Cuba: elle était si belle la révolution, vue de Saint-Germain-des-Prés

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Dans les années 60, les intellectuels et artistes français, de Jean-Paul Sartre à Gérard Philipe, se pressent à la Havane, fascinés par la révolution cubaine. Depuis, malgré le désenchantement, la culture continue de lier la France et Cuba où se rend lundi François Hollande.

En pleine guerre froide, Gérard Philipe est l'un des premiers à serrer la main de Fidel Castro en 1959, quelques mois après son installation à Cuba au terme de plus de deux ans de guérilla contre le régime de Fulgencio Batista.

L'acteur fut "le premier ami de la révolution à Paris", selon l'ancien directeur de l'institut cubain du cinéma, Alfredo Guevara, cité par le journaliste Michel Porcheron dans un article récent de l'association Cuba coopération France*.

Bien d'autres suivront, Bernard Kouchner, le journaliste Claude Julien, Michel Leiris, Marguerite Duras, Jorge Semprun ou l'éditeur François Maspero, récemment décédé. Régis Debray viendra en 1961.

La cinéaste Agnès Varda a réalisé en 1963 un petit bijou de film de propagande, musical et poétique, témoignant de l'engouement que provoquait alors à Saint-Germain-des-Prés la révolution de Castro et son "pittoresque tropicalo-socialiste".

Dans "Salut les Cubains", accessible sur internet**, dont le texte est lu par Michel Piccoli, Fidel Castro est comparé à Gary Cooper. Les barbes et les cigares des uns, les jupes serrées et les déhanchements des autres sont salués au même titre que les architectes et les volontaires de la canne à sucre qui contribuent à l'édification du nouveau pays. Au son de rythmes afro-cubains entraînants.

La visite de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir en 1960 finit de glorifier l'oeuvre castriste aux yeux de l'intelligentsia parisienne et de la gauche française anti-américaine.

De ce séjour d'un mois en février, Sartre tire une série de 16 articles réunis sous le titre "Ouragan sur le sucre", publiés entre le 28 juin et le 15 juillet 1960 dans France Soir, qui expliquent par le menu la révolution cubaine depuis 1956.

Au passage, il semble néanmoins pressentir les dangers à venir, parlant notamment de la "voix" de Fidel Castro "au milieu de cinq cent mille silences"***.

- 'Cuba si, Castro no' -

Aujourd'hui, l'exilé cubain Jacobo Machover, vivant en France, est très sévère sur l'aveuglement de l'intelligentsia française vis-à-vis des excès de la révolution castriste, les exécutions publiques notamment. L'engouement a duré au moins jusqu'en 1971 lorsque le poète Heberto Padilla fut contraint à une autocritique publique.

Dans son essai "Cuba l'accompagnement coupable, les compagnons de la barbarie" (Armand Colin, 2010), il tape sur ces intellectuels qui ont "refusé de critiquer l'horreur derrière les images des dirigeants révolutionnaires, métamorphosés en héros romantiques". "Fidel Castro a mystifié les intellectuels français", accuse-t-il alors.

L'intellectuel Régis Debray, qui fut proche de Che Guevara, conserve "une grande affection pour ce pays". "J'ai eu mes années cubaines, que je ne renie pas. Jusqu'en 1989, je recevais la traditionnelle boîte de (cigares) +Cohiba+ de la part de Fidel Castro. Ca s'est arrêté. Suite à des divergences politiques", dit-il en 2013 dans une rare interview sur le sujet au magazine "l'amateur de cigare".

En 2003, beaucoup d'artistes de gauche participeront à une soirée présidée par Jorge Semprun à Paris intitulée "Cuba si, Castro no", demandant la libération des dissidents emprisonnés pour avoir bravé Fidel Castro.

"Evidemment, le régime a commis beaucoup d'erreurs", dit à l'AFP Roger Grevel, président-fondateur de l'association Cuba coopération France. Entre autres, "l'internement forcé des homosexuels dans des camps". Jean Ristat, légataire universel du poète Louis Aragon, a refusé jusqu'à très récemment de se rendre à Cuba pour protester contre l'homophobie officielle qui y a longtemps prévalu, selon M. Grevel.

"Mais il y a aujourd'hui des intellectuels français qui continuent d'avoir des relations importantes avec Cuba", ajoute-t-il, soulignant "les évolutions positives".

Outre l'Alliance française, "la plus importante du monde en nombre d'apprenants", dont le nouveau siège à la Havane doit être inauguré par François Hollande, un des liens essentiels passe par le festival du film français de Cuba qui s'est achevé le 4 mai. Cette année les deux invités principaux étaient Costa Gavras et Laurent Cantet.

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** - "Salut les Cubains" d'Agnès Varda

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Extrait de: Source et auteur

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Un commentaire

  1. Posté par Vautrin le

    Je me demanderai toujours pourquoi on appelle “intellectuels” des personnages à cervelles de colibris, dont la caractéristique est de constamment penser faux. “Intellego” veut dire “je comprends”, et avec un bel ensemble les germanopratins ne comprennent rien, puisqu’ils ne sont pas capables d’analyser le réel bien pragmatique qui s’oppose à leurs théories dont Aristophane aurait pu faire une critique féroce dans une nouvelle version de ses “Nuées”. Lorsqu’ils avaient tort, c’est-à-dire toujours, ils préféraient se tromper avec Sartre qu’avoir raison avec Raymond Aron : voilà un bel exemple que suivent leurs enfants et petits-enfants, bobos-bébêtes et grands cuistres. Ergo : il est logique qu’ils révèrent les tyrans, pourvu que ceux-ci soient de gauche.

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