les Européens peuvent l’obtenir sur le territoire de la Suisse. Alors que demander de plus ? Pourquoi l’UE veut-elle en plus que notre droit devienne conforme à son droit intérieur ?  Poser la question c’est y répondre.

Sous le vocable d’harmonisation du droit, ou sous l’appellation trompeuse de « stabilisation de nos relations » qu’utilise le Conseil fédéral, c’est en réalité une mise en conformité du droit suisse au droit européen que l’on veut nous faire accepter. Une telle mise en conformité ou l’un des droits étend ses principes et les infiltre dans un autre pour y devenir le maitre relève en réalité d’un processus de colonisation juridique.

Et la colonisation juridique a de tout temps été l’instrument central de toute colonisation politique, une pratique que l’on voit et a vue dans toutes les expansions administratives coloniales et impériales de l’Histoire. Lorsqu’il n’y a plus d’autonomie juridique et législative c’est le pouvoir politique (du dominé) qui lentement s’efface pour finir par disparaitre.

La perte croissante de notre autonomie juridique et législative, le pas supplémentaire que l’on veut nous imposer avec l’accord cadre, sont évidents. Et que nous disent le Conseil fédéral et la Conférence des gouvernements cantonaux ? Que ce n’est pas un sujet si important qu’il doive être soumis au référendum obligatoire.

Ce sont juste des sornettes. Ces gens se moquent de vous.

 

N.B. La thèse du maitre de la loi a déjà été largement exposée il y a maintenant plus de douze ans dans « Suisse années 2015, un peuple qui disparait ». Disponible en ligne.

https://www.amazon.fr/Suisse-Ann%C3%A9es-2015-Peuple-Dispara%C3%AEt-ebook/dp/B00Y74ULQI

 

LA DISTINCTION FORMELLE / MATERIELLE

L’abus de ceux qui veulent faire croire que ces accords n’entament en rien notre souveraineté repose sur l’utilisation abusive d’une distinction bien connue en droit qui oppose le formel au matériel.

En droit une chose peut être formellement vraie mais matériellement fausse.

En voici un exemple parlant.

Lorsque dans un procès un juge se voit poser une question juridique par l’une des parties il a l’obligation d’y répondre. S’il n’y répond pas il viole le droit d’être entendu de cette partie (il ne l’entend pas). C’est une violation d’un droit fondamental de procédure.

Mais les procédures en justice sont remplies de cas où le juge fait semblant de répondre à la question juridique qui lui est posée, (formellement) dans la forme il y répond, dans son jugement il écrit une réponse, mais en s’arrangeant pour ne pas répondre ou ne répondre que partiellement à la question qui lui a été posée et à laquelle (matériellement), donc dans les faits, il ne répond pas. Le résultat est que formellement il répond mais pas matériellement.

Dans notre affaire avec l’accord cadre c’est le même type d’abus reposant sur une utilisation abusive (et de mauvaise foi) de  la distinction entre le formel et le matériel, entre la forme et le fond, qui est utilisé.

Dans toute la justification juridique que Conseil fédéral a utilisée dans son Rapport explicatif à l’accord cadre pour expliquer que la démocratie et la souveraineté sont respectées il détaille par le menu que du point de vue de la « forme » (formellement) tout est respecté, le texte de notre Constitution n’est en rien modifié, sa forme et son texte ne pas touchés, nous aurons toujours le droit de faire des référendums contre les reprises du droit européen.

Ce que le Conseil fédéral et les pro-UE ne disent pas c’est que si du point de vue procédural notre Constitution est bien « formellement » respectée, « matériellement » elle ne l’est pas. Si formellement nous sommes toujours souverains, matériellement nous ne le sommes plus.

Et cela se prouve par ce qui a déjà été dit et par les raisonnements qui suivent :

 

(1) PLEINE AUTONOMIE LEGISLATIVE

Un Etat n’est souverain que lorsqu’il possède la pleine autonomie de son pouvoir législatif, c’est-à-dire lorsqu’il peut promulguer toutes ses lois sans avoir à se conformer à l’avis d’un autre Etat.

