« Je ne suis pas d’accord avec vous, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire »

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Dans le cadre des assassinats odieux perpétrés dans les locaux de Charlie Hebdo, on a beaucoup entendu ces jours-ci cette phrase de Voltaire :

« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous puissiez le dire ».

Phrase importante pour ce qu’elle représente sur le plan de la démocratie...

L’ennui c’est que Voltaire n’a jamais écrit ni prononcé cette phrase.

Celles et ceux qui ont décerné cette citation à Voltaire se basent sur une lettre datant du 6 février 1770. Voltaire se serait adressé à l’abbé Le Riche en ces termes : « Monsieur l’abbé, je déteste ce que vous écrivez, mais je donnerai ma vie pour que vous puissiez continuer à écrire. » Si l’existence de cette missive a été avérée, la phrase n’y figure pas, ni même l’idée ! C’est ce qu’on appelle une citation « apocryphe », non authentique.

La paternité de cette sentence revient à l’Anglaise Evelyn Beatrice Hall qui, dans un livre, The Friends of Voltaire, publié en 1906 sous le pseudonyme de S. G. Tallentyre, utilisa la célèbre formule pour résumer la pensée voltairienne. « “I disapprove of what you say, but I will defend to the death your right to say I”, was his attitude now », écrit-elle. Elle confirmera par la suite que c’était sa propre expression et qu’elle n’aurait pas dû être mise entre guillemets. Qu’elle soit due à la maladresse de l’auteur ou de l’éditeur, la citation a été rapidement traduite en français avant de connaître le succès que l’on sait.

Charlie Hebdo, partisan de la liberté d’expression ?

Laissons de côté la vulgarité répétitive de Charlie Hebdo, sa prédictibilité et sa perte de lectorat constante depuis quelques années à tel point que l’hebdomadaire « irresponsable » comme il titrait avait récemment fait appel à la générosité de ses lecteurs. Mais est-ce que Charlie Hebdo était vraiment un partisan de la liberté d’expression totale ou uniquement en faveur de pouvoir exprimer les opinions chères aux auteurs de Charlie Hebdo ?

Le 26 avril 1996, Cavanna, Val et Charb (trois piliers du journal Charlie Hebdo) débarquent en estafette dans une annexe du ministère de l’Intérieur. Dans leur coffre, des cartons remplis de signatures qu’ils apportent à un conseiller de Jean-Louis Debré. En huit mois, 173 704 personnes ont répondu à l’appel « pionnier » de l’hebdomadaire pour demander l’interdiction du Front national (FN). On peut mieux faire question défense de la liberté d’expression.

Il y a aussi l’affaire Siné en 2008 quand un des dessinateurs sera renvoyé pour « antisémitisme » (il y aurait donc bien des tabous modernes). Le vétéran de Charlie Hebdo avait écrit : « Jean Sarkozy, digne fils de son paternel et déjà conseiller général de l’UMP, est sorti presque sous les applaudissements de son procès en correctionnelle pour délit de fuite en scooter. Le Parquet a même demandé sa relaxe ! Il faut dire que le plaignant est arabe ! Ce n’est pas tout : il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! » Propos très proches de ceux du président de la LICRA.

Mais rien n’y fera. « [Le rédacteur en chef] Val [promu peu après directeur de France Inter] voulait des excuses auprès de Jean Sarkozy et de la famille Darty. Je lui ai demandé s’il ne se foutait pas de ma gueule. Je préfère me couper les roubignoles », a déclaré Siné, qui collabore à Charlie Hebdo depuis la relance du titre en 1992. Âgé de 79 ans, le dessinateur et chroniqueur avait également participé à l’ancienne formule.

« Je reproche à Jean Sarkozy de se convertir par opportunisme. S’il s’était converti à la religion musulmane pour épouser la fille d’un émir, c’était pareil. Et un catholique, pareil, j’ai jamais fait de cadeau aux catholiques », a expliqué Siné. Il ne s’agirait pas des seuls actes de censure de la part de Philippe Val.

En décembre 2012, la société éditrice de Charlie Hebdo est condamnée par la cour d’appel de Paris à verser 90 000 euros de dommages et intérêts à Siné pour licenciement abusif.

