Drôle de pensée où le fait de vouloir s'opposer - dans le cadre d'une loi, la plus libérale du monde, qui permet l'avortement jusqu'au 9e mois - au remboursement par l'assurance-maladie de l'interruption artificielle d'un phénomène qui est certainement tout sauf une maladie, fait systématiquement de vous un "intégriste".

Passe encore quand ladite pensée est le fait d'un anonyme, mais ce genre de trouvaille a le don d'allumer des réflexes de Pavlov jusqu'au sommet de l'élite socialiste. Dites "intégristes" et tous les voyants s'allument dans le pauvre horizon référentiel de Mathias Reynard, conseiller national socialiste valaisan, pour qui intégristes religieux chrétiens et islamistes se rejoignent forcément sur cette question contre la citadelle de liberté du socialisme suisse.

Ignorance

Outre que la présente réflexion s'avère infiniment ignorante des subtilités de la position musulmane en l'occurrence, ce recours intempestif au manichéisme caricatural tend à prouver une fois encore, si besoin était, la pauvre qualité de jugement de la pensée socialiste chez un homme dont l'élection, due aux hasards de la proportionnelle, prend chaque jour un peu plus des allures d'erreur de casting. M. Reynard n'a certainement pas tort quand il déclare:

"Comme élu, je me considère juste comme un représentant du peuple pour 4 ans, rien de plus !"

Rien de plus, c'est le mot.

Persuasion

Le jeune socialiste est encore persuadé que le peuple suisse a voté à 72%, en pleine connaissance de cause, pour le remboursement des avortements. Nous avons fait la preuve que cette question n'a pas même été évoquée dans l'information préalable.

Mathias Reynard étoffe toutefois son répertoire d'invectives pour qualifier de "réactionnaires" les abominables anti-démocrates qui osent remettre en question un sujet traité en votation populaire:

"Cette initiative est celle de réactionnaires n'ayant pas supporté la défaite!"

Faut-il compter le nombre exact de fois que le parti socialiste a réclamé la révision du vote du 6 décembre 1992 sur l'adhésion de la Suisse à l'Espace économique européen ? Résultat qu'il continue de "bafouer" par ses revendications discontinues. Faut-il parler de cette loi sur le partenariat enregistré, votée par le peuple sur la garantie qu'il n'y aurait ni adoption ni procréation assistée, et sur laquelle le PS a demandé, à l'unanimité, de pouvoir revenir ? Peut-on évoquer ces réactions lamentables des plus hauts responsables du parti socialiste à chaque fois qu'un homme de droite est élu ? A-t-on le droit de se souvenir des déclarations de la Conseillère fédérale Ruth Dreifuss comparant Christoph Blocher à Hitler parce que celui-ci aussi... avait été élu, et allant même jusqu'à ajouter, souvenez-vous:

"Il faut veiller à ne pas laisser utiliser la démocratie par ses adversaires."

Sic !

La belle vie

Réactionnaires ? Pensez donc, la vie à gauche est un paradis. Vous pouvez être une nullité sommitale dont tout le bilan se résume à avoir porté des croix suisses sur vos chaussures, vous serez toujours un être brillant et un rempart civilisationnel contre la barbarie. Vous pouvez avoir été le champion de la pédophilie pendant des décennies et ne pas devoir vous épargner la lourde charge de continuer à faire la morale au monde. Vous pouvez avoir fait l'objet d'une dénonciation en pleine page dans le rapport contre l'antisémitisme et vous offrir le luxe de distribuer bons et mauvais points, de qualifier ceux qui ont le malheur de ne pas recevoir le don précieux de vos avis genou en terre d'intégristes et de réactionnaires. A la défense de nos élus socialistes, dans un monde où l'insulte est le degré ultime de la réflexion politique, on se met à leur place, réfléchir c'est déjà désobéir.