Ce n’est plus le cas avec l’UE puisque dans les matières concernées nous ne pouvons plus légiférer en sens contraire ou dans un sens différent de la législation de l’UE sans son assentiment.

 

(2) EGALITE DES PRINCIPES JURIDIQUES NATIONAUX

Un Etat n’est souverain que si ses propres principes juridiques sont respectés et à égalité avec ceux des autres nations.

Ce n’est plus le cas avec l’UE puisque les principes européens priment dorénavant sur les nôtres. Nous ne pouvons en particulier plus avoir un contrôle strict de nos frontières et de notre immigration car nous devons respecter le principe de libre circulation des personnes de l’UE.

Un Etat ne peut pas être considéré comme souverain lorsque l’unification du droit est unilatérale et ne va que dans un seul sens.

Notre droit est unilatéralement adapté à celui de l’UE, il n’y a ici plus aucune égalité entre les deux ordres juridiques, il n’y a plus de bilatéralité.

Si formellement nous restons souverains, matériellement les éléments concrets montrent que nous n’avons dans les faits plus toute notre autonomie juridique et que nous sommes dans un rapport inégalitaire soumis aux principes de l’UE.

 

(3) PLEINE AUTONOMIE DES DROITS REGALIENS

Un Etat n’est souverain que lorsqu’il a la pleine possession de l’exercice de ses droits régaliens.

Les droits régaliens sont les droits visant à protéger l’existence de l’Etat. Sans le plein exercice de ces droits l’Etat n’est plus à même de garantir son existence. En fait partie tout ce qui concerne la protection du territoire et notamment la maitrise de l’immigration et du droit d’établissement des étrangers.

Or, ces deux derniers droits régaliens ont été restreints pour la Suisse afin de satisfaire au principe de libre circulation des personnes que l’UE lui a imposé unilatéralement et par la force.

Au début des négociations sur les accords bilatéraux avec l’UE, à la fin des années 90, il ne fut en effet jamais question pour la Suisse d’accepter un tel abandon de ses droits régaliens, cet abandon lui a été imposé durant les négociations, les comptes rendus en font foi.

Il n’existe par ailleurs jamais aucune raison pour que dans le cadre d’accords économiques une partie exige de l’autre un abandon de ses droits régaliens ou la perte de la pleine possession de son contrôle migratoire et de son droit d’établissement.

Les droits régaliens sont toujours  des questions distinctes des accords économiques.

C’est l’UE qui forte de son poids et de la taille de son marché a forcé la Suisse à accepter que ces questions distinctes soient liées en échange d’un accès libre et complet de la Suisse à son marché. C’est une pratique typiquement coloniale.

Lorsque le peuple suisse a voulu s’y opposer par le vote sur l’immigration de masse le 9 février 2014 ce vote lui a été confisqué par ses propres autorités prétextant que l’UE n’était pas d’accord.

De fait, l’accord avec l’UE (ALCP), tant par son origine, que par sa structure juridique ou par sa pratique et ses conséquences concrètes pour la Suisse, a montré qu’il fonctionne selon la règle (illicite en droit international) du droit du plus fort.

L’accord avec l’UE a commencé par une colonisation juridique de la Suisse en l’obligeant à accorder aux citoyens européens un droit de s’établir librement sur son sol, droit qui s’est ensuite matérialisé par une colonisation démographique massive de la Suisse par les ressortissants de l’UE.

Si l’on reprend que toute colonisation se caractérise par un processus de domination d’un Etat sur un autre, par lequel le premier étend son contrôle et l'établissement de ses citoyens sur le territoire du second, alors on ne peut nier que nous sommes ici factuellement face à un processus de colonisation.

Les résultats concrets entrainés par l’ALCP en Suisse correspondent en tous points à cette définition et en réunissent les deux éléments caractéristiques principaux : restriction ou disparition des droits régaliens du pays dominé, accroissement démographique massif des ressortissants du pays dominant sur le territoire du pays dominé sans possibilité pour celui-ci de s’y opposer.

