Farzana Parveen, une jeune Pakistanaise de 25 ans enceinte, a été battue à mort, mardi 27 mai, à coups de briques par une trentaine de membres de sa famille à l’entrée du tribunal de Lahore, mégalopole de plus de 10 millions d’habitants de l’est du pays. La jeune femme a été lapidée alors qu’elle se rendait au tribunal pour témoigner contre sa famille, qui avait accusé son mari de l’avoir « kidnappée ». En réalité Farzana Parveen avait choisi d’épouser Iqbal, un mariage célébré contre la volonté de sa famille.
Le Monde.fr avec AFP | 28.05.2014 à 17h42 • Mis à jour le 28.05.2014 à 18h17
« Nous sommes la cible de menaces depuis que nous sommes mariés », a déclaré mercredi à l'AFP Iqbal, joint par téléphone, depuis son village de Jaranwala où ont eu lieu les funérailles de la jeune femme. Lors d'une précédente audience dans cette affaire, le 12 mai dernier, le couple avait affirmé avoir réchappé à une première attaque, a-t-il précisé. « Mais mardi, alors que nous nous rendions au tribunal, une trentaine de personnes nous ont attaqués, dont le père de Farzana, ses frères et ses cousins », a déploré l'homme âgé de 45 ans.
« IMPUNITÉ »
La police de Lahore a indiqué avoir interpellé le père de la mariée, Muhammad Azeem, et être à la recherche de deux de ses frères et trois de ses cousins.« Toutes les personnes qui étaient présentes sont connues, elles ont été vues par tout le monde, il n'y a donc aucune raison que les agresseurs ne soient pas traduits en justice, a déclaré le mari éploré. Justice doit être faite ! »
Au Pakistan, près de 1 000 femmes ou adolescentes ont été tuées l'an dernier pour avoir « déshonoré » leur famille, selon la Commission nationale des droits de l'homme, qui dénonce « l'impunité » dont jouissent les auteurs de ces meurtres peu rapportés dans la presse locale. « Les gens ont peur de parler car ils ont peur d'être accusés de blasphème ou de propos contraires à l'islam », a constaté la militante féministe Samina Rehman. « Son seul crime a été de se marier par choix, un droit reconnu par la loi pour tous les citoyens adultes mais que l'Etat ne parvient pas à protéger des abus et des violences », a réagi mercredi la Commission des droits de l'homme du Pakistan.
LES MARIAGES FORCÉS INTERDITS DEPUIS QUINZE ANS
Des militants des droits de l'homme et féministes s'étaient réunis mercredi pour protester contre l'indifférence quasi généralisée que suscitait cette affaire dans un pays où la loi interdit pourtant la tradition coriace des mariages forcés et les« crimes d'honneur ». « La police régulière du tribunal était mystérieusement absente des lieux du crime, elle a été incapable de prendre des mesures préventives, de protéger [la victime] et ce malgré les précédents dans les cas de meurtres pour déshonneur, a estimé Tahira Abdullah, une militante des droits de la femme. Nous glissons irrémédiablement vers l'extrémisme et des interprétations non islamiques d'un islam “talibanisé” »
Au Pakistan, des lois entrées en vigueur au début des années 2000 interdisent les mariages forcés et pénalisent les crimes d'honneur, mais se heurtent à des coutumes ancestrales ou à une interprétation étriquée de l'islam. Plusieurs ignorent ainsi que dans la religion musulmane « une femme a le droit de choisirson mari », souligne sur son blog la militante féministe pakistanaise Bina Shah.
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Tous frères, tous égaux?