« Je suis une mère, je suis catholique, je suis italienne, et tout cela vous ne me l’enlèverez pas. » Ces mots que Giorgia Meloni prononce lors d’un discours, en 2019, au pied de la basilique Saint-Jean-de-Latran, révèlent littéralement la jeune dirigeante politique italienne sur la scène médiatique internationale. Les Italiens, eux, la connaissent depuis longtemps. À 42 ans, elle a déjà un long parcours politique. Depuis, le phénomène Meloni s’est emballé. Fin 2024, elle est sacrée troisième femme la plus influente au monde par le magazine américain Forbes, tandis que son alter ego à tendance démocrate, Politico, la couronne personnalité la plus puissante d’Europe. C’est la consécration pour ce petit bout de femme à la démarche aussi rapide et décidée que le débit de mitraillette de sa parole, s’exprimant avec l’accent inimitable des faubourgs du sud de Rome dont elle est originaire.
La bonne société italienne a moqué l’extraction populaire de Giorgia Meloni. La Stampa, quotidien historique de la bourgeoisie turinoise, la traitait encore récemment de « banlieusarde hyper-populiste ». Un mépris de classe montrant a posteriori que l’élite boboïsée des centres-villes hyperprotégés ne l’avait pas vue venir, elle qui portait aux nues le technocrate bon teint Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne. Lors de son discours de politique générale, en octobre 2022, Meloni explique venir « d’un environnement culturel qui a souvent été confiné aux marges de la République ». Tout en avertissant : « Je suis l’outsider qui pour s’affirmer doit déjouer tous les pronostics. […] Soyez assurés que nous n’abandonnerons pas, ne reculerons pas et ne trahirons pas. »
Un attachement viscéral à la cause de la vie et de la famille
Giorgia Meloni n’a pas eu une enfance toujours facile. Élevée par une mère qui fit mille métiers pour subvenir aux besoins de ses enfants, elle est très proche de sa sœur, Arianna, comme elle militante depuis toujours, aujourd’hui secrétaire politique du parti Fratelli d’Italia ; la chef de file de la droite assume de récompenser la fidélité avant le talent. Leur père, absent, les abandonne alors que Giorgia n’a qu’un an. Sa mère avait renoncé in extremis à l’avortement pour elle, ce qui explique en partie son attachement viscéral à la cause de la vie et de la famille – sa majorité a pénalisé les GPA faites à l’étranger. Dès l’âge de 15 ans, elle se met à militer. Le déclic s’est produit avec l’assassinat des juges antimafia Giovanni Falcone et Paolo Borsellino, qui la révolte.
Meloni gravit peu à peu les échelons du MSI, le parti post-fasciste italien, puis du mouvement qui en émane, l’Alliance nationale. Son parcours politique a tout de celui d’une météorite : élue députée à 29 ans, elle devient ensuite vice-présidente de la Chambre basse, puis, à 31 ans, plus jeune femme ministre, au sein du gouvernement Berlusconi. Avant de créer, en 2012, à la fin de l’ère Berlusconi, Fratelli d’Italia.
Le mérite vient avant tout
En dépit de son statut d’icône féminine, Meloni se moque des féministes post-soixante-huitardes. « La gauche n’a pas surmonté le choc de voir que c’est la droite qui a donné la première femme présidente du Conseil en Italie. Il y a une différence substantielle entre la pensée conservatrice et libérale et celle de gauche : nous, nous croyons que le mérite vient avant tout et eux, ils pensent que ce sont les étiquettes qui viennent avant tout. » Son objectif, dit-elle, est de « faire mon travail bien et mieux que mes prédécesseurs, pour montrer que, souvent, les femmes savent être plus concrètes, plus humaines, plus humbles, plus déterminées. Et qu’en les mettant dans des rôles de responsabilité, on peut en tirer un avantage pour tous ».
« La politique part de la réalité, pas de l’idée qu’on se fait d’elle. […] La réalité [qui] est la vie présente, mais aussi la vie passée, la tradition et la mémoire »
Autodidacte, Meloni connaît néanmoins sur le bout des doigts les ténors de la pensée conservatrice occidentale. La dirigeante, qui nourrit un véritable amour pour son pays, a développé un sens aigu de la communauté – la famille, la cité, les patries, unies dans un destin commun. Elle professe un conservatisme renouvelé dans tous les domaines, « sans renoncer à de nouvelles exigences et de nouvelles formes ». Tant elle croit que « la politique part de la réalité, pas de l’idée qu’on se fait d’elle. […] La réalité [qui] est la vie présente, mais aussi la vie passée, la tradition et la mémoire ». Son credo : « La fierté, c’est la principale révolution dont l’Italie a besoin. »
Mon itinéraire, de Giorgia Meloni, préface de Marie d’Armagnac, Chora, 408 pages, 19,90 €.
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