A l'heure où beaucoup parlent des missiles russes livrés à l'Iran et à propos de l'Alliance entre la Russie, la Syrie et l'Iran, je publie ci-dessous deux analyses, celle (un peu longue...), de Paul Khalifeh sur le site de RFI ; et celle de Maxim Shevchenko reprise par la Novaya Gazeta (vous êtes naturellement libre d'aller directement sur l'analyse de Maxim Shevchenko, vu la longueur de l'analyse de Paul Khalifeh, n'est-ce pas...).
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Le point de vue de Paul Khalifeh :
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On peut lire sur le site de RFI, que Paul Khalifeh estime (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : L’intervention militaire russe en Syrie, où l’Iran est déjà impliqué depuis plus de trois ans aux côtés de l’armée du président Bachar al-Assad, a permis d’inverser les rapports de force et, par conséquent, de renforcer la position du régime dans le processus de négociations. Mais les trois alliés n’ont pas forcément des agendas identiques. Des divergences peuvent parfois apparaître aussi bien au niveau des méthodes que des objectifs.
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Paul Khalifeh : Avant l’intervention massive de l’aviation et des conseillers russes en Syrie, le 30 septembre 2015, l’armée syrienne était partout sur la défensive. Entre avril et août de l’année dernière, le régime a perdu toute la province septentrionale d’Idleb, le quart de celle de Lattaquié, la ville antique de Palmyre et une bonne partie de la province méridionale de Deraa. A Alep, son armée était bousculée et autour de Damas, elle avançait lentement.
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Paul Khalifeh : En l’espace de cinq mois, le paysage a changé drastiquement. Appuyée par une centaine de bombardiers et d’hélicoptères de combat déployés dans la base de Hmeimim (Lattaquié), conseillée par des centaines d’instructeurs russes, et équipée de matériel militaire dernier cri (chars T-90, lance-roquettes multitubes, missiles air-sol à guidage laser, systèmes de télécommunication sophistiqués etc…), l’armée syrienne est repassée à l’attaque sur tous les fronts.
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Paul Khalifeh : Elle s’est emparée de plus de 250 villes et villages, a reconquis 15 000 km2, repris la quasi-totalité de la province de Lattaquié, encerclé les rebelles dans la partie est d’Alep, et avancé à Deraa. Palmyre, au centre, Cheikh Meskin au sud, Salma et Rabia à l’ouest, l’aéroport de Kweires à l’est d’Alep, les troupes de Bachar al-Assad volaient de victoire en victoire.
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Paul Khalifeh : Ces succès militaires ont été rendus possibles par la grande puissance de feu déployée, la participation active des alliés, comme le Hezbollah libanais et les Gardiens de la révolution iranienne, les plans militaires préparés avec l’aide de conseillés russes intégrés à l’état-major syrien, et une bonne coordination. Cependant, si l’harmonie militaire semblait parfaite, on ne peut pas en dire autant de la coordination politique. Très tôt, des divergences sont apparues entre la Russie et la Syrie et entre Moscou et Téhéran autour des objectifs poursuivis par chacun des trois alliés.
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Paul Khalifeh : Alors que la Russie ne cessait d’affirmer qu’il ne saurait y avoir de solution militaire à la crise syrienne, et qu’en fin de compte les belligérants devront s’asseoir autour d’une même table pour trouver une issue politique, le président Assad livrait le fond de sa pensée : « L’objectif final est de libérer tout le territoire syrien et de vaincre les terroristes ». Cette déclaration a été interprétée par la Russie comme un acte de sabotage des efforts diplomatiques engagés avec les Etats-Unis pour une relance du processus politique. Moscou n’a pas caché son mécontentement, et son représentant à l’Onu, Vitaly Tchorkine, a riposté, le 18 février: « Nous avons investi très sérieusement dans cette crise, politiquement, diplomatiquement et aussi militairement. Nous voudrions donc que le président Assad prenne cela en compte ».
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Paul Khalifeh : Alors que la diplomatie russe s’activait dans tous les sens pour relancer les négociations inter-syriennes, le président Assad signait un décret convoquant des élections législatives pour le 13 avril prochain. Cette décision a surpris les alliés et les ennemis de Damas ainsi que les observateurs, d'autant que les pourparlers de Genève devaient porter, justement, sur une participation de l’opposition aux différents échelons du pouvoir.