L’« humour » de Charlie Hebdo,
caricature reproduite dans le numéro commémoratif du 15 janvier 2015

Après l’attentat qui avait frappé la rédaction de Charlie Hebdo en 2012, de nombreuses figures de la gauche française avaient fait connaître leur désapprobation par rapport à ce journal satirique.

Vidéo d’Humour de gauche (Charb s’y plaint des procès des « intégristes catholiques » : c’est une manière civilisée de contester, non ?)

Qu’en est-il de Voltaire ?

Voltaire défendait-il la liberté d’expression, la démocratie ? Le mieux est de le citer.

Voltaire méprisait le peuple et n’était pas démocrate. Dans Questions sur l’Encyclopédie, Voltaire écrit : « La multitude des bêtes brutes appelées hommes, comparée avec le petit nombre de ceux qui pensent, est au moins dans la proportion de cent à un chez beaucoup de nations. »

Voltaire

Sur ses vieux jours, Voltaire sera encore plus sélectif : « le genre humain pensant, c’est-à-dire la cent-millième partie du genre humain tout au plus » (dans Aventure de la mémoire). Voltaire encouragera son correspondant d’Alembert : « Portez-vous bien, éclairez et méprisez le genre humain » (lettre du 19 février 1757).

Pour Voltaire, « Ce monde-ci (il faut que j’en convienne) est un composé de fripons, de fanatiques et d’imbéciles, parmi lesquels il y a un petit troupeau séparé qu’on appelle la bonne compagnie ; ce petit troupeau étant riche, bien élevé, instruit, poli, est comme la fleur du genre humain ; c’est pour lui que les plaisirs honnêtes sont faits ».

Dans un sens, Voltaire voyait le monde divisé en deux, comme Charlie Hebdo, les sots (les cons et les beaufs de Charlie Hebdo) et les personnes éclairées. À Mme du Deffand, il vantera « le plaisir noble de se sentir d’une autre nature que les sots ». Oui, d’une autre nature. Or les sots sont légion. Les non-pensants, il le répète, sont l’écrasante majorité.

Diderot, quant à lui, n’est pas en reste : « Malheur à celui qui oublie que tout ce qui ressemble à un être humain n’est pas obligatoirement un être humain ». Pour Voltaire encore, « Le peuple est entre l’homme et la bête ». Pour Voltaire, les choses sont nettes : « nous n’avons de compatriotes que les philosophes, le reste n’existe pas. » L’élitisme de Voltaire est clair.

Les Français, si souvent des sots cons

Voltaire partage aussi la pensée hédoniste des vieux soixante-huitards octogénaires qui avaient fondé Hara-kiri devenu Charlie Hebdo : « il faut jouir, et que tout le reste n’est que folie » (à Frédéric II). Au duc de Richelieu, il conseille « Jouissez de votre gloire, de votre considération, et des plaisirs présents et des plaisirs passés ».

Contrairement à Chateaubriand qui conseillait de ne dispenser le mépris qu’avec parcimonie, à cause du grand nombre de nécessiteux, Voltaire n’aura pas de ces petitesses mesquines. Il distribuera libéralement son mépris : « L’essentiel est d’être bien avec soi-même, et de regarder le public comme des chiens qui tantôt nous mordent, et tantôt nous lèchent. » Chien, le mot reviendra. À un enfant anglais passant à Ferney avec ses parents, Voltaire fera en anglais cet aveu peu avant sa mort : « Vous serez quelque jour un Malborough ; pour moi je ne suis qu’un chien de Français. »

Nous passerons ici sur les descriptions peu amènes que Voltaire fait des « minorités ethniques » comme on dit aujourd’hui : « La lèpre, ainsi que le fanatisme et l’usure, avait été le caractère distinctif des Juifs. » Les juifs forment « de tous les peuples, le plus grossier, le plus féroce, le plus fanatique, le plus absurde. »

Le « beauf » de Charlie Hebdo (Cabu). Le Français modeste, le peuple de Voltaire : vulgaire, misogyne, « con », alcoolique, raciste et en plus il peut voter !

« Se battre jusqu’à la mort » ?

Écrivant à Helvétius, Voltaire dira : « faire plus de cas du bonheur de la vie que de la vérité ». Michel Hennin, résident de France à Genève, et familier de Voltaire, le présentera à Bertin comme « tenant plus que personne à son repos et à ses richesses » (lettre du 27 octobre 1774). Pour Voltaire, « persécution [est] abominable ; martyr, fou ». Il se confie à Argental : « Il y aurait de la folie à être martyr de la vérité ».