Un Etat n’est souverain que lorsqu’il a la pleine possession de l’exercice de ses droits régaliens.

Vingt-cinq ans de libre-circulation des personnes avec l’UE montrent dans les faits comment la restriction de ses droits régaliens à fait perdre à la Suisse matériellement son autonomie et une partie de sa souveraineté. Démographiquement, elle est aujourd’hui dans les faits un pays en voie de colonisation.

Mais cela ne pose aucun problème de souveraineté n’est-ce pas ?

 

 

N.B. La clause de sauvegarde de l’ALCP qui permet de limiter l’immigration n’est à cet égard d’aucun secours et relève largement du mythe. Cette clause ne sauvegarde rien, elle ne permet qu’une limitation provisoire de l’immigration pour des raisons économiques et ne change rien au fait que les Suisses sont en train de devenir minoritaires dans des bien des régions de leur propre pays, la colonisation est ici un fait qu’il n’est plus possible de contester. Notre population a augmenté de 30% en vingt-cinq ans uniquement par la migration. Et le projet de la majorité pro-UE au pouvoir est de continuer comme ça.

Par ailleurs, et sans surprise, la nouvelle clause de sauvegarde qui figure dans le nouvel accord cadre avec l’UE (article 14 a nouveau ALCP) sera encore plus difficile à mettre en œuvre car elle obligera désormais la Suisse à prouver un lien de causalité strict entre la libre circulation et l’effet économique jugé indésirable (ce qui n’est actuellement pas une obligation juridique) et qui, vous pouvez vous en douter, sera très difficile à invoquer (ex. La pénurie de logements résulte-t-elle de l’ALCP ou du fait que la Suisse ne construit pas assez de logements ou ne déclasse pas assez de territoire constructible ? La hausse du chômage est-elle due à la libre circulation ou à la baisse de la demande mondiale ? Etc.)

À bien des égards cette nouvelle clause sera donc juste du vent, comme l’a montré l’absence de mise en œuvre de la clause actuelle en vigueur qui est pourtant plus souple et plus facile à appliquer que ne le sera la nouvelle, et qui, sauf lors de l’extension de l’ALCP à la Bulgarie et la Roumanie en 2009 n’a jamais été appliquée.

Pire, ce sont les autorités helvétiques elles-mêmes qui vont déterminer les seuils de mise en œuvre de cette nouvelle clause de sauvegarde et vont les inscrire en droit interne dans notre loi sur les étrangers et l’intégration (LEI). Or, les seuils d’activation que le Conseil fédéral a déjà proposés sont si élevés qu’ils n’auraient permis de demander à l’UE une limitation provisoire de l’immigration que deux fois, oui vous avez bien lu, que deux fois durant les 25 dernières années depuis l’entrée en vigueur en 2000 de la libre-circulation et qui a pourtant vu notre population augmenter de 30 % ! (Rapport explicatif (voir le lien sous Note 2 infra) p. 284, par. 2 et Tableau 2.3.8.1.).

Le Conseil fédéral a donc déjà pensé ces seuils de manière à ce qu’ils n’entrainent aucuns risques de désaccords avec l’UE. Vous avez donc déjà une idée du tableau, qui reste toujours le même, le peuple, dans les faits, les problèmes concrets auxquels il se voit quotidiennement confronté, le Conseil fédéral s’en moque.

Ce que l’on voit ici dépasse clairement l’admissible, puisque ce sont nos propres autorités qui vont fixer des seuils très hauts pour limiter leur propre marge de manœuvre en matière migratoire ! Le Conseil fédéral est sans aucun doute (on le savait déjà) l’un des meilleurs élèves de l’UE.

Si le parlement devra bien évidemment se prononcer aussi sur le niveau de ces seuils, certains milieux économiques, notamment la FER (Fédération des Entreprises Romandes) sont déjà en train de faire pression pour que les seuils de mis en œuvre de la clause de sauvegarde soit fixés le plus haut possible.

