Les enfants cobayes de la révolution trans

 

Texte de Mathieu Bock-côté par ce samedi dans le Figaro.

Ils sont nombreux à confesser leur surprise devant les révélations concernant le rapport ayant fuité dans Le Figaro sur la transition de genre de la Haute Autorité de santé (HAS). Car la HAS entend la rendre accessible à tous, même aux mineurs de 16 ans, sans exprimer la moindre prudence, alors qu’ailleurs en Occident, se dévoile une vive inquiétude à ce sujet. Rappelons l’esprit et les grandes lignes de ces révélations.

Mais faisons d’abord un détour. L’idéologie du genre s’est concentrée ces derniers temps sur la transition « sociale » en expliquant qu’il suffisait pour une femme de se dire homme pour que la société soit obligée de la considérer comme tel. C’est ce qui a poussé le planning familial à soutenir en 2022 qu’un homme pouvait être enceint. C’est aussi dans cet esprit qu’on a vu se multiplier les non-binaires, prétendant se dérober au féminin comme au masculin, ou alors les embrasser ensemble.

Mais nous venons de franchir une étape. C’est désormais la société dans son ensemble qui doit se reprogrammer pour faciliter non plus la transition « sociale », mais la reconstruction médicale des trans. Le personnel de santé est ainsi invité à accueillir le jeune trans en utilisant les pronoms qu’il exige - un homme biologique se prenant pour une femme devra ainsi se faire appeler «elle». L’inverse s’imposera aussi. D’aucune manière, on ne devra se demander si ce désir de changer de sexe n’est pas le signe d’un trouble psychiatrique ou psychique - la dissociation entre l’identité de genre et le corps sexué est ainsi légitimée par le corps médical.

Le système de santé est ensuite poussé à engager le plus rapidement possible la thérapie hormonale engageant le «changement de sexe», puis les opérations chirurgicales qui le rendront absolument définitif. Ces opérations devront être accessibles aux mineurs de 16 ans. Par ailleurs, les parents qui remettraient en question la transition de genre de leur enfant, et qui refuseraient de l’accompagner, pourraient être accusés de maltraitance parentale, et voir à terme leur autorité parentale remise en question, et même abolie. L’État, à terme, se donnera le droit d’arracher leurs enfants aux parents trop conservateurs, trop traditionnels. La déconstruction de la famille culmine ici.

La mouvance trans est parvenue à créer un dispositif technomédical autoréférentiel où ses militants se citent les uns les autres pour produire un « savoir » orientant ensuite le système de santé

La première chose qui frappe, ici, est la pénétration de la théorie du genre dans les instances censées produire l’expertise médicale. Le néolyssenkisme triomphe. La mouvance trans est parvenue à créer un dispositif techno-médical autoréférentiel où ses militants se citent les uns les autres pour produire un « savoir » orientant ensuite le système de santé. Cet entrisme s’accompagne souvent d’une stratégie de harcèlement des médecins pour voir lesquels se soumettent à cette idéologie et lesquelles s’y refusent, ce qui justifiera ensuite leur dénonciation pour transphobie.

La banalisation de la notion d’identité de genre a pour fonction d’empêcher de se demander pourquoi tant de jeunes, aujourd’hui, en viennent à se croire étrangers à leur corps. La vérité existentielle d’un être se trouverait dans son « ressenti de genre », et non pas dans son corps sexué, désormais traité comme une carcasse charnelle encombrante et le résidu réactionnaire d’une phase antérieure de l’humanité, avant la révélation constructiviste, expliquant que la biologie comme la nature sont désormais des catégories périmées. On parle ainsi non plus de chirurgies de changement de sexe mais de « réassignation sexuelle », pour modeler un corps jugé traître, ou du moins réfractaire, à l’esprit flottant qu’on croit porter en soi.

On touche ici les programmes d’éducation à la sexualité à l’école. Les enfants subissant la propagande du genre auront plus de chance de se retrouver un jour devant un médecin du genre ayant la mission de piloter leur transition. Si cet adolescent doute soudainement des bienfaits de la démarche dans laquelle il s’est engagé, une association de militants trans présentés comme des experts par l’état lui dira de ne pas avoir peur. La diffusion accélérée du fantasme voulant qu’on puisse naître dans le mauvais corps est le symptôme d’une perte du rapport au réel et d’un effondrement psychique à l’échelle d’une civilisation.

La modernité porte en elle une tentation démiurgique et rêve d’une humanité informe qu’elle pourra modeler selon son bon désir, dans une rationalité utopique, qui culmine toujours dans une logique totalitaire. La médecine doit fabriquer un homme nouveau, dénaturalisé, modifié aux hormones et au scalpel, persuadé désormais de s’autoengendrer. Nous sommes devant les enfants cobayes de la révolution trans.

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