En 1736, il n’hésite pas à écrire à Thiérot : « Il faut mentir comme un diable, non pas timidement, non pas pour un temps, mais hardiment et toujours. » Évidemment, ce mensonge doit être pour la bonne cause et ne pas causer de mal...

Les partisans du châtelain de Ferney disent qu’il ne faut pas prendre cette citation hors contexte. Ces contemporains lui rendaient cependant justice : il pratiquait ce qu’il conseillait dans sa correspondance. La Beaumelle, un de ses adversaires, en 1753 dira ainsi : « [M]onsieur de Voltaire n’a pas de longues habitudes avec le vrai ». Un de ses amis, Hennin écrivant à Choiseul, dira en 1770 : « M. de Voltaire que son imagination trompe quelques fois sur les faits ». Frédéric II écrira à Voltaire le 6 décembre 1772 : « Vous savez mieux que personne que les mensonges font plus de chemin que les vérités. »

Voltaire fait arrêter ses adversaires…

Il faut ici rappeler deux affaires peu honorables pour Voltaire : les affaires La Beaumelle et Clément.

L’auteur protestant La Beaumelle (1726-1773) avait eu l’indécence de critiquer sévèrement Voltaire. Ce dernier s’activa par trois fois pour l’embastiller par lettre de cachet. Quels étaient les torts de cet auteur qui faisait ombrage à Voltaire ? Voltaire ne lui pardonne pas l’audace d’avoir jugé obséquieux son Siècle de Louis XIV et, notamment, l’indulgence de Voltaire envers la Révocation de l’Édit de Nantes. Voltaire en veut également à La Beaumelle de souligner son statut d’homme de lettres grassement subventionné chez Frédéric II de Prusse. Il a notamment écrit dans un gros ouvrage deux lignes assassines : « Le roi de Prusse comble de bienfaits les hommes à talents, précisément par les mêmes raisons » qui poussent d’autres princes à « combler de bienfaits un bouffon ou un nain » ou encore « Qu’on parcoure l’histoire ancienne et moderne, on ne trouvera point d’exemple de prince qui ait donné sept mille écus de pension à un homme de lettres, à titre d’homme de lettres ». Le roi de Prusse n’avait pas dit autre chose quand, après le premier séjour de Voltaire à Berlin, il écrivit : « C’est bien payer un fou ; jamais bouffon de grand seigneur n’eut de pareils gages ».

Ces deux griefs contre l’auteur protestant sont peu avouables, Voltaire se doit donc d’en inventer d’autres. Il fait ainsi croire que l’« insolent », dans son ouvrage, accuse le Régent d’avoir empoisonné plusieurs membres de la famille royale alors que l’écrivain cévenol s’est borné à indiquer que la faiblesse des arguments de Voltaire qui prétendait en disculper ce prince de sang. (Voir La Beaumelle, Un Protestant cévenol entre Montesquieu et Voltaire, par Claude Lauriol, pp. 355, 356) Crimes de lèse-majesté, injures des plus graves, Voltaire nourrit ce mensonge en les ressassant inlassablement contre La Beaumelle. Voltaire cite de travers, isole quelques phrases dans tout un volume, dénature le sens, méconnaît l’ironie d’un propos qu’il répète à outrance (Cl. Lauriol, pp. 597 et 600). Mais, pour le seigneur de Ferney, le jeu en vaut la chandelle : il s’agit d’emprisonner un impertinent qui a critiqué son amateurisme historique.

Publiquement, Voltaire a écrit ostensiblement contre les lettres de cachet. L’historien Quétel dans son livre De par le Roy, essai sur les lettres de cachet, a révélé que le philosophe avait contribué avec insistance à faire enfermer par lettre de cachet une tripière vulgaire et bruyante qui « blasphémait le saint nom de Dieu à outrance ».