Les Suisses seront-ils mieux protégés ? C’est le contraire qui est vrai. Ce que le Conseil fédéral avec l’accord cadre voit comme une phase de stabilisation de nos relations avec l’UE est en réalité une phase de consolidation de ce qui s’est fait dans le passé et avec des conditions encore plus dures qui seront inscrites dans l’airain. Des seuils si hauts et si inapplicables que la clause de sauvegarde comme le reste ne sera plus qu’un trompe l’œil et une astuce de plus pour faire croire au citoyen qu’on le protège, le B.A.ba en somme, une fois de plus, de la supercherie politique.

 

ADDENDUM

Deux avis de droit récents de professeurs émérites de droit constitutionnels en Suisse-allemande, de Hans-Joerg Seiler et de Paul Richli, viennent encore confirmer tout ce qui a été dit sur le référendum obligatoire. Nous en reparlerons.

Mais la question de savoir pourquoi on ne trouve à notre connaissance aucun professeur en Suisse-romande devrait déjà être posée. De quoi ce silence étourdissant de ce côté de la Sarine est-il le reflet ? En réalité nous le savons tous déjà.

 

 

NOTES

 

[1]

Ein Zürcher SP-Urgestein verlässt die Partei im Streit. «Die SP reitet auf einer üblen antisemitischen Grundwelle mit», sagt Hartmuth Attenhofer. 21.10.2025.

https://www.nzz.ch/zuerich/sp-reitet-auf-antisemitischer-welle-mit-sp-urgestein-kehrt-partei-den-ruecken-ld.1907959

 

[2]

La gauche devra notamment s’expliquer sur la protection des salaires qui sera très largement illusoire en matière de protection sociale et de revenu disponible pour les citoyens (ce qui leur reste à la fin du mois une fois qu’ils ont tout payé).

Avec l’accord cadre non seulement les loyers vont continuer d’augmenter mais ce sont les ressources des caisses sociales qui vont diminuer du fait d’un afflux supplémentaire de personnes étrangères en recherche d’aide sociale.

L’accord cadre (i.e. la reprise partielle de la directive 2004/38/CE inscrite dans le protocole d’amendement de l’ALCP nouveau) supprime en effet l’une des conditions du regroupement familial qui était pour le travailleur européen en Suisse de disposer de la capacité d’héberger les membres qu’il voulait faire venir, cette condition et devoir de les héberger lui-même ne sera plus nécessaire. (Rapport explicatif du paquet Suisse-UE, p.220).

(Cf. également. Condition du logement convenable dans le tableau de la Fiche d'information du 15.07.2025, Libre circulation des personnes - regroupement familial, admin.ch, disponible en ligne).

 

Le Conseil fédéral évalue que la seule reprise de ladite directive devrait entraîner une hausse annuelle du nombre de bénéficiaires de l’aide sociale de l’ordre de 3000 à 4000 personnes (Rapport explicatif p.356).

Ici chacun sait que ce type de prévisions du Conseil fédéral n’a aucune valeur, en 2000 il nous avait promis que l’immigration resterait limitée et que les prix en Suisse allaient baisser, c’est exactement le contraire qui est arrivé. Son calcul représente d’autre part un minimum parce que sur la base de 4000 nouveaux bénéficiaires de l’aide sociale chaque année on arrive à une somme de dépenses sociales supplémentaires au sens large de 158 millions et non de 72 millions uniquement pour la première année.

Plus grave, le Rapport explicatif du Conseil fédéral oublie une modification importante apportée par la reprise de la directive 2004/38/CE qui concerne la capacité (nouvelle) pour l’immigrant UE en Suisse de faire venir tout proche ou membre de sa parenté, quelle que soit la nationalité de ce dernier, même non citoyen de l’UE, s’il a besoin de soins médicaux.

C’est la porte ouverte à un risque d’immigration médicale massive.

Avec toutes les conséquences possibles sur les coûts de la santé dont une majorité de citoyens n’arrivent déjà plus à payer les primes. Le Conseil fédéral n’en pipe pas un mot.

Bis repetita. On reprend les mêmes et on recommence. Comme avant toutes les votations sur les bilatérales qui ont eu lieu en Suisse les autorités font l’apologie des bénéfices à gagner tout en cachant ou minimisant les dépenses qui seront mises à la charge du peuple. Ce n’est pas acceptable.

