Le reportage était cruel mais tellement révélateur pour François Hollande et l'ensemble de la gauche. Les équipes du Supplément se sont rendues à Grenay, un bastion historique de la gauche dans le Nord-Pas-De Calais, qui a voté Hollande à 60% en 2012. Aux départementales, ils ont choisi de soutenir les candidats FN. Face aux questionnements de ces déçus de la gauche, François Hollande a montré, laborieusement en peine, que le chemin de la reconquête de cette France là serait long. S'il est seulement possible.
C’est un passage qui traduit parfaitement toute l’incompréhension de François Hollande face à la dynamique du Front national. Et plus largement, de l’ensemble de cette classe politique qui se revendique de la gauche et qui refuse de voir les dégâts de leur conversion aux préceptes du social-libéralisme.Une journaliste du Supplément s'est rendue dans un canton du Nord-Pas-de-Calais, dans une commune aux couleurs communistes, dont les électeurs en 2012 avaient voté à 60% pour Hollande et qui pourtant, lors des dernières départementales, ont choisi de soutenir des candidats FN. Une commune comme il en existe tant en France, ancienne terre minière dévastée par le chômage, pratiquement 20 %, et qui est bien décidée à faire payer à la gauche ses errements idéologiques. Car toutes les personnes interrogées expriment cette même défiance, ce même sentiment d’abandon, que ce soit cette jeune mère de quatre enfants, élevée dans une famille acquise aux idées de gauche et qui tractait pour le PS étant jeune, cet ancien élu sur des listes socialistes aussi ou encore ces chômeuses de longue durée, qui, il y a encore peu, votaient socialiste mais qui ont décidé de troquer la rose pour la flamme frontiste.
Et pas la peine de les asticoter très longtemps : chômage de masse, renoncement à lutter contre les dérives de la finance, sentiment d’abandon au profit des puissants, sont les causes de ce désamour. Ne reste alors que le choix du FN, soit pour montrer « sa colère » comme l’explique une retraitée ou par adhésion à un programme économique, dont les grands axes sont directement empruntés à la gauche anti-austérité, qui leur promet de renverser les rapports de domination. Pas d’attaques sur les immigrés, d’obsessions de la préservation d’une identité française figée ou de points de détails mais un même questionnement : « Quand vivrais-je mieux ? ».Une réalité que ne semble pas vouloir voir notre président de la République tant ses réponses tombent à côté. Face à Maïtena Biraben qui lui fait remarquer que ces français qui ont cru à son discours du Bourget ne lui « font plus confiance », lui balaye ça d’un « si ce n’était que ça ». Car pour Hollande les vraies raisons sont à chercher ailleurs. « Les Français ne croient plus au système ni à la démocratie » ou mieux de voir dans « la lenteur du Parlement. Six mois voire un an pour faire voter une loi, c'est trop long » l’une des causes de ce vote frontiste et de dénoncer une Marine Le Pen qui « parle comme un tract du PC des années 70 ». Et pourtant quand la gauche socialiste décide de parler avec les mots de la droite, accepte de se plier aux injonctions du marché et abandonne les doléances des classes populaires au profit des exigences du Medef, ouvriers, salariés et prolos en tout genre se raccrochent à ceux qu’ils pensent pouvoir les défendre le mieux. A un parti qui propose des solutions économiques dérobées « à un tract du PC des années 70 », époque à laquelle on pouvait entendre un François Mitterand clamer haut et fort, « celui qui n’accepte pas la rupture avec l’ordre établi, avec la société capitaliste, celui- là, il ne peut pas être adhèrent du Parti Socialiste ».
Paradoxe, plus le FN s’inspire des analyses de la gauche historique et plus il engrange l’adhésion des classes populaires. Une évidence que ne semble pas avoir vu ou vouloir voir notre président de la république, voguant d’émission télé en émission télé, tel un bateau ivre à la dérive. La gueule de bois n’en sera que plus dure.
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