Mais ce n’est pas la seule fois que Voltaire a cherché à faire enfermer des écrivains dont l’industrie le contrariait. Trois tentatives sont recensées à l’encontre du seul La Beaumelle. Deux essais seulement ont été couronnés de succès. Dans ces deux cas, l’écrivain protestant a été envoyé à la Bastille. Six mois d’abord en 1753. Selon l’historien Lauriol, La Beaumelle, alors âgé de vingt-sept ans, « a beaucoup souffert de sa détention, physiquement et moralement ». À sa sortie de prison, en 1754, Malesherbes, directeur de la censure, lui refuse l’autorisation de créer un journal et lui interdit même de rien imprimer pour sa défense contre Voltaire. Résigné, l’écrivain protestant s’exclame : « Il me semble qu’on craint Voltaire encore plus qu’on ne le méprise ».

La Bastille, Voltaire parviendra à y faire emprisonner par deux fois l'écrivain La Beaumelle

La Beaumelle est enfermé une seconde fois de 1756 à 1757. Voltaire y contribue en le dénonçant auprès de Mme de Pompadour et du duc de Richelieu sous le prétexte que les Mémoires de La Beaumelle pour servir à l’Histoire de Mme de Maintenon n’aurait été que d’horribles calomnies sur toutes les familles royales d’Europe, en montant en épingle « une note rapide perdue au milieu de deux mille pages », selon R. Pomeau dans De la Cour au Jardin, Oxford, 1991.

Élargi, la vigilance de Voltaire s’ajouta à la vigilance du Ministère et fit peser d’inquiétantes menaces pour l’empêcher d’obtenir la révocation de sa lettre d’exil et le condamner ainsi au silence. Voltaire sembla déçu de l’élargissement de son contradicteur quand il s’enquit ainsi auprès d’Argental : « Dites-moi, je vous prie, à propos des arts que tant de coquins déshonorent, s’il est vrai que ce misérable La Beaumelle soit sorti de sa Bastille ».

La Beaumelle ne s’exprima plus, comme il l’écrivit à Maupertuis le 5 avril 1758, parce qu’« on craint une lettre de cachet, et avec quelque raison, quoiqu’on soit très sincèrement disposé à ne rien mettre dans ces notes qui blesse autre homme que lui [Voltaire] ».

Voltaire méprisant (bis)

Voltaire, quant à lui, avait décrété : « Les La beaumelle et les insectes de cette espèce pourraient nous faire prendre le genre humain en haine ».

Voltaire, il faut le rappeler (il l’a également dit dans l’affaire Calas) n’aime guère les protestants (sauf quand ils peuvent servir à abattre l’infâme). Dans le cas de La Beaumelle, il se confiera à ses correspondants : « Je n’aime point ces maudits huguenots ». « Nous ne valons pas grand-chose, mais les huguenots sont pires que nous ». Hargne constante et noire contre « ce petit huguenot qui a été apprenti prédicant à Genève ». Voltaire invente ce détail pour aggraver le cas de l’écrivain protestant, car Voltaire déteste « des prédicants la dure et morne espèce ». La Beaumelle, c’était pour le seigneur de Ferney, « un chien qu’on ne pouvait plus laisser dans les rues ». Le parangon de la tolérance était donc un persécuteur teigneux qui se réjouit des tourments qu’il fait infliger.

Voltaire, militant embastilleur récidiviste

La Beaumelle ne fut pas la seule victime de l’amour-propre de Voltaire. En effet, Jean-Marie-Bernard Clément (1742-1812) eut le front de publier des Observations critiques contre quelques poètes qui ont pignon sur rue, sans omettre Voltaire. Le héros moderne de la tolérance est exaspéré. Son courroux le domine. Clément n’est qu’« un gredin de la littérature », « un misérable », « un scorpion », « ce petit serpent de Dijon », « un maroufle », « cette petite canaille ». Il recommande à d’Alembert en 1771 : « [J]e crois qu’il ne serait pas mal qu’il fît deux ans de noviciat à Bicêtre ». Deux ans de prison dans un lieu particulièrement infamant, car l’endroit accueillait alors la lie de la société, mélangeant indifféremment les indigents, les malades et les criminels : aliénés, escrocs, syphilitiques, assassins, vagabonds et délinquants de toute sorte.

Voltaire s’en explique : « La critique est permise, sans doute, mais la critique injuste mérite un châtiment ». Voilà qui est intéressant. La liberté d’expression est permise pour autant que la critique ne s’attaque pas aux auteurs confirmés. Sinon, deux années d’emprisonnement sans jugement, car c’est cela la lettre de cachet !

