Le 5 juillet 2014 paraissait sur le « dark web », l’internet des profondeurs, un magazine intitulé Dabiq, du nom d’un village syrien aux mains de l’Etat islamique. Une maquette professionnelle au service d’une propagande sophistiquée, qui, à l’égal des productions vidéo de l’organisation terroriste, a largement fait ses preuves.
Break the Cross
Les titres de ce surprenant périodique sont sans ambiguïté : le premier numéro proclamait ainsi Le Retour du Califat, les suivants s’intitulaient La Loi d’Allah ou les lois des hommes, La Charia seule peut gouverner l’Afrique ou encore Brisez la Croix qui marqua le dernier numéro le 31 juillet 2016. L’iconographie soignée se mêlait, numéro après numéro, à la violence la plus crue : exécutions d’infidèles, victimes ensanglantées des derniers attentats, épaves carbonisées. Une mise en scène venant soutenir auprès du lecteur la conviction que l’Etat islamique vaincra indubitablement et qu’il suffit de se montrer patient. Aux apôtres de l’islam, religion de paix, Dabiq répond sans grands détours. Dans le numéro 14, qui s’attachait à traquer les faux musulmans, on pouvait ainsi voir une photo d’un jeune salafiste manifestant avec une pancarte : « Le terrorisme n’est pas l’islam », conclusion de Dabiq en légende : « Slogans d’apostasie ». C.Q.F.D.
« Tout infidèle sera tué »
Louant les « martyrs » des attentats de Paris ou de Bruxelles, les communicants de l’Etat islamique n’hésitaient pas à affirmer : « C’est une évidence. Tout infidèle qui se trouve sur le chemin de l’Etat islamique sera tué, sans pitié ni remords, jusqu’à ce que tous les musulmans vivent sous le joug d’Allah. » Voilà qui devrait être diffusé massivement aux populations européennes qui sont maintenues dans un aveuglement criminel par un intense matraquage étatique, depuis l’Education nationale jusqu’au rouleau-compresseur médiatique. Télescopage avec l’actualité la plus récente ? Dès avril 2016, Dabiq plaignait le sort des musulmans Rohingyas souffrant de « l’oppression bouddhiste » en Birmanie. Les soldats du Califat annonçaient alors être prêts à lancer des opérations dans de nombreuses régions d’Asie du Sud-Est.
Constantinople puis Rome
A l’été 2016, alors que Dabiq – le village – allait être repris aux mains des djihadistes, l’Etat islamique remplaça son principal magazine par un nouveau titre intitulé Rumiyah, « Rome » en arabe. En référence à un hadith annonçant la conquête par les musulmans de Constantinople puis de Rome. Voilà qui est on ne peut plus clair. Dès le deuxième numéro, les attaques au couteau étaient clairement recommandées pour frapper les infidèles. Les djihadistes étaient également missionnés pour foncer dans les foules au volant de voitures ou camions. Ce terrorisme à bas coût, ne nécessitant ni longue préparation ni chaîne logistique complexe, nous en avons rapidement subi les conséquences. Et les experts du terrorisme s’accordent à dire que cette forme d’attaques sera désormais le bruit de fond sur lequel surgiront des frappes de plus grande ampleur (explosifs, attaques chimiques…).
Et maintenant ?
La dernière livraison de Rumiyah est datée du 9 septembre 2017. Son titre ? Allah a glissé la terreur dans leurs cœurs. Les propagandistes de l’Etat islamique reconnaissent les lourds revers que subit l’organisation depuis plusieurs mois et invite ses soldats à « tenir bon à travers les tribulations ». L’habituelle rubrique consacrée aux « opérations » de l’EI n’en est pas moins tragiquement fournie : Russie, Somalie, Tunisie et bien sûr Espagne… Le récit des attaques de Barcelone est particulièrement mis en avant : « deux unités de l’Etat islamique ont attaqué des foules de Juifs et de Croisés » est-il écrit, une photo de la Sagrada Familia en fond. Des « Croisés » bien peu conscients du moment historique que nous traversons et qui sont touchés par un mal plus grand : la terreur, une léthargie suicidaire. « Vous n’aurez pas notre haine », rabâchent-ils en bêlant. Pauvres imbéciles…
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