Est-ce que ce sont les islamistes qui profitent de l’attaque chimique en Syrie ?

Michel Garroté
Politologue, blogueur
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Michel Garroté  --  Le projet de résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU sur l’attaque "chimique" contre la ville syrienne de Khan Cheikhoun, projet de résolution soumis par les Etats-Unis et d'autres pays, est basé sur de fausses informations. Et il y a huit bonnes raisons de penser cela. Ci-dessous, nos lectrices et lecteurs trouveront, d'un part, les huit bonnes raisons susmentionnées ; et d'autre part, une interview sur ce sujet avec le spécialiste en sécurité, et, ancien officier des services secrets britanniques, Charles Shoebridge.
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Huit bonnes raisons :
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1- L'aviation syrienne a porté des frappes près de la ville de Khan Cheikhoun contre un entrepôt de terroristes où étaient entreposées des armes chimiques.
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2- L'aviation syrienne, à moins d'être masochiste et d'aimer les ennuis et les problèmes inutiles, n'avait aucun intérêt, aucune raison, de frapper, avec des armes chimiques, les civils de Khan Cheikhoun.
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3- Des échantillons de sol ont été prélevés et transmis à l'Organisation pour l'Interdiction des Armes Chimiques. Rien dans la presse. Pas un mot. Rien.
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4- Or, sans rien entreprendre et uniquement guidés par des informations fallacieuses, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne ont de nouveau jeté -- on ne peut dire 'proposé' --  au Conseil de Sécurité de l'ONU un projet de résolution qui revêt un caractère anti-syrien et risque d’exacerber la situation politique déjà tendue qui règne en Syrie et dans la région dans son ensemble.
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5- En accusant Damas d’avoir commis une attaque au gaz dans la province d’Idlib, qui a coûté la vie à des dizaines de civils, la Maison-Blanche oublie le fait que les armes chimiques possédées par la Syrie ont été détruites en 2014 par des professionnels civils et militaires sous contrôle des États-Unis eux-mêmes.
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6- En revanche, les armes chimiques détenues par des islamistes de l'opposition syrienne et par l'EI n'ont toujours pas été confisquées.
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7- Concernant les frappes aériennes contre Khan Cheikhoun, rappelons que des laboratoires de production de gaz sarin, laboratoires détenus par l'opposition syrienne islamiste et par l'EI, ont été retrouvés à Alep. Des laboratoires similaires se trouvaient également à Hama. C'est probablement un laboratoire de ce type qui a été bombardé, ce qui explique un si grand nombre de victimes à Khan Cheikhoun.
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8- Le fait est que dès que les affaires de l'opposition islamiste syrienne vont mal, on commence à crier au crime de guerre. Dès que l'opposition islamiste syrienne subit une perte, un incident, "chimique" ou pas, survient.
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L'interview avec Charles Shoebridge :
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Dans le contexte actuel, il faut se poser la question de la motivation de Bachar el-Assad à mener une attaque pareille au moment où il obtient des victoires à travers le pays, juge le spécialiste en sécurité Charles Shoebridge (*) (lien vers source en bas de page).
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RT : Le gouvernement syrien est accusé d'avoir utilisé des gaz de combat contre des cibles de l'opposition en Syrie dans la matinée du 4 avril, causant des dizaines de morts. Damas a démenti et l'ONU a déclaré avoir ouvert une enquête à ce sujet. Qu'en pensez-vous ?
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Charles Shoebridge : Il y a deux questions majeures. D’abord, s’agit-il d’une attaque chimique ? Et bien que les informations divergent en ce moment, tout bien considéré, nous pouvons affirmer avec un certain degré de certitude que des agents chimiques ont été utilisés. Ensuite, si ces agents ont effectivement été utilisés, qui a été à l’origine de cette attaque ? C’est la question la plus pertinente. C’est la question à laquelle nous faisons face depuis cinq ou six ans, avec des allégations similaires. Rappelez-vous qu’en 2013, une grande attaque avec l’utilisation de sarin s’était produite – c’est d’ailleurs le gaz qui, d’après de nombreuses allégations, a été utilisé cette fois-ci également – où plus de cent personnes ont été tuées. Beaucoup de gens à l’Ouest, tout comme un certain nombre de gouvernements occidentaux, avaient accusé Bachar el-Assad d'en être responsable.
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Si on compare cela à la situation d’aujourd’hui, on peut constater qu’il existe un schéma, ces incidents ayant lieu dans des moments critiques pour la perspective géopolitique. Quand on prend en considération l’incident à la Ghouta, cela a eu lieu précisément au moment de l’arrivée des inspecteurs en armes à Damas.-L’année dernière, avant une grande conférence à Londres, où l’opposition syrienne rencontrait ses donateurs, tels que le Royaume-Uni, la France et d’autres, des allégations d'attaques chimiques avaient eu lieu. Aujourd’hui, il y a ce grand incident présumé, et une fois de plus – ce n’est probablement pas une coïncidence – demain commence une conférence très importante à Bruxelles entre l’ONU et l’UE. D’un point de vue militaire cette attaque ne donne que très peu de bénéfice.
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RT : Mais qui alors pourrait être derrière ces attaques ?
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C. S. : Dans le contexte actuel, en dépit de toute évidence qui puisse apparaître, parfois susceptible de faire l’objet de manipulations, il faut se poser la question de la motivation de Bachar el-Assad à faire une chose pareille, à ce moment particulier quand il obtient des victoires à travers le pays. Quelle serait alors sa motivation pour provoquer la condamnation de la communauté internationale à ce moment précis ?
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RT : Ce genre d’attaque peut-il être un avantage stratégique militaire pour son auteur ?
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C. S. : D’un point de vue militaire, cette attaque ne donne que très peu de bénéfice. Les gaz qui seraient utilisés en Syrie ont une toxicité basse et sont [peu efficaces] par rapports à d’autres armes telles que les explosifs conventionnels, les balles. Ceux qui ont vraiment profité de cette attaque ce sont les rebelles eux-mêmes, car ils ont obtenu un grand avantage géopolitique au moment où ils luttent de manière stratégique, comme de manière géopolitique. Néanmoins, seule une enquête indépendante établira les faits sur le terrain, qui permettrait de tirer une conclusion définitive (lien vers source en bas de page).
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(*) Charles Shoebridge est un spécialiste en sécurité et ancien officier des services secrets britanniques.
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Michel Garroté pour https://lesobservateurs.ch/
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http://www.libertepolitique.com/Actualite/Coup-de-projecteur/Ce-sont-les-rebelles-eux-memes-qui-ont-vraiment-profite-de-l-attaque-chimique-en-Syrie
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Et vous, qu'en pensez vous ?

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