Clément a l’outrecuidance de faire publier en 1773 des Lettres à M. de Voltaire. Pour ce dernier, cette parution est la preuve des failles de la censure : « S’il a fait imprimer un libelle, il faut que quelque petit censeur royal, quelque petit fripon de commis à la douane des pensées ait été de concert avec lui. Je tâcherai de découvrir cette manœuvre ».

Il suffit, Arouet de Voltaire, comte de Tournay, seigneur de Ferney, ne peut en souffrir mais. Outré, l’aristocrate, défenseur de la liberté d’expression, alerte le second personnage du royaume, à savoir le chancelier Maupeou en personne. Le tout pour se plaindre de ce que Clément se trompe dans sa généalogie et lui donne un oncle pâtissier... C’est selon Voltaire une petite calomnie qui jette sur lui un grand ridicule ! Il fait savoir ce qu’il pense de ce Clément : « chassé de Dijon et demeurant à Paris, a déjà été mis en prison par la police ». Précision sournoise glissée à toutes fins utiles. Dix-huit mois plus tard, l’empêchement infligé à Clément d’imprimer sera accueilli avec satisfaction : « un premier châtiment bien dû à ce misérable, en attendant que la police ses grossières insolences ». Il ne s’agit après tout que d’« écrase[r] un [jeune] scorpion », d’« assommer dans la boue un crapaud qui croasse ».

Qu’il s’agisse de La Beaumelle ou de Clément, ses jeunes confrères, le polémiste-philosophie ne plaisante point. Il les insulte copieusement et s’active pour les faire emprisonner et interdire de publication. Force est de constater que Voltaire ricanerait à voir aujourd’hui ceux qui aujourd’hui l’ont transformé en militant passionné de la liberté d’expression, quitte à se battre jusqu’à la mort ! À son habitude, il les mépriserait sans doute. Lui qui écrivait au duc de Richelieu : « Nous avions besoin autrefois qu’on encourageât la littérature et aujourd’hui il faut avouer que nous avons besoin qu’on la réprime. » Il faut réprimer la littérature, c’est signé Voltaire. Mais qui le cite ?

La France, patrie des droits de l’homme et de la liberté d’expression ?

On a beaucoup entendu dire que la France, digne héritière de Voltaire, est la patrie des droits de l’homme et de la liberté d’expression. Peut-être est-ce le cas, mais pas pour des raisons moins honorables que celles de la légende de France patrie de la liberté et de Voltaire défenseur jusqu’à la mort de la tolérance.

Pour l’avocat Emmanuel Pierrat, spécialiste du droit de la presse, interrogé par Le Point, la liberté d’expression est nettement plus encadrée en France qu’aux États-Unis.

En France, la liberté d’expression figure dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui a valeur constitutionnelle. L’article 11 dispose que « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement »... Mais une restriction est immédiatement apportée à ce principe, après une virgule : « Sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » Les États-Unis, eux, n’ont jamais ajouté de virgule à leur « freedom of speech » garanti par le premier amendement de la Constitution. La Convention européenne des droits de l’homme reprend la liberté d’expression, mais y met elle aussi des bémols. Dans la patrie de Voltaire, selon Emmanuel Pierrat, quelque 400 textes portent atteinte à la liberté d’expression...

Voir aussi

Voltaire, cet inconnu, ce mythe, ce sectaire

Le côté sombre des Lumières

Canada : Cour suprême — « toutes les déclarations véridiques » ne doivent pas « être à l’abri de toute restriction » quand elles peuvent heurter les sentiments de minorités protégées

La vision pessimiste de l’homme développée par les Lumières

Condorcet : L’éducation publique doit-elle se borner à l’instruction ?

« Le pacte de confiance entre l'État, la famille et l'école a été rompu »

Le cours ECR « pour former des citoyens complets » (leurs parents étant incomplets&nbs;?)

 

Extrait de: Source et auteur

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2 commentaires

  1. Posté par Annick M. le

    “Monsieur l’abbé, je désapprouve ce que vous écrivez, mais je donnerais ma vie pour que vous puissiez continuer à écrire”. Pour moi, “l’idée y est”, non ?

    Annick Montassier

  2. Posté par Sven Arte le

    Nous aurions tant voulu que cette phrase soit de Voltaire tant elle nous conforte dans le culte du symbole émancipateur qu’il représente, mais la vérité est par trop souvent décevante, admettonsque nous sommes par trop enclin à adorer des symboles

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