Ce transfert caché des charges sur le dos du peuple est au cœur même des analyses déjà posées dans « La croissance économique de la Suisse, un drame politique caché ». Disponible en ligne. Ce n’est donc pas un fait nouveau. Nous sommes ici face à une nouvelle aggravation.

https://www.amazon.fr/croissance-%C3%A9conomique-Suisse-drame-politique-ebook/dp/B00UEW21Y2

 

Rapport explicatif du paquet Suisse-UE

https://www.europa.eda.admin.ch/dam/fr/sd-web/D1B9F4b1HKA2/20250613%20Rapport%20explicatif%20(FR).pdf

 

 

[3]

Zimmer: «Es entwickelt sich eine soziale Zweiteilung in der Schweiz – man muss nicht Sozialist sein, um das zu erkennen». 21.10.2025.

https://www.nzz.ch/schweiz/oliver-zimmer-es-entwickelt-sich-eine-soziale-zweiteilung-in-der-schweiz-man-muss-nicht-sozialist-sein-um-das-zu-erkennen-ld.1906911

[4]

Johann Schneider-Ammann. Die Schweiz darf gegenüber der EU nicht den Weg des geringsten Widerstands gehen. 13.10.2025.

https://www.nzz.ch/meinung/die-schweiz-darf-gegenueber-der-eu-nicht-den-weg-des-geringsten-widerstands-gehen-ld.1906154

[5]

https://lesobservateurs.ch/2025/10/21/il-ny-a-quune-seule-reponse-a-donner-a-ce-traite-dadhesion-lue-un-non-categorique-du-parlement-du-peuple-et-des-cantons/

[6]

Le Conseil fédéral était toutefois déjà parvenu à la conclusion que les nouveaux accords « n’entraînaient pas de modification politique fondamentale et ne touchaient donc pas à notre ordre constitutionnel » (FF 2004 5593, 5913).

https://www.news.admin.ch/fr/newnsb/nZPui4ybDJRNFN-qkQtS5

 

Conférence des gouvernements cantonaux

Les cantons soutiennent le paquet d’accords Suisse-UE. 24.10.2025

https://kdk.ch/fr/actualite/communiques-de-presse/details/les-cantons-soutiennent-le-paquet-daccords-suisse-ue

 

Stabilisation et développement des relations entre la Suisse et l’Union européenne : résultats des négociations et mise en œuvre nationale

Assemblée plénière extraordinaire du 24 octobre 2025

https://kdk.ch/fileadmin/redaktion/aktuell/stellungnahmen/2025/UE_Paket_Stellungnahme_2025_FR.pdf

Et vous, qu'en pensez vous ?

Poster un commentaire

Votre commentaire est susceptible d'être modéré, nous vous prions d'être patients.

* Ces champs sont obligatoires

Avertissement! Seuls les commentaires signés par leurs auteurs sont admis, sauf exceptions demandées auprès des Observateurs.ch pour des raisons personnelles ou professionnelles. Les commentaires sont en principe modérés. Toutefois, étant donné le nombre très considérable et en progression fulgurante des commentaires (259'163 commentaires retenus et 79'280 articles publiés, chiffres au 1 décembre 2020), un travail de modération complet et exhaustif est totalement impensable. Notre site invite, par conséquent, les commentateurs à ne pas transgresser les règles élémentaires en vigueur et à se conformer à la loi afin d’éviter tout recours en justice. Le site n’est pas responsable de propos condamnables par la loi et fournira, en cas de demande et dans la mesure du possible, les éléments nécessaires à l’identification des auteurs faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Les commentaires n’engagent que leurs auteurs. Le site se réserve, par ailleurs, le droit de supprimer tout commentaire qu’il repérerait comme anonyme et invite plus généralement les commentateurs à s’en tenir à des propos acceptables et non condamnables.

Entrez les deux mots ci-dessous (séparés par un espace). Si vous n'arrivez pas à lire les mots vous pouvez afficher une nouvelle image.