C'est une question sensible. Un mot de travers peut provoquer l'ire d'une partie de la gauche. Jean-Luc Mélenchon le sait et il marche sur des œufs.
A quelques mois des élections européennes, le leader de La France insoumise (LFI) vient de refuser de signer «un manifeste pour l'accueil des migrants» lancé le 26 septembre et rédigé par les rédactions de Mediapart, Politis et Regards, porté par 150 personnalités du monde artistique, politique et militant, et rejoint par plus de 30 000 signataires. Ce texte est notamment signé par sa camarade, la députée insoumise Clémentine Autain.
Brillant par son absence, Jean-Luc Mélenchon a été interrogé le 30 septembre par France 3 sur cette décision. Pour lui, faire de l'immigration la question centrale des élections qui arrivent «c'est servir la soupe à Macron et à Le Pen». Sans négliger le sujet, il a expliqué ne pas souhaiter «faire comme si l'immigration était quelque chose de naturel, de désirable, de souhaitable». Le député des Bouches-du-Rhône a ainsi plaidé pour traiter les causes de l'immigration. «Le slogan "vivre et travailler au pays", c'est pas juste pour les bobos en France», a-t-il défendu.
D'autre part, Jean-Luc Mélenchon a évoqué les problèmes socio-économiques engendrés, selon lui, par la libre-circulation des travailleurs dans l'Union européenne : «Je ne suis pas d'accord pour le droit à la libre installation et quand je gouvernerai ce pays, il n'y aura plus de travailleurs détachés en France parce que c'est de la fraude sociale.»
Dans la même veine, fin août, lors de son discours à l’université d’été de son parti, Jean-Luc Mélenchon avait déclaré : «Honte à ceux qui organisent l’immigration par les traités de libre-échange et qui l’utilisent ensuite pour faire pression sur les salariés.»
Souffler le chaud et le froid
Le leader des Insoumis semble souffler le chaud et le froid sur le thème de l'immigration, au point de paraître, pour ses détracteurs, se contredire quelque peu. Récemment, il a pris ses distances avec l'orateur national de LFI, Djordje Kuzmanovic, qui avait pourtant fait une déclaration très similaire à celle de Jean-Luc Mélenchon citée plus haut. Dans L'Obs du 8 septembre, Djordje Kuzmanovic livrait cette analyse : «Sur la question migratoire, la bonne conscience de gauche empêche de réfléchir [...] Plutôt que de répéter, naïvement, qu’il faut "accueillir tout le monde", il s’agit d’aller à l’encontre des politiques ultralibérales [...] C’est une analyse purement marxiste : le capital se constitue une armée de réserve.»
«Le point de vue qu’il [Djordje Kuzmanovic] exprime sur l’immigration est strictement personnel. Il engage des polémiques qui ne sont pas les miennes», avait réagi Jean-Luc Mélenchon.
Le leader de La France insoumise n'adopte pas à ce jour, donc, la voie tranchée d'une Sahra Wagenknecht, la co-présidente du groupe parlementaire de la gauche radicale allemande qui vient de créer Aufstehen, un mouvement opposé à l'immigration tout en se revendiquant de gauche.
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