Mardi 22 juillet, les lourdes portes en bronze massif du Congrès des députés, à Madrid, se sont refermées. Le soleil s’est couché sur la capitale, après le dernier vote de l’année parlementaire. Et c’est une défaite pour le président du gouvernement socialiste, Pedro Sánchez. Six semaines après la révélation d’une lourde affaire de corruption au sein de son parti, une sorte de cordon sanitaire antigouvernemental s’est formé pour rejeter un décret-loi visant à éviter la répétition de la gigantesque panne électrique du 28 avril dernier. De la gauche la plus extrémiste, le parti Podemos, aux nationalistes de Vox en passant par la droite libérale et les indépendantistes catalans, tous les parlementaires non socialistes ont rejeté ce texte symbolique.
En plein scandale de corruption, le Parlement est devenu hostile à Sánchez. Car tous ses opposants avaient une bonne raison d’appuyer sur le bouton rouge.
Paraissant à moitié sonné, lors d’une comparution officielle peu après le scrutin, Pedro Sánchez a laissé éclater sa colère : « Ce qui vient de se passer au Parlement, c’est tout sauf de la politique. » Il n’a pas tout à fait tort. Le fond du sujet est largement passé au second plan. Tant pis pour les consommateurs. En plein scandale de corruption, le Parlement est devenu hostile à Sánchez. Car tous ses opposants avaient une bonne raison d’appuyer sur le bouton rouge. Ses alliés indépendantistes catalans, qui mettent la pression maximale sur Madrid pour tenter d’arracher de nouveaux privilèges. Podemos, le LFI espagnol, qui veut affaiblir le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) dont Sánchez est le secrétaire général, pour devenir la principale force à gauche. Le Parti populaire (PP), droite libérale, et Vox, qui rêvent de dégager le chef de l’exécutif pour faire la loi au palais de la monarchie parlementaire.
Retour six semaines plus tôt. Pedro Sánchez est encore l’homme invincible de la politique espagnole. Il dirige le pays avec sa coalition composée de ses camarades socialistes et des élus de Sumar, un parti de la gauche radicale, soutenue par les régionalistes basques et les indépendantistes catalans. Le Premier ministre prépare le budget 2026. Mais en cette fin de printemps, les cénacles madrilènes bruissent de rumeurs : une nouvelle affaire de corruption au sein du PSOE est sur le point d’éclore.
Le 12 juin dernier, les rumeurs deviennent officielles
Une nouvelle affaire, car en février 2024, José Luis Ábalos, le bras droit de Pedro Sánchez, ancien ministre des Transports et numéro 2 du PSOE, a été démis de ses fonctions, après que son nom est apparu dans des histoires de pots-de-vin. Sur le coup, Sánchez, que les médias progressistes appellent le “beau gosse” (« el guapo »), réussit à conserver l’estime du peuple de gauche. Il se présente comme victime de la trahison de son ami, comme cela arrive souvent dans la vie, et assure qu’il ne savait rien, et cela fonctionne.
Or, le 12 juin dernier, les rumeurs deviennent officielles. La Guardia civil, équivalent de la Gendarmerie nationale, publie un rapport impliquant Santos Cerdán dans une affaire de corruption. Cerdán était le successeur d’Ábalos comme secrétaire à l’organisation du PSOE et, lui aussi, un fidèle parmi les fidèles du président du gouvernement.
Dix ans auparavant, le candidat Sánchez avait embarqué, dans sa Peugeot personnelle, Ábalos, Cerdán et un garde du corps, Koldo García, pour faire le tour des fédérations socialistes et rencontrer les militants. L’objectif était de ravir le PSOE à la barbe des barons embourgeoisés lors d’une primaire pour désigner le secrétaire général du parti. Et leur succès était devenu un cas d’école. Mais aujourd’hui, trois des quatre passagers de cette voiture, dont le garde du corps, se retrouvent mis en examen pour corruption.
Pour réagir devant la presse à cette nouvelle histoire, le chef du gouvernement semble avoir ressorti les fiches de son discours de février 2024 : “Je suis trahi, je ne savais rien. ” Il demande pardon au peuple espagnol à huit reprises. Cette fois, le “beau gosse” se liquéfie, apparaissant devant les médias fardé de multiples couches de maquillage afin de masquer son teint livide.
Sánchez sent la terre se dérober sous ses pieds, avec la perspective d’une démission agitée par la droite. La tension devient maximale. Mais il reste une cartouche dans le fusil du leader socialiste : le coup du rempart contre l’extrême droite.
Pourtant, Sánchez n’est qu’au début de son chemin de croix. Sa vice-présidente, Yolanda Díaz, chef du parti allié Sumar, a refusé de se présenter lors des traditionnelles questions au gouvernement durant lesquelles l’opposition de droite a lapidé le Premier ministre. Dans les jours qui suivent, la presse conservatrice publie une fuite du dossier d’instruction : des enregistrements audio relatent des conversations entre Ábalos et Cerdán faisant mention de fonds publics détournés et d’emplettes particulières, comme la réservation et le choix de prostituées. « Ce soir, quatre putes au Wellington [une adresse huppée de la capitale, NDLR] », « Ariatna est parfaite, elle est nouvelle », « Et la Colombienne, Carlota, elle s’éclate à mort. »
Santos Cerdán incarcéré
Les socialistes, qui revendiquent être le parti féministe espagnol, sont horrifiés. « Comment aurais-je pu imaginer une telle chose de mes amis ? », insiste Pedro Sánchez, qui organise dans la foulée une réunion avec les principales femmes de son parti. Tandis que les médias s’attardent encore sur les enregistrements, un nouveau coup de théâtre éclate : Santos Cerdán est incarcéré. Et Sánchez sent la terre se dérober sous ses pieds, avec la perspective d’une démission agitée par la droite. La tension devient maximale. Mais il reste une cartouche dans le fusil du leader socialiste : le coup du rempart contre l’extrême droite.