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Paul Khalifeh : De crainte que les opposants les plus intransigeants ne trouvent dans cette démarche un prétexte pour boycotter les négociations de Genève, la Russie a réagi. La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Maria Zakharova, déclarait, le 24 février, que Moscou insistait pour qu’il y ait un processus politique débouchant sur une nouvelle Constitution et ensuite des élections.
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Paul Khalifeh : Les divergences les plus profondes sont celles qui ne sont pas apparues en public. Selon des personnalités proches du gouvernement syrien, rencontrées à Damas, le régime et son allié iranien étaient farouchement opposés à la trêve proposée par Moscou. « Lors des réunions, le ton est monté entre les officiers supérieurs des trois pays chargés d’examiner la question de la trêve, a rapporté un général de réserve syrien, qui a requis l’anonymat. Les Syriens et les Iraniens jugeaient cette trêve prématuré, a-t-il ajouté.
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Paul Khalifeh : Elle intervenait alors que l’armée syrienne était dans une dynamique de reconquête, surtout à Alep. Ils trouvaient insensée la proposition russe et ne comprenaient pas ses motivations ». Syriens et Iraniens ont tenté d’obtenir une rallonge de quelques jours, ne serait-ce que pour parachever l’encerclement des quartiers est d’Alep, tenus par les rebelles, et prendre les deux derniers bastions pro-turcs de Mareh et Aazaz, à la frontière. En vain. La Russie avait pris sa décision et l’a imposée à ses alliés. Le cessez-le-feu, parrainé par Moscou et Washington, entrera en vigueur le 27 février.
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Paul Khalifeh : La Russie a ensuite installé, dans la base de Hmeimim, un « centre pour la réconciliation des parties du conflit syrien », dirigé par le colonel Sergueï Kouralenko. Censé répertorier les violations de la trêve, ce centre a aussi établi des contacts avec des dizaines de groupes armés et des personnalités de l’opposition. Un membre de l’opposition tolérée par le régime, rencontré à Damas, affirme avoir été invité par un officier russe à se rendre à Hmeimim pour « discuter du processus politique ». « Un hélicoptère russe m’a transporté à Lattaquié, où j’ai rencontré des officiers russes, et m’a ramené à Damas. Les membres des services de renseignements syriens qui surveillent tous mes va-et-vient n’ont pas osé me poser la moindre question », dit-il.
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Paul Khalifeh : A la veille des négociations de Genève, le 14 mars, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Moallem, donnait une conférence de presse. Il affirme que le président Assad est « une ligne rouge » et assure que la délégation syrienne n’attendra pas plus de 24 heures l’arrivée des représentants de l’opposition. Le surlendemain, Vladimir Poutine créait la surprise en annonçant le retrait du gros de son contingent déployé en Syrie.
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Paul Khalifeh : Certains ont interprété cette décision comme un moyen de pression exercé sur le régime syrien pour le pousser à présenter des concessions. D’autres y ont vu une manœuvre pour permettre aux négociations de Genève de produire de vrais résultats. Quoi qu’il en soit, par cette annonce, qui a pris de court aussi bien ses alliés que ses détracteurs, Poutine a montré qu’il privilégiait le processus diplomatique, contrairement au président Assad, partisan de l’option militaire. La Russie et l’Iran non plus ne sont pas au même diapason. Lorsque le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Serguei Riabkov, a préconisé une solution fédérale en Syrie, les dirigeants iraniens n’ont pas hésité à exprimer publiquement leur désaccord. Hassan Rohani a même reçu, à Téhéran, son homologue turc et ennemi juré de la Russie, Recep Tayyeb Erdogan, malgré leurs profondes divergences sur la crise syrienne.
