Ventes d’armes à Riyad : Washington invoque «l’agression iranienne», le Congrès proteste

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L'administration américaine de Donald Trump a annoncé le 24 mai de nouvelles ventes d'armes à l'Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis, en invoquant «l'agression iranienne» pour contourner un Congrès de plus en plus hostile à l'attitude de Riyad. Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a confirmé le recours à une procédure d'«urgence» pour débloquer 22 contrats d'armement en souffrance, qui concernent également la Jordanie, pour un montant total d'environ 8,1 milliards de dollars. 

Cela va «soutenir nos alliés, renforcer la stabilité du Moyen-Orient et aider ces nations à faire de la dissuasion et à se défendre de la République islamique d'Iran», a affirmé Mike Pompeo, promettant de n'avoir recours qu'une seule fois à cette procédure contestée. Accusant les élus d'avoir bloqué la fourniture de munitions et d'assistance à l'entretien d'avions militaires ces derniers mois, il a estimé que le partenariat avec ces pays arabes était une «pierre angulaire» de la «stratégie de sécurité nationale des Etats-Unis».

Le Congrès américain avait approuvé début avril une résolution exhortant le président Trump à cesser toute assistance à la coalition menée par l'armée saoudienne, qui intervient depuis 2015 dans la guerre au Yémen contre les rebelles houthis soutenus par Téhéran, ennemi commun de Riyad et Washington. Le milliardaire républicain a mis son veto à ce texte, mais il est fort probable que les élus se seraient opposés à toute nouvelle vente d'armes à l'Arabie saoudite comme ils l'ont déjà fait récemment.

La procédure habituelle veut que les ventes d'armes ne se concrétisent que si le Congrès ne s'y oppose pas dans un délai de 90 jours après leur notification par le département d'Etat. Les parlementaires démocrates sont immédiatement montés au créneau pour dénoncer un tour de passe-passe «sans précédent» et «inacceptable». Le sénateur Bob Casey a évoqué un «mépris total pour le Congrès» et son collègue Chris Van Hollen un «abus de pouvoir».

Selon le numéro deux de la commission des Affaires étrangères du Sénat Bob Menendez, le gouvernement a «invoqué une obscure disposition» législative sur les exportations de munitions à guidage de précision pour passer outre l'avis du Congrès, évoquant «des années de comportement néfaste de la part de l'Iran mais sans expliquer clairement ce qui constitue aujourd'hui une urgence».

Consensus unanime contre la décision

La décision gouvernementale hérisse les démocrates pour plusieurs raisons. D'abord, le contexte d'escalade des tensions avec l'Iran en cours depuis début mai. Evoquant des menaces d'attaques «imminentes» de la part de Téhéran ou de ses alliés régionaux contre les intérêts américains, Washington a multiplié les déploiements militaires, dépêchant dans le Golfe un porte-avions, des bombardiers B-52, un navire de guerre et des missiles Patriot. Donald Trump a aussi annoncé le 24 mai l'envoi de 1 500 soldats supplémentaires au Moyen-Orient de manière «préventive».

Or, bon nombre d'observateurs et d'élus d'opposition soupçonnent les plus va-t-en-guerre dans l'entourage présidentiel d'exagérer les risques pour renforcer la pression sur la République islamique, voire pour provoquer une confrontation ou même un conflit. La situation au Yémen, où la coalition saoudienne est accusée de faire de nombreuses victimes civiles dans ses frappes, est également évoquée. «Les Saoudiens ont créé l'un des pires désastres humanitaires au monde au Yémen», a accusé la sénatrice démocrate Dianne Feinstein. «La guerre menée par l'Arabie au Yémen n'est pas une urgence, c'est un crime contre l'humanité», a-t-elle tonné.

Des parlementaires républicains ont également exprimé leur désaccord avec l'option du gouvernement. «La décision présidentielle d'utiliser une procédure d'urgence pour ces ventes est regrettable et nuira aux futurs échanges avec le Congrès», a indiqué l'élu texan Michael McCaul, président de la commission de la Sécurité intérieure à la Chambre des représentants.

Enfin, le Congrès, démocrates et républicains confondus, est plus généralement remonté contre Riyad depuis l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi en octobre dans le consulat de son pays à Istanbul, un meurtre dont le Sénat américain a unanimement attribué la responsabilité au prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane. «Au lieu de résister à ceux qui ont assassiné Jamal Khashoggi et travaillent contre les intérêts américains, l'administration Trump a décidé de contourner le Congrès et peut-être aussi la loi», a regretté Bob Menendez.

Le locataire de la Maison Blanche a fait clairement savoir qu'il ne remettrait pas en cause l'alliance avec l'Arabie saoudite, notamment pour ne pas perdre de juteux contrats d'armement. Le débat sur les ventes d'armes au royaume saoudien fait aussi rage en Europe, où la France a refusé de les suspendre contrairement à l'Allemagne qui les a officiellement gelées.

Lire aussi : Donald Trump menace Téhéran : «Si l'Iran veut se battre, ce sera la fin officielle de l'Iran»

 

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