Sánchez explique doctement qu’il ne partira pas et que la droite est libre de proposer une motion de censure pour le déloger. Il ne prend aucun risque. Contrairement à la France, la Constitution espagnole exige que la motion de censure soit “constructive”. Autrement dit, l’auteur de la censure doit être aussi le chef du gouvernement suivant. Or, le leader de l’opposition de droite, Alberto Feijóo, président du Parti populaire, ne dispose pas, même avec le renfort de son cousin plus radical, Vox, de la majorité absolue au Congrès des députés. Il a besoin du renfort des voix de la gauche pour qui cet attelage est un repoussoir absolu. Le piège tendu par Sánchez a fonctionné. Les porte-parole de toutes les mouvances périphériques au socialisme ont dû lui renouveler leur soutien en se pinçant le nez. Tout en y mettant quand même une ligne rouge : si les affaires de corruption s’emballent et qu’un financement occulte du PSOE était mis à jour par la justice, il leur deviendrait impossible de rester dans le même bateau que Sánchez.
Le PP l’a bien compris aussi. L’ancien président du gouvernement conservateur José María Aznar, lors de l’assemblée générale de son mouvement, a exigé, sur un ton de procureur, l’incarcération de Pedro Sánchez, au motif qu’il est entouré de délinquants et a livré le pays aux indépendantistes. De fait, sans le soutien de Carles Puigdemont, le leader catalan en fuite en Belgique après la tentative de sécession de 2017, le leader socialiste aurait été dans l’incapacité de continuer à gouverner depuis 2018 : les législatives qui se sont succédé en avril puis novembre 2019 et en 2023 témoignent de l’impossibilité de dégager des majorités claires avec le scrutin législatif à la proportionnelle.
Arracher des compétences en matière d’immigration pour la Catalogne
La politique connaissant rarement les bons sentiments, Puigdemont a réclamé son dû en bonne et due forme : une loi d’amnistie taillée pour effacer les poursuites judiciaires contre des centaines d’indépendantistes catalans. Un franchissement du Rubicon pour Sánchez, qui est accusé par ses détracteurs de menacer l’unité de l’Espagne. L’affaire est tellement sensible qu’elle a été soumise aux principaux tribunaux espagnols, et notamment au Tribunaux suprême et constitutionnel : Puigdemont ayant fui la justice, peut-il ou non bénéficier de la loi d’amnistie ? Le dossier est en souffrance depuis un an et l’ancien président catalan n’en peut plus d’attendre. Il retient le couperet de la censure pour trancher le cou politique de Sánchez, tout en ayant l’impression que ce dernier le fait tourner en bourrique. Gourmand, le leader catalan tente au passage d’arracher au gouvernement espagnol des compétences en matière d’immigration pour la Catalogne, afin de les exercer depuis Barcelone et de durcir les conditions d’accueil des nouveaux venus sur le territoire de la Généralité.
À droite, on se dit que Puigdemont soutient Sánchez comme la corde soutient le pendu. Très optimiste depuis l’éclatement du scandale Ábalos-Cerdán, Alberto Feijóo prépare déjà ses valises pour s’installer au palais de la Moncloa, le siège du gouvernement. Mais sur la route du déménagement, l’impétrant a été victime d’une crevaison. L’ancien ministre des Finances du dernier gouvernement conservateur, Cristóbal Montoro, vient d’être lui aussi mis en examen pour avoir mis en place, alors que l’Espagne connaissait une austérité très sévère à cause de la crise de la dette des années 2010, une réforme fiscale particulièrement favorable à certains industriels qui l’auraient rémunéré à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros à travers son ancien cabinet d’avocats.
De quoi permettre à Sánchez de sortir de son cercueil politique pour rappeler que le PP a été condamné, en 2018, pour association de malfaiteurs. Quitte à alimenter le slogan du “tous pourris” dans un pays où, de fait, droite et gauche ont franchi la ligne rouge et se sont brûlé les ailes avec l’argent de la construction et du tourisme.
Théoriquement, les prochaines élections législatives devraient avoir lieu en 2027, mais il apparaît extrêmement peu plausible que le gouvernement Sánchez survive jusqu’à cette date. Le scénario de législatives anticipées semble le plus probable. Reste à voir qui pourra se présenter avec le moins de casseroles. Pour le moment, aucun leader de Vox ou de la gauche radicale n’est inquiété par la justice.
Il faudra faire place nette !
Ils sont TOUS plus ou moins corrompus, pourris … à jeter à la poubelle.
Mais la Justice espagnole DOIT sévir et punir très sévèrement ces politicards vérolés !
A moins que la ”j”ustice espagnole soit aussi corrompue !!??
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Il faudra faire place nette !
Ils sont TOUS plus ou moins corrompus, pourris … à jeter à la poubelle.
Mais la Justice espagnole DOIT sévir et punir très sévèrement ces politicards vérolés !
A moins que la ”j”ustice espagnole soit aussi corrompue !!??