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Paul Khalifeh : Les deux dirigeants craignent la contagion fédéraliste dans leurs pays respectifs, qui abritent de fortes minorités kurdes. Ils ont donc exprimé leur attachement à l’unité territoriale de la Syrie, et ont décidé de renforcer leurs relations. De plus, alors que la Russie a allégé sa présence militaire en Syrie, le général Ali Arasteh, officier de liaison adjoint des forces terrestres iraniennes, a déclaré lundi 4 avril, que des commandos de l'armée régulière ont été envoyés en Syrie en tant que « conseillers ». Ils viennent s’ajouter aux unités des Gardiens de la révolution déjà sur place. La Russie, la Syrie et l’Iran sont certes des alliés, mais leurs agendas ne sont pas identiques.
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De même que des divergences existent au sein du camp adverse, notamment entre les Etats-Unis, les pays du Golfe et l’Europe. Dans un paysage d’une telle complexité, les négociations seront longues et difficiles et des développements spectaculaires peuvent se produire à tout moment, conclut Paul Khalifeh (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Le point de vue de Maxim Shevchenko :
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Dans une récente interview, le journaliste russe de renom Maxim Shevchenko, de son côté, a déclaré (extraits de la version écrite ; voir lien vers source vidéo en bas de page) : que la position russe sur la Syrie était « tout à fait claire. Nous soutenons une fédération ». « Cela a été discuté au plus haut niveau. La Syrie doit devenir une fédération », a-t-il déclaré dans cette interview, mise en ligne sur le site Internet de la Novaya Gazeta. Extraits :
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Maxim Shevchenko (extraits de la version écrite ; voir lien vers source vidéo en bas de page) : Manifestement, il n’y a pas eu de sanctions. Au contraire, l’opération syrienne a été une percée. Mais il y a eu des pressions politiques. Eh bien, nous avions un consensus et avons coopéré avec Washington. Avec la France, nous avions presque une alliance militaire. Les seules pressions provenaient de la Grande-Bretagne, car cela s’inscrivait en faux contre de nombreux projets britanniques. La Grande-Bretagne, en tant que patron traditionnel des pays du Golfe persique – notamment des Emirats arabes unis – voulait faire tomber le régime syrien, une partition de la Syrie et qu’une partie du territoire syrien soit dirigé de manière informelle par les « dominions » britanniques du Golfe persique.
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Novaya Gazeta (extraits de la version écrite ; voir lien vers source vidéo en bas de page) : Nous avons évoqué précédemment le déploiement de forces russes à l'époque soviétique en Afghanistan, qui s’est effectué sans véritables délibérations avec des experts. Aucun spécialiste du Moyen-Orient n’était impliqué. Sur la question du déploiement de forces en Syrie, vous avez mentionné le fait que le spécialiste russe Vitaly Naumkin et d’autres ont aidé le gouvernement russe. Mais qu’en est-il de nos forces ? Voyez-vous une quelconque influence de la communauté des experts ?
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Maxim Shevchenko : La position russe sur la Syrie est tout à fait claire. Nous soutenons une fédération. Cela a été discuté au plus haut niveau. La Syrie doit devenir une fédération (fin des extraits de la version écrite ; voir lien vers source vidéo en bas de page).
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Adaptation et mise en page de Michel Garroté pour Les Observateurs
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http://www.rfi.fr/moyen-orient/20160405-syrie-limites-alliance-russie-iran-bachar-assad
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http://www.memri.fr/2016/04/11/le-journaliste-russe-maxim-shevchenko-nous-soutenons-une-federation-en-syrie/
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Merci Michel
Je ne vois pas particulièrement trop longue l’analyse de Paul Khalifeh. Bien au contraire, elle permet de se faire une idée très précise des motivations des acteurs engagés en Syrie.
Je dois reconnaitre que je suis soulagée d’apprendre que la Russie ait des divergences très nettes et très fermes avec l’Iran et le Hezbollah.
Quant à Assad, il s’accroche comme il l’entend. Chez nous ce n’est guère mieux, n’est-ce pas ?
Reste que la population syrienne souffre de la guerre menée par la coalition US-EU-Terroristes contre Assad.
Et que, si chacun de ces “fouille-merde” qui se mêlent de tout chez les autres s’étaient abstenus d’armer les terroristes, comme ils le font de par le monde, la situation actuelle, tant en Europe qu’au Moyen-Orient aurait été différente et ce ne serait resté qu’une affaire interne syrienne.