Samedi, la Russie a organisé une grande cérémonie pour fêter le 70ème anniversaire de la rédition de l’Allemagne nazie sur le front est. Si les dirigeants de la Chine et de l’Inde sont venus à Moscou, cela n’a pas été le cas de la plupart des dirigeants européens. Une absence inexcusable.
Une insulte à l’histoire
La cérémonie de samedi était l’hommage à la contribution décisive de la Russie à la victoire contre Hitler. Comme le montre Olivier Berruyer sur son blog, chose oubliée aujourd’hui, la Russie est, de loin, le pays qui a le plus contribué à la défaite du nazisme. D’abord, c’est le premier pays par la contribution du sang, avec plus de 20 millions de victimes, 30% des morts de la Seconde Guerre Mondiale. Quand les Etats-Unis ont perdu 400 000 soldats, l’URSS en a perdu entre 8,7 et 13,9 millions ! En 1945, pour 57% des Français, l’URSS était le premier contributeur à la défaite de l’Allemagne, les Etats-Unis pour 20%. L’histoire a été réécrite avec le temps puisque 54% citent Washington et 23% Moscou.
Quelque soit ce que l’on pense du régime de Poutine, l’histoire imposait à la France et sans doute aussi aux autres dirigeants européens de se rassembler samedi, dans un message de rassemblement pour défendre la liberté contre l’oppression du totalitarisme le plus barbare. C’était le moins que l’on pouvait faire pour honorer la mémoire des 80 millions de morts provoqués par le conflit, mais aussi la liberté dont nous avons profité par la suite. Il est difficile de ne pas comprendre, en se rappelant ce qu’a été cette guerre, qu’il était indispensable pour les principaux dirigeants européens d’être présents à Moscou samedi pour honorer cette alliance qui a fait tomber Hitler, comme l’a noté Jacques Sapir.
Deux poids, deux mesures
Bien sûr, certains se boucheront le nez en évoquant la Russie de Poutine. Sa pratique de la démocratie n’est pas conforme à ce que nous pouvons attendre, mais après tout, nous raisonnons aussi avec notre histoire et nos valeurs. Ensuite, les évènements ukrainiens sont plus complexes que la façon dont ils sont trop souvent présentés. Et de toutes les façons, même si la Russie était une dictature, fallait-il ignorer cette cérémonie historique majeure, les 70 ans de la fin de la Seconde Guerre Mondiale ? Et cela est d’autant plus vrai que nos dirigeants ne sont aussi regardants avec des dirigeants au pédigré bien plus contestable que la Russie, que ce soit la Chine, l’Arabie-Saoudite ou le Qatar.
En effet, les dirigeants absents samedi reçoivent en grande pompe le premier ministre Chinois, alors que les Chinois n’ont pas leur mot à dire sur qui les dirige. La mort du roi d’Arabie Saoudite a vu déflier bien des dirigeants de la planète, dont Barack Obama et François Hollande. Il n’est quand même pas difficile de comprendre que la place des présidents des Etats-Unis et de la France était plus à Moscou samedi dernier pour honorer ce combat commun contre la barbarie plutôt qu’à Riyad pour honorer la mort de l’autocrate d’un pays qui ne partage pas beaucoup de valeurs avec nous… Et que dire du voyage de Hollande dans le Golfe, à des régimes largement aussi critiquable que la Russie.
L’effarante décision diplomatique de ne pas aller à la cérémonie des 70 ans de la rédition de l’Allemagne à Moscou révèle la russophobie sans nuance ni recul de nos dirigeants. Et mis en rapport avec les honneurs donnés à certains régimes, elle révèle une totale absence de